Quatrième dimanche
de l’Avent
Préparons notre
cœur à la venue du Messie. Que nos instants, que nos pensées, en ce Temps de l’Avent, se portent vers le Seigneur. Que nos cœurs se
préparent à accueillir Celui qui doit venir : le Messie. Celui que Dieu,
dans sa bonté, a préparé pour opérer notre salut, réparer le péché originel
d’Adam, « recueillir » comme un bon Pasteur, le genre humain, établir
la paix, rétablir la paix entre Dieu et les hommes.
Elevons nos
cœurs vers la sagesse de Dieu, et goûtons, en ce dernier dimanche du Temps de
l’Avent, les beaux textes liturgiques que l’Eglise nous fait entendre dans la messe du Samedi des
quatre temps. Ils nous serviront pour ce dimanche. Il serait malheureux que
cette messe du samedi des quatre temps de l’Avent passe
aux oubliettes.
Et tout d’abord,
écoutons l’Introït.
« Veni et ostende nobis faciem tuam ». « Viens
et montre nous ton visage ».
C’est une
supplique. C’est un cri. C’est un appel fervent qui sort de cœur du fidèle qui
sait sa misère et qui confesse les grandeurs de Celui qui, seul, peut nous
sauver en raison de sa misericorde mais, surtout ici,
en raison de sa puissance.
« Veni et ostende vobis faciem tuam ».
« Viens et montre nous ton visage ». Vous le voyez, l’appel du cœur
aimant est fort et impératif. Il s’appuie sur
sa propre misère pour supplier la venue du Sauveur. « Veni ». « Viens ». C’est impératif. Et
« ostende », « montre-nous ton visage »,
ta miséricorde. Sans toi, nous sommes à
jamais perdus, exilés du Ciel, du bonheur éternel. « Veni et ostende misericordiam tuam ».
L’âme est ardente dans son appel. Elle sait sa
misère. Toutefois elle n’oublie pas non plus, la nature de Celui qui doit
venir : sa puissance, sa transcendance, sa gloire. Il est Celui qui règne sur
les Chérubins. Il est le Seigneur, le Maître. Le « Dominus ».
En Lui notre espérance. En Lui, notre salut parce qu’il est Dieu. « Veni… Domine, qui sedes super Cherubim, et salvi erimus ». « Viens… Seigneur, toi qui trônes
sur les Chérubins et nous serons sauvés ».
Tel est l’appel
pressant de l’Eglise en ce temps de l’Avent. « Veni ! Ostende
faciem tuam et toi qui
commande aux Chérubins, viens, assure, opère notre salut.
Et le texte
d’Isaïe de la première lecture, explicite ce cri, cet appel, ce « veni ». « Ils crieront vers le Seigneur dans
leurs tribulations. En latin : « Clamabunt
ad Dominum. Ce n’est pas un simple appel quelconque.
. Le verbe latin « clamare » est bien
plus expressif que cela. C’est un cri. Il se traduit par « pousser une
cri ». C’est donc un appel vibrant. C’est appeler
en criant. Telle est la disposition de l’âme chrétienne.
« Ils
crieront vers le Seigneur dans leurs tribulations », « a facie tribulantis ».
« Tribulare », en latin, veut dire « tourmenter »,
« faire souffrir », « affliger », « persécuter ». Plus la misère est
grande, plus le cri est grand. Le cri est proportionné à la misère.
Et Dieu est
attentif à ce cri, à cette supplique : « Et Dieu leur enverra un
Sauveur « salvatorem ». Et le texte d’Isaïe
ajoute « un défenseur », en latin un « propugnatorem ».
C’est une précision très utile qui va décrire joliment ce sauveur et son
action. « Propugnator » veut dire
« celui qui défend une place assiégée. C’est le « défenseur »,
« le soldat », le « combattant ». Telle est la
description du Sauveur. Il nous era présenté, un peu
plus loin comme « le berger », ce qui connote la douceur. Mais, ici,
il est un combattant, un soldat. Il est celui qui délivre l’assiégé. « Propugnare », veut dire « se battre », « combattre
pour défendre » ,ou encore « être le champion
de… »
Ainsi Isaïe
entre dans le concret. Il nous fait connaître le Messie. Il sera un « battant »,
un « lutteur ».
Et il ajoute
dans son texte : « et cognocetur Dominus ab Aegypto ». « Il se fera connaître à l’Egypte et
l’Egypte connaîtra le Seigneur », « et cognoscent
Aegypti Dominum in die illa ».
A ces mots, mon
esprit se souvient de la libération d’Israel des
mains du Pharaon, en Egypte, par l’ange exterminateur, le serviteur de Yahweh. Souvenez-vous, vous aussi du récit de l’Exode, en son chapitre 12. Voila la description de « l’Agneau pascal ».Une autre description du Sauveur à
venir. Voilà son sang mit sur les linteaux de la porte des maisons d’Israël
captif, figure de notre captivité dans le péché. Voilà ce sang libérateur.
Voilà ce sang protecteur. « Et je passerai cette nuit là par le pays
d’Egypte et je frapperai de mort tous les premiers nés d’Egypte depuis les
hommes jusqu’aux animaux. .. Je suis Yahweh. Le sang sera un signe en votre faveur sur les
maisons où vous êtes : je verrai le sang et je passerai par-dessus vous,
il n’y aura point pour vous de plaie meurtrière quand je frapperai le pays
d’Egypte ».
Et cela me fait
penser aussi à la belle homélie pascal de Méliton de Sarde.
« Oh
Mystère étrange et inexplicable ! L’immolation de l’Agneau
se trouve être le salut d’Israël. La mort de l’agneau devint la vie du peuple.
Et la sang intimida l’Ange ».
Voilà comment
Dieu s’est révélé, s’est fait connaître à l’Egypte. Et par le sang de l’Agneau, son holocauste, sa miséricorde, sa bonté allant
jusqu’au sacrifice. Et par le bras vengeur. L’ange combat au bénéfice
d’Israël : « à la vue du Sang de l’Agneau
il passe… » L’Agneau ! Mais c’est une
figure très précise du Messie. « Ecce Agnus Dei » dira Saint Jean, le
baptiste.
Dès lors, bien
chers lecteurs, notre appel, notre cri doit se changer en action de grâce, tout
à l’honneur de l’Agneau de Dieu, du Messie ? Nos
acclamations sont dues à l’Agneau de Dieu, comme
elles le sont au « combattant » qu’il sera, « au
battant » annoncé, plus tard, « au berger »
C’est ce
qu’exprime très joliment, notre évêque de Sarde, Meliton : « Dis-moi,
o Ange ce qui t’a intimidé, l’immolation de l’Agneau
ou la vie du Sauveur, la mort de l’Agneau ou la
préfiguration du Seigneur. Il est clair que tu as été intimidé parce que tu as
vu le mystère du Seigneur, s’accomplissant dans l’Agneau
pascal… C’est pourquoi tu ne frappas pas Israël mais tu privas l’Egypte seule
de ses enfants. Quel est ce mystère inattendu : l’Egypte frappé pour sa
perte. Israël protégé pour son salut ».
Alors sachons
regarder vers l’Agneau qui fut immolé en Egypte,
regarder vers Celui qui frappa l’Egypte et qui sauva Israël par son sang.
« Et le Seigneur se fera connaître à l’Egypte et l’Egypte connaîtra le Seigneur en ce jour-là » nous dit Isaïe.
« Et le Seigneur frappera l’Egypte… ». Il est aussi le
« combattant », le « battant ».,
contre le « Fort », Satan.
A ce mystère de
salut, révélé, annoncé, prédit et surtout réalisé, convertissons-nous.
« Et le
Seigneur frappera l’Egypte et ils se convertiront au Seigneur et il se laissera
fléchir et les guérira ». Il le peut. Il est le tout puissant. Tel est
celui qui croit en ce Messie : il est le « guéris » du Seigneur.
Car il est le Dieu fort, le Dieu puissant. C’est l’enseignement du texte du
Graduel qui suit : « Il part d’une extrémité du Ciel et sa course le
conduit jusqu’à l’autre ». Il est le tout puissant. Tout est à lui. IL est
le Maître de toutes choses. « Les cieux proclament sa gloire », nous
dit encore le Graduel « et le firmament
publie l’œuvre de ses mains ».
Chers lecteurs,
n’oublions jamais que celui qui doit venir, que nous attendons, sera peut-être
mis dans la crèche, il sera peut-être « infans »
mais « Il est celui qui fit le ciel et la terre ». Voilà ce que le
graduel de cette messe nous rappelle du Messie.
Et l’Eglise, alors, précise la prière de ses enfants dans la
belle oraison : « Fais, nous t’en supplions, Dieu tout puissant que
nous qui sommes courbés sous le joug du péché par suite de notre vieille
esclavage, nous soyons délivrés par la nouvelle naissance de ton Fils unique si
longtemps attendu… »
Et voilà enfin
la deuxième très belle lecture, tirée toujours d’Isaïe ,
le prophète. Une lecture de joie et de bonheur
car, avec la venue du Messie, le salut nous est donné. Tout refleurit,
tout renaît comme en un printemps nouveau. « Alors le désert et la terre
aride ( i.e. « nous » en raison de nos
péchés) se rejouiront ». « Laetabitur » : c’est un futur. Ce verbe veut
dire : se réjouir. Mieux encore : « se livrer à la
joie ». Le mot « laetitia » exprime
une « joie vive », « une allégresse », « le comble de
la joie ». Il veut même dire « beauté ». Comme si la terre de
stérile, d’aride qu’elle était, laide donc, devenait belle,
« joyeuse » en se parant de ses nouvelles végétations. Et de faite,
« laetitia » veut aussi dire
« végétation vigoureuse ». Telle sera la terre fécondée par le sang
de l’Agneau., la grâce divine..
« Que la terre aride donne sa parure, une végétation luxuriante ».
« Alors la
lande exultera ». « En latin, le verbe utilisé est « exultare ». Il veut dire « bondir »,
« sauter », « se réjouir vivement ».
« Germinans germinabit »,
« la terre se couvrira de fleurs ». Elle fleurira. Cela me fait
penser à la Genése,
au récit de la création : « la semence donnera sa semence », « tout
arbre donnera son fruit ». Et de fait, la venue du Messie est une deuxième
naissance, une deuxième création.Il créra toutes
choses nouvelles. C’est le « mirabilia reformasti », la prière de notre belle offertoire.
« La lande,
la terre fleurira, elle exultera dans la jubilation et les chants de triomphe
et de louanges ». « Exultabit laetabunda et laudans ».
Vous noterez la redondance. La multiplication des mots de joie et de
jubilation. « Ils verront la gloire du Seigneur, la magnificence de
notre Dieu ».
Nul doute que ce texte d’Isaïe encourage le cœur à se réjouir fortement à
l’annonce de la venue du Seigneur.
On retrouve ces
sentiments de grande jubilation dans les chants de Zacharie, d’Elizabeth
et de Notre Dame. C’est la même joie qu’ils font tous entendre lorsqu’ils
parlent dans leur s prières du Seigneur et de sa venue.
Voyez la prière
de Sainte Elisabeth accueillant Notre Dame : « D’où m’est-il
donné que la mère de Mon Seigneur vienne à moi. Car votre voix, lorsque vous
m’avez saluée, n’a pas plutôt frappé mes oreilles que mon enfant a trésaillé de
joie dans mon sein ».
Voyez la prière
de Notre Dame dans son Magnificat : « Mon âme glorifie le
Seigneur et mon esprit trésaille de joie en Dieu, mon Sauveur ».
Il y a une
parfaite harmonie entre l’Ancien et le Nouveau
Testament.
« Dites à
ceux qui ont le cœur troublé : courage. Point de peur. Voici votre Dieu.
Il vient lui-même. Il vous sauvera ». « Deus ipse
veniet et salvabit
vos ».
Alors Zacharie
pourra chanter, comme Isaïe le chanta déjà dans son style fleuri et
bucolique : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël. Parce qu’il a
visité et racheté son peuple Et qu’il a
suscité une force pour nous sauver…pour nous sauver de nos ennemis et du
pouvoir de tous ceux qui nous haïssent afin d’exercer sa miséricorde envers nos
pères »
Et encore cette
prière de Siméon, le prophète : « Maintenant, O Maître vous laissez
partir votre serviteur en paix selon votre promesse. Puisque mes yeux ont vu
votre salut. Que vous avez préparé à la face de tous les peuples. Lumière qui
doit dissiper les ténèbres des Nations et gloire d’Israël, votre peuple ».
Ainsi la
tristesse en ces jours qui viennent n’est pas de mise. L’Eglise
veut, oui elle veut que notre cœur soit dans l’allégresse à la venue du Messie.
Et l’Eglise, de fait, fait monter vers Dieu cette
prière : « Seigneur réjouis-nous par l’avènement de Ton Fils
unique »
Enfin arrive la
troisième lecture qui va insister sur la bonne nouvelle de la nuit de Noël.
Elle va utiliser le texte d’Isaïe au chapitre 40 des versets 9 à 11. Lisez le dans votre
missel. Goûtez-le. Goûtez sa poésie, sa
joie exubérante. La liturgie de l’Eglise lorsqu’elle s’exprime sur ses plus beaux Mystères, atteint
le sublime. Et c’est cette bonne nouvelle qui sera proclamée par les Anges, la
Nuit de Noël. Mais Isaïe l’avait déjà annoncée, dans ce passage qui fait l’objet
de ce troisième texte : « Montez sur une haute montagne vous
qui portez à Sion la bonne nouvelle. Elevez la voix avec force ».
« Exalta in fortitudine vocem
tuam ». Vous remarquerez encore l’usage des
mots, leur répétition. Oui, le Messie est annoncé avec force et puissance. Les
Anges du Ciel seront tels la nuit de
Noël.. « Ne craignez point. Car je vous annonce
une nouvelle qui sera pour tout le peuple une grande joie. Il vous est né
aujourd’hui dans la ville de David un Sauveur qui est le Christ
Seigneur ». Et c’est alors la venue de la milice céleste louant Dieu avec
fortes acclamations : « Gloria in Excelsis
Deo ».
Le prophète
Isaïe l’avait déjà annoncé : « Elevez la voix avec force, vous qui
portez à Jérusalem la bonne nouvelle. Elevez la voix. Ne craignez rien. Dites
aux villes de Juda : Voici votre Dieu. Voici que le Seigneur vient avec
puissance, son bras lui soumet tout. Voici avec lui, le prix de sa victoire. Le
fruit de sa conquête marche devant lui. Comme un berger, il fera paître son troupeau. De son bras il le rassemblera.
Il portera les agneaux sur son sein, Lui le Seigneur notre Dieu ».
Voici la Bonne
nouvelle. Ne pourrait-on pas la décrire comme étant « la tendresse du
berger » ? « Les agneaux sur son sein ». Le prix de sa
victoire : son sang. Sa conquête : nos âmes. Quelle richesse dans les
évocations de ce Messie !
C’est enfin le
très beau texte de la quatrième lecture. Lisez-le en ces temps de l’Avent pour prépare, dans votre intime, la venue du Messie.
Ne soyez pas comme ces athées qui vivent comme si Dieu n’existait pas, dans un matérialisme fou
et terriblement appauvrissant.
Et concluez avec
moi que tout cela est tout simplement extraordinaire. Wonderful,
diraient les anglais. Et ne peut pas ne pas faire jaillir de notre cœur le même
chant que celui des enfants au milieu de la fournaise :
« Tu es
béni, toi qui t’avances sur les ailes des vents et sur les flots de la mer,
digne de louange et de gloire à jamais.
« Anges et
saints, bénissez tous le Seigneur ; louez-le et glorifiez-le à jamais.
« Cieux,
terre, mer et tout ce que vous renfermez, louez-le et glorifiez-le à jamais.
«
Benedictus es, Domine Deus patrum nostrorum.
Et laudabilis et gloriosus
in saecula ». Amen.