Condamnation
des erreurs modernes
et de
la secte de la Franc-maçonnerie
L'ENCYCLIQUE
E SUPREMI APOSTOLATUS
de Saint
Pie X
(4 octobre
1903)
La première encyclique de saint Pie X s'intitule
E supremi apostolatus. Elle est datée du 4 octobre 1903. Le pape avait été
couronné le 4 août ; c'est donc juste deux mois après son avènement qu'il
publia cette encyclique relativement courte et simple dans son développement.
Juste après le prologue, il expose le programme qu'il entend réaliser au cours
de son pontificat, non sans donner une vision du monde actuel. Puis il encourage
les évêques à l'aider, insistant surtout sur la formation des séminaristes,
le soin du clergé, l'action catholique.
Donc le pape commence par des considérations sur sa nomination. En fait il
n'avait jamais pensé, ni même imaginé, qu'il serait élu par le conclave ;
il avait bel et bien promis à ses diocésains de Venise qu'il reviendrait.
Et il n'est pas revenu... Alors il dit:
"Au moment de vous adresser pour la première fois la parole du haut de
cette chaire apostolique où Nous avons été élevé par un impénétrable conseil
de Dieu, il est inutile de dire avec quelles larmes et quelles ardentes prières
Nous nous sommes efforcé d'éloigner de Nous la charge effroyable et les honneurs
du pontificat ".
Il emprunte les paroles de saint Anselme lors de son élévation à l'épiscopat.
"Les témoignages de tristesse qu'il (saint Anselme) donne alors, Nous
pouvons les produire à notre tour pour montrer dans quelles dispositions d'âme
et de volonté Nous avons accepté la mission si redoutable de pasteur du troupeau
de Jésus‑Christ". Les larmes de mes yeux en sont témoin, dit saint
Anselme, ainsi que les cris, pour ainsi dire les rugissements, que poussait
mon cœur dans une angoisse si profonde. Ils me furent tels que je ne me souviens
pas d'en avoir laissé échapper de semblables en aucune douleur avant le jour
où cette calamité de l'archevêché de Cantorbery vint fondre sur moi. Ils ne
purent l'ignorer, ceux qui ce jour‑là virent de près mon visage ".
"Certes, dit alors saint
Pie X, Nous ne manquions pas de nombreux
et sérieux motifs de Nous dérober au fardeau. En outre, et pour passer sous
silence bien d'autres raisons, Nous éprouvions une sorte de terreur à considérer
les conditions funestes de l'humanité à l'heure présente. Peut‑on ignorer
la maladie si profonde et si grave qui travaille en ce moment, bien plus que
par le passé, la société humaine et qui s'aggrave de jour en jour et, la rongeant
jusqu'aux moëlles, l'entraîne à sa ruine. Cette maladie, Vénérables Frères,
vous la connaissez. C'est à l'égard de Dieu l'abandon et l'apostasie".
L'abandon
de Dieu
Donc, pour saint Pie X, la grande maladie de son époque, la grande maladie
de la société, c'est l'abandon de Dieu et l'apostasie. Abandonner Dieu : nous
pouvons encore bien le dire aujourd'hui plus que jamais ! Si saint Pie X vivait
aujourd'hui, je crois qu'il serait beaucoup plus effrayé qu'il ne l'était
de son temps. Parce qu'alors, il y avait encore des séminaires, il y avait
beaucoup de prêtres, il y avait beaucoup de religieux et de religieuses animés
d'une foi vivante. Les églises étaient encore remplies.
Poursuivons la lecture:
"A un si grand mal, Nous comprenions qu'il Nous appartenait, en vertu
de la charge pontificale à Nous confiée, de porter remède ".
"Tout
instaurer dans le Christ"
Quel
remède va‑t‑il proposer ?
"Nous estimions qu'à Nous s'adressait cet ordre de Dieu
"Voici qu'aujourd'hui je t'établis sur les nations et les royaumes, pour
arracher, détruire, pour édifier et pour planter ". Mais pleinement conscient
de notre faiblesse, Nous redoutions d'assumer une œuvre hérissée de tant de
difficultés. Cependant puisqu'il a plu à Dieu d'élever Notre bassesse jusqu'à
cette plénitude de puissance, Nous puisons courage en Celui qui Nous conforte
et, mettant la main à l'œuvre soutenu par la force divine, Nous déclarons...
".
Voici
alors une déclaration officielle courte et forte
"Nous déclarons que Notre but unique, dans l'exercice suprême du Pontifcat,
est de tout instaurer dans le Christ (Declaramus propositum esse Nobis : instaurare omnia
in Christo (Eph 1,10)
ut... sit omnia et in omnibus
Christus (Col 3,11), afin que
le Christ soit tout et en tout".
Tel est le programme de saint Pie X.
Et c'est une chose admirable que cette devise. Parce que si nous lisons saint
Paul dans ses lettres soit aux Ephésiens, soit aux Colossiens, et si nous
lisons les passages et les versets qui suivent et qui complètent les affirmations
de saint Pie X, nous nous apercevons que c'est aussi le but principal de l'apostolat
de saint Paul. Saint Paul dit aux Ephésiens et aux Colossiens qu'il a été
choisi comme apôtre pour annoncer un grand mystère, un mystère qui était caché
depuis le début du monde, même caché dans une mesure aux anges, un mystère
extraordinaire. Que va annoncer le pape Pie X ? Son mystère, c'est précisément
cela: "Instaurare omnia in Christo". "Recapitulare
omnia in Christo", dirai‑je. Faire du Christ à la fois la synthèse
de toute l'histoire de l'humanité et la solution de tous les problèmes de
l'humanité. Donc pas seulement instaurare, mais recapitulare (du mot grec
cephalos, la tête). Notre Seigneur Jésus‑Christ est la
tête et tout descend de la tête. C'était là le grand mystère annoncé par saint
Paul aux Gentils. Saint Pie X le reprend comme programme de son pontificat.
Il y en a, ajoute le pape, qui diront que notre but n'est pas vraiment celui‑là,
qu'il est plutôt temporel...
"Si quelqu'un croyait pouvoir se permettre d'interpréter les mobiles
qui Nous font agir, Nous ne pourrions que redire Notre intangible volonté
d'instaurer toutes choses dans le Christ".
C'est donc clair. De la clarté, des idées, la limpidité de la parole, contrairement
à ce que nous entendons trop souvent aujourd'hui dans les documents pontificaux
où abondent les ambiguïtés, les équivoques, les expressions à la mode. Ici
tout est simple, on ne peut hésiter sur ce que pense le Saint‑Père.
Le laïcisme
Il jette alors un nouveau coup d'œil sur le monde
"Nous voulons donc entreprendre et poursuivre, Vénérables Frères, cette
grande œuvre qui est "instaurer tout dans le Christ". Ce qui redouble
notre ardeur, c'est la certitude que vous Nous y serez de vaillants auxiliaires".
Il
compte sur l'appui des évêques pour venir à son secours
"De nos jours, il n'est que trop vrai, les nations ont frémi et les peuples
ont médité des projets insensés contre leur Créateur. Et presque commun est
devenu ce cri des ennemis : "Retirez‑vous de nous ". De là,
chez la plupart, un rejet total de tout respect de Dieu. De là des habitudes
de vie tant privée que publique où nul compte n'est tenu de Sa souveraineté".
Voilà constatée l'introduction du laïcisme, de ce que l'on appellerait peut‑être
aujourd'hui d'une manière plus courante la sécularisation. Plus de religion
dans la vie publique ; l'homme est seul, il organise le monde, la société
et tout absolument comme si Dieu n'existait pas. C'est le laïcisme complet.
Le pape poursuit:
"Bien plus il n'est effort, ni artifice, que l'on ne mette en œuvre pour
abolir complètement Son souvenir et jusqu'à Sa notion ".
Qu'aurait‑il dit s'il avait vécu aux temps du communisme et de ses écoles
d'athéisme !
F
L'avènement
de l'Antéchrist
Puis
voici ‑ chose assez curieuse ‑ une allusion à l'Antéchrist:
"Qui pèse ces choses a droit de craindre qu'une telle abdication des
esprits ne soit le commencement des maux annoncés pour la fin des temps, et
comme leur prise de contact avec la terre et que, évidemment, le "Fils
de perdition " dont parle l'Apôtre n'ait déjà fait son avènement parmi
nous".
Sans doute le pape Pie X était‑il inspiré, pour dire cela dès le début
de son pontificat, comme si déjà l'Antéchrist lui semblait présent dans la
société de son temps. Le saint pape poursuit
"En revanche, et c'est là aux dires mêmes de l'Apôtre le caractère propre
de l'Antéchrist : l'homme, avec une témérité sans nom a usurpé la place du
Créateur en s'élevant au‑dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu
".
On le sait : la venue de l'Antéchrist correspondra à un moment où les hommes
rejetteront Dieu de toutes parts. Or celte lutte ouverte a commencé depuis
longtemps. A vrai dire: depuis Satan, depuis le péché originel ! Mais, au
cours de l'histoire de l'Eglise, on a vécu un temps où Dieu était connu, aimé,
respecté dans la majorité des nations.
Le culte
de l'homme
C'est véritablement avec la Renaissance et le protestantisme que sont apparus
des penseurs désireux de transformer la société et de la rendre laïque, donc
athée. Mais tant qu'il y eut des rois catholiques, des princes catholiques,
ils ne pouvaient parvenir à leurs fins. Ils ont donc fait la Révolution en
tuant les rois, en massacrant les princes, et après avoir renversé l'ordre
ancien, ils sont parvenus, tout doucement, à instaurer une société vraiment
laïque, un peu partout, plus ou moins selon les pays. Aujourd'hui les législations
ne tiennent plus compte de la loi de Dieu, le Décalogue, mais seulement des
droits de l'homme.
Eh bien, saint Pie X voyait déjà cela
"C'est
à tel point que, impuissant à éteindre complètement en soi la notion de Dieu,
il (l'homme) secoue cependant le joug de Sa
majesté et se dédie à lui‑même le monde visible en guise de temple où
il prétend recevoir les adorations de ses semblables".
Tout cela est prophétique. Parlant de son temps, le pape projette déjà ses
pensées vers l'avenir : il sent venir des temps effrayants, où la persécution
sera ouverte contre Notre Seigneur. Pressentait‑il la venue du communisme
athée ? En tout cas il voyait l'Antéchrist à l'œuvre.
Dieu remportera
la victoire
Poursuivons la lecture:
"Quelle sera l'issue de ce combat livré à Dieu par les faibles mortels
? Nul esprit sensé ne peut la mettre en doute. Il est loisible assurément
à l'homme qui veut abuser de sa liberté, de violer les droits et l'autorité
suprême du Créateur, mais au Créateur reste toujours la victoire... ".
Donc, c'est évident, Dieu aura la victoire. Mais quand le voudra‑t‑Il
?
... et ce n'est pas assez dire.
La ruine plane plus près sur l'homme justement quand il se dresse plus audacieux
dans l'espoir du triomphe. C'est de quoi Dieu Lui‑même nous avertit
dans les Saintes Ecritures. Dieu ferme les yeux sur les péchés des hommes,
mais bientôt après, se réveillant, ainsi qu'un homme dont l'ivresse a grandi
la force, Il brise la tête de ses ennemis".
Le
pape cite les paroles de l'Écriture:
"Ainsi que tous sachent que le roi de la terre, de toute la terre, c'est
Dieu. Que les peuples comprennent qu'ils ne sont que des hommes ".
Ce que dit saint Pie X, nous pouvons le dire plus
que jamais
Dieu "ferme les yeux" ; nous nous sentons un peu abandonnés du Bon
Dieu. Les hommes commettent les pires choses, des choses auxquelles on n'osait
même pas penser au temps de saint Pie X. Pensons à ces lois autorisant l'avortement,
entraînant le massacre de centaines de millions d'innocents dans des pays
soi‑disant civilisés. L'immoralité est partout : on ne peut plus ouvrir
un journal sans apprendre des rapts, des crimes, des viols... Alors nous pour
vons nous dire: qu'attend le Bon Dieu pour secouer le monde et le faire frémir
un peu ?
Dieu est patient ; Il a son heure ; nous ne pouvons pas savoir quand Il décidera
de se manifester. Cela pourrait arriver subitement ; Il vient "comme
un voleur", un peu comme pour la mort.
Ce triomphe de Dieu, continue Pie X
"Vénérables Frères, nous le tenons d'une foi certaine et nous l'attendons,
niais cette confiance ne nous dispense pas, pour ce qui dépend de nous, de
hâter l'œuvre divine, Pion seulement par une prière persévérante : "
Levez‑vous Seigneur et ne permettez pas que l'homme se prévale de sa
force... ", mais encore ‑ et c'est ce qui importe le plus ‑
par la parole et par les œuvres pour revendiquer pour Dieu la plénitude de
son domaine sur les hommes et sur toute créature, de sorte que Ses droits
et Son pouvoir de commander soient reconnus par tous avec vénération et pratiquement
respectés ".
Le salut
par Jésus‑Christ
Voilà le programme : travailler au règne de Notre Seigneur Jésus‑Christ.
C'est clair. Pour saint Pie X, il n'est pas question de droits de l'homme,
de progrès, de changements de structures. Non, uniquement Notre Seigneur.
C'est par Lui que viendra le salut. Comme il le dit ensuite : accomplissons
nos devoirs, et si nous cherchons la paix, nous ne pouvons la chercher en
dehors de Dieu
"Chasser Dieu, c'est bannir la justice, et la justice écartée, toute
espérance de paix devient une chimère ; la paix, c'est l'œuvre de justice.
Pax opus justitiae ".
Rendre à Dieu ce qui est dû à Dieu, rendre au prochain ce qui est dû au prochain
: telle est la vertu de justice. C'est par elle que régnera la paix.
Toutefois, dit alors saint Pie X
"Il en est, 'et en grand nombre, Nous ne l'ignorons pas, qui, poussés
par l'amour de la paix, c'est‑à‑dire de la tranquillité de l'ordre,
s'associent et se groupent, pour former ce qu'ils appellent "le Parti
de l'Ordre ". Hélas! Vaines espérances, peines perdues ! ". Et
pourtant, le parti de l'Ordre, n'est‑ce pas le parti de l'Eglise ?
Pour saint Pie X, ce n'est pas suffisant
"De
parti d'ordre capable de rétablir la tranquillité au milieu de la perturbation
des choses, il n'y en a qu'un : le parti de Dieu ! (...).
C'est donc celui‑là qu'il Nous faùt promouvoir.
C'est à lui
ufaut amener le plus d'adhérents possibles, pour peu que nous ayons à cœur
la sécurité publique".
Voilà ce que nous n'entendons plus aujourd'hui. Le pape actuel, à Paris, dans
son discours à l'UNESCO (Le 2 juin 1980), a dit que le grand moyen de rétablir la paix dans
le monde, c'est de donner sa place a la conscience, de faire "prendre
conscience" aux gens du danger que court le monde si l'on ne fait pas
d'efforts pour rétablir la paix. "Conscientiser", comme on dit aujourd'hui,
ne peut être suffisant si l'on ne donne pas le remède ! Or le seul remède,
c'est la loi de Dieu ; c'est le Décalogue, lequel est à la base de toute civilisation
humaine et chrétienne.
Saint Pie X, lui, n'hésite pas
"Vénérables Frères, ce retour des nations au respect de la majesté et
de la souveraineté divines, quelques efforts que nous fassions d'ailleurs
pour le réaliser, n'adviendra que par Jésus-Christ. Nunquam nisi per Jesum Christum eveniet ".
Encore une fois, c'est très clair. L'Apôtre nous avertit : personne ne peut
poser d'autre fondement que celui qui a été posé et qui est le Christ Jésus.
C'est Lui seul que le Père a sanctifié et envoyé en ce monde, splendeur du
Père et figure de substance, vrai Dieu et vrai Homme, sans lequel nul ne peut
connaître Dieu. Car "personne n'a connu le Père si ce n'est le Fils et
celui à qui le Fils aura voulu le révéler" (Mt 11,27).
Le Christ
est Dieu
D'où il ressort pour saint Pie X que "tout restaurer dans le Christ et
ramener les hommes à l'obéissance divine sont une seule et même chose".
Le Christ est Dieu: cela paraît simple, et pourtant c'est ce qui est toujours
nié tant par les adversaires de Notre Seigneur que par les catholiques qui
n'ont plus une foi vive, car ces derniers ne Le considèrent pas dans leur
vie ou dans leurs manières d'agir comme s'Il était Dieu. Évidemment c'est
un grand mystère que celui de Dieu incarné ; on voit davantage l'homme en
Jésus-Christ, Dieu est caché derrière son humanité. Pourtant il n'y a pas
deux personnes en Notre Seigneur Jésus‑Christ, il n'y en a qu'une nla
personne du Verbe. Et Verbum caro factum est. Le Verbe, c'est
Dieu, quia pris chair. Alors s'Il est vraiment Dieu, nous devons L'honorer
comme Dieu, Lui obéir comme Dieu et chercher que son règne arrive.
"Cela fait, explique le pape, l'homme
se trouvera par là‑même ramené à Dieu. Nous voulons dire non pas à un
Dieu inerte et insoucieux des choses humaines comme les matérialistes l'ont
forgé dans leurs folles rêveries, mais un Dieu vivant et vrai, en trois personnes,
dans l'unité de nature, auteur du monde, étendant à toutes choses son infinie
Providence, législateur très juste qui punit les coupables et assure aux vertueux
leur récompense (...)".
Alors
survient aussitôt la question:
Aller à
Jésus‑Christ par l'Eglise
"Quel est le moyen maintenant d'aller à Notre Seigneur Jésus-Christ ?
Qui va nous donner Notre Seigneur Jésus‑Christ et quelle est la voie
qui nous donne accès à Notre Seigneur Jésus-Christ
? Elle est sous nos yeux : c'est l'Eglise (Saint Jean Chrysostome nous
dit avec raison : l'Eglise est ton espérance, l'Eglise est ton salut, l'Eglise
est ton refuge) ".
"C'est pour cela que le Christ l'a établie après l'avoir acquise au prix
de son Sang. C'est pour cela qu'Il lui a confié sa doctrine, les préceptes
de sa loi, lui prodiguant en même temps les trésors de la grâce divine pour
la sanctification des âmes".
Ainsi donc nous nous sanctifierons et nous honorerons Notre Seigneur, et Son
règne arrivera par l'extension de l'Eglise catholique. Il n'y a pas d'autre
moyen et c'est précisément pour cela que nous luttons. Nous voulons garder
l'Eglise telle qu'elle a toujours été pour donner Notre Seigneur Jésus‑Christ
aux âmes, tel qu'Il a toujours voulu se donner, par l'Eglise, par la foi de
l'Eglise, par la grâce de l'Eglise.
Poursuivons
la lecture
"Vous voyez donc, Vénérables Frères, quelle œuvre est confiée à vous
et à Nous. Il s'agit de ramener les sociétés humaines, égarées loin de la
sagesse du Christ, à l'obéissance de l'Eglise ; l'Eglise à son tour les soumettra
au Christ et le Christ à Dieu ".
L'ordre
voulu par Dieu
"Toutefois pour que les résultats répondent à nos vœux il faut par tous
les moyens et au prix de tous les efforts, déraciner absolument cette monstrueuse
et détestable iniquité propre au temps que nous vivons et dans laquelle l'homme
se substitue à Dieu ".
Comment ne pas penser ici aux nouveautés du concile Vatican II ? Ce qui frappe,
c'est précisément la part de l'homme par rapport à celle de Dieu. C'est un
peu la religion de l'homme. Dans la nouvelle messe, on remarque surtout l'homme,
c'est une messe démocratique. Alors que la messe de la Tradition, celle que
nous disons tous les jours, est une messe hiérarchique : Dieu, le Christ,
l'Église en la personne de l'évêque et du prêtre, puis des fidèles, et encore
parmi ceux‑ci il y a une hiérarchie : on faisait autrefois une distinction
entre les princes ou les magistrats, ceux qui ont une autorité, qui donc partagent
l'autorité de Notre Seigneur (puisque toute autorité vient de Dieu) et le
peuple fidèle.
Ce ne sont pas des idées moyenâgeuses, c'est tout simplement la hiérarchie
telle qu'elle sera dans le Ciel où il y aura le Bon Dieu, puis toute une hiérarchie
entre les anges et la même chose entre les saints. Tout cela est normal :
Dieu a voulu que nous participions plus ou moins à Sa gloire.
Considérons qu'il y a une occasion d'exercer la charité. Que certains aient
moins, que certains aient plus de dons, cela fait naître des communications
entre les hommes ici‑bas, comme entre les saints et entre les anges
dans le Ciel.
Au contraire, selon les erreurs modernes, tous les hommes sont égaux. On a
affaire à une masse uniforme et c'est le nombre qui donne l'autorité ! L'homme
se substitue à Dieu ; il n'y a plus de Dieu.
Saint
Pie X rappelle l'ordre voulu par Dieu dans la société:
"Rétablir dans leur ancienne dignité les lois très simples, les conseils
de l'Evangile, proclamer hautement les vérités enseignées par l'Eglise sur
la sainteté du mariage, sur l'éducation de l'enfance, sur la possession et
l'usage des biens temporels, sur les devoirs de ceux qui administrent la chose
publique, rétablir enfin le juste équilibre entre les diverses classes de
la société selon les lois et les institutions chrétiennes, tels sont les principes
que, pour obéir à la divine Volonté, Nous voulons appliquer durant le cours
de Notre pontificat et avec toute l'énergie de Notre âme ".
Tel est donc le programme du saint pape Pie X : Tout instaurer dans le Christ,
remettre Dieu dans la société par l'Eglise, remettre de l'ordre dans la société
par les institutions chrétiennes que l'Eglise a toujours défendues et enseignées.
Former
des prêtres
Le pape s'adresse alors aux évêques. Quel est votre rôle à vous ? Qu'avez‑vous
à faire pour arriver à ce règne de Notre Seigneur Jésus‑Christ ? Quels
moyens convient‑il d'employer pour atteindre un but si élevé ? Il semble
superflu de les indiquer tant ils se présentent d'eux‑mêmes à l'esprit
"Que vos premiers soins soient de former le Christ dans ceux qui par
le devoir de leur vocation sont destinés à Le former dans les autres. Nous
voulons parler des prêtres. Car tous ceux qui sont honorés du sacerdoce doivent
savoir qu'ils ont parmi les peuples avec lesquels ils vivent la même mission
que Paul attestait avoir reçue lorsqu'il prononçait ces tendres paroles :
"Mes petits enfants que j'engendre de nouveau jusqu'à ce que le Christ
se forme en vous".
Alors
donc, il faut absolument penser aux séminaires.
"Le prêtre est appelé pour cela un autre Christ, non seulement parce
qu'il participe au pouvoir de Jésus‑Christ, mais en plus parce qu'il
doit imiter Ses œuvres et par là reproduire en soi Son image ".
Saint Pie X exhorte les évêques: quel sera votre premier souci ? La formation
des prêtres ! C'est tout à fait normal : qu'est‑ce qu'une Eglise sans
prêtres, une Eglise sans vrais prêtres, une Eglise sans saints prêtres ? Or
nous nous dirigeons vers cette catastrophe, bien plus qu'au temps de saint
Pie X... S'il revenait, il insisterait encore davantage ! Des prêtres n'ont
plus l'esprit du sacerdoce, ne prêchent plus l'Evangile, ni le vrai catéchisme,
ou se marient ! Il n'y a presque plus de séminaristes et ils sont si mal formés
! Que peut donner une telle situation ?
Multiplier
les séminaires
Je le répète
: le premier souci des évêques doit être de former de vrais prêtres. Nous
ne pouvions pas choisir un meilleur patron pour la Fraternité que saint Pie
X. Et c'est parce que la situation aujourd'hui est pire que du vivant du saint
pontife que, comme évêque, n'ayant plus de charge officiellement, il m'a semblé
que ce que je pouvais faire de mieux pour l'Eglise et pour la restauration
du règne de Notre Seigneur Jésus‑Christ dans l' Eglise et dans la société,
c'était de faire des prêtres, donc d'ouvrir des séminaires, de préparer des
formateurs de prêtres.
Car il faut multiplier les séminaires. C'est le premier but de la Fraternité
sacerdotale Saint‑Pie X. Il en faudrait un au Canada, un au Mexique,
un en Colombie, un en Australie, un en Afrique du Sud. Il en faudrait aussi
en Irlande, en Angleterre, partout (En 1993, la Fraternité sacerdotale
Saint‑Pie X compte déjà six séminaires : le Séminaire international
Saint‑Pie X, Ecône ‑ CH 1908 Riddes ; le Séminaire international
Saint‑Curé d'Ars, Maison Lacordaire ‑ 21150 Flavigny‑sur‑Ozerain
; Saint Thomas Aquinas Seminary, Route Rurale 1, Box 97 A‑1‑USA
Winona, Minnesota 55987 ; Seminario Nuestra Senora Corredentora, La Reja ‑
1744 Moreno Argentine ; Holy Cross seminary, P.O. Box 417 ‑ Goulbum,
N.S.W. 2580 Australie; Priersterseminar Herz Jesu ‑ Zaitzkofen ‑
8306 Shierling, Allemagne.). Dans la mesure où il faut rénover l'Eglise, où il
faut restaurer le règne de Notre Seigneur Jésus‑Christ, il faut des
prêtres, et pas n'importe quels prêtres.
On entend dire parfois : mais la situation est en train de changer, le nombre
des séminaristes augmente. Par exemple, au séminaire de Paderborn, il est
entré trente‑neuf séminaristes l'année dernière ; d'Augsbourg, vingt‑cinq.
Dans un nouveau séminaire d'Argentine, un évêque a décidé de rétablir un peu
de la tradition, beaucoup de jeunes y sont attirés par l'usage du latin, par
une certaine discipline...
Hélas, il faut étudier de près le genre de philosophie qu'on leur enseigne,
la liturgie qu'on y pratique et même la discipline générale ! On n'apprend
pas à ces jeunes séminaristes la philosophie scolastique, pourtant la vraie
philosophie de l'Eglise. On y enseigne une histoire de la philosophie, donc
toutes les philosophies en quelques mots, mais on ne va pas jusqu'aux vrais
principes de la philosophie. Il en va de même pour la théologie : on fait
surtout de l'apologétique et de l'Ecriture sainte. Alors ces prêtres ne sont
pas formés, ils sont même déformés.
Un professeur est récemment venu de Paderborn à notre séminaire de Zaitzkofen.
Il nous a dit : là‑bas, il y a des séminaristes, c'est vrai, et quand
ils arrivent ils sont pleins de bonnes dispositions, du désir d'apprendre
la Vérité ; mais ils s'aperçoivent, au bout d'un ou deux ans, qu'ils sont
complètement déformés ; on ne leur apprend pas ce qu'ils sont venus apprendre.
Alors, ils se découragent, ou perdent la notion de vérité, ou ils cherchent
ailleurs !
Autre exemple : le séminaire de Regensburg (Ratisbonne) passait naguère pour
le séminaire traditionaliste par excellence en Allemagne, et Mgr Graber était
également considéré comme traditionaliste ayant même écrit un petit livre
"réactionnaire" contre certaines positions du Concile. Je lui ai
alors rendu visite. Que m'a‑t‑il dit ? "Oui, j'ai des séminaristes,
j'ai ordonné dix‑huit prêtres cette année, j'aurai encore des vocations..."
‑ "Alors, lui demandais‑je, êtes‑vous content ?"
"Pas tellement, me répondit‑il, beaucoup de séminaristes n'assistent
pas à la messe le matin, il y en a avec des cheveux qui leur tombent sur les
épaules...".
Et pourtant nous nous rejouirions, nous dirions : Deo gratias s'il y avait des séminaires qui commencent à reprendre
le vrai chemin. Mais non, ce n'est pas le cas, et plus le temps passe moins
il y aura de professeurs qui connaîtront la philosophie de saint Thomas ou
la vraie théologie. C'est pourquoi une bonne partie des séminaristes de la
Fraternité Saint‑Pie X seront appelés à être à leur tour professeurs
dans nos séminaires. Cela sera absolument indispensable.
Former
de saints prêtres
Saint
Pie X nous y invite instamment
"S'il en est ainsi, combien grande ne doit pas être votre sollicitude
pour former le clergé à la sainteté. Il n'est affaire qui ne doive céder le
pas à celle‑là. Par conséquent le meilleur et le principal de votre
zèle doivent se porter sur vos séminaires pour y introduire un tel ordre et
leur assurer un tel gouvernement qu'on y voie fleurir côte à côte l'intégrité
de l'enseignement et la sainteté des mœurs. Faites des séminaires les délices
de votre cœur et ne négligez rien de tout ce que le concile de Trente a prescrit
dans sa haute sagesse pour garantir la prospérité de cette institution. Quand
le temps sera venu de promouvoir les jeunes candidats aux saints Ordres, n'oubliez
pas ce qu'écrivait saint Paul à Timothée : "N'imposez précipitamment
les mains à personne, vous persuadant bien que, le plus souvent, tels seront
ceux que vous admettez au sacerdoce et tels seront aussi dans la suite les
fidèles confiés à leur sollicitude. Ayez uniquement en vue Dieu, l'Eglise,
le bonheur éternel des âmes, afin d'éviter 'de participer aux péchés d'autrui
"' (1 Tim 5,22).
Sollicitude
envers les jeunes prêtres
Il ne faut pas non plus négliger les jeunes prêtres qui sortent des séminaires
"D'ailleurs, que les nouveaux prêtres qui sortent du séminaire n'échappent
pas pour cela aux sollicitudes de votre zèle. Réchauffez‑les, enflammez‑les,
afin qu'ils n'aspirent plus qu'à Dieu, à la conquête des âmes, qu'ils ne se
laissent pas surprendre aux manœuvres insidieuses d'une science nouvelle qui
se pare du masque de la vérité et où on ne respire pas le parfum de Jésus‑Christ,
science menteuse qui, à la faveur des arguments fallacieux et perfides, s'efforce
de frayer le chemin aux erreurs du rationalisme et du semi‑rationalisme
contre lequel l'Apôtre avertissait déjà son cher Timothée de se prémunir lorsqu'il
lui disait : " Garde le dépôt, évitant les nouveautés profanes dans le
langage aussi bien que les objections d'une science fausse dont tous les partisans
avec leurs promesses ont défailli dans la foi" (1 Tim 6,20).
Donc
attention aux jeunes prêtres !
"C'est une grande douleur pour Nous, une continuelle tristesse de constater
de nos jours cette plainte de Jérémie : " Les enfants ont demandé du
pain et il n'y avait personne pour le leur rompre " (Lam 4, 4).
"Il n'en manque pas, en effet, dans le clergé qui, cèdant à des goûts
personnels, dépensent leur activité en des choses d'une utilité plus apparente
que réelle, tandis que non moins nombreux peut‑être sont ceux qui à
l'exemple du Christ prennent pour euxmêmes les paroles du Prophète : "L'esprit
m'a donné l'onction et m'a envoyé évangéliser les pauvres" (Le 4, 18‑19).
Je suppose que le pape à ce moment‑là se remémorait son diocèse en disant
: beaucoup de prêtres emploient leur temps à bien d'autres choses qu'à exercer
leur ministère et à enseigner le catéchisme, qu'à administrer les sacrements,
etc...
Que peut‑on dire maintenant ? Quelle est la paroisse où le prêtre est
à son confessionnal et attend les pénitents ? On sonne au presbytère ? Le
prêtre est parti ou n'a pas le temps... Et les fidèles sont découragés de
se confesser...
Saint Pie X a toujours insisté sur l'occupation première du prêtre : enseigner
le catéchisme. Les prêtres aujourd'hui disent non, ce n'est pas notre affaire,
c'est celle des parents. Bien sûr que les parents doivent enseigner les éléments
du catéchisme à leurs enfants. C'est bien, mais c'est le prêtre qui a la science
pour donner l'enseignement religieux. Non pour prononcer de grands discours
philosophiques pour une petite élite, mais pour être apte à donner la science
religieuse à des enfants, à des personnes simples. Car il y a danger à se
laisser prendre par les sciences très spéculatives et à ne pas s'adapter aux
gens. Il faut savoir monnayer la science que l'on a reçue en fonction de ceux
vers lesquels on est envoyé.
C'est encore ce que dit saint Pie X
"Le principal moyen de rendre à Dieu son empire sur les âmes, c'est l'enseignement
religieux".
Et
il ajoute:
"Combien sont hostiles à Jésus‑Christ, prennent en horreur l'Eglise
et l'Evangile, bien plus par ignorance que par malice, donc on pourrait dire
: ils blasphèment tout ce qu'ils ignorent ; de là, en beaucoup le dépérissement
de la foi. Car il ne faut pas admettre que ce soient les progrès de la science
qui l'étouffent, c'est bien plutôt l'ignorance, tellement que là où l'ignorance
est plus grande, là aussi l'incrédulité fait de plus grands ravages. C'est
pour cela que le Christ a donné aux apôtres ce précepte
Allez, enseignez toutes les nations"' (Mt 28,19).
Une charité
patiente
Saint Pie X demande ensuite aux évêques de veiller à ce que les prêtres exercent
la charité
"Mais pour que ce zèle à enseigner produise les fruits qu'on en espère
et serve à former en tous le Christ, rien n'est plus efficace que la charité".
Le conseil qui est donné ici est d'une très grande importance. Pensons aux
difficultés qu'ont connues les traditionalistes dans leurs paroisses... Les
prêtres qui manquent de charité ont tendance à juger les hommes tels qu'ils
devraient être et non tels qu'ils sont, ils ferment les yeux sur les réalités.
Si un jeune prêtre entre en contact avec les âmes en ayant des catégories
dans son esprit, en pensant a priori que les chrétiens doivent être ceci ou
cela, il ne peut pas recevoir le pécheur qui se présente à lui (et nous sommes
tous pécheurs !) en médecin ‑ le médecin des âmes ‑ mais en juge
; alors il condamne, il réprimande, il morigène ce pénitent. Résultat les
gens fuient. Imaginez que dans un hôpital un médecin vous dise : vous êtes
trop malade, je ne peux pas vous soigner, vous n' avez qu'à mourir. Ou bien
un médecin qui envisagerait tout de suite les grands moyens : il faut vous
couper la jambe... Un tel médecin ferait des analyses, mais n'aurait pas le
sens du diagnostic, ce sens qu'avaient au plus haut point nos médecins de
campagne qui savaient tout de suite deviner la maladie. Et l'on aimait ces
médecins.
Il faut donc que les prêtres se montrent des médecins des âmes, dit saint
Pie X, qui explique alors
"Gravons cela fortement dans notre mémoire, ô Vénérables Frères, car
le Seigneur n'est pas dans la commotion (c'est‑à‑dire dans la
dureté et l'agitation). En vain espèrerait‑on attirer les âmes à Dieu
par un zèle empreint d'amertume. Reprocher durement les erreurs, reprendre
les vices avec âpreté cause très souvent plus de dommages que de profit. IL
est vrai que l'Apôtre exhortant Timothée lui dit : "Accuse, supplie, reprend", mais il ajoute : en toute patience" (in omni patientia) (2 Tim 4,2).
"Rien de plus conforme aux exemples que Jésus‑Christ nous a laissés.
C'est Lui qui nous adresse cette invitation : "Venez à moi, vous tous
qui souffrez et qui gémissez sous le fardeau et je vous soulagerai" (Mt
11, 28). Et dans sa pensée, ces infirmes, ces opprimés n'étaient autres que
les esclaves de l'erreur et du péché. Quelle mansuétude dans ce divin Maître,
quelle tendresse, quelle compassion envers tous les malheureux! Son divin
Cœur nous est admirablement dépeint par Isaïe en ces termes :
"Je poserai sur Lui mon esprit. Il ne contestera point et n'élèvera pas
la voix; jamais il n'achèvera le roseau demi‑brisé et n'éteindra encore
la mèche fumante" (Is 42,1). Cette charité patiente, bénigne, devra aller
au‑devant de ceux‑là mêmes qui sont nos adversaires, nos persécuteurs.
Ils nous maudissent, ainsi le proclamait saint Paul, et nous bénissons, ils
nous persécutent et nous supportons, ils nous blasphèment et nous prions.
"Le contact avec les autres, les préjugés, l'influence des doctrines
et les exemples, enfin le respect humain, conseiller funeste, les ont engagés
dans le parti de l'impiété. Mais, au fond, leur volonté n'est pas aussi dépravée
qu'ils se plaisent à le faire croire ".
Se garder
des conclusions hâtives
En effet, la dureté est mauvaise conseillère : on tire tout de suite des conclusions
exagérées de telle ou telle phrase entendue ; on interprète les propos des
autres toujours dans le sens le plus fort.
Il y a par exemple des gens qui disent : le pape a dit ceci, il est donc hérétique,
donc il n'est pas pape... Voilà un raisonnement trop simple. Il ne suffit
tout de même pas de prendre une phrase hors de son contexte pour tirer tout
de suite la conclusion: il est hérétique.
Pour être hérétique, il faut être "pertinax"
dans l'erreur, et pas seulement avoir prononcé une phrase hérétique. Par
exemple, au sujet de la Sainte Trinité ‑ un sujet très difficile ‑
nous pouvons très bien nous tromper ou commettre une maladresse dans l'expression,
et alors dire une chose pas très orthodoxe. Si on nous le fait remarquer,
nous rectifions ; mais si l'on nous accuse d'hérésie, si l'on nous excommunie,
c'est effrayant!
Certains vont jusqu'à tirer des conclusions invraisemblables
Un tel a dit telle phrase, donc c'est un libéral. Et si c'est un libéral,
ce doit être un franc‑maçon, donc il est excommunié... Avec de tels
raisonnements, tout le monde serait franc‑maçon !
Il est donc très dangereux de se laisser entraîner à des conclusions hâtives.
A propos du pape, on entend dire parfois : il a signé le décret sur la liberté
religieuse, or ce décret est hérétique, donc le pape est hérétique, donc le
pape n'est pas pape... D'abord il faudrait étudier de manière très précise
si ce décret est hérétique. Ensuite se demander si le pape, lorsqu'il l'a
signé, a eu exactement conscience de ce qu'il signait. On sait qu'il a lui‑même
fait ajouter certaines petites phrases pour dire : " Le décret sur la
liberté religieuse est conforme à la Tradition". Bien sûr ce n'est pas
vrai, mais dans sa pensée le pape le voyait ainsi. On ne peut donc pas conclure
trop rapidement, les conséquences en seraient trop graves.
On dit : il n'y a pas de pape. Alors, les cardinaux qu'il a nommés ne sont
pas cardinaux, et quand ceux‑ci éliront le nouveau pape, il ne sera
pas pape puisque les cardinaux n'étaient pas cardinaux... Où va‑t‑on
? Qui va alors désigner le nouveau pape ? La Providence ? Oui, mais la Providence
se sert des hommes... On est dans le trou noir. Voilà où mènent les conclusions
hâtives.
Faut‑il s'étonner si les fidèles cherchent ailleurs ? Ils vont à Palmar
de Troya où maintenant Clemente s'est fait pape, avec toute sa cour cardinalice.
Ils vont à l'Eglise latine de Toulouse, ou ailleurs... On les a poussés à
chercher une autorité ; ils finissent par aller vers les sectes ; ils rompent
complètement avec l'Eglise.
Il faut donc faire très attention, être très prudent avant d'affirmer. Ceux
qui ont parlé ainsi ont manqué d'esprit de charité et, par conséquent, de
réalisme. Ce sont des idéalistes, des raisonneurs spéculatifs.
Le prêtre
est le médecin des âmes
C'est la même chose avec les pécheurs. Quand on doit examiner le péché de
quelqu'un, on considère, bien sûr, le péché en soi, l'action commise qui est
un péché grave. Mais il est possible que, subjectivement, le pénitent ne soit
pas coupable : il ne savait peutêtre pas que ce qu'il faisait était un péché
grave, ou alors il a été poussé, conditionné, dans un moment où il n'était
pas conscient de ce qu'il faisait. Autant de circonstances à examiner ; voir
les choses en dehors des circonstances n'est pas réaliste. Or ‑ encore
une fois ‑ le prêtre est le médecin des âmes, il doit interroger son
pénitent ou celui qui vient lui demander conseil. Comment a‑t‑il
fait cela ? Comment a‑t‑il pu se mettre dans une telle situation
? Expliquer, pour essayer ensuite de porter remède. Cela est très important.
II faut, dès le séminaire, rechercher la vertu de prudence. Il ne faut pas
se durcir, ni s'enfermer dans des raisonnements par lesquels on s'égare et
on égare les autres.
L'action
catholique
Saint Pie X aborde ensuite la question des moyens.
"Dans cette œuvre si ardue de la rénovation des peuples par le Christ,
il n'est pas question que vous restiez vous et votre clergé, sans auxiliaires.
Quels sont ces auxiliaires du clergé: ce sont les fidèles ".
Le pape demande là que l'on veille sur l'action catholique, c'est‑à‑dire
la société des fidèles qui aident le prêtre à répandre l'enseignement que
donne l'exemple de la vie chrétienne.
"Ce ne sont pas donc seulement les hommes revêtus du sacerdoce, mais
tous les fidèles, sans exception, qui doivent se dévouer aux intérêts de Dieu
et des âmes. Non pas certes chacun au gré de ses vues et de ses tendances,
mais toujours sous la direction et selon la volonté des évêques (...). Donc s'associer entre
catholiques, dans des buts divers mais toujours pour le bien de la religion
est chose qui, depuis longtemps, a mérité l'approbation et les bénédictions
de Nos prédécesseurs. Nous non plus, Nous n'hésitons pas à louer une si belle
œuvre et Nous désirons qu'elle se répande et fleurisse partout dans les villes
et les campagnes ".
"Le premier objet de cette action catholique, doit être l'accomplissement
des devoirs de la vie chrétienne".
Pour bien connaître les idées de saint Pie X sur l'action catholique, il faut
se rapporter à l'allocution qu'il a prononcée le 25 septembre 1904. Il demande
que trois principes président à cette action catholique : piété, étude, action. On connaît des groupements tels que la Jeunesse étudiante
catholique (JEC), la Jeunesse ouvrière catholique (JOC), la Jeunesse agricole
catholique (JAC)... qui sont nés à l'initiative d'un prêtre belge, Cardijn,
devenu ensuite cardinal ; celui‑ci donnait pour devise : voir, juger, agir.
C'est très différent de ce que proposait Pie X : piété, étude, action. La piété, si l'on peut dire, enveloppe l'étude, selon les principes de la
religion catholique, et ensuite l'action, qui est commandée par la piété et
l'étude. Tandis que dans voir, juger,
agir, il y a d'abord voir, qui
est une action ; c'est se comporter comme tous ceux qui réalisent une entreprise
quelconque : on commence par voir, puis on juge ; enfin on agit. Mais comment
voient‑ils les choses ? Comment les jugent‑ils ? Comment leur
action est‑elle guidée ?
Lorsque j'étais archevêque de Dakar, je me souviens avoir visité des groupements
de JOC ; je leur faisais remarquer le danger de cette formule. D'abord on
voit ce qui ne va pas dans le travail ; puis on juge : pourquoi cela ne va‑t‑il pas ? C'est à cause de l'autorité, donc du patron
; alors on agit :
il faut lutter contre le patron.
C'est pareil dans la paroisse : quelque chose ne va pas, c'est la faute au
curé, donc il faut lutter contre le curé. On tombe ainsi dans le principe
révolutionnaire. Pour ces jeunes, rien n'est jamais leur faute, c'est toujours
celle de l'autorité !
Cela explique que ces mouvements d'action catholique qui, au début, étaient
très bien intentionnés, aient fini par devenir des associations révolutionnaires.
Qu'y a‑t‑il de plus révolutionnaire que l'Action catholique ouvrière
(ACO) ? Tout est la faute de la société, alors on se révolte contre la société,
on veut changer toutes les structures ; c'est la révolution généralisée...
D'abord
la piété
Il est très important de revenir aux vrais principes de l'action catholique.
D'abord la piété, d'abord prier, demander la grâce du Bon Dieu ! Ensuite étudier
l'enseignement de l'Eglise, enfin agir conformément aux principes d'une action
vraiment catholique. Tel est l'ordre normal.
Saint Pie X poursuit:
"Grâce à cette action on verra sans doute des multitudes d'hommes, foulant
aux pieds le respect humain, se dégageant de tous les préjugés, de toute hésitation,
adhérer au Christ et promouvoir à leur tour sa connaissance et son amour gage
de vraie et solide félicité (...).
Le
résultat:
"Il ne manquera plus rien, Vénérables Frères, pour que nous contemplions
la restauration de toutes choses dans le Christ. Et que l'on, ne croie pas
que tout cela se rapporte seulement à l'acquisition des biens éternels (...).
Les intérêts temporels et la prospérité publique s'en ressentiront aussi très
heureusement, car ce résultat une fois obtenu, les nobles et les riches sauront
être justes et charitables à l'égard des petits. Et ceux‑ci supporteront
dans la paix et la patience les privations de leur condition peu fortunée.
Les citoyens obéiront non plus à l'arbitraire mais aux lois. Tous regarderont
comme un devoir le respect et l'amour envers ceux qui gouvernent et dont le
pouvoir‑ ne vient que de Dieu. Et enfin l'Eglise jouira, elle aussi,
d'une pleine et entière liberté".
Saint
Pie X, avant d'achever, exprime un vœu:
"Que Dieu riche en miséricorde hâte dans Sa bonté cette rénovation du
genre humain en Jésus‑Christ puisque ce n'est ni l'œuvre de celui qui
veut, ni de celui qui court, mais du Dieu de miséricorde. Demandons‑Lui
cette grâce, en esprit d'humilité".
Puis,
il se tourne vers la Sainte Vierge:
"Recourons aussi à l'intercession très puissante de la divine Mère. Nous
exhortons aussi à prendre ainsi pour intercesseur le très pur époux de Marie,
patron de l'Eglise catholique, et les princes des Apôtres saint Pierre et
saint Paul".
Enfin, le pape donne sa bénédiction apostolique.
Telle est cette belle encyclique de saint Pie X : elle résume un peu toutes
les encycliques des papes, tout ce qu'ils ont enseigné avant lui. Il met l'accent
sur ce qu'il y a de plus important: Omnia restaurare in Christo. Aujourd'hui, comme de son temps, c'est là le but du sacerdoce.
L'ENCYCLIQUE HUMANUM GENUS
de Léon XIII
Sur la secte
des francs‑maçons
(20 avril
1884)
Léon XIII
précise toute la perversité
de la franc‑maçonnerie
L'encyclique Humanum genus, qui
est la plus importante, la plus complète, la plus exhaustive dans la description
de ce qu'est la franc‑maçonnerie et la perversité de ses buts, est due
à Léon XIII.
On a reproché à Léon XIII sa faiblesse sur certains points et malheureusement,
dans la pratique, il n'a pas su percevoir la nocivité de ceux qui gouvernaient
la France, ce qui a débouché sur le triste ralliement.
Mais au‑delà de cette erreur d'appréciation qui a eu de très fâcheuses
répercussions, les encycliques que ce pape a écrites sont de véritables traités
de théologie, magnifiques et merveilleux.
Voyons donc attentivement cette encyclique Humanum genus, à laquelle nous devons accorder quelque attention,
parce que si l'on étudie bien ce qu'est la maçonnerie à l'exemple des papes,
on tient la clef de tout ce qui se passe actuellement.
Sans l'étude de ces documents pontificaux, on ne peut pas comprendre la très
grave situation dans laquelle l'Eglise se trouve actuellement et toutes nos
sociétés dites civilisées, qui avaient autrefois profité de la civilisation
chrétienne, de ses principes et de la vertu chrétienne pendant des siècles
et des siècles.
Comme l'exprime très bien le pape Léon XIII,
le but des francs-maçons c'est de détruire toutes les institutions chrétiennes,
d'en finir avec tout ce qui a été édifié et institué par l'Eglise pendant
dix ou douze siècles, d'anéantir tout cela de fond en comble. La morale, les
principes, les dogmes de l'Eglise : il faut tout détruire.
On ne peut s'expliquer justement cette destruction,
que par l'in tervention d'une organisation
extrêmement efficace ; puisqu'elle parvient, au cours des siècles, à réaliser
ce qu'elle a prévu et annoncé. "Nous mettrons des siècles s'il le faut,
mais nous y arriverons".
Comment
un semblable projet peut‑il s'expliquer s'il n'y a pas à sa base un principe permanent ? Eh bien ce principe
permanent, c'est Satan. Le pape le
dit clairement. On ne peut pas expliquer cette fureur, cette haine que nourrit
la franc‑maçonnerie contre l'Eglise,
contre Notre Seigneur Jésus‑Christ en définitive, autrement que par
la haine de Satan. C'est impossible.
D'ailleurs
lorsque l'on connaît les liens véritables entre la franc‑maçonnerie et Satan, au cours des cérémonies secrètes,
dans tout ce qui se fait dans l'ombre
du secret, on comprend cette persévérance et puis cette intelligence, cette
subtilité extraordinaire avec laquelle tout le plan est mené. Cela ne peut
être que le fait d'une in telligence
remarquable, extraordinaire et subversive.
De nos
jours, la franc‑maçonnerie n'a jamais été aussi puissante et son influence
aussi étendue. Le nombre des francs‑maçons et
leur audace croissent d'une manière invraisemblable. Ils tiennent maintenant
leurs réunions en plein jour puisqu'ils n'ont plus rien à
redouter des gouvernements qui les soutiennent et qui sont truffés
des leurs. Ils n'ont plus besoin de se cacher.
Sans doute se réunissent‑ils encore discrètement pour discuter de leur
stratégie, dresser leurs plans,
prendre leurs grandes décisions. Mais leur existence, ils ne la dissimulent
plus. A présent même, ils n'attaquent plus ou
vertement l'Eglise, ce qui est facilement compréhensible puisque
l'Eglise elle‑même réalise ce à quoi ils voulaient parvenir.
On di rait presque que, maintenant, l'Eglise s'est mise
au service de la maçonnerie, que jadis elle condamnait !
Léon
XIII, lui, était net, catégorique et affirmait avec vigueur
"II n'y a pas d'entente possible
entre le christianisme et la franc maçonnerie". Mais, de nos jours,
on a cru bien faire en pratiquant un faux œcuménisme aussi avec la franc‑maçonnerie.
Alors la franc‑maçonnerie est très satisfaire. Elle se dit ça y est,
maintenant l'Eglise adopte nos pensées, nos désirs, il n'y a plus de problèmes
avec elle.
Léon XIII a daté du 20 avril 1884, l'encyclique Humanum
genus sur la secte des francs‑maçons.
Elle est intitulée De secta
massonum. Le pape ne se borne
pas à tenir un langage occasionnel, puisqu'il a intitulé ce document: "De
la secte des francs‑maçons".
La cité
de Satan
La première considération qui apparaît dans le prologue
du texte pontifical est que le pape Léon XIII prend pour image l'opposition
faite par saint Augustin dans La Cité de Dieu, entre les deux cités, et qui est souvent employée
dans les Exercices spirituels de saint Ignace. Le genre humain s'est partagé
entre deux camps ennemis.
"Depuis que par la jalousie du démon le genre humain s'est misérablement
séparé de Dieu, auquel il était devenu redevable de son appel à l'existence
et des dons surnaturels, il s'est partagé entre deux camps ennemis, lesquels
ne cessent pas de combattre, l'un pour la vérité et la vertu, l'autre pour
tout ce qui est contraire à la vertu et à la vérité. Le premier est le royaume
de Dieu sur la terre ; à savoir la véritable Eglise de Jésus‑Christ
(...) le second est le royaume de Satan".
C'est une description simple et limpide à laquelle le pape s'est livré et
qui poursuit
"Ces deux royaumes, saint Augustin les a vus et décrits avec une grande
perspicacité sous la forme de deux cités opposées l'une à l'autre, soit par
les lois qui les régissent, soit par l'idéal qu'elles poursuivent. Il a mis
en relief le principe constitutif de chacune d'entre elles".
II
cite saint Augustin
"Deux
amours ont donné naissance à deux cités: la cité terrestre procède de l'amour
de soi porté jusqu'au mépris de Dieu (l'amour de soi, l'égoïsme, donc la cité
de l'égoïsme), la cité céleste procède de l'amour de Dieu porté jusqu'au mépris
de soi ".
C'est donc exactement l'opposé. Pour l'amour de Dieu nous nous méprisons nous‑mêmes,
le chrétien se méprise, au contraire Satan porte l'amour de soi, l'égoïsme,
jusqu'au mépris de Dieu, à s'opposer à Dieu.
"Dans toute la suite des siècles qui nous ont précédés, ces deux cités
n'ont pas cessé de lutter l'une contre l'autre, en employant toutes sortes
de tactiques avec les armes les plans diverses".
Le pape décrit ces deux cités en s'appuyant sur le texte de saint Augustin
et sur l'expérience, sur l'histoire de l'Eglise.
"A notre époque, les fauteurs de mal paraissent s'être coalisés dans
un immense effort, sous l'impulsion et avec l'aide d'une société répandue
en un grand nombre de lieux et fortement organisée, la société des francs‑rnaçons".
Ainsi, Léon XIII caractérise la société des francs‑maçons comme étant
la cité du démon, la cité de Satan. Et il précise leurs buts.
"Ceux‑ci, en effet, ne prennent plus la peine de dissimuler leurs
intentions. C'est publiquement et à ciel ouvert qu'ils entreprennent de ruiner
la sainte Eglise, afin d'arriver si c'était possible, à dépouiller complètement
les nations chrétiennes des bienfaits dont elles sont redevables au Sauveur
Jésus‑Christ".
Devant cet état de fait, devant cette situation, le pape conclut que c'est
son devoir, en tant que Pontife suprême de dénoncer le péril.
"C'est notre devoir de signaler le péril, de dénoncer les adversaires,
d'opposer toute la résistance possible à leurs projets et à leur industrie
(...) afin que le royaume de Jésus‑Christ, que Nous sommes chargé de
défendre, non seulement demeure debout et dans toute son intégrité, mais fasse
par toute la terre de nouveaux progrès, de nouvelles conquêtes".
Condamnations
antérieures
Alors le pape s'appuie sur le magistère antérieur et constate : je ne suis
pas le seul à l'avoir fait d'ailleurs, à avoir poussé ce cri d'alarme devant
l'attaque des ennemis, devant cette attaque terrible, tous les papes Nos prédécesseurs
l'ont fait. Et il fait référence à tous les documents que nous avons cités
et étudiés, ceux de Clément XII, de Benoît XIV de Pie VII.
Et cela est très important. Car lorsqu'un pape dénonce ou affirme quelque
chose en s'appuyant sur le passé, cela renforce sa propre parole. C'est cela
qui fait la force de lEglise, de se référer à ce que tant de papes ont déjà
dit et redit sur le même sujet : "Et moi, je confirme à nouveau ce qu'ont
dit tous mes prédécesseurs".
Une doctrine qui est enseignée de cette manière, une condamnation qui est
faite dans ces conditions paraît être infaillible.
Parce que c'est vraiment le magistère de l'Eglise qui se manifeste d'une manière
beaucoup plus nette que lorsque le pape émet simplement une opinion personnelle.
Dans le cas présent, Léon XIII n'exprime pas une opinion personnelle, il fait
appel à tout ce que les papes ont dit précédemment. II rappelle que les papes
jugeant de leur devoir de dénoncer, ont pris des mesures d'excommunication,
des peines canoniques contre les francs‑maçons et cette secte.
"Irrités de cette mesure et espérant qu'ils pourraient soit par le dédain,
soit par la calomnie, échapper à ces condamnations ou en atténuer la force,
les membres de la secte accusèrent les papes qui les avaient portées tantôt
d'avoir porté des sentences iniques, tantôt d'avoir excédée la mesure dans
les peines infligées. C'est ainsi qu'ils s'efforcèrent d'éluder l'autorité
ou de diminuer la valeur‑ des Constitutions promulguées par Clément
XII, Benoît XIV, Pie VII et Pie
IX ".
Ensuite, non seulement Léon XIII s'appuyé sur ce qu'ont fait les papes, mais
sur ce qu'ont fait aussi les chefs d'Etat, disant que beaucoup parmi eux ont
pris des mesures pour empêcher ces sectes d'exister dans leurs Etats et il
les énumère
"C'est cela qui s'est pratiqué en Hollande, en Autriche, en Suisse, en
Espagne, en Bavière, en Savoie et dans quelques parties de l'Italie.
"Il importe souverainement de faire remarquer combien les événernents
donnèrent raison à la sagesse de nos prédécesseurs".
Progrès
de la franc‑maçonnerie
Le pape est amené à constater que malgré l'intervention de ses prédécesseurs,
malgré l'intervention des chefs d'Etat...
"En l'espace d'un siècle et demi la secte des francs‑maçons a fait
d'incroyables progrès".
On le constate de nos jours, malheureusement, malgré tout ce que les papes
ont pu faire, les francs‑maçons ont réalisé de tels progrès qu'il n'y
a plus maintenant un chef d'Etat qui s'oppose à la franc‑maçonnerie.
Il n'y a plus pour apporter un soutien à l'action des papes, celui des chefs
d'Etat qui avaient interdit la maçonnerie dans leur pays.
Il y a bien eu un petit essai au moment de la dernière guerre par le maréchal
Pétain, ou par Salazar, qui ont pris quelques mesures contre la franc‑maçonnerie.
Mais ce ne furent que quelques tentatives sporadiques émanant de personnalités
qui ont surgi dans des circonstances particulières, à cause de l'anarchie
ou de la guerre et qui ont senti où était le mal, constatant que parmi les
francs‑maçons il y avait des gens qui trahissaient la patrie. Alors
ils ont sévi contre eux, mais cela n'a pas duré. Depuis ta fin de la deuxième
guerre mondiale et la disparition de ces quelques personnalités les plus courageuses,
c'est terminé. Il n'y a plus de résistance. Au contraire, ce sont maintenant
les francs‑maçons qui dirigent tous les pays, même ceux soi‑disant
catholiques.
"Et c'est pourquoi il y a lieu de concevoir pour l'avenir les craintes
les plus sérieuses ".
Le pape voyant clair, craignant pour l'avenir, il assure que le danger est
grave.
"Non certes en ce qui concerne l'Eglise, dont les solides fondements
ne sauraient être ébranlés par les hommes".
S'il avait assisté à ce qui se passe maintenant, quelles auraient été ses
réactions ? Bien sûr, il aurait affirmé que l'Eglise ne peut pas être ébranlée,
comme il l'a dit, mais nul ne pouvait imaginer, avant le concile Vatican 11,
que l'Eglise pourrait être investie par ses ennemis, par les francs‑maçons,
et que la franc‑maçonnerie parviendrait à avoir des adeptes ou des affiliés,
jusque parmi les cardinaux de la Curie romaine !
"Mais par rapport à la sécurité des Etats, au sein desquels sont devenues
trop puissantes ou cette secte de la franc‑maçonnerie, ou d'autres associations
similaires... "
Alors le pape déclare : il faut que je parle, je dois parler, je ne peux pas
me taire devant cette conjuration générale.
"Aujourd'hui à l'exemple de nos prédécesseurs, Nous avons résolu de fxer
directement Notre attention sur la société maçonnique, sur l'ensemble de sa
doctrine, ses projets, ses sentiments et actes traditionnels, afin de mettre
en une plus éclatante évidence, sa puissance pour le mal et d'arrêter dans
ses progrès la contagion de ce funeste plan".
C'est une nouvelle tentative que le pape entreprend pour tenter d'empêcher
la secte d'avoir une trop grande influence.
Il parle d'abord de son existence. Il revient ensuite sur les buts de la franc‑maçonnerie
et donne, en les expliquant, les conséquences déplorables de ces doctrines
et enfin il propose des remèdes.
D'abord l'existence de ces sectes ; ensuite le but dans la perspective duquel
elles agissent. Troisièmement : la description de leurs principes. Quatrièmement
les conséquences de ces principes ; cinquièmement le jugement à porter sur
eux et enfin les remèdes à apporter contre eux.
De nombreuses sectes, mais une seule maçonnerie
"Il y a un grand nombre de sectes qui diffèrent les unes des autres par
le nom, les rites, la forme, l'origine, mais elles se ressemblent et elles
sont d'accord entre elles par l'analogie du but et des principes essentiels.
En fait elles sont identiques à la franc‑maçonnerie qui est pour toutes
comme le point central d'où elles procèdent et où elles aboutissent.
"Bien qu'à présent elles aient l'apparence de ne pas aimer à demeurer
cachées, bien qu'elles tiennent des réunions en plein jour et sous les yeux
des tous, bien qu'elles publient leurs journaux, toutefois si on va au fond
des choses on peut voir qu'elles appartiennent à la famille des sociétés clandestines
et qu'elles en gardent les allures. A cette loi du secret concourt merveilleusement
la division faite entre les associés des droits, des officines et des charges,
la distinction hiérarchique, savamment organisée. La plupart du temps ceux
qui sollicitent l'initiation doivent promettre, bien plus, ils doivent faire
le serment solennel de ne jamais révéler à personne, à aucun moment, d'aucune
manière, les noms des associés, les notes caractéristiques et les doctrines
de la société. C'est ainsi que sous les apparences mensongères, et en faisant
de la dissimulation une règle constante de conduite,
i comme autrefois les manichéens, les francs‑maçons n'épargnent aucun
effort pour se cacher et n'avoir d'autres témoins que leurs complices ".
Le pape, constatant l'existence de ces sociétés, fait ressortir qu'elles font
en sorte de ne pas paraître ce qu'elles sont.
"Ils jouent le personnage d'amis des lettres ou de philosophes réunis
ensemble pour cultiver les sciences. Ils ne parlent que de leur zèle pour
les progrès de la civilisation, de leur amour pour le pauvre peuple. A les
en croire, leur seul but est d'améliorer le sort de la multitude et d'étendre
à un plus grand nombre d'hommes les avantages de la société civile... "
"Or vivre dans la dissimulation et vouloir être enveloppé de ténèbres
; enchaîner à soi par les liens les plus étroits et sans avoir préalablement
fait connaître à quoi ils s'engagent, des hommes réduits ainsi à l'état d'esclaves
; employer à toute sorte d'attentats ces instruments passifs d'une volonté
étrangère, armer pour le meurtre des mains desquelles on s'assure l'impunité
du crime, ce sont là de monstrueuses pratiques condamnées par la nature elle‑même
".
Le pape insiste sur le secret dont s'entourent les sectes et dénonce les crimes
commis par ces sociétés, dont il constate les fruits qui font apparaître ce
qu'elles sont en réalité.
Le pacte
fondamental de la maçonnerie
Puis, dans une phrase clairvoyante et dont il faut se souvenir,
Léon XIII précise catégoriquement le but que se sont assigné les francs‑maçons.
"Leur but : il s'agit pour eux de détruire de fond en comble toute la
discipline religieuse et sociale qui est née des institutions chrétiennes,
et de lui en substituer une nouvelle façonnée à leurs
idées et dont les principes fondamentaux et les lois sont empruntés au naturalisme".
Changer complètement les fondements de notre société, les francs‑maçons
l'ont entrepris et malheureusement réalisé avec une diabolique habileté. Ce
changement d'état d'esprit, de mentalité, de vision des choses, ils l'ont
inculqué peu à peu par le truchement des écoles, par l'enseignement dont ils
se sont emparé, par une pénétration insidieuse qui fait que les gens ne s'en
aperçoivent pas et boivent le poison à petites doses pendant des années et
des années. Le résultat est qu'ils finissent par changer de mentalité.
De même, les changements et les réformes qui ont été opérés par et après le
concile Vatican Il et qui ont été inspirés par un modernisme et un faux œcuménisme
qui tiennent leur origine dans la doctrine maçonnique, sont des réformes empoisonnées.
Je ne cesse de le répéter : ces réformes sont empoisonnées, parce qu'elles
ne distillent plus l'esprit catholique. Elles donnent un autre esprit. Ceux
qui s'habituent à vivre ces réformes et à les employer n'ont plus l'esprit
catholique ; ils ont perdu l'esprit de pénitence, l'esprit de sacrifice, de
renoncement. Ils n'ont plus l'esprit, ni le respect, de la hiérarchie, de
l'autorité, ni celui des uns et des autres. Tout cela est évident.
Une des belles choses que nous enseigne la liturgie ‑ celle de toujours
‑c'est le respect. Parce que le respect du sacré, c'est le respect de
Dieu, Dieu présent dans la liturgie, présent dans les personnes et dans les
choses. C'est cela que l'on appelle le sacré. Cette désacralisation, cette
vulgarité que l'on rencontre dans les rites actuels, font qu'il n'y a plus
de respect. Plus de respect pour l'Eucharistie, plus de respect des personnes,
de la hiérarchie. La fleur de la politesse chrétienne, c'est le respect. Tout
chrétien respecte Dieu Dieu présent dans les personnes, dans les choses, Dieu
présent dans la réalité des sacrements ; toutes les magnifiques cérémonies
que règle la liturgie sont imprégnées de signes de respect de Dieu, par les
génuflexions, les inclinaisons, mais aussi par des marques de respect à l'égard
des objets qui interviennent dans le déroulement de nos offices, les vases
sacrés par exemple, ou par le baisement de l'étole par le prêtre avant de
la revêtir, etc.
Nous devons aussi respecter notre prochain, nous respecter les uns les autres.
Il n'y a rien de plus désagréable que cette vulgarité qui s'est répandue et
qui fait que l'on se traite mutuellement sans aucun respect et qui voudrait
faire des hommes, une espèce de troupeau méconnaissant les réalités. Nos âmes
sont les temples du Saint‑Esprit. Donc il y a quelque chose d'eminemment
sacré en nous, dans nos personnes, dans nos âmes, que les autres doivent respecter
comme nous devons respecter celles des autres. La vulgarité doit être bannie
dans nos rapports avec les autres, car nous ne devons pas nous comporter avec
les personnes qui nous entourent, comme s'il n'y avait rien de sacré en elles.
Les principes
fondamentaux
de la franc‑maçonnerie
Après avoir exposé clairement le but de la franc‑maçonnerie, qui est
de mettre tout en œuvre pour parvenir à la destruction de l'Église et de la
religion catholique, Léon XIII dresse l'exposé des principes fondamentaux
qui la régissent.
II ne suffit pas, dit‑il, d'examiner leurs actes, mais il faut rechercher
les principes qui commandent leur action.
"En outre si des circonstances particulières de temps ou de lieux peuvent
persuader à certaines fractions de demeurer en deçà de ce qu'elles souhaiteraient
défaire ou de ce que font d'autres associations, il n'en faut pas conclure
pour cela que ces groupes soient étrangers au pacte fondamental de la maçonnerie
; ce pacte demande à être apprécié moins par les actes accomplis et par leurs
résultats que par l'esprit qui l'anime et par ses principes généraux".
C'est très important, parce que plus que ne l'ont fait ses prédécesseurs,
Léon XIII cherche à approfondir davantage les principes de la maçonnerie.
Les papes du début du XIXe siècle ont surtout insisté sur le secret dont s'entourent
les francs‑maçons et sur les crimes qu'ils commettent, mais ils ont
moins approfondi les principes.
Premier principe le naturalisme
"Le premier principe des naturalistes, c'est qu'en toutes choses la nature
ou la raison humaine doit être maîtresse et souveraine ".
Le premier principe pour lequel le pape condamne la franc‑maçonnerie,
c'est le naturalisme. A première vue on pourrait penser qu'après tout, le
naturalisme croit en la nature humaine et qu'il s'y conforme. Ce serait une
erreur, car il ne faut pas oublier que la nature humaine a été traumatisée,
blessée par le péché originel.
La foi nous enseigne que le péché originel étant intervenu dans l'histoire
de l'humanité avec la faute d'Adam et Eve, il a non seulement privé les personnes
de la grâce, mais a même détruit, désor
ganisé et désordonné la nature. Il faut toujours se le rappeler. C'est absolument
indispensable pour bien comprendre ces problèmes, que saint Thomas a exposés
d'une manière très explicite : la nature a été blessée de quatre manières
par le péché originel. Et ces blessures, dit saint Thomas, demeurent même
après que la grâce nous a été donnée. Elles demeurent dans la nature. Si le
péché originel, en tant que péché, nous est enlevé par la grâce du baptême,
il laisse des traces, des suites dans la nature.
Ces quatre blessures sont : premièrement, la blessure de l'ignorance. C'est
la vertu de prudence qui est blessée par l'ignorance et elle n'est plus ce
qu'elle devrait être. Quelqu'un qui est ignorant, qui a une tendance à l'erreur,
n'est pas prudent. Étant mal éclairé, il se trompe forcement.
Les quatre vertus cardinales sont blessées. La vertu de prudence l'est par
l'erreur.
La vertu de justice, qui est la vertu fondamentale et capitale de notre vie
humaine, rend à Dieu ce qui lui est dû et au prochain ce qui lui est dû et
à nous‑mêmes. Cette vertu est blessée par la blessure de la malice.
Il y a une tendance qui demeure en nous à faire le mal, à ne pas rendre à
Dieu ce qui lui est dû, à ne pas rendre au prochain ce qui lui est dû et à
ne pas rendre à nous‑mêmes, à notre propre personne, ce qui lui est
dû non plus.
Il y a donc une tendance au mal. C'est tellement évident que l'on n'a même
pas besoin de connaître ces principes pour les constater. On le voit malheureusement
chez les hommes : il y a une tendance à la malice.
Troisième blessure : c'est la vertu de force qui est blessée par la faiblesse.
L'homme ne résiste pas à la tentation, il a été affaibli, ses forces ont été
diminuées. Sa vertu de force est amoindrie face aux difficultés de la vie.
Enfin quatrième blessure : celle qui atteint la vertu de tempérance : c'est
la concupiscence. L'homme est tenté par la jouissance des biens de ce monde,
c'est‑à‑dire l'argent, la volupté et il a besoin de la vertu de
tempérance pour modérer l'attrait qu'il ressent face à la concupiscence. Il
est aux prises avec le désir de satisfaire ces plaisirs. Pour cela il lui
faut de l'argent. L'homme est aussi attiré par l'orgueil, par la soif des
honneurs, nous le savons bien.
Alors ces quatre blessures demeurent. Quand on parle justement du naturalisme,
les francs‑maçons, les modernistes, les libéraux ont toujours tendance
à dire : non, la nature est bonne, par conséquent tout ce que l'Eglise qualifie
de désordres, pour nous ce ne sont pas des désordres, c'est très bien. Tous
les plaisirs que l'homme recherche, il faut les lui donner, c'est la nature
qui le demande. Donc, il y a droit et il doit les satisfaire. Mais si nous
admettons au contraire que l'homme est blessé dans sa nature, qu'il est désordonné,
alors si on l'encourage dans cette voie de désordre, nous voyons où cela va
le conduire !
Or, quand nous dénonçons la faiblesse de l'homme, on nous rétorque : mais
non il n'est pas faible. Les
désirs qu'il éprouve ne sont pas un signe de faiblesse. Il a droit et il a
besoin de ces plaisirs. Et ensuite on évoque les droits que possède l'homme
d'épanouir sa nature. La seule limite est qu'il ne trouble pas l'ordre public.
C'est la seule limite que ceux qui nous contredisent et nous combattent mettent
à la liberté des hommes, à la liberté de tous les instincts mauvais qui sont
en lui : c'est de ne pas troubler l'ordre public. Ne pas avoir de problèmes
avec les gendarmes et encore, bien souvent, c'est aux gendarmes que l'on donne
tort.
Voilà où nous conduit notre société basée sur ces faux principes, qui sont
ceux de la franc‑maçonnerie. C'est cela leur naturalisme.
Et lorsque les papes condamnent le "naturalisme", comprenons bien,
ce ne sont ni la nature elle‑même, ni la nature humaine qu'ils désignent,
mais l'erreur qui consiste à dire que la nature n'a pas été blessée par le
péché originel et par conséquent que tout ce qui est désordonné dans notre
nature est tout à fait naturel et que l'on n'a pas le droit de s'opposer aux
instincts qui sont dans l'homme. C'est cela qu'ils appellent les droits de
l'homme : on a droit à la liberté. Les libéraux ont aussi cette tendance à
s'aligner sur les doctrines de la franc‑maçonnerie.
Le rationalisme
"Or, poursuit le pape,
le premier principe des naturalistes c'est qu'en
toutes choses la nature, ou la raison humaine, doit être maîtresse et souveraine.
"Donc ils nient que Dieu soit l'auteur d'aucune révélation. Pour eux,
en dehors de ce que peut comprendre la raison humaine, il il, v a ni dogme
religieux, ni vérité, ni maître en la parole de qui, au nom de son mandat
officiel d'enseignement, on doit avoir foi".
Donc, dans la société où nous vivons maintenant, on ne veut plus ni Dieu,
ni maître. C'est ce qui explique toutes les transformations qui sont intervenues
dans l'enseignement qui est prodigué de nos jours dans toutes les nations.
L'enseignement n'est plus magistériel, dispensé par quelqu'un qui enseigne,
mais ce sont des colloques, des dialogues, parce que l'on ne peut plus supporter
l'idée de voir imposer une vérité. C'est bien ce que dit le pape
"... il n'y
a pas de maître en la parole de qui, au nom de son mandat officiel d'enseigner,
on doit avoir foi ".
On ne doit plus avoir foi en aucun maître, parce que le maître ne peut pas,
n'a pas le droit d'imposer et de dire la vérité, ce que l'on doit penser ou
croire. Non, chacun peut penser ce qu'il veut. C'est soi‑disant du choc
des idées que jaillit la lumière. Chacun exprime sa pensée comme il le pense
et on progresse comme cela dans la science. C'est absolument absurde ! C'est
ce qui, actuellement et de plus en plus, contribue à faire le néant de la
vraie science, parce que l'on ne veut plus se soumettre à un enseignement
du magistère,
c'est‑à‑dire qui vient de toute une tradition et d'une vérité
déjà acquise.
On est cependant bien obligé d'agir d'une autre façon dans les sciences physiques,
chimiques, mécaniques ou autres. Chacun ne peut pas faire à son idée. Il y
a bien des règles à suivre. Si on ne les suivait pas cela déboucherait sur
une belle folie, que les voisins exploiteraient.
Imaginons, par exemple, qu'entre les deux super‑puissances que sont
les Etats‑Unis et la Russie, qui ont accumulé un armement fantastique,
il y en ait une des deux qui dise: non, non, il n'y a plus de règlement mécanique
ou de balistique, c'est fini, chacun peut penser ce qu'il veut de ces problèmes,
tandis que l'autre continuerait à se préparer à détruire son rival, qui n'aura
plus rien à lui opposer, ayant abandonné tous les principes qui lui permettaient
de construire ses armements, ses canons, ses bombes, ses missiles sol-air,
air-sol et ainsi de suite, cela créerait un beau gâchis. Il faut donc bien
suivre les principes, enseigner les choses telles qu'elles sont. On ne peut
pas avoir chacun son opinion là‑dessus.
Alors pour la religion, pour la philosophie, chacun pourrait avoir son opinion,
sans que cela ait d'importance ? Non, car les conséquences sont graves. C'est
ainsi que l'on tue l'intelligence qui n'a plus de base, plus de vérité, plus
rien. C'est comme cela que l'on constate que même dans les universités, règne
une invraisemblable ignorance, même sur des principes élémentaires.
Erreur
du naturalisme
et du rationalisme
Il faut bien comprendre ce qu'est le naturalisme. C'est un terme que l'on
retrouve souvent sous la plume des papes, dans leurs encycliques, dans tous
les documents pontificaux. Les papes parlent constamment du naturalisme. Il
est donc nécessaire de bien comprendre le sens qu'ils y attachent, c'est‑à‑dire
l'erreur opposée à la doctrine de l'Eglise sur la nature déséquilibrée, désordonnée
par les conséquences du péché originel, même après qu'il ait été pardonné.
Nous‑mêmes le sentons bien. Nous éprouvons une attraction vers des désirs
qui ne sont pas normaux et que nous devons réprimer par la vertu, vertu de
tempérance, de force, de justice, de prudence.
Si nous étions d'accord avec les francs‑maçons qui considèrent qu'il
est bon pour l'homme de satisfaire tous ses instincts, jugeant qu'ils sont
bons, où irions‑nous ? On voit déjà les résultats : le désordre, la
drogue, la corruption, la ruine et le suicide. En définitive cette théorie
finit par conduire au suicide, au néant, même physique. Voila où on en est
arrivé : le nombre des jeunes gens qui se suicident ne cesse de croître.
Refus de
la révélation et de l'ordre surnaturel,
mais aussi
de l'ordre naturel
Nous devons posséder une bonne connaissance de la nature telle que l'Eglise
l'enseigne et aussi de ce naturalisme et de ce rationalisme professés par
ceux qui sont dans l'erreur et qui contredisent la vérité et la foi. En refusant
toute vérité, tout dogme religieux, par le fait même les francs‑maçons
veulent annihilier l'Eglise, la supprimer. Or qu'est‑ce que l'Eglise,
sinon la société fondée par Notre Seigneur Jésus‑Christ qui l'a chargée
d'une mission, que rappelle Léon XIII.
"La mission de l'Eglise catholique, consiste à recevoir dans leur plénitude
et à garder dans une pureté incorruptible les doctrines révélées de Dieu aussi
bien que l'autorité établie pour les enseigner avec les autres secours donnés
du Ciel en vue de sauver les hommes ".
C'est‑à‑dire la grâce, les sacrements, la prière, le Saint Sacrifice
de la messe, voilà les secours. C'est cela le rôle du magistère de l'Eglise,
le but de l'Eglise. On n'a pas le droit de changer ses dogmes, on n'a pas
le droit de les modifier. S'ils n'existent plus, comme disent les francs-maçons,
s'il n'y a plus de doctrine saine et immuable, alors la vérité devient relative.
Il n'y a plus de vérité absolue concernant la nature, l'homme et concernant
Dieu.
Eglise et maçonnerie : un dialogue
impossible
Et cela n'a pas changé, car la franc‑maçonnerie n'a renoncé à aucun
de ses objectifs. Depuis le Concile tout était devenu possible : l'union avec
la franc‑maçonnerie, cela faisait partie de la soi‑disant "ouverture"
au monde annoncée par Vatican II, qui était un concile de dialogue, d'œcuménisme.
Or, récemment, les évêques allemands ont publié un document dont la lecture
est particulièrement éloquente
"Au cours des années 1974‑1980, par mandat de la conférence épiscopale
et des grandes loges unies de l'Allemagne, ont eu lieu en Allemagne des entretiens
officiels entre l'Eglise et la franc-maçonnerie. La conférence épiscopale
allemande avait chargé le groupe du colloque, premièrement de vérifier les
changements survenus à l'intérieur de la franc‑maçonnerie ; deuxièmement
d'examiner la compatibilité d'une double appartenance à l'Eglise catholique
et à la franc‑maçonnerie... "
On croit rêver quand on lit des choses pareilles, tant cela est invraisemblable
!
... troisièmement, dans le cas d'une réponse affirmative à la précédente demande,
de préparer l'opinion publique au changement de situation par des initiatives
publicitaires... "
Les évêques allemands étaient prêts à faire de la publicité en faveur de l'union
entre l'Eglise et la franc‑maçonnerie. On allait donc très loin dans
l'ouverture, comme l'a écrit Ploncard d'Assac. Pourquoi ? Les évêques allemands
le disent:
"Parce que l'Eglise s'est ouverte au dialogue avec tous les hommes de
bonne volonté, au colloque avec tous les groupes qui s'y montreraient disposés".
"D'autre part, Paul VI avait insisté, établissant plus amplement les
fondements théoriques, indiqué les orientations pratiques, les divers cercles
avec lesquels il convenait d'entreprendre le dialogue, la liberté convenablement
comprise de l'homme dans sa vie privée, religieuse et publique rappelée par
l'Eglise de manière spéciale dans Vatican 11, et offrait une base de dialogue
avec la franc‑maçonnerie".
Ce qu'ont expliqué les évêques allemands est très grave. Car la liberté religieuse
instaurée, presquà la manière de la maçonnerie permettrait la liberté de croire,
la liberté de toutes les religions, donc la liberté de l'erreur. La franc‑maçonnerie
est tout à fait d'accord avec cela, dans la mesure où celle‑ci dans
son attitude humaniste se considère comme tenue de s'engager en faveur de
la liberté humaine, ce qui vaut par analogie en faveur des droits de l'homme.
Évidemment, droits de l'homme de faire tout ce qu'il veut, d'avoir tout ce
qu'il désire .
Les évêques allemands suggèrent aussi que la franc‑maçonnerie allemande
entretienne des institutions d'aide fraternelle et de bienfaisance ce qui
permettrait de trouver certains points de contact avec une Église à laquelle
appartient essentiellement une vocation à la charité.
"Enfin, poursuivent les évêques allemands, il y avait le fait que dans
notre temps désorienté, certaines personnes trouvent dans les symboles et
dans le rite de la franc‑maçonnerie certaines satisfactions de besoins
insatisfaits, comme dans l'Eglise catholique symboles, rites, ont toujours
leurs places, on pouvait présumer que là encore il pourrait se trouver un
point de contact et une base de compréhension... "
Entre les rites de la maçonnerie, diaboliques, sataniques et de la liturgie
de l'Eglise ! Que cela se trouve dans un document officiel d'un épiscopat,
c'est inconcevable !
Heureusement, ils corrigent un peu cela, d'une certaine manière, comme le
relève très bien Ploncard d'Assac : "C'est ici que le document de la
conférence épiscopale va prendre toute sa valeur et toute sa force, jusqu'ici
on l'a vu, il semblait fait de toutes les naïvetés, illusions et compromissions
auxquelles nous avons assisté. Or brusquement le document change de ton, heureusement.
"Cette opinion sur la double appartenance à l'Eglise et à la franc‑maçonnerie
a été favorisée par une manière complètement fausse d'interpréter le dernier
concile, qui s'est manifestée à la suite de campagnes de presse dont on vient
de parler".
Alors
en fait, qu'en est‑il ?
"Pour parvenir à un examen vraiment adéquat des problèmes il était au
contraire nécessaire d'étudier l'essence de la franc‑maçonnerie ".
Alors,
les évêques ont étudié ce rituel officiel
"Et voilà ce que l'on a découvert : le fait que la franc‑maçonnerie
mette en question l'Eglise de manière fondamentale n'a pas changé. Il suffit
de lire le programme maçonnique Thèses
pour l'an 2000, publié cette année
peu après la conclusion du colloque. On y nie par principe la valeur de la
vérité révélée (donc on nie
le dogme) et au moyen de cet indifférentisrne,
se trouve écartée dès le départ, toute religion révélée".
Ce
sont exactement les mêmes mots que Léon XIII a employés il n'y a plus, pour
les francs‑maçons, de religion révélée.
"Dès la première thèse, indubitablement la plus importante, il n'existe
pas de système de nature philosophiquement religieux qui puisse revendiquer
une obligation exclusive ".
Donc, selon leur thèse, il n'y a pas de religion qui puisse se dire exclusivement
être la vérité.
"Dès lors, quel que soit le ton employé, même si l'on n'en est plus aux
outrages, même si l'Eglise sait aujourd'hui qu'elle est tenue de collaborer
avec d'autres communautés religieuses, il ne doit pas en résulter l'impression
que l'Eglise n'aurait aucun motif de tenir pour dépassée son attitude de mise
en garde et de refus, vis‑à‑vis de la franc‑maçonnerie ".
La franc‑maçonnerie n'a pas changé
"Donc, dès que l'Eglise catholique s'est mise à examiner la teneur des
trois premiers grades maçonniques, elle a dû constater des oppositions fondamentales
et insurmontables ; la franc‑maçonnerie n'a pas changé dans son essence.
D'ailleurs la vision que les francs‑maçons ont du monde est une vision
relativiste.
"Le lexique international des francs‑maçons reconnu comme une source
objective affirme à ce sujet : la franc‑maçonnerie est vraiment la seule
institution qui ait réussi à se maintenir dans le temps, dans une large mesure,
libre des dogmes, idéologies et praxis. La franc‑maçonnerie peut être
considérée comme un
mouvement qui vise à recueillir les hommes d'orientation relativiste pour
la promotion de l'idéal humaniste. Un tel subjectivisme ne peut s'harmoniser
avec la foi dans la parole de Dieu, révélée ".
Les francs‑maçons nient la possibilité d'une connaissance objective
de la vérité. Les évêques allemands poursuivent leur constat
Le refus
d'une vérité objective unique
"Au cours des colloques, on a notamment rappelé la sentence du franc‑maçon
Lessing : " Si Dieu tenait renfermée dans sa main droite toute la vérité
et dans sa main gauche la seule quête vivante de la vérité, même en ajoutant
que je me suis toujours éternellement trompé, et qu'il me dise : choisis,
je me jetterais avec humilité à sa gauche ".
Donc si Dieu tenait la vérité dans une main et de l'autre la recherche de
la vérité, lui Lessing, il irait vers la main gauche pour demeurer en quête
de la vérité et non pas pour recevoir la vérité. C'est incroyable !
"Et je lui dirais, à Dieu, ajoute le maçon, Père damne‑moi,
la pure vérité est pour toi seul... moi, je veux toujours être en recherche
de la vérité. Je choisis la recherche de la vérité".
C'est effrayant ce rejet de la vérité et de dire : que le Bon Dieu me damne,
plutôt que de me donner la vérité !
Remarquons cependant que si l'on étudie attentivement les textes qui sont
issus de Vatican Il, soit Gaudium et spes, soit Digtutatis
humanae sur la liberté religieuse,
on retrouve cette même conception : nous sommes tous ensemble, toutes les
religions sont en recherche de la vérité. Comment l'Eglise a‑t‑elle
pu affirmer des choses pareilles ? Nous ne sommes pas en recherche de la vérité.
Nous l'avons. Tout cela, c'est pour plaire aux francs‑maçons, aux protestants
qui, eux aussi, partagent les théories maçonniques exprimées dans le relativisme.
"La relativité de toute vérité représente la base de la franc‑maçonnerie,
poursuivent les évêques allemands, (il n'y a donc pas de vérité objective), ce qui entraîne un refus par principe de toutes les positions dogmatiques.
Un tel concept de la vérité n'est pas compatible avec le concept catholique
de la vérité, ni du point de vue de la théologie naturelle, ni de celui de
la théologie de la révélation.
"La conception de la religion chez les.francs‑maçons est relativiste,
toutes les religions sont des tentatives concurrentes d'exprimer la vérité
divine".
Voilà comment, aujourd'hui encore, les francs‑maçons définissent les
religions.
Heureusement, les évêques allemands ont fait preuve d'un peu de courage, en
publiant un document, qui est le premier depuis le Concile à s'exprimer aussi
clairement.
Peut‑on s'étonner alors de lire dans la Civilta cattolica, qui est publiée
à Rome, l'article d'un fameux jésuite qui, lors du Concile s'était montré
ardemment favorable au dialogue avec les francsmaçons, dans lequel il s'insurge
contre ce document émanant des évêques allemands ? Il écrit: " Oh, ça
vaut pour l'Allemagne, mais cela ne vaut pas pour ailleurs''. Et c'est cela
que l'on trouve dans la revue catholique la plus importante publiée à Rome
et qui est dirigée par des jésuites. C'est effrayant ! Il y a donc eu à partir
du Concile, une volonté de parvenir à s'entendre avec les francs‑maçons.
Or c'est impossible : ce serait la ruine de toute notre théologie, de notre
philosophie. Il ne resterait rien.
Il n'est donc pas sans intérêt d'ouvrir cette parenthèse, lorsque nous poursuivons
l'étude de ce que Léon XIII déclarait il y a bientôt cent ans. Un siècle après,
à notre époque les principes des francs‑maçons sont toujours les mêmes.
Ils n'ont pas changé: ils ne peuvent pas supporter l'Eglise.
L'Eglise s'oppose nécessairement, fondamentalement, à la franc‑maçonnerie.
Ils affirment que la vérité est relative, nous, nous disons qu'elle est objective.
Ils déclarent qu'il n'y a pas de dogmes, et nous qu'il y a une vérité révélée
et des dogmes. L'entente est donc impossible. C'est pourquoi, les francs‑maçons
continueront de tout faire, comme l'affirmait Léon XIII, pour tenter de détruire
l'Eglise, parce que, forcément, elle s'oppose à eux. Il y a une incompatibilité.
Leur principe naturaliste est en opposition formelle à la doctrine de l' Eglise.
C'est ce qu'exprime encore le pape.
"Maintenant, qu'on voit à l'œuvre la secte des francs‑maçons dans
les choses qui touchent à la religion, là principalement où soli action peut
s'exercer avec une liberté plus licencieuse : et que l'on dise si elle ne
semble pas s'être donné pour mandat de mettre à exécution les décrets des
naturalistes. Ainsi dût‑il lui en coûter un long et opiniâtre labeur,
elle se propose de réduire à rien, au sein de la société civile, le magistère
et l'autorité de l'Eglise ".
Laïcité
de l'Etat et lutte contre l'Eglise
"Tous les francs‑maçons s'appliquent à vulgariser cette conséquence
pour laquelle ils ne cessent de combattre, à savoir qu'il faut absolument
séparer lEglise de l'Etat".
En conséquence de leur naturalisme, les francs‑maçons prônent la laïcité
de l'Etat : il faut séparer l'Eglise de l'Etat, éliminer les dogmes et la
vérité objective. Après quoi, ils agiront sur l'enseignement dispensé par
l'Etat dans les écoles publiques et par les universités. Ils pourront laïciser
les intelligences et les esprits et faire enfin pénétrer leurs idées de relativisme
conduisant pratiquement à la suppression de Dieu. Et Léon XIII précise:
"Mais il ne leur suffit pas d'exclure de toute participation au gouvernement
des affaire humaines l'Eglise, ce guide si sûr et si sage, il faut encore
qu'ils la traitent en ennemie et usent de violence contre elle (...).
"On réduit presque à rien sa liberté d'action et cela par des lois qui,
en apparence, ne semblent pas trop oppressives, mais qui, en réalité, sont
expressément faites pour enchaîner cette liberté.
"Au nombre des lois exceptionnelles faites contre le clergé, Nous signalons
particulièrement celles qui auraient pour résultat de diminuer notablement
le nombre des ministres du sanctuaire et de réduire toujours davantage leurs
moyens indispensables d'action et d'existence".
Les clercs seront astreints au service militaire. La mainmise de l'Etat sur
les biens de l'Eglise privera le clergé de la possibilité de créer et de soutenir
les œuvres d'éducation ou de charité.
"Les restes des biens ecclésiastiques soumis à mille servitudes".
Deuxième
principe
L'indifférentisme
Deuxième principe des francs‑maçons : l'indifférentisme qui est pratiquement
une conséquence du naturalisme, mais qui est quand même un principe particulier.
L'indifférentisme c'est un mot qui est souvent employé dans les documents
pontificaux. Il a une signification bien précise : l'indifférentisme postule
pratiquement et propage l'idée que toutes les religions se valent, qu'il n'y
en a pas une qui vaille plus qu'une autre.
"En ouvrant leurs rangs à des adeptes qui viennent à eux des religions
les plus diverses, ils deviennent plus capables d'accréditer la grande erreur
du temps présent, laquelle consiste à reléguer au rang des choses indifférentes
le souci de la religion et à mettre sur le pied d'égalité toutes les formes
religieuses.
Or à lui seul, ce principe suffit à ruiner toutes les religions et particulièrement
la religion catholique, car, étant la seule véritable, elle ne peut sans subir
la dernière des injures et des injustices, tolérer que les autres religions
lui soient égalées".
Un tel langage n'est plus celui qui est tenu maintenant. On ne le tiendrait
plus au Vatican.
Léon XIII, lui, affirmait avec juste raison que l'on ne peut mettre au même
plan la vérité et l'erreur, ce n'est pas possible.
Troisième
principe
Négation
de l'existence de Dieu
et de l'immortalité
de l'âme
Troisième principe : la négation de l'existence de Dieu et de l'immortalité
de l'âme, principe que commente le pape
"... Ils ne gardent même plus dans leur intégrité et dans leur‑
certitude, les vérités accessibles à la seule lumière de la raison naturelle
(donc ils ne gardent plus les vérités fondamentales
de la philosophie), telles
que sont assurément l'existence de Dieu, la spiritualité et l'immortalité
de l'âme (...). Ils ne se dissimulent pas que la question de Dieu est parmi
eux une cause de grands dissentiments ".
Mais ce n'est pas parce que les francs‑maçons parlent du Grand Architecte
que cela signifie qu'ils croient à l'existence de Dieu. En définitive, pour
eux, le Grand Architecte, ce sont les forces naturelles qui soutiennent l'existence
du monde, mais cela ne signifie nullement un Dieu personnel qui a créé le
monde, qui dirige et soutient le monde dans son existence. Pas du tout, c'est
plutôt une espèce de panthéisme, comme Léon XIII le dit:
"Or, quand ce fondement nécessaire est détruit (l'existence de Dieu et l'immortalité de l'âme) il va de soi que les autres principes de l'ordre
naturel chancellent... ".
La conséquence de ces négations, c'est la disparition des vérités les plus
nécessaires à la vie.
`... L'effondrement des vérités qui sont la base de l'ordre naturel et qui
importent si fort à la conduite rationnelle et pratique de la vie, aura un
contre‑coup sur les mœurs privées et publiques, même si Nous passons
sous silence ces vertus naturelles (...) ces vertus dont nous ne trouvons
aucune trace chez ceux qui font profession d'ignorer dédaigneusement la Rédemption
du genre humain, la grâce des sacrements (...). Nous parlons simplement des
devoirs qui résultent des principes de l'honnêteté naturelle.
"Un Dieu qui a créé le monde et qui gouverne par sa Providence ; une
loi éternelle dont les prescriptions ordonnent de respecter l'ordre de la
nature (humaine) et défendent de le troubler ; une fin dernière placée pour
l'âme dans une région supérieure aux choses humaines et au‑delà de cette
hôtellerie terrestre ; voilà les sources, voilà les principes de toute justice
et honnêteté. Faites‑les disparaître (et c'est la prétention des naturalistes et des francs‑maçons) et il sera impossible de savoir en quoi consiste
la science du juste et de l'injuste, ou sur quoi elle s'appuie ".
"Quant à la morale, la seule chose qui ait trouvé grâce devant les membres
de la secte franc‑maçonnique, et dans laquelle ils veulent que la jeunesse
soit instruite avec soin, c'est celle qu'ils appellent "la morale civique",
"morale indépendante", "la morale libre", en d'autres
termes, morale qui ne fait aucune place aux idées religieuses".
On
dirait aujourd'hui "la morale permissive".
Conséquences désastreuses des principes
maçonniques
Après avoir ainsi défini les principes qui sont ceux de la franc-maçonnerie,
Léon XIII en vient aux conséquences engendrées par ces principes : ce sont
des résultats absolument déplorables.
Immoralité
publique
"Là en effet, où après avoir pris la place de la morale chrétienne, elle
a commencé à régner avec plus de liberté, on a vu promptement dépérir la probité
et l'intégrité des mœurs, grandir et se fortifier les opinions les plus monstrueuses
et l'audace des crimes partout déborder. Ces maux provoquent aujourd'hui des
plaintes et des lamentations universelles, auxquelles font parfois écho bon
nombre de ceux‑là mêmes qui, bien malgré eux, sont contraints de rendre
hommage à l'évidence de la vérité".
En lisant ce texte on pourrait croire que Léon XIII l'a écrit de nos jours,
en évoquant l'audace des crimes que relatent aujourd'hui les journaux : enlèvements,
crimes partout, ces assassinats, en France, en Espagne et ailleurs, ces bombes
qui explosent tuant des innocents... C'est abominable. "L'audace des
crimes partout déborder", c'est bien ce à quoi nous assistons. Le pape
fait alors allusion à la négation du péché originel, cause de tous ces désordres.
Négation du péché originel et société
de consommation
"La nature humaine ayant été viciée par le péché originel, et à cause
de cela, étant devenue beaucoup plus disposée au vice qu'à la vertu, l'honnêteté
est absolument impossible si les mouvements désordonnés de l'âme ne sont pas
réprimés, et si les appétits n'obéissent pas à la raison. Dans ce conflit
il faut souvent mépriser les intérêts terrestres et se résoudre aux plus durs
travaux et à la souffrance pour que la raison victorieuse, demeure en possession
de sa principauté.
"Mais les naturalistes et les francs‑maçons n'ajoutent aucune foi
à la Révélation que nous tenons de Dieu, nient que les forces du libre arbitre
soient d'une certaine façon "débilitées ou inclinées" vers le mal.
Tout au contraire, ils exagèrent la puissance et l'excellence de la nature.
Aussi voyons‑nous multiplier et mettre à la portée de tous les hommes
ce qui peut flatter leurs passions, journaux et brochures d'où la réserve
et la prudence sont bannies, représentations théâtrales dont la licence passe
les bornes, ceuvres artistiques ou s'étalent avec un cynisme révoltant les
principes de ce que l'on appelle aujourd'hui le RÉALISME; invention ingénieuse
destinée à augmenter les délicatesses et les jouissances de la vie ; en un
mot tout est mis en œuvre pour satisfaire l'amour du plaisir, avec lequel
finit par se mettre d'accord la vertu endormie".
L'homme se trouve ainsi soumis à l'esclavage des passions à tout ce que l'on
appelle aujourd'hui la société de consommation. Comment définir la société
de consommation sinon qu'elle s'engage à mettre le plus de bien matériels
possibles à la disposition des hommes et donc à les pousser à la jouissance,
à l'argent, à profiter de tout, à tout acheter.
Si encore il ne s'agissait que de mettre à la disposition des hommes des biens
honnêtes, mais ce n'est pas le cas, les choses malhonnêtes y trouvent la même
place que celles qui sont honnêtes. En définitive, tout est fait pour encourager
le péché. Ne nous étonnons donc pas de voir cette société aller vers son suicide,
vers son anéantissement.
On ne tient compte ni du péché originel, ni de la vertu, ni de la spiritualité
de l'âme, ni de tout ce qui est spirituel et qui devrait prévaloir sur les
biens matériels. Non, l'homme n'est plus qu'un corps et un objet de consommation.
Il faut le faire consommer le plus possible pour gagner le plus possible d'argent
et lui donner le plus de facilités qui le conduisent au péché.
Le communisme
esclavagiste
Cependant, là où les communistes sont parvenus au pouvoir, les peuples sont
soustraits aux avantages de la société de consommation, dont les bénéfices
vont uniquement à l'Etat. L'homme n'est plus qu'un esclave, un instrument
de travail pour l'Etat, qui ne doit manger juste ce qu'il faut pour le maintenir
en un état de santé qui lui permette encore de travailler. Tout le reste doit
aller à l'Etat,
pour servir au diable, à la franc‑maçonnerie, au communisme, pour servir
à la révolution mondiale, à la domination mondiale et à la destruction de
l'Eglise.
D'un côté, il y a l'esclavage des passions, qui, apparemment est moins grave
que celui auquel sont réduits les peuples soumis au communisme, mais dans
un certain sens, l'esclavage des passions est peut‑être rendu plus défavorable
à la spiritualité de l'âme et à la foi, à la conservation de la religion,
que l'esclavage du communisme. Ce dernier qui prive les hommes de tous les
biens qu'offre la société de consommation, les place dans un certain état
d'ascèse, de sacrifice et dans cette ambiance de sacrifice les hommes pensent
davantage et sont amenés à rechercher les biens spirituels.
C'est ce qui explique que la religion est peut‑être plus vivante et
plus réelle derrière le "rideau de fer", que du côté de l'Occident.
Parce que si on satisfait toutes les passions des hommes, il n'y a rien de
tel pour immerger leur esprit dans la jouissance de tous ces biens et en finir
avec la religion. II est sans doute plus aisé à la franc‑maçonnerie
de tenter d'arracher les hommes aux principes de la religion dans cette société
de consommation et de jouissance, qu'aux communistes vis‑à‑vis
des peuples privés des biens de ce monde et réduits à travailler comme des
esclaves. En effet, si les hommes de ces pays souffrent de l'espèce d'abrutissement
où on les maintient, on constate que, privés des biens d'ici‑bas, ils
se tournent davantage vers les biens spirituels. D'où la lutte acharnée que
les communistes mènent contre la religion pour empêcher qu'elle ne profite
de cette ascèse dans laquelle ils ont placé les hommes. Alors les professeurs
d'athéisme, dans toutes les écoles dont Dieu a été banni, poursuivent sans
relâche la lutte continuelle contre la religion.
La destruction
de la famille
par celle
du mariage
Après l'étude des principes de la maçonnerie et des résultats déplorables
qui résultent de leur application pour la vie spirituelle, pour la morale
individuelle et même politique, et avoir dénoncé aussi la criminalité, l'esclavage
des passions complètement dé
chaînées, Léon XIII aborde la question de la destruction de la famille.
"Personne en effet n'obéissant avec autant de servilité à ces habiles
et rusés personnages que ceux dont le courage s'est énervé et brisé dans l'esclavage
des passions, il s'est trouvé dans la franc‑maçonnerie des sectaires
pour soutenir qu'il fallait systématiquernent employer tous les moyens de
saturer la multitude de licence et de vices, bien assurés qu'à ces conditions
elle serait tout entière entre leurs mains et pourrait servir d'instrument
à l'accomplissement de leurs projets les plus audacieux".
Développer la corruption systématique de la population est pour les francs‑maçons
l'un des moyens les plus efficaces pour parvenir à la destruction de la famille.
"Relativement à la société domestique, voici à quoi se résume l'enseignement
des naturalistes. Le mariage n'est qu'une variété de l'espèce des contrats
; il peut donc légitimement être dissous de la volonté des contractants ".
Comme tout contrat, en principe on peut le dénoncer. Il n'y a pas de raison
pour qu'un contrat ne puisse pas se dissoudre si ceux qui l'ont conclu décident
de le rompre. Puisqu'il a été fait par la volonté des contractants, ceux‑ci
peuvent aussi le dénoncer.
Si cela s'appliquait à des actes libres, dépendant de la seule volonté des
contractants, très bien. Si le mariage est véritablement un contrat, il n'est
libre que sur le choix des personnes, pas sur les conditions dans lesquelles
il a été conclu. Les conditions du contrat ont été inscrites dans la nature
même de l'homme et de la femme. C'est Dieu Lui‑même qui dans la nature
a posé les conditions du contrat. Les hommes ne sont pas obligés de faire
ce contrat. Mais dès lors qu'ils l'ont fait, ils ne peuvent plus le détruire,
parce que les conditions dans lesquelles il a été établi manifestent qu'il
ne peut pas être rompu. Ce contrat est définitif jusqu'à la mort des conjoints.
La famille est faite pour la procréation, pour multiplier l'espèce humaine.
Donc les parents ne peuvent pas à leur gré rompre ce contrat, rupture qui
laisserait les enfants dans l'abandon. C'est ce que nous voyons depuis la
légalisation du divorce.
C'est pourquoi l'Eglise a toujours professé l'indissolubilité du mariage :
on ne peut pas rompre le lien. Dans des cas extrêmes, l'Eglise tolère la séparation
des corps, mais elle n'admet jamais le divorce.
Dans certains cas, elle reconnaît la nullité du mariage. Mais encore faut‑il
qu'il y ait des motifs certains. Quand l'Eglise reconnaît la nullité d'un
mariage, c'est parce qu'elle a constaté que l'une des conditions du contrat
n'a pas été remplie, parce qu'il y a eu, par exemple, une crainte, une menace.
La femme a été mariée sous la pression des parents, sous la menace des sévices
et a éprouvé une certaine crainte telle qu'elle n'a pas osé dire non. Sans
cette contrainte, elle aurait dit non. Si vraiment on peut constater qu'avant
le contrat, il y a eu une pression morale telle, que la volonté n'était pas
libre, le contrat n'a pas eu lieu, car il manquait la liberté de l'un des
conjoints. C'est l'une des raisons qui peuvent être invoquées.
Citons un autre cas. Si l'un ou l'autre des conjoints affirme clairement avant
le mariage, et cela devant témoins qui peuvent en justifier, qu'il ne voulait
pas d'enfants, c'est encore une condition qui montre la nullité du contrat.
Le contrat est fait pour que les époux aient des enfants.
S'ils ne peuvent pas en avoir pour des raisons particulières, c'est autre
chose. Mais la volonté de ne pas avoir d'enfants rend nul le contrat de mariage.
Hors
de ces rares conditions qui interviennent quelquefois, l'Eglise ne rompt jamais
un mariage. Si le mariage est vraiment constaté et qu'il n'y ait aucune raison
de nullité, l'Eglise ne peut pas rompre le mariage, cela ne dépend pas d'elle.
Le pape lui-même ne le peut pas ; il n'a pas le droit de rompre un mariage,
cela ne dépend pas de lui (Exception
faite du mariage chrétien non consommé qui peut être dissous par le pape pour
des motifs graves, ou du mariage des païens qui peut être dissous "en
faveur de la foi" du conjoint qui reçoit le baptême, si le conjoint païen
refuse la cohabitation pacifique.).
Dieu a institué le mariage et en a indiqué les conditions, le but. C'est Lui‑même,
l'auteur de la nature, qui a conçu le mariage et son but. Et en raison du
but du mariage, qui est précisément la procréation et l'éducation des enfants,
le contrat est indissoluble, parce que les enfants ont besoin de leurs parents,
de la stabilité de leur union, de la continuité de l'existence de la famille
pour être élevés convenablement.
Mais les francs‑maçons ont une toute autre conception, pour eux le mariage
est un contrat comme un autre, "qui peut donc être légitimement dissous
à la volonté des contractants".
Remarquons que l'indissolubilité du mariage est spécifique à la religion catholique.
Seule elle professe cette doctrine qui est fondamentale, parce que s'il y
a quelque chose qui est à la base de la société humaine, qui en est la cellule,
c'est bien la famille.
Toutes les autres religions quelles qu'elles soient, acceptent des motifs
de divorce, avec plus ou moins de facilité, même les orthodoxes et les protestants.
C'est vraiment une marque de la religion catholique de ne pas admettre le
divorce, l'institution divine du mariage ne le permettant pas.
Le mariage
chrétien,
garantie
de la dignité de la femme
En proposant aux femmes, la Vierge Marie pour modèle, l'Eglise prouve en quelle
estime elle tient la femme, ainsi que Dieu Lui‑même qui l'a choisie
pour être la mère de Notre Seigneur Jésus‑Christ.
Dans toutes les civilisations antiques, dans toute l'histoire du paganisme,
on trouve toujours le mépris de la femme. Elle est considérée comme un simple
objet. Elle n'a pas de droits civils. Elle peut être expulsée et même vendue.
L'Eglise apporte la liberté de la femme et elle la lui garantit.
J'ai pu constater en Afrique que dans toutes ces tribus païennes que j'ai
eu l'occasion de rencontrer, le grand problème est toujours celui de la femme.
Les hommes passent leur temps à vendre leurs filles ou à acheter des femmes,
ou à les revendre. Ils qualifient ce procédé de dot.
C'est faux car il s'agit d'un
véritable négoce. A peine nées, les petites filles font l'objet d'un marché,
quelqu'un commence à donner de l'argent pour les acheter. Dès lors qu'un homme
se présente avec plus d'argent que le mari n'en a donné, les parents s'arrangent
pour que leur fille quitte le mari avec lequel elle se trouve. Ils rendent
la "dot" au mari qui l'avait achetée le premier et gardent le surplus.
Si la femme est vendue 1 000 F et qu'un autre se présente avec 2 000 F, ils
rendent 1 000 F au premier et gardent 1 000 F. C'est un véritable trafic que
l'on a peine à imaginer.
Nous devions
nous battre pour maintenir les mariages chrétiens et même dans ce cas c'était
difficile, parce que ces habitudes sont véritablement ancrées dans les mœurs.
Et puis, les parents n'étaient pas toujours chrétiens, mais païens et agissaient
avec leur fille qui était devenue chrétienne et mariée chrétiennement, d'une
manière païenne. Les femmes qui avaient quitté leur mari de cette façon, n'avaient
rien contre lui, mais elles obéissaient aux injonctions des parents, qui toujours
commandent. Si le père dit à sa fille : tu reviens chez nous et je te marie
à un autre, la fille ne peut rien faire. Elle est subjuguée par son père.
Si son père meurt, elle appartient à son frère aîné. Elle appartient toujours
à quelqu'un. Elle n'est pas libre.
Parfois
nous étions obligés d'aller rechercher dans les villages la femme qui avait
quitté son mari, on partait en commando avec quelques jeunes, dans une pirogue,
à la recherche de la femme et cela parce que les catéchistes disaient : "
Mais mon Père, si tu ne fais rien, elles vont toutes partir". Aller chercher
les femmes de cette manière me paraissait faire une drôle de besogne.
Nous avons
fait quelques exemples. Mais quand les parents apprenaient que nous venions
chercher la femme qu'ils subjuguaient, ils la faisaient cacher dans la forêt
pour que nous ne puissions pas la trouver. Mais il y avait toujours quelqu'un
dans le village qui nous renseignait et nous finissions par la retrouver,
car souvent la femme désirait rentrer chez son mari. Mais, devant ses parents,
il fallait qu'elle prouve le contraire. Alors elle se mettait à hurler, pour
manifester qu'elle partait sans leur consentement. Devant le Père qui venait,
les parents n'osaient trop rien dire. Quelquefois, il nous fallait prendre
la femme de force, on la ligotait, on la mettait dans la pirogue et nous la
ramenions au village. A peine s'était‑elle éloignée de ses parents elle
battait des mains et manifestait sa joie de se retrouver chez son mari. Mais
avant, elle se livrait à des scènes invraisemblables : je vais me tuer...
Et elle se jetait à l'eau dans la rivière... Je vais me noyer... Et les jeunes
allaient la rechercher. Cela prouvait bien en tout cas que ces pauvres femmes
n'étaient pas libres de disposer d'elles‑mêmes et qu'elles faisaient
l'objet d'un véritable marché.
Pour défendre
le mariage chrétien dans ces conditions, c'est extrêmement difficile !
Si l'on
considère l'islam et le comportement des musulmans, on constate le même mépris
de la femme. J'ai eu l'occasion au Maroc et en Algérie, de visiter des harems.
C'est affreux, des femmes sont enfermées toute leur vie dans un espace très
restreint, à trois ou quatre. Elles aussi sont achetées, vendues, revendues.
C'est un marché abominable.
Le mariage
chrétien est la garantie du respect de la femme, respect qui existe encore,
grâce à Dieu, dans nos familles chrétiennes et dans bien des régions chrétiennes.
Mais, dans la mesure où les doctrines maçonniques se répandent avec le divorce,
on constate que la femme est de plus en plus méprisée, de moins en moins respectée.
Le mariage est l'un des signes de la civilisation chrétienne. C'est pourquoi
l'Eglise s'est employée à tout faire pour empêcher la légalisation du divorce.
Mais actuellement, dans la plupart des pays qui n'avaient pas encore admis
le divorce, les francs‑maçons ont lancé des campagnes et exercé des
pressions en vue de sa légalisation.
Même des
catholiques, même des évêques ont, dans une certaine mesure, contribué à
favoriser le divorce, comme le cardinal Tarancon, qui préconisait l'institution
de deux espèces de mariages, un mariage pour ceux qui voulaient le mariage
indissoluble et puis un mariage civil pour ceux qui voulaient éventuellement
pouvoir divorcer. Je l'ai lu dans une célèbre revue madrilène, où le cardinal
faisait explicitement campagne pour qu'il y ait deux espèces de mariage.
Or on sait que l'Espagne est un pays de tradition catholique et qu'il ne parlait
donc pas pour des gens qui ne sont pas catholiques, mais bien du mariage entre
catholiques. C'est inimaginable de voir une telle proposition émaner d'un
cardinal !
Tout cela vient du fait que c'est la maçonnerie qui est à l'origine de ces
idées, puisqu'il s'agit d'une tendance universelle. Si c'était dans un seul
pays, on pourrait penser que cela vient du chef du gouvernement. Mais non,
c'est dans tous les pays, les uns après les autres, que les assemblées législatives
sont saisies de projets de lois instituant le divorce. Et cela c'est l'œuvre
de la maçonnerie : elle veut que les chefs de gouvernement aient puissance
sur le lien conjugal.
S'emparer
de l'éducation de la jeunesse
Mais cela ne suffit pas, la maçonnerie veut aussi se saisir de l'éducation de la jeunesse, ainsi
que Léon XIII l'assure
"La secte concentre aussi toutes ses énergies et tous ses efforts pour
s'emparer de l'éducation de la jeunesse ".
Après le divorce, c'est maintenant l'éducation de la jeunesse dont la secte
s'empare. C'est d'une évidence qui crève les yeux. Les progrès de la laïcisation
de l'enseignement dans les pays du monde entier sont manifestes.
Des organismes comme l'UNESCO, soi‑disant faits pour répandre l'enseignement
dans le monde entier et lutter contre l'analphabétisme, sont en réalité dirigés
par la maçonnerie pour répandre l'éducation laïque et athée dans le monde
entier, sous le fallacieux prétexte de permettre à tous les hommes d'accéder
à la culture.
Nous l'avons bien constaté dans nos missions : nous avions les pires ennuis
avec les organismes de l'UNESCO parce qu'ils disposaient de beaucoup d'argent
et installaient des écoles laïques partout où nous avions des écoles catholiques,
alors qu'il existait des quantités d'endroits où ils auraient pu créer des
écoles et où il n'y avait pas d'écoles catholiques. Non, ils faisaient exprès
de s'installer à côté de nous pour détruire l'influence de l'Eglise catholique.
Avec l'argent dont ils disposaient c'était facile. Ils payaient les enseignants
beaucoup plus cher que nous ne pouvions le faire.
Heureusement, il y avait encore le sens de la religion chez beaucoup d'Africains,
qui préféraient mettre leurs enfants dans nos écoles catholiques, même parmi
les musulmans. Nous avions toujours un bon nombre de musulmans dans nos écoles,
sans vouloir dépasser toutefois 15 %. Mais ceux qui les premiers s'inscrivaient
dans nos écoles, c'étaient des musulmans et cela à cause de la religion. Les
parents savaient que nous enseignions la religion, non pas pour les convertir
ou qu'ils deviennent catholiques, c'était malheureusement impossible : même
si un bon petit musulman était premier au catéchisme, il était impossible
de lui faire faire sa communion. Quelquefois, l'enfant pleurait quand il voyait
tous les autres aller communier, alors que lui, premier au catéchisme, n'y
allait pas. II ne comprenait pas. Mais, avec les parents, il n'y avait rien
à faire. Si jamais ils avaient appris que nous faisions faire la communion
en secret à l'enfant, ils auraient brûlé l'école. Il était donc impossible
de les convertir, mais ils avaient ce sens de la religion qu'ils voulaient
voir enseigné à leurs enfants.
Le pape dénonce alors l'emprise de la maçonnerie sur l'éducation de la jeunesse.
"La secte concentre aussi toutes ses énergies pour s'emparer de l'éducation
de la jeunesse. Les francs‑maçons espèrent qu'ils pourront aisément
former, d'après leurs idées, cet âge si tendre, et en plier la flexibilité
dans le sens qu'ils voudraient, rien ne devant être plus efficace pour préparer
à la .société civile une race de citoyens tels qu'ils rêvent de la lui donner.
C'est pour cela que dans l'éducation et l'instruction des enfants, ils ne
veulent pas tolérer les ministres de l'Eglise, ni comme surveillants, ni comme
professeurs. Déjà dans plusieurs pays ils ont réussi à faire confier exclusivement
à des laïcs l'éducation de la jeunesse, aussi bien qu'à proscrire totalement
l'enseignement de la morale les grands et saints devoirs qui unissent l'homme
à Dieu ".
Or maintenant, même dans des pays comme l'Italie où existait encore il y a
peu de temps l'obligation d'enseigner la religion catholique dans les écoles,
depuis le nouveau concordat c'est fini (Le nouveau concordat, remplaçant
celui qui avait été conclu sous Pie XI, entre le Saint‑Siège et l'Italie,
a été signé le 18 février 1984 par le Cardinal Casaroli et le président Bettino
Craxi.).Tout n'est pas encore entré
en application, et la nouvelle législation davantage laïque, tolère encore
que les prêtres enseignent la religion dans les écoles. Pour le moment, les
parents sont encore libres de faire donner ou non à l'école, un enseignement
catholique à leurs enfants et les prêtres sont encore rémunérés par l'État.
Mais l'intention des législateurs est de supprimer la rétribution des prêtres.
De ce fait il n'y aura plus de prêtres qui dispenseront l'enseignement catholique
dans les écoles.
Alors il faudra que les prêtres, comme c'est malheureusement le cas en France,
organisent les catéchismes en dehors des écoles. Et dans ce cas, les francs‑maçons
qui veulent détruire l'enseignement catholique s'arrangent, pour établir les
programmes de telle sorte, qu'en donnant apparemment une certaine liberté
aux enfants d'aller au catéchisme, ce soit toujours à l'heure des récréations
où ils auraient besoin de se détendre. C'est à ces moments‑là que l'on
donnera aux enfants la possibilité d'aller au catéchisme, pour leur rendre
le cours plus difficile. Il faudra qu'ils fassent un sacrifice pour pouvoir
obtenir l'éducation chrétienne. Allez donc demander à tous les parents de
signer un papier comme quoi ils veulent l'éducation catholique de leurs enfants
!
Les droits
de l'homme
Léon XIII aborde ensuite la thèse selon laquelle tous les hommes sont égaux en droit.
"Viennent ensuite les dogmes de la science politique. Voici quelles sont
en ces matières les thèses des naturalistes : "les hommes sont égaux
en droit, tous, à tous les points de vue sont d'égale condition ".
C'est le premier article des "droits de l'homme" : tous les hommes
sont égaux. Comme le dit, plus loin, le pape, bien sûr que les hommes, par
leur nature commune, sont égaux vis‑à‑vis de Dieu, mais en fait,
les hommes ne sont pas tous égaux par les dons naturels, ni par conséquent
par leur rôle dans la société.
Continuant d'analyser la démocratie voulue par la maçonnerie, le pape en dénonce
l'autre faux principe : la liberté sociale naturelle de l'homme
"Étant tous libres par nature, aucun d'eux n'a le droit de commander
à l'un de ses semblables et c'est faire violence aux hommes que de prétendre
les soumettre à une autorité quelconque, à moins que cette autorité ne procède
d'eux‑mêmes ".
L'idéologie
démocratique ruine l'autorité
C'est le principe du système démocratique moderne : la souveraineté populaire.
L'autorité réside dans tous les hommes, dans le peuple. Et c'est le peuple
qui confère l'autorité dont chacun dispose, à un autre. Mais, personne n'a
par lui‑même le droit de commander à un autre. La philosophie thomiste
nous le dit aussi, mais parce que c'est Dieu qui nous commande. Nous, nous
disons que ceux qui participent à l'autorité, participent à l'autorité de
Dieu. Ce n'est pas parce que c'est tel ou tel, mais c'est parce qu'ils sont
revêtus d'une autorité qui leur est conférée lors de circonstances naturelles,
ou éventuellement par une élection. Mais l'autorité vient de Dieu. C'est ce
que dit l'Église, peu importe le moyen par lequel ils ont reçu l'autorité.
Par exemple, l'autorité du père de famille, c'est une autorité naturelle qui
est conférée par la nature. Ce ne sont pas les enfants qui confèrent l'autorité
au père. Nous n'en sommes pas encore parvenus à une telle absurdité !
Combien d'événements ne sont‑ils pas surgis qui ont été l'occasion pour
des familles de devenir des familles royales. C'étaient des personnalités
qui émergeaient avec, dirai‑je, un consentement tacite de la population.
Notamment quand il fallait défendre le pays contre les ennemis. II fallait
avoir un chef qui commande, qui organise la société, pour son bien, et pour
protéger précisément le peuple contre les ennemis du dehors. Instinctivement
le peuple reconnaissait l'autorité de celui qui avait réussi par son intelligence
et les dons qu'il possédait à protéger le peuple des ennemis. On le considérait
comme le roi. Ces dons étaient des dons naturels, octroyés par Dieu à ces
hommes qui, devenus rois ou reconnus comme princes, ont fait souche. Parce
que, comme le dit le pape, c'est ridicule de dire que nous sommes tous égaux.
Nous n'avons pas les mêmes' qualités, ni la même intelligence, ni la même
force physique. Les uns sont très habiles de leurs mains, les autres ne savent
rien faire de leurs dix doigts. Les uns sont très intelligents, les autres
moins. Nous sommes tous inégaux et le Bon Dieu l'a voulu ainsi. Il a voulu
cette inégalité, ces différences, précisément pour que nous nous complétions
et que nous nous aidions les uns les autres, que nous fassions partager nos
dons avec ceux qui en ont moins reçus., C'est cela la société.
S'il y a des hommes qui sont patrons, qui possèdent une industrie qu'ils dirigent,
ils ont aussi besoin des autres. S'il n'y avait personne qui travaille manuellement,
comment feraient‑ils ? II y a ce besoin de se compléter. Les ouvriers
ont besoin d'un patron qui pense à toute l'organisation de l'usine, à la commercialisation
de ses produits, à la recherche de nouveaux marchés... Le Bon Dieu a créé
les hommes ainsi. Il a voulu que la société soit organisée, ordonnée, organique
et non pas qu'elle soit une masse d'hommes comme le prétendent les francs‑maçons
et les libéraux : une masse informe d'hommes qui sont tous identiques, qui
ont les mêmes droits. Cette conception est totalement fausse. Elle est contre
nature.
Léon XIII stigmatise cette conception totalement erronée et la décrit ainsi
"Tout pouvoir est dans le peuple libre, ceux qui exercent le commandement
n'en .sont que les détenteurs par le mandat oit la concession du peuple de
telle sorte que .si la volonté populaire change il faut dépouiller de leur
autorité les chefs de l'Etat même malgré eux".
Nous voyons bien maintenant la situation dans laquelle se trouvent tous les
peuples avec la multiplication des élections. Les candidats sont à peine élus
que déjà ils pensent à l'élection suivante et préparent la prochaine consultation
électorale. Les politiciens flatteront le peuple, ils lui donneront ceci ou
cela en vue d'obtenir leurs suffrages lors de la prochaine consultation. C'est
absurde et conduit à une société absolument ridicule. C'est celui qui disposera
de plus de moyens, de plus d'argent, celui qui saura séduire le plus les électeurs,
qui aura le plus d'influence, qui sera élu. Ce ne sera pas celui qui aura
le plus de qualités pour être le chef de l'Etat qui y parviendra, mais celui
qui est le plus fort, qui a le plus d'argent.
Léon XIII souligne en plus le caractère non seulement anti‑naturel,
mais athée de la démocratie maçonnique
"En outre, l'Etat doit être athée. Il ne trouve, en effet, dans les diverses
formes religieuses, aucune raison de préférer l'une ou l'autre : toutes doivent
être mises sur un pied d'égalité".
La maçonnerie
ouvre la voie
au communisme
Le pape voit l'aboutissement ultime des principes politiques professés par
la franc‑maçonnerie.
"Ils frayent ainsi le chemin à d'autres sectaires nombreux et plus audacieux,
qui se tiennent prêts à tirer de ces faux principes des conclusions encore
plus détestables, à savoir, le partage égal et la communauté des biens entre
tous les citoyens, après que toute distinction de rang et de fortune aura
été abolie".
Cette conception est celle des communistes, donc, dit le pape, en la professant
les francs‑maçons ouvrent la voie au communisme.
Ce serait une erreur de croire que les francs‑maçons ne sont pas la
cause du communisme lui‑même. Ils ne veulent peut‑être pas voir
s'instaurer toutes les conséquences qui découlent du communisme, mais en fait,
leurs propres principes préparent le communisme.
Perversité
de la franc‑maçonnerie
Le pape, après l'exposé des principes des francs‑maçons et de leurs
conséquences indique le jugement qu'il faut porter sur eux.
"Les faits que Nous venons de résumer, mettent en lumière suffisante
la constitution intime des francs‑maçons et montrent clairement par
quelle route ils s'acheminent vers leur but. Leurs dogmes principaux sont
en un si complet et si manifeste désaccord avec la raison qu'il ne peut rien
s'imaginer de plus pervers ".
Donc, il s'agit bien d'une opposition totale aux principes de la raison. Bien
qu'ils se disent naturalistes, rationalistes, les principes des francs‑maçons
sont absolument contraires aux principes naturels, aux principes rationnels.
"En effet vouloir détruire la religion et l'Eglise établies par Dieu
Lui‑même et assurées par Lui d'une perpétuelle protection, pour ramener
parmi nous après dix‑huit siècles, les mœurs et les ins
titubons des païens n'est‑ce pas le comble de la folie et de la plus
audacieuse impiété.
"Certes dans un plan si insensé, si criminel, il est bien permis de reconnaître
la haine implacable dont Satan est animé à l'égard de Notre Seigneur Jésus‑Christ
et sa passion de vengeance ".
L'œuvre
de Satan
Le jugement que formule le pape est clair et formel : ce plan vient de Satan
; les plans des francs‑maçons sont sataniques et inspirés par la haine
de Notre Seigneur Jésus‑Christ. Il faut précisément bien voir les choses
comme le pape Léon XIII les décrit, pour bien comprendre l'origine et les
motifs de cette guerre menée avec tant d'intelligence, tant de prudence ‑
je dirai ‑ de prudence humaine, contre les institutions chrétiennes
et par conséquent pour s'opposer au règne de Notre Seigneur Jésus‑Christ.
Ils ont mené cette guerre depuis plusieurs siècles et dans le monde entier.
Aussi n'est‑ce pas possible que ce ne soit que des hommes qui puissent
être à l'origine d'un pareil plan et d'une semblable réalisation. Ce ne peut
être que le diable. C'est vraiment la cité du diable qui est organisée contre
Notre Seigneur Jésus‑Christ, contre la cité chrétienne.
Evidemment Satan est malin, remarquablement intelligent. Il sait jouer son
jeu, tantôt sous la violence, tantôt en la dissimulant sous des dehors très
humanitaires, tantôt par des doctrines très absolues comme celle du communisme
et puis après par le libéralisme qui est fait de quantités de nuances, si
bien que l'on s'y perd.
Beaucoup se laissent prendre par ce langage ambigu destiné à attirer les esprits
faibles, qui ne réfléchissent pas et ils se laissent entraîner.
Evidemment tous les hommes sont libres, tous égaux, tous sont frères. Mais
en fait il ne s'agit pas de la vraie liberté, de la véritable égalité, de
la vraie fraternité. Il faut s'attacher à bien comprendre les mobiles et les
objectifs de cette lutte vraiment satanique.
Le pape ne mâche pas ses mots et accuse catégoriquement Satan d'être à l'origine
de toutes ces doctrines maçonniques qui déshonorent l'homme, la famille et
la société.
"Par là ils se font les auxiliaires de ceux qui voudraient qu'à l'instar
de l'animal, l'homme n'eut d'autre règle d'action que ses désirs. Ce dessein
ne va rien moisis qu'à déshonorer le genre humain et à le précipiter ignominieusement
à sa perte. Le mal s'augmente de tous les périls qui menacent la société domestique
et la société civile. Ainsi que Nous l'avons exposé ailleurs, tous les papes,
tous les siècles s'accordent à reconnaître dans le mariage quelque chose de
sacré et de religieux, et la loi divine a pourvu à ce que les unions conjugales
puissent être dissoutes, mais si elles deviennent purement profanes, s'il
est permis de les rompre au gré des contractants, aussitôt la constitution
de la famille sera en proie au trouble et à la confusion : les femmes seront
découronnées de leur dignité. Toute protection et toute sécurité disparaitront
pour les enfants et pour leurs intérêts".
La délinquance
engendrée
par la
maçonnerie
Il est curieux de remarquer les contradictions qui résultent du comportement
des francs‑maçons. D'un côté ils créent des œuvres laïques pour les
jeunes, pour les enfants, et puis, dans le même temps ils font tout ce qu'il
faut pour remplir d'enfants les prisons.
Ils refusent de laisser à l'Eglise le soin de dispenser l'éducation catholique,
dont ils rejettent la morale et détruisent l'honnêteté. Ils répandent le vice,
les films et les ouvrages pornographiques. Ils pratiquent tout pour corrompre
la jeunesse. Et après cela, il a fallu construire des prisons pour les enfants
délinquants, des hôpitaux psychiatriques ou des maisons de redressement. C'est
invraisemblable, car auparavant on ne connaissait pas cela. Il n'existait
pas de prisons pour enfants. Les maisons de redressement étaient souvent des
orphelinats, où des religieuses ou les frères de saint Jeande‑Dieu s'occupaient
d'eux ; actuellement en France il y a par exemple, les sueurs de Pontcalec,
ou la police conduisait les enfants abandonnés par leurs parents.
Il existait des œuvres comme celles‑là, où les enfants retrouvaient
un esprit familial, une affection de la part de ces sueurs ou de ces frères
qui les avaient recueillis.
Or ces congrégations ont été persécutées, les religieux et les religieuses
ont été chassés. Tout a été entrepris pour que ces œuvres disparaissent, soi‑disant
pour créer des œuvres laïques. Résultat
on a dû construire des prisons pour enfants, qui sont de véritables camps
de concentration où tous les vices règnent.
Ou bien alors, comme il y a trop de jeunes délinquants, on les laisse courir.
On ne peut pas les enfermer tous. Il arrive alors ce que l'on voit maintenant
dans tous les pays avec l'accroissement de la délinquance, les vols, la drogue...
La Suisse n'est pas exempte de ces remous qui atteignent la jeunesse. On voit
à Zurich, à Lausanne, des bandes de jeunes qui volent les voitures, brisent
les glaces des magasins pour les piller, qui se comportent comme de vrais
bandits et la police regarde. Elle ne sait pas ce qu'elle doit faire. Elle
constate les faits, en ramasse quelques‑uns, les interrogent... On les
met en prison pour quelques jours et puis on les relâche et ça continue. Les
autorités responsables ne savent plus comment diriger la société, dont ont
été arrachées toutes les bases morales. Tout ce qui pouvait offrir aux jeunes
les éléments d'une vie convenable, d'une vie régulière, a été supprimé. Toutes
les barrières ont été enlevées au nom de la liberté ! C'est épouvantable !
La propagation de la drogue en est un exemple. C'est un fléau affreux qui
se répand, même dans les écoles qui restent encore catholiques. Personne n'arrive
à dire ce que l'on peut faire pour endiguer ce mal qui se propage de plus
en plus.
Si l'on en est arrivé à ce point, c'est parce que l'on ne veut plus imposer
la loi morale, la loi de Dieu. Le décalogue n'est plus à la base des sociétés,
à la base de la famille, à la base de l'enseignement.
Il n'y a plus que les "droits de l'homme" : droit à la liberté.
La liberté ! On en mesure les résultats !
La Révolution
et la soif
de changement
La doctrine des francs‑maçons selon laquelle les hommes sont égaux,
ruine par le fait même toute autorité dans l'organisation politique de la
société civile.
Si une telle conception était appliquée à l'Eglise, toute sa structure serait
ruinée. L'Eglise est essentiellement hiérarchique et l'autorité y est conférée
par les autorités supérieures, à part l'élection du pape au cours du conclave.
Les évêques sont désignés par le pape, les prêtres sont appelés par les évêques
et ainsi de suite. L'Eglise est donc une société tout à fait hiérarchisée,
dont l'organisation s'oppose aux doctrines rationalistes des francs‑maçons.
Les conséquences de la mise en œuvre des doctrines des francsmaçons, dit le
pape, mènent à la révolution
"Les malfaisantes erreurs que Nous venons de rappeler, menacent les Etats
des dangers les plus redoutables. En effet, supprimez la crainte de Dieu et
le respect dû à ses lois, laissez tomber en discrédit l'autorité des princes,
donnez libre carrière et encouragements à la manie des révolutions, lâchez
la bride aux passions populaires, brisez tout frein sauf celui du châtiment,
vous aboutirez par la force des choses à un bouleversement universel et à
la ruine de tolites institutions : tel est, il est vrai, le but avéré, explicite,
que poursuivent de leurs efforts beaucoup d'associations communistes et socialistes
; et la secte des francs‑n maçons n'a pas le droit de se dire étrangère
à leurs attentats, puisqu'elle favorise leurs desseins et que, sur le terrain
des principes, elle est entièrement d'accord avec elles".
"Et plût à Dieu que tous, jugeant l'arbre à ses fruits sussent reconnaître
le germe et le principe des maux qui nous accablent, des dangers qui nous
menacent. Nous avons affaire à un ennemi rusé et fécond en artifices. Il excelle
à chatouiller agréablement les oreilles des princes et des peuples, il a su
prendre les uns et les autres par la douceur de ses maximes et l'appât de
ses flatteries. Les princes ? Les francs‑maçons se sont insinués dans
leur faveur sous le masque de l'amitié pour faire d'eux des alliés et de puissants
auxiliaires, à l'aide desquels ils opprimeraient plus sûrement les catholiques
...
Les peuples ? Ils se jouent d'eux en les flattant par des procédés semblables.
Ils ont toujours à la bouche les mots de "liberté" et de "prospérité
publique". A les en croire, c'est l'Eglise, ce sont les souverains qui
ont toujours fait obstacle à ce que les niasses fussent arrachées à une servitude
injuste et délivrées de la misère " (...). Ils ont séduit le peuple par
ce langage fallacieux et excitant dans lés peuples la soif des changements,
ils l'ont lancé à l'assaut des deux puissances ecclésiastique et civile ".
L'aggiornamento
adaptation
à l'esprit libéral
La soif des changements a été fréquemment dénoncée par les papes. Le désir
du changement, c'est le mal des hommes modernes et c'est celui qui a sévi
au Concile. On a voulu tout changer sous prétexte d'aggiornamento, sous prétexte d'adaptation il faut changer ; il faut
se mettre au diapason de l'homme moderne. Et comme l'homme moderne change
toujours, alors, il faut toujours changer, s'adapter indéfiniment.
Que, dans une certaine mesure, on adapte les méthodes d'apostolat, c'est évident,
la question n'a même pas besoin d'être posée, tant cela va de soi. On ne prêche
pas à des adultes comme à des enfants ; on ne prêche pas à des intellectuels,
à des personnes savantes comme à des gens du peuple. On s'adapte évidemment.
C'est tout naturel et il n'était pas nécessaire de réunir un concile pour
cela.
Mais là où on touche l'inimaginable, c'est qu'en fait on a voulu discuter
de formules en vue, soi‑disant, d'adapter la manière d'exprimer notre
foi pour la rendre plus accessible à l'homme moderne. Ce sont des élucubrations
! Les droits de l'homme. De quel homme s'agit‑il ?
Il y a les hommes. Il n'y a pas "l'homme" séparé de toute réalité.
Quand on parle de s'adapter à l'homme moderne suivant qu'on le prend en Europe,
en Amérique du Sud, en Chine, ou ailleurs... De quel homme s'agit‑il
? Cela n'a pas de sens. L'homme moderne, c'est tout simplement l'homme qui
a le cerveau modelé par les doctrines maçonniques, par des idées absolument
contraires à l'Eglise, absolument contraires aux principes même de la nature,
aux principes conçus par Dieu.
S'imaginer que l'on peut christianiser les idées et le vocabulaire de cet
"homme moderne" est totalement irréaliste. On aura beau dire : "les
droits de l'homme, c'est quelque chose quand même, on pourrait les rendre
évangéliques..." c'est impossible ! Les maçons les ont élaborés, les
ont voulus contre le décalogue. On ne parle pas des devoirs de l'homme, mais
uniquement de ses droits dans le but
de détruire la loi de Dieu, de façon à ce qu'elle ne soit plus à la base des
sociétés, mais que lui soit substituée la liberté.
Les droits de l'homme, la déesse Raison, adorer la raison humaine, c'est cela
la révolution: mettre l'homme à la place de Dieu.
Comment peut‑on imaginer que l'on puisse s'adapter à ces gens‑là
? Ce n'est pas possible.
On a tellement bien voulu s'adapter qu'en effet on a fini par rationaliser
notre liturgie qui contenait de si belles choses, si sacrées, si mystérieuses,
si divines. On en a fait quelque chose de rationaliste, d'humain. On a abaissé
le rite sacré de la messe pour en faire un repas, une communion, une Eucharistie.
Il a fallu se démocratiser, sans hiérarchie ‑ il n'y a plus de hiérarchie
‑ le prêtre n'est plus que le président désigné, mais qui pourrait être
aussi bien désigné par la communauté. C'est effrayant de constater où nous
a conduits cette volonté de s'adapter !
Nous ne pouvons pas employer le langage des autres, parce qu'il a une signification
bien précise et qu'il exprime bien ce qu'ils veulent. On ne peut pas utiliser
le langage des protestants, le langage des rationalistes sans, tout doucement,
devenir rationaliste soi‑même.
La lutte contre la maçonnerie
Après avoir exposé les principes des francs‑maçons, puis les conséquences
de leur application, Léon XIII propose des remèdes. Que faut‑il faire
?
"Quoiqu'il en puisse advenir, Notre devoir est de Nous appliquer à trouver
des remèdes proportionnés à un mal si intense et dont les ravages ne sont
que trop étendus. Nous le savons, notre meilleur et plus solide espoir de
guérison est dans la vertu de cette religion divine que les francs‑maçons
haïssent d'autant plus qu'ils la redoutent davantage. Il importe donc souverainement
de faire d'elle le point central de la résistance contre l'ennemi commun ".
Il
faut donc, dit le pape, affirmer notre sainte religion.
"Plein de confiance à cet égard, dans la bonne volonté des chrétiens,
Nous les supplions au nom de leur salut éternel et Nous leur demandons de
se faire une obligation sacrée de conscience, de ne jamais s'écarter, même
d'une seule ligne, des prescriptions promulguées à ce sujet par le Siège apostolique".
Donc, que les fidèles s'en tiennent strictement à tout ce quia été promulgué
par les papes au sujet de la franc‑maçonnerie.
Arracher son masque à la franc‑maçonnerie
Ensuite
Léon XIII s'adresse aux évêques
"(...) Mais puisque l'autorité inhérente à Notre charge Nous impose de
vous tracer Nous‑même la ligne de conduite que Nones estimons la meilleure,
Nous vous dirons : premièrement, arrachez à la franc‑maçonnerie le masque
dont elle se couvre et faites‑la voir telle qu'elle est".
Le pape dit aux évêques : votre premier devoir est de dénoncer la maçonnerie,
lui arracher le masque dont elle se couvre avec le vocabulaire trompeur qu'elle
emploie, les différentes institutions soi‑disant de charité, de dévouement
qu'elle anime. Derrière cela se cache un esprit satanique.
Les francs‑maçons n'aiment pas être dévoilés. Ils n'aiment pas que l'on
parle d'eux. Je me suis fait attaquer plusieurs fois parce que dans quelques
discours j'avais parlé de la franc‑maçonnerie, ce qui a suscité des
répliques immédiates dans les journaux. Dès que l'on touche à la franc‑maçonnerie,
qu'on la critique publiquement, ses adeptes s'insurgent. Ils ne peuvent pas
tolérer cela. Se sentant dévoilés, ce qu'ils redoutent, alors ils sont furieux
et ils contre‑attaquent.
Dans l'homélie que j'avais prononcée à Lille en 1977, j'avais parlé ouvertement
contre la franc‑maçonnerie. J'avais dit que c'était elle qui était à
l'origine de toutes ces révolutions, de toute cette guerre contre lEglise,
de tout cet esprit qui sévit encore maintenant.
Ils n'ont pas digéré cette intervention. Et c'est dans de telles circonstances
qu'ils se découvrent... C'est ainsi qu'après cette déclaration, un journaliste,
qui dirigeait une revue très bien faite, où il adoptait une attitude plutôt
traditionaliste ce qui lui valait d'être assez lue dans nos milieux, s'est
révélé ce qu'il était réellement. Son père était franc‑maçon. Il le
disait lui‑même. Et dans l'article qu'il a écrit, il s'est montré très
mécontent parce que j'avais attaqué la franc‑maçonnerie. Je n'aurais
jamais dû faire cela, c'était absolument inadmissible. Alors là, il a fait
plus que de montrer le bout de l'oreille ! Sa violente réaction l'a fait sortir
de l'ombre où il dissimulait sa véritable appartenance. Cela a surpris bon
nombre de lecteurs de sa revue, qui n'imaginaient pas qu'il puisse ainsi défendre
la franc‑maçonnerie. Ce fut pour eux une révélation et il s'est fait
ainsi beaucoup de tort parmi les traditionalistes qui lisaient sa revue, où
ils trouvaient des informations très intéressantes et même des articles religieux,
toujours dans un sens traditionnel.
Aucun catholique
ne peut s'affilier
à la franc‑maçonnerie
Donc le pape demande premièrement aux évêques de dénoncer la franc‑maçonnerie
: "Faites‑la voir telle qu'elle est".
"Secondement, instruisez vos peuples ; faites‑leur connaître les artifices employés par ces sectes... La perversité de leurs
doctrines... Rappelez‑leur qu'en vertu des sentences plusieurs fois
portées par Nos prédécesseurs, aucun catholique s'il veut rester digne de
ce nom et avoir de son salut le souci qu'il mérite, ne peut sous aucun prétexte
s'affilier à la secte des francs‑maçons (...).
"Il faut ensuite, à l'aide de fréquentes instructions et exhortations,
faire en sorte que les masses acquièrent la connaissance de la religion...
Que les fidèles connaissent à fond l'Eglise catholique et l'aiment de tout
leur cœur. Car plus cette connaissance et cet amour grandiront dans les âmes,
plus on prendra en dégoût les sociétés secrètes, plus on sera empressé de
les fuir".
Et c'est vrai, plus nous connaissons notre religion, plus nous la vivons et
en particulier notre liturgie ‑ celle à laquelle nous demeurons attachés
et qui était autrefois celle de toute l'Eglise ‑ plus nous nous trouvons
comme immunisés contre ces mauvaises tendances du rationalisme et contre toutes
ces erreurs.
Le rationalisme
destructeur
de la liturgie
Face à cette liturgie réformée depuis Vatican lI, on éprouve comme une espèce
d'écœurement, de dégoût. On ne se sent pas à l'aise du tout, car cela ne correspond
plus à notre foi, à notre manière de penser, à notre vie chrétienne. C'est
là une réaction tout à fait normale. Tout doucement, désorientés par cette
transformation, les gens ont commencé à déserter les églises.
Un exemple de la pénétration du rationalisme dans la nouvelle liturgie, c'est
justement que l'on a voulu que les fidèles comprennent tout. Le rationalisme
n'accepte pas quelque chose qu'il ne peut pas comprendre : il faut que tout
soit jugé par la raison. Bien sûr que dans l'exercice de notre liturgie, nombreux
sont ceux qui ne comprennent pas le latin, la langue sacrée, ou les prières
qui sont dites à voix basse. Le prêtre est tourné vers la Croix et les fidèles
ne voient pas ce qu'il fait. Ils ne peuvent pas suivre tous ses gestes. II
y a donc un certain mystère.
C'est vrai : il y a un mystère, il y a une langue sacrée. Mais, même si les
fidèles ne comprennent pas ce mystère, cette conscience du mystère de Notre
Seigneur leur est encore beaucoup plus profitable que de leur lire à haute
voix et dans leur langue toute la messe. D'abord, même en langue vernaculaire
certains textes sont quelquefois difficiles ; les vérités sont parfois ardues
a saisir. Ensuite il faut prendre en compte l'inattention. Les gens sont distraits
; ils écoutent un peu, saisissent une phrase et puis c'est fini. Ils ne peuvent
pas tout suivre, tout comprendre. Ils le disent eux‑mêmes : toujours
entendre parler, parler, à haute voix, les fatigue. Ils ne peuvent pas se
receuillir un instant et ils s'en plaignent.
La prière est avant tout une action spirituelle, comme le disait Notre Seigneur
à la Samaritaine : " Les vrais adorateurs que demande mon Père, ce sont
ceux qui L'adorent in spiritu
et veritate, en esprit et en
vérité". La prière est plus intérieure qu'extérieure. S'il y a une prière
extérieure, c'est pour favoriser la prière intérieure de notre âme, la prière
spirituelle, l'élévation de notre âme vers Dieu. C'est le but qui est recherché
: élever les âmes vers Dieu. Tandis que l'autre, au contraire, fatigue avec
ce bruit conti
nuel. Il n'y a pas un moment de silence. Et à la fin, lassés, les gens se
détachent.
L'erreur ainsi commise en voulant transformer la liturgie est le résultat
de l'esprit rationaliste qui a gagné notre temps. On a voulu s'adapter à l'homme
moderne qui veut tout comprendre : c'est inadmissible de nous parler dans
une langue que l'on ne comprend pas.
Or chacun sait bien que les fidèles ont toujours eu des missels où, à côté
du latin, figurait la traduction. Ces missels existaient dans le monde entier
et ce n'était pas difficile de suivre sa messe C'est donc un raisonnement
absurde. Mais on a voulu s'adapter à l'esprit de l'homme moderne qui ne veut
pas de mystère, qui ne veut pas ne pas comprendre tout ce qu'il entend. On
a ainsi détruit le mystère, chassé le sacré, le divin, des cérémonies. Il
nous faut donc rester attachés à notre liturgie.
Le Tiers‑ordre
de saint François
Ensuite le pape recommande ‑ c'est assez curieux ‑ une chose qui
est assez particulière : le Tiers‑ordre de saint François
"Nous profitons à dessein de la nouvelle occasion qui Nous est offerte,
d'insister sur la recommandation que Nous avons déjà faite en faveur du Tiers‑ordre
de saint François, à la discipline duquel Nous avons apporté de sages tempéraments.
Il faut mettre un grand zèle à le propager‑ et à l'affermir. Tel en
effet qu'il a été établi par son auteur, il consiste tout entier en ceci :
attirer les hommes à l'amour de Jésus‑Christ, à l'amour de l'Église
et à la pratique des vertus chrétiennes. Il peut donc rendre de grands services
pour aider à vaincre la contagion de ces sectes détestables...
"Cette association est une véritable école de liberté et de fraternité
et d'égalité", dit le pape, "non seulement selon l'absurde façon
dont les francs‑maçons entendent ces choses, mais telles que Jésus‑Christ
a voulu en enrichir le genre humain et que saint François les a mises en pratique.
"Nous parlons ici de la liberté des enfants de Dieu, Nous refusons d'obéir
à des maîtres impies qui s'appellent Satan et les mauvaises passions. Nous
parlons de la fraternité qui nous rattache à Dieu comme au Créateur et Père
de tous les hommes. Nous parlons de l'égalité qui, établie sur les fondements
de la charité, ne rêve pas de supprimer toute distinction entre les hommes,
mais excelle à faire de la variété des conditions et des devoirs de la vie
une harmonie admirable et une sorte de merveilleux concert dont profitent
naturellement les intérêts et la dignité de la vie civile".
Ainsi le pape encourage à faire partie du Tiers‑ordre franciscain, dont
il estime l'esprit. Et c'est vrai que ce Tiers‑ordre a fait un bien
immense et a permis à bien des âmes de se sanctifier.
Opposer
les corporations
aux syndicats
politisés
Parmi les remèdes qu'il suggère, le pape donne un autre conseil : reconstituer
des "corporations ouvrières destinées à protéger, sous la tutelle de
la religion, les intérêts du travail et les mœurs des travailleurs".
"Si la pierre de touche d'une longue expérience avait fait apprécier
à nos ancêtres, l'utilité de ces associations, notre âge en retirerait peut‑être
de plus grands fruits, tant elles offrent de précieuses ressources pour combattre
avec succès et pour écraser la puissance des sectes (...). Nous souhaitons
ardemment de voir se rétablir sous les auspices et le patronage des évêques,
ces corporations appropriées aux besoins des temps ".
Les papes ont souvent insisté sur les bienfaits des corporations qui étaient
des associations chrétiennes de travail animées par un esprit religieux, un
esprit de foi et réunissaient patrons et ouvriers dans l'amour de leur métier
et dans la recherche de la plus grande perfection dans le travail et dans
une meilleure répartition aussi des bénéfices et des biens entre eux. Mais
cela se pratiquait autour de chaque métier. Chaque corporation avait son saint
patron, ses fêtes. Et il y avait aussi union entre patrons et ouvriers dans
la foi chrétienne. Cela favorisait une atmosphère de paix et en même temps
de charité et de justice, tandis que maintenant les syndicats sont des instruments
politiques, des armes de combat, faits pour exciter à la lutte des classes,
donc pour opposer les ouvriers aux patrons et non pas pour les faire travailler
ensemble.
Ces syndicats sont le reflet des clivages politiques et des instruments des
partis : syndicat communiste, syndicat socialiste, syndicat chrétien, syndicat
de ceci, de cela. De ce fait ils n'ont pas pour objet la recherche du bien
du travail, du métier. Et pourtant, aussi bien les patrons que les ouvriers
ont intérêt à ce que leur entreprise soit florissante. Donc il faut qu'ils
s'entraident pour le bien du patron et des ouvriers pour la survie de la profession.
Tandis que de nos jours les syndicats formulent des revendications telles
qu'elles condamnent les entreprises à disparaître.
D'où la destruction de nombreuses petites entreprises qui n'arrivent plus
à faire face aux exigences toujours plus grandes, tantôt de l'Etat, tantôt
des syndicats. Et on assiste à la concentration massive d'ouvriers dans d'énormes
complexes, où ils se trouvent comme une masse. Il n'y a plus ce contact humain
qui existait dans les petites entreprises et, ce qui était plus naturel, plus
proches de la nature, car elles se trouvaient dispersées dans les villages.
Tandis que maintenant on a concentré des milliers et des milliers d'ouvriers
dans d'énormes usines dans les villes industrielles. C'est l'un des fruits
de la socialisation. Et tout cela est aux mains des sociétés financières multinationales
et des grandes banques, qui elles‑mêmes sont en fin de compte celles
de la franc‑maçonnerie. On en revient toujours là : tout est entre leurs
mains : tout !
Les papes, eux, ont toujours favorisé le maintien ou la renaissance des corporations
et il faut bien comprendre dans quel sens ils l'ont fait.
Il est profitable, à ce sujet, de lire des ouvrages qui ont été écrits à la
fin du siècle dernier, vers 1870, et en particulier ceux qui relatent les
travaux des cercles ouvriers d'Albert de Mun et d'autres, comme les écrits
de René de La Tour du Pin ( On lira avec profit l'ouvrage de Xavier Vallat
: La croix, les lys et la peine des
hommes, racontant l'histoire du mouvement social catholique français.). Ils ont très
bien compris et précisé ce que l'Eglise demandait.
On a reproché à l'Eglise d'avoir perdu de vue les ouvriers, pour ne pas s'être
assez intéressée à leur sort au siècle dernier. C'est complètement faux et
injuste. C'est l'élite catholique qui a mené le combat pour rétablir l'ordre
social chrétien et améliorer la situation des ouvriers. Qui avait détruit
les corporations ? C'est bien la Révolution, parce que c'étaient des organismes
qui soutenaient la religion et par conséquent qui, en même temps qu'ils créaient
les conditions favorables à l'exercice des métiers, contribuaient à la christianisation
du pays. Alors la Révolution a détruit cet édifice pour réduire tous les hommes
au même niveau, constituer une grande masse d'ouvriers et qu'il n'y ait plus
de hiérarchie, ni cette organisation qui existait à l'intérieur des corporations.
Résultat, les ouvriers se sont trouvés sans défense devant les patrons libéraux.
Évidemment, ils ont été exploités.
Certes, tout doucement, des patrons chrétiens ont suggéré de reconstituer
les corporations. Mais la franc‑maçonnerie s'est empressée d'empêcher
leur renouveau et, le socialisme qui avait déjà acquis une influence énorme,
a créé des syndicats politisés dans lesquels les ouvriers sont regroupés.
Et maintenant, les socialistes se présentent comme les sauveurs de la classe
ouvrière, ce qui est absolument faux.
Pratique
de la dialectique
et lutte
des classes
Les ouvriers ont été lancés dans une lutte continuelle contre leurs employeurs
et en même temps les syndicats ont fait naître chez eux un esprit permanent
d'envie, absolument contraire à la vertu de modération, à la vertu de tempérance.
C'est‑à‑dire qu'ils sont poussés vers la recherche uniquement
de la jouissance des biens de ce monde. Obtenir toujours davantage de biens,
de profits de la société de consommation. Cela est tout à fait contraire à
l'esprit chrétien : plus aucune limite, plus aucune modération. Donc les socialistes
et les communistes ont été habiles en profitant de la situation ainsi créée,
pour entraîner le plus grand nombre possible d'individus dans cette lutte
permanente, qui est aussi conforme à la dialectique marxiste qui prétend que
le progrès ne s'obtient que dans la lutte des classes, dans l'opposition des
citoyens entre eux et des citoyens contre le gouvernement. Alors partout où
ils ont l'occasion de provoquer ces heurts, ils le font. Mais ils n'agissent
ainsi que dans les sociétés chrétiennes qu'ils veulent détruire.
Cette dialectique est‑elle mise en pratique dans les pays gouvernés
par les communistes ? Non bien sûr ! Il n'y a qu'à voir les difficultés, voire
l'opposition formelle, que les ouvriers rencontrent quand ils cherchent à
former un syndicat qui ne soit pas aux mains du parti communiste. Le communisme
ne peut pas laisser libre cours à la liberté. Ce n'est pas possible. En U.R.S.S.
il n'y a pas de grèves, ou alors elles sont rapidement et sévèrement réprimées.
Il n'y a pas non plus de possibilité de lutte des classes, parce que ne se
trouvent en présence que le gouvernement et les ouvriers ("La
caste dirigeante qui constitue le parti n'est pas seulement la caste politiquement
dirigeante, elle est le propriétaire unique et l'employeur", Jean Madiran,
La vieillesse du monde, première
partie : "La technique de l'esclavage" IV.). Il n'y a pas de problèmes, les ouvriers n'ont qu'à
travailler et le gouvernement ramasse l'argent et ne leur donne qu'à peine
de quoi vivre. C'est tout.
La doctrine sociale de l'Eglise l'encyclique Rerum novarum
Ce que les papes demandent, ils l'ont exprimé dans plusieurs encycliques très
développées sur ce sujet. L'encyclique Rerum
novarttm par exemple, du pape Léon XIII. Il y a d'autres encycliques sur
les questions sociales et sur les bienfaits des corporations. Il ne faut pas
hésiter à les consulter afin d'établir une comparaison avec la situation actuelle
et la comprendre.
Il faut reconnaître qu'à ce point de vue, les Suisses ont davantage conservé
cet esprit des corporations et qu'ils ont réalisé en 1927 ou 1928, un accord
entre les patrons et les ouvriers déclarant la grève illégale. C'est la raison
pour laquelle il n'y a pas de grèves en Suisse. Parallèlement des organismes
ont été créés et dès qu'une difficulté surgit, patrons, ouvriers et représentants
des services économiques du pays se réunissent pour étudier et régler le différend,
voir si l'on peut augmenter les salaires et au terme d'une concertation, aboutir
à un arrangement. Mais on continue le travail. Car arrêter le travail, c'est
mettre l'entreprise en péril. Et si la grève se poursuit un certain temps,
tous les concurrents en profitent pour enlever ses clients à l'entreprise
paralysée par la grève. C'est absolument absurde, car en agissant de la sorte,
les ouvriers tuent l'instrument qui les fait vivre. De ce point de vue, la
Suisse est un modèle. C'est le seul pays en Europe ou la grève est illégale.
Quand on dit cela dans nos pays, on vous répond : ce n'est pas vrai. Comment
? Un pays ou la grève est interdite, ce n'est pas possible, ça n'existe plus
! Or c'est cependant l'un des pays ou le niveau de vie est le plus élevé.
C'est normal.
L'ordre
social chrétien
Dans le dernier numéro d'Itinéraires ( Numéro 248, de décembre 1980,
publiant sous la plume de Louis Salleron une recension du livre de Suzanne
Labin : Chili, le crime
de résister (Nouvelles éditions Debresse).) il y avait
un article concernant un ouvrage qui était paru sur le Chili, montrant la
progression réalisée par ce pays depuis que le communisme en a été expulsé.
C'est le pays qui, depuis cinq ans, a réalisé le plus grand progrès économique
dans le monde entier. C'était la même chose au Portugal au temps de Salazar,
c'était aussi le cas en Espagne quand Franco était au pouvoir. Le niveau de
vie avait progressé, parce qu'il y avait de l'ordre, parce que tout le monde
travaillait, parce qu'il y avait un esprit de justice parce qu'il y avait
des lois chrétiennes. Quand dans une société l'esprit chrétien fait retour
et avec lui l'esprit de justice, d'entraide, d'entente, de paix, tout revient.
La monnaie devient plus sûre, les gens vivent dans la paix et s'entendent.
C'est tellement clair que ceux qui sont les ennemis de la justice sociale
telle que l'Eglise l'entend, sont furieux et veulent détruire ces pays qui
donnent un exemple tellement contraire à leurs propres desseins.
Autre exemple : à Cuba, les gens sont très mécontents aussi, mais pas pour
les mêmes raisons. C'est parce qu'ils manquent de tout et ne mangent pas à
leur faim. C'est le désordre et malgré cela, dans nos pays, le communisme
se présente toujours comme étant le parti des travailleurs, le parti du progrès
qui défend les malheureux. C'est incroyable et le fruit d'une désinformation
et d'un aveuglement insensés. Mais peu leur importe, ce qu'ils veulent avant
tout c'est justement rejeter et supprimer l'esprit chrétien.
L'enseignement des papes à ce sujet est particulièrement éclairant.
Enfin Léon XIII propose un autre remède : la société fondée sous le patronage
de saint Vincent de Paul.
"Nous voulons parler de celle quia pris le nom de son père saint Vincent
de Paul. On connaît assez les œuvres accomplies par cette société et les buts
qu'elle se propose '(On peut citer ici en exemple l'Institut des Frères
de saint Vincent de Paul, qui fut fondé à Paris en 1845, par trois laïcs,
dont le premier deviendra prêtre: Messieurs La Prévost, Myionnet et Maurice
Maignen. Menant la vie commune, ces religieux, formés à la doctrine sociale
de l'Eglise et à la lutte contre le libéralisme, dirigèrent patronages, orphelinats,
cercles d'hommes, caisses mutuelles, protection des apprentis, aides charitables.
Magnifique œuvre de régénération de la dignité chrétienne et d'amélioration
de la condition des ouvriers.)
Et
voici ce qu'en dit le pape Léon XIII:
"Les efforts de ses membres tendent uniquement à se porter par une charitable
initiative au secours des pauvres et des malheureux, ce qu'ils font avec une
merveilleuse sagacité et une non moins admirable modestie. Mais plus cette
société cache le bien qu'elle opère, plus elle est apte à pratiquer la charité
chrétienne et à soulager les misères des hommes".
Il est vrai que maintenant il existe tout un système d'assurances, de soutien
qui, dans une certaine mesure, a peut‑être amenuisé un peu les malheurs.
Mais il y a encore tellement de malheureux, surtout dans les grandes villes,
où nombreux sont ceux que l'on ne connaît pas et qui pourtant le sont bien
réellement. Alors, de ce point de vue l'Institut des Frères de saint Vincent
de Paul aura fait beaucoup de bien. Il apporte non seulement des secours matériels,
mais encore des secours spirituels par ses multiples institutions au service
de ces pauvres, regroupant ces malheureux. Et il y en a toujours. Notre Seigneur
a dit: " Vous aurez toujours des pauvres avec vous" (Mt 26,11).
Soustraire
la jeunesse
à l'esprit
empoisonné des sectes
Le pape évoque ensuite les dangers qui menacent la jeunesse dans l'enseignement
qui lui est prodigué.
"Quotidiennement, afin d'atteindre
plus aisément le but
de nos désirs, Nous recommandons avec une nouvelle insistance à Votre foi
et à Votre vigilance, la jeunesse qui est l'espoir de la société. Appliquez
à sa formation la plus grande partie de vos sollicitudes pastorales. Croyez
que vous n'en ferez jamais assez pour soustraire la jeunesse aux écoles et
aux maîtres près desquels elle a respiré le souffle empoisonné des sectes".
Donc, on le devine, le pape désigne les écoles laïques. C'est une mise en
garde salutaire qui conserve toute son actualité, parce que maintenant, on
entend souvent des parents dire : " Je préfère encore mettre mon fils
ou ma fille dans une école laïque, plutôt que dans une école catholique".
Enfin est‑ce possible ?
Ce n'est peut‑être pas une règle générale, mais c'est quelquefois exact.
Il est vrai que, dans certains cas, les écoles laïques ne sont pas aussi violentes
contre la religion, ni anti‑catholiques . Cependant, il ne faut pas
oublier que cette laïcité générale qui existe dans de telles écoles, fait
respirer aux enfants ‑ même s'ils sont de bons chrétiens ‑ une
atmosphère ou l'on ne connaît pas la religion et c'est très grave. Parce qu'à
force de se trouver dans cette ambiance empoisonnée d'athéisme en définitive,
les enfants courent un grave danger. A la longue ils risquent de devenir presque
indifférents à la religion. Ils peuvent avoir l'impression que de la religion
on n'en a pas besoin ? A quoi cela sert‑il ? On fait ses études, on
aura des diplômes, on aura un métier, une profession... La religion ça ne
sert à rien.
Il y a donc cette ambiance de l'école laïque qui finit par pénétrer dans les
esprits et dans les cœurs.
Nous devons donc fonder à nouveau des écoles intégralement catholiques.
Prière
pour les combattants
de la lutte
contre les sectes
Enfin le pape se tourne normalement, comme il doit le faire, vers la prière
et termine par là.
"Du reste, Nous savons très bien que nos communs labeurs pour arracher
du champ du Seigneur des semences pernicieuses, seraient tout à fait impuissants
si, du haut du ciel, le Maître de la vigne ne secondait nos efforts. Il est
donc nécessaire d'implorer son assistance et son secours avec une grande ardeur
et par des sollicitations réitérées...
"A une si violente attaque doit répondre une défense énergique. Que les
gens de bien s'unissent donc, eux aussi, et forment une immense croisade de
prières et d'efforts ".
Nous tourner vers la prière, le pape nous y engage, car c'est vraiment là
qu'est notre véritable secours.
"En conséquence, Nous leur demandons, de faire entre eux, par la concorde
des esprits et des cœurs, une cohésion qui les rende invincibles contre les
assauts des sectaires. En outre, qu'ils tendent vers Dieu des mains suppliantes
et que leurs gémissements s'efforcent d'obtenir la prospérité et les progrès
persévérants du christianisme, la paisible jouissance pour l'Eglise de la
liberté nécessaire, le retour des égarés au bien, le triomphe de la vérité
sur l'erreur, de la vertu sur le vice.
"Demandons à la Vierge Marie, Mère de Dieu, de se faire notre auxiliaire
et notre interprète (...). Appelons à notre aide le prince
des milices célestes, saint Michel quia précipité dans l'enfer les anges révoltés,
puis saint Joseph, l'époux de la très Sainte Vierge, le céleste et tutélaire
patron de l'Eglise catholique, saint Pierre et saint Paul, ces infatigables
semeurs et ces champions invincibles de la foi catholique...
"Grâce à leur protection et à la persévérance de tous les fidèles dans
la prière, Nous avons la confiance que Dieu daignera envoyer un secours opportun
et miséricordieux au genre humain en proie à un si grand danger".
Enfin, en terminant cette encyclique si importante et qui résume en quelque
sorte tout ce que ses prédécesseurs avaient déjà dit au sujet des sectes maçonniques,
le pape donne sa bénédiction apostolique.
Mgr Lefebvre
"C'est moi, l'accusé, qui devrais vous juger
!"
Commentaire des actes du magistère condamnant les
erreurs modernes
Editions fideliter