L’année 2005 sera le 30ème
anniversaire de la loi dépénalisant l’avortement (j’utilise le mot avortement,
celui d’IVG me paraissant occulter la gravité de l’acte). En effet le 21 décembre
1974, était adoptée la loi présentée par Madame Simone Veil. Le texte était
promulgué le 17 janvier 1975. Le Parlement confirmait la loi le 31 décembre
1979.
Le livre anniversaire de Madame Simone
Veil a pour titre « Une loi pour l’histoire » (chez Stock). La loi de 1975 est bien « une loi pour
l’histoire » et « les hommes aussi s’en souviennent » selon le
sous-titre du journal «
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L’avortement
La pratique de
l’avortement a toujours existé. Ce n’est pas une invention de notre époque ni
de la loi de 1975. Cette dernière pensait même pouvoir en limiter le nombre, ce
qu’elle n’a pas réussi à faire. Jusqu’à cette loi, l’avortement était considéré
comme un acte de mort, condamné par la loi. Même la loi de 1975, dans son
article 1er, affirmait que la vie doit être protégée dès le premier instant de
son existence. Elle reconnaissait encore que l’avortement est une
transgression.
Mais immédiatement après ces affirmations,
la loi dépénalisait l’avortement. Elle
l’autorisait en certaines situations de détresse et avec des conditions
précises : dialogue préalable, clause de conscience pour le personnel
médical, nécessité de l’autorisation parentale pour les mineures. Il était à
prévoir que cette porte entr’ouverte allait s’ouvrir de plus en plus. Et de
fait, un pas de plus a été fait avec le remboursement, à la fin de 1982, par
D’abord autorisé jusqu’à 10 semaines,
l’avortement a été légalisé sous le gouvernement de Monsieur Lionel Jospin
jusqu’à 12 semaines (4 juillet 2001). (Notons, mais est-ce une
consolation ?, que l’avortement est autorisé
jusqu’à 22 semaines, cinq mois, en Espagne Il a été déclaré cause
prioritaire des soins de santé, avec financement important pour développer les
services hospitaliers nécessaires en vue de répondre rapidement à toutes les
demandes. On présente comme anormal le fait qu’il ne puisse pas être répondu
rapidement à toutes les demandes. Le dialogue préalable est devenu caduc.
Les médecins chefs de service sont obligés
d’admettre les avortements dans leur service. Les mineures sont dispensées, en
certains cas, de l’autorisation parentale. La distribution de la pilule du
lendemain est devenue libre et gratuite pour les mineures dans les
établissements scolaires, ou dans les pharmacies, qui sont obligées de la
distribuer, ce qui pose de graves cas de conscience à certains pharmaciens. Les
avortements thérapeutiques, pour raisons de santé de la mère, peuvent être
pratiqués jusqu’à la naissance.
Monsieur Douste Blazy, notre ministre de la santé, vient d’autoriser, en
juillet 2004, l’avortement médicamenteux à domicile, avec remboursement par
Remarquons la manière dont il est parlé de
l’avortement dans les médias officiels. Non seulement il est toujours présenté
comme une avancée remarquable de la liberté, mais jamais aucune émotion ne
transparaît envers les êtres humains ainsi supprimés. L’émotion est beaucoup
plus sensible lorsqu’il est question des mauvais traitements infligés aux
animaux. Tout laisse entendre que l’avortement est devenu une pratique normale,
ne posant pas de problème social, sauf bien entendu pour les femmes qui le
subissent, ce dont elles parlent peu et dont on ne parle jamais.
Juridiquement l’embryon est peu protégé
par la loi. Un amendement proposé par un député de la majorité actuelle (UMP),
prévoyant qu’un fœtus de six mois, tué accidentellement, devait être considérés
comme un homicide, donc que le foetus était une personne humaine, a été
immédiatement retiré par la même majorité. Un courant est pourtant plein
d’espérance. Des parents, dont le fœtus est mort à 4, 5 ou 6 mois, demandent que
ce fœtus soit reconnu comme leur enfant, qu’il ait un lieu de sépulture. Un
mouvement se crée pour réclamer que ces fœtus soient pleinement reconnus comme
des enfants.
La loi
Veil était soi-disant faite pour diminuer le nombre des avortements. En
réalité, le nombre n’a pas diminué,- il est officiellement de 225.000-, ce qui
inquiète d’ailleurs certains médecins et certains hommes politiques.
L’avortement n’a pas été voulu comme un moyen de contraception, mais il l’est
devenu en fait. Il est la conclusion devenue évidente de la mentalité
contraceptive. Si les autres moyens de contraception échouent ou si l’on oublie
de les utiliser, le recours à l’avortement devient la solution normale.
Ces progressives dérives favorisent
l’homme et l’adolescent toujours absents de ce débat. Elles incitent les
mineures aux relations sexuelles. Elles banalisent de plus en plus l’acte
sexuel, ce qui, avec l’invasion de la pornographie, explique que certains
adolescents, parfois en bande, violent des adolescentes sans que cela leur pose
de problème de conscience : « Je n’y vois rien de grave, d’ailleurs
elles sont consentantes », a-t-on entendu parfois après une de ces
« tournantes ». Tandis qu’elle est, à juste titre, sévère envers des
actes comme la pédophilie et le viol, notre société est de plus en plus
permissive et même incitatrice sur le plan sexuel.
La banalisation de l’avortement ne tient
pas compte du traumatisme causé à la femme par l’avortement, traumatisme dont
on se garde bien de parler, que pourtant certaines femmes commencent à
reconnaître publiquement en tel magazine ou en telle émission télévisée, dont
certains ouvrages soulignent la gravité, dont de nombreux faits attestent qu’il
est souvent la cause de divorces. La loi de 2004 marginalise les parents par
rapport à la vie de leurs enfants, alors que par ailleurs on tend à les juger
coupables des délits de ces mêmes enfants.
L’Eglise catholique, mais pas elle seule,
est absolument opposée à l’avortement dès la fécondation. Ce faisant, elle ne prétend
pas condamner les femmes en cause, mais s’adresser à la conscience de la
société et l’inciter à aider les jeunes filles et les femmes à garder l’enfant
qu’elles portent. Car l’embryon doit être respecté comme un être humain dès le
premier instant de sa formation. Ce n’est pas le cas pour bien des chercheurs,
qui prétendent fixer l’humanisation de l’embryon à certains stades de son
développement. Leurs positions vont de une semaine après la fécondation jusqu’à
six mois.
Certains font dépendre l’humanité de
l’embryon du « projet parental » : la qualité humaine d’un
embryon dépend du projet de ses parents d’en faire un homme ou une femme. Cela
revient à dire que le statut humain d’un être dépend du choix de ses parents,
donc du jugement que portent sur lui d’autres hommes. On décrète ainsi
pratiquement que les êtres humains ne sont pas également humains aux
différentes étapes de leur croissance.
L’Eglise catholique a toujours opté pour
le fait que l’embryon dès la fécondation doit être respecté comme une personne.
Nous trouvons la condamnation de l’avortement dès les premiers textes
chrétiens. Le Concile de Vatican II a une formule forte :
« L’avortement et l’infanticide sont des crimes abominables » (G. S.
51, § 3). La position de l’Eglise va dans le sens des données actuelles de la
science qui disent que, dès la constitution du premier noyau, tout
l’avenir génétique de l’être humain commençant est présent en lui. D’ailleurs
si l’embryon fécondé par l’Assistance médicale à la procréation est implanté
dans le sein de la mère, c’est bien qu’il est, non un petit paquet de chair ni
un caillot de sang ni un embryon indifférencié, mais un embryon humain.
Il n’y a pas un instant où il ne serait
qu’un petit amas de cellules pour passer ensuite à un stade humain. Il évoluera
quant à sa personnalité psychologique, non quant à son être de
personne. Il est un être humain dès le début ou il ne le sera jamais.
Aucun projet parental ne peut faire qu’un embryon non humain devienne humain à
un moment quelconque de son évolution. Là, si l’on peut dire, est le fondement
du véritable esprit républicain : tous les êtres humains, dès leur
fécondation, sont égaux. Ils ont à être traités comme tels avant même leur
naissance.
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L’assistance médicale à la procréation (AMP) ou la
procréation médicalement assistée (PMA).
Il s’agit, non de la création de la vie
par les chercheurs, mais de la fécondation d’un embryon en dehors du sein de la
mère par l’union de la semence masculine et de l’ovule féminin réalisée dans un milieu chimique. De là vient le nom de
« bébé-éprouvette ». L’embryon est ensuite implanté dans le sein de
la mère où il va se développer jusqu’à la naissance. Cela se fait soit avec les
gamètes du mari (AMP homologue), soit avec ceux d’un donneur qui n’est pas le
mari (AMP hétérologue). Cette assistance médicale est utilisée pour remédier à
l’impossibilité pour un couple d’avoir un enfant d’une manière naturelle, ou,
et ceci va se développer, pour mieux
choisir l’enfant désiré.
L’Eglise catholique est
opposée aux deux formes d’AMP. Outre que
l’hétérologue aboutit à un enfant adultérin, les deux formes d’assistance
médicale sont refusées par l’Eglise pour les raisons suivantes :
Il faut créer plusieurs embryons pour être
sûr qu’il y en ait un qui atteigne le but recherché. De là est né le problème des milliers
d’embryons surnuméraires congelés dont on ne sait que faire et qui vont être de
plus en plus utilisés pour la recherche, donc destinés à la destruction
programmée. Cette multiplicité des embryons produits pour la fécondation de
quelques-uns accentue la chosification des embryons, donc leur dévaluation, et
par suite l’acceptation qu’ils soient traités comme un matériau disponible au
prix de leur suppression.
On entre dans un processus irréversible du
tri des embryons, donc dans un processus d’eugénisme, par volonté de vouloir
des enfants parfaits (enfants zéro-défaut). Le choix
de l’enfant par les adultes devient peu à peu une chose normale. Or
l’enfant est un don. Il doit être voulu pour lui-même quel qu’il soit,
libre d’être différent de ce que veulent les parents. Pour nous chrétiens, il
est un don de Dieu. L’enfant n’est pas
le fruit d’un simple choix parental. Il est à l’image de Dieu avant d’être à
l’image des parents.
On insiste beaucoup sur l’enfant désiré.
Plus important que d’être désiré est le fait pour un enfant d’être aimé et
adopté tel qu’il est quand il arrive. Là est la valeur de l’adoption. Il y a
dans l’AMP une volonté de maîtriser l’origine de la vie qui peut devenir une
véritable hantise : avoir les enfants qu’on veut, quand on veut, tels
qu’on les veut. Le désir d’enfant est bon, mais l’enfant ne doit pas être voulu
pour la seule satisfaction des adultes. Avec l’AMP hétérologue, dont le donneur
doit être anonyme, on empêche l’enfant de savoir d’où il vient, au moment où on
insiste sur la nécessité pour l’enfant de connaître ses parents, par exemple
dans le cas des enfants nés sous X.
Surtout, pour l’Eglise, le mystère de la
procréation disparaît derrière l’intervention technique du praticien. La
procréation ne se fait plus à deux mais à trois, avec intervention extérieure.
Or la fécondation est une action de Dieu à l’intérieur de la relation d’amour.
Le mystère de l’origine, donc de la filiation, est occulté par l’action
technique. Le sein maternel est le lieu de la rencontre de l’homme et de la
femme et de la mère et de l’enfant. La fécondation est le fruit d’une alliance
entre l’homme et la femme par l’engagement du corps, et d’une alliance de la
mère et de l’enfant par l’engagement de la parole. La prise de conscience de la
succession des générations tend à disparaître. On occulte la fécondation comme
lieu exceptionnel d’expérience humaine.
Les AMP permettent la
maternité de femmes de 60 ans et plus, le phénomène des mères-porteuses
avec ou sans rétribution, la gestation d’un enfant par une grand-mère ou une
tante pour sa fille ou sa nièce, l’insémination d’une femme avec le sperme du
mari décédé, la fécondation d’un enfant pour couples homosexuels.
Il faut ajouter que le processus est très
éprouvant et très coûteux. On a pu parler d’un véritable « parcours du
combattant ». Il y faut souvent de nombreux essais, aboutissant parfois à
des échecs définitifs.
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Les recherches sur
l’embryon.
L’avortement devenu, pratiquement et
théoriquement, de plus en plus normal est à la source d’une multitude de
pratiques qui ne pourraient pas exister sans lui. Une des conséquences de cet
affaiblissement de la conscience réside dans la dérive, adoptée par la dernière
loi française de bioéthique (2004), de la recherche sur les embryons. Cette dérive vient de la pratique de la
création des nombreux embryons surnuméraires pour l’assistance médicale à la
procréation (AMP). Que faire de ces embryons ? Les laisser mourir ?
Les utiliser pour la recherche ? La réponse, de plus en plus admise dans
l’opinion, est de les utiliser pour la recherche. Même si une telle possibilité
est « encadrée » par la loi,
elle est une dégradation de plus dans la conception de l’être humain
commençant. Les arguments utilisés sont de plusieurs ordres.
Plutôt que de laisser mourir ces embryons,
il vaut mieux les utiliser pour la recherche. Cette recherche peut apporter de
grands progrès à la médication de certaines maladies. Si nous ne le faisons pas
chez nous, d’autres pays le font ou vont le faire. Il convient donc de ne pas
prendre de retard. De grands enjeux économiques sont en cause. Il existe déjà
un commerce international de cellules- souches- embryonnaires issus d’embryons
surnuméraires ou d’embryons fabriqués pour cela grâce au don d’ovules de
femmes, surtout de femmes pauvres, en attendant les cellules- souches produites
par clonage. L’Eglise n’admet une telle recherche sur les embryons vivants
présents dans le sein de leur père qu’en vue de soigner ces embryons. Mais elle
est opposée aux recherches sur l’embryon en vue de prélever des cellules-souches pour un usage médical. Car peu à peu des
embryons humains vont être transformés en carrières de matériau utilisable.
En effet la tentation, à laquelle a déjà
succombé tel chercheur qui le reconnaît, sera de créer des embryons uniquement
pour la recherche, y compris, bientôt sans doute, par le clonage thérapeutique.
Qui pourra empêcher d’autres formes d’utilisation des êtres humains pour la
santé et le confort d’autres êtres humains ( par
exemple, comme cela s’est fait, et non seulement en Allemagne nazie, les
expérimentations sur des hommes vivants, ainsi sur des condamnés à mort)? Or
cette recherche ne peut se faire que par la mort des embryons utilisés. Les
embryons ne peuvent servir à la recherche que si l’on accepte comme normale
leur suppression. Cela ne fait plus de problème lorsqu’on parle de la recherche
sur les embryons. On met en avant les bénéfices, jamais la condition
indispensable de ces bénéfices.
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L’inévitable clonage.
De l’utilisation des embryons pour la
recherche, il est naturel de passer au clonage. Puisqu’il faut des embryons
pour la recherche, pourquoi ne pas fabriquer des embryons par clonage ? On
parle d’un double clonage : le clonage thérapeutique et le clonage
reproductif. En réalité il n’y en a qu’un. Car le clonage thérapeutique est un
clonage reproductif interrompu. Qu’est le clonage ?
C’est un procédé technique qui consiste à
créer un embryon en introduisant dans un ovule féminin privé de son noyau une
cellule somatique provenant d’un individu humain. On met ainsi en route un
embryon identique à l’être humain sur lequel a été prélevée la cellule. En
arrêtant le développement de cet embryon au bout de cinq ou six jours, on
détruit cet embryon et on prélève sur lui des cellules, qui peuvent être
multipliées à l’infini. C’est ce qu’on appelle les cellules- souches-
embryonnaires. On pourra alors réimplanter ces cellules qui vont régénérer
l’organisme malade. Tel est le clonage thérapeutique.
Si on laisse se développer l’embryon ainsi
cloné, il deviendra au bout de dix jours un embryon pouvant aboutir à un être
identique à celui sur lequel a été prélevée la cellule. Tel est le clonage
reproductif. D’un côté il y a toujours destruction de l’embryon. De l’autre on
aboutit à un être humain, non pas procréé par fécondation humaine, mais
fabriqué en série. Le clonage est la négation de la création telle que nous
l’entendons, la négation de la fécondation humaine par la rencontre d’un homme
et d’une femme, la négation de l’unicité de chaque être humain, la négation de
la suite des générations, la négation de la participation d’un être humain à
une généalogie, ce qui est fondamental pour qu’un homme soit vraiment un membre
de l’humanité. C’est l’homme transformant la création en fabrication .Cela
fait dire à certains que le clonage est un crime contre l’humanité.
Jusqu’à présent tout le monde s’oppose au
clonage reproductif, sauf tel ou tel médecin ou groupe qui se dit prêt à
réaliser un tel clonage. Mais le clonage thérapeutique est déjà admis en Grande
Bretagne. L’ONU récemment n’est pas arrivé à se mettre d’accord sur une déclaration
interdisant le clonage. Il semble difficile qu’il ne se généralise pas. Car,
dit-on, il ne faut pas prendre scientifiquement de retard sur d’autres pays. Il
faut sauvegarder le prestige scientifique
de son pays. Si on ne le fait pas, il faudra acheter des cellules- souches-
embryonnaires à d’autres pays. Tel chercheur français reconnaît qu’il est
dommage que le clonage thérapeutique ne soit pas admis pour l’instant en
France.
Le clonage thérapeutique aboutira à
transformer plus encore les embryons en simple matériau utilisable pour
d’autres fins que leur propre vie. Il risque d’aboutir à une commercialisation
des ovules féminins, donc à un nouveau marché de femmes, surtout celles des
pays pauvres. Cela est d’autant plus regrettable qu’il est possible de
développer la recherche sur les cellules- souches- adultes, qui ne posent pas
de problème éthique. Encore faut-il que la société encourage et finance une
telle recherche.
L’annonce de la naissance
de la brebis Dolly, puis, de la naissance vraie ou
fausse d’un enfant cloné au sein de la secte raëlienne,
a soulevé beaucoup de protestations de la part d’hommes politiques et de
scientifiques. Combien de temps tiendront ces protestations ? Aux Etats
Unis déjà, des hommes politiques et des savants plaident pour que ne soit pas
légalisée l’interdiction absolue du clonage reproductif. Surtout il y a une
immense hypocrisie à protester contre le clonage reproductif tout en demandant
de plus en plus dans le monde scientifique que soit admis le clonage
thérapeutique ?
D’une part, la technique est absolument la
même pour les deux formes de clonage, la seule différence étant que dans un cas
on arrête le développement de l’embryon cloné à cinq ou six jours et qu’on le
laisse se développer dans l’autre cas. Plus gravement, personne ne souligne que
tout clonage thérapeutique se fait au prix de la destruction obligatoire de
l’embryon dans le but de recueillir des cellules qui pourront être multipliées
à l’infini (les cellules- souches- embryonnaires). La mort des embryons
fabriqués par clonage en vue de la recherche devient de plus en plus normale,
devient un processus qui va de soi, devant lequel nulle indignation de ne
s’élève, dont on ne parle pas.
Nous avons l’impression qu’un certain
nombre de chercheurs se servent de la gravité du clonage reproductif et
protestent violemment contre lui pour laisser entendre que le clonage
thérapeutique est une technique parfaitement innocente sur le plan éthique,
qu’il est un procédé bénéfique dont il serait grave de se passer, donc qu’il
serait criminel d’interdire. Le clonage thérapeutique est la voie ouverte au
clonage reproductif. Quand la technique de ce clonage thérapeutique sera
parfaitement au point, comment empêcher que des chercheurs, sous le couvert du
clonage thérapeutique, fabriquent un embryon cloné qu’ils laisseront se
développer jusqu’à la production d’un embryon cloné ? C’est ce que
craignent et disent clairement un certain nombre de chercheurs.
La tentation du clonage reproductif, dont
le clonage thérapeutique assurera la technique, va être d’autant plus grande qu’il
facilitera l’eugénisme et permettra des expérimentations génétiques illimitées.
Ne soyons pas naïfs : la cause du
clonage thérapeutique, magnifiquement servie par la menace du clonage reproductif,
est une étape de plus dans l’anésthésie des
consciences et dans la dérive anti-humaine devenant de plus en plus normale
pour l’ensemble des français, y compris de la majorité des catholiques. Une
fois de plus il apparaît que l’Eglise catholique, en interdisant non seulement
le clonage reproductif, mais aussi le clonage thérapeutique, est la gardienne
de la valeur unique de l’être humain.
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Les différents diagnostics
et l’eugénisme.
Les progrès techniques permettent de connaître
de mieux en mieux ce que sera l’enfant, donc de trier et de choisir les
embryons, donc d’aller vers un eugénisme qui ne dit pas son nom, qu’on dit ne
pas être un eugénisme d’Etat, mais qui devient en fait un eugénisme officiel.
Quels sont ces diagnostics ?
*
Le diagnostic préimplantatoire. Il s’agit du diagnostic réalisé sur les
embryons obtenus par AMP avant qu’ils ne soient implantés dans le sein de la
mère. Ce diagnostic permet de choisir l’embryon qu’on veut mener jusqu’à la
naissance. Parmi les quelques embryons ainsi produits, on fait un tri pour ne
retenir que celui qui semble le plus sain ou qui correspond le mieux au désir des parents. Cela se réalise
déjà, sans que cela ne pose de problème à l’opinion, qui y voit au contraire un
progrès prometteur.
* le diagnostic prénatal. C’est le
diagnostic réalisé sur l’embryon dans le sein de la mère, en particulier par l’amniocentèse.
Cette manière de faire aboutit au même résultat que le précédent, à savoir
qu’on en vient à éliminer par destruction tout embryon qui ne semble pas de bonne qualité ou qui ne
correspond pas au modèle désiré. Il faut noter en outre, ce qu’on ne dit
jamais, qu’en prélevant le liquide amniotique qu’on va analyser, bien des
embryons en bonne santé sont détruits.
* l’échographie. L’échographie permet
de voir les anomalies, même minimes, des embryons et des foetus. Ces examens
aboutissent souvent à l’avortement, y compris pour des défauts minimes de
l’embryon. L’arrêt Perruche, c’est-à-dire la décision de la cour de cassation
de verser des indemnités à un jeune handicapé dont l’échographie n’avait pas
décelé les symptômes de handicap, a fortement ébranlé les médecins échographes,
qui se sont senti menacés de procès pour n’avoir pas pu ou su déceler un défaut
de l’embryon, et dont les assureurs étaient tentés d’augmenter dans des
proportions énormes leurs cotisations. L’assemblée nationale, grâce à
l’intervention du professeur Mattei, a quelque peu remis en cause ce qui s’est
passé avec Nicolas Perruche.
Ces divers diagnostics aboutissent de plus
en plus à des avortements, les avortements des enfants qui ne correspondent pas
au choix des adultes. En d’autres termes, nous sommes de plus en plus dans une
société d’où les handicapés et les malades sont exclus. On a pu écrire qu’on
allait vers l’éradication du mongolisme par l’éradication des mongoliens avant
leur naissance. C’est d’autant plus vrai que certains hommes politiques
déclarent publiquement qu’il faut aller vers l’obligation faite aux parents,-
et aux médecins -, d’éliminer par avortement les futurs enfants menacés de
handicap, sous peine de se voir supprimer toute aide financière pour
l’éducation des enfants handicapés qu’ils auront décidé de garder. Au lieu de
développer la recherche médicale pour soigner certaines maladies, on prône la
suppression de ces futurs malades. Il est heureux que les associations de
handicapés et ceux qui les soutiennent et les accompagnent réagissent fortement
contre cette vision d’une société rejetant les plus faibles.
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La volonté de maîtriser le
début et la fin de vie
Il y a une corrélation entre les dérives
concernant le début de la vie et celles concernant la fin de la vie. D’une
part, la dérive eugénique commence à toucher les nouveaux-nés. Tel chercheur ne
craint pas de dire qu’il faut supprimer les nouveaux-nés handicapés dont les
diagnostics avant la naissance n’ont pas décelé le handicap. On ne parle plus
alors d’avortement, mais d’euthanasie néo-natale. Et l’avortement lui-même devient
une euthanasie anté-natale. La maîtrise sur la vie
tend à devenir aussi une maîtrise sur la mort, pour l’empêcher quand cela est possible, pour la donner quand la
vie semble ne plus avoir de sens.
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Vers des recherches futures
- Un vaste domaine d’expérimentations est ouvert.
Ainsi il est possible de prévoir la production d’hommes génétiquement modifiés,
en vue de donner naissance à des êtres humains aux capacités physiques,
intellectuelles, sociales, choisies et performantes dans tel ou tel ou tel
domaine. Va-t-on vers un autre type d’hommes ? Les opposants aux OGM
devraient se pencher sur de telles possibilités à venir. Je n’ai pas
connaissance que des associations écologiques luttent pour la protection de
l’humanité comme elles luttent pour la protection des plantes ou des animaux.
- Certains envisagent même des
« chimères » provenant d’une association de gênes d’êtres humains et
d’animaux, comme on le fait pour la production de plantes, de fleurs,
d’animaux. Est-il besoin d’insister sur la qualification éthique de telles
recherches ?
Conclusion
Il nous faut bien comprendre et expliquer
la position de l’Eglise catholique et sa radicalité. Elle ne refuse pas les
recherches, les progrès, le bonheur humain. Elle ne se situe pas seulement sur
un plan moraliste. Elle dit un « oui » clair à l’être humain, à sa
vie, à sa vocation éternelle découlant du projet créateur de Dieu et du salut
accompli par le Fils de Dieu devenu homme. L’Eglise est pour tout ce qui se
fait pour l’homme. Elle estime hautement ceux qui oeuvrent pour l’homme. Elle
appelle ses membres et la société à agir pour la dignité de l’homme partout où
elle est en cause..
Ce qui se passe dans les domaines de la
vie commençante comme de la vie finissante touche l’homme dans sa globalité. Il
ne s’agit pas là, comme on le dit souvent, de la vie privée des personnes. La
preuve en est que les instances gouvernementales et parlementaires sont amenées
à légiférer. La preuve en est encore que la nation, donc tous les citoyens, y
compris ceux qui sont opposés à certaines pratiques, l’avortement par exemple,
est appelée à financer leur pratique. La preuve en est enfin que ce qui est en
train de se jouer dans ces domaines entraîne une profonde modification des
mentalités et des jugements, ayant des conséquences parfois dramatiques sur le
comportement des enfants, des jeunes et des générations à venir.
Prétendre devenir les maîtres absolus de
la vie et de la mort conduit certains à se croire en effet les maîtres absolus
de la vie et de la mort. Pourquoi la société interdirait-elle certains actes,
et pourquoi certains agissements seraient-ils humainement condamnables, si
officiellement, en toute légalité, des actes de mort peuvent être
accomplis ? Dans son apparente intransigeance, l’Eglise catholique prend
le parti de l’homme.
Mgr Bouchex 18 décembre
2004 à la réunion des associations pro-vie du Sud-Est