6. Ce que comporte l’acte humain à l’effet d’être un acte bon méritoire, ou un acte mauvais déméritoire, à parler du mérite et du démérite en général

– Pourriez-vous me dire ce par quoi l’homme, sur cette terre et dans cette vie, peut se préparer, par voie de mérite, à recevoir de Dieu, un jour, la vision de Dieu qui doit faire son éternel bonheur à titre de récompense ?

– Oui, c’est uniquement par ses actes (q. 6, prologue).

– Que sont ces actes par lesquels l’homme peut, sur cette terre et dans cette vie, se préparer, par voie de mérite, à recevoir de Dieu, un jour, la vision de Dieu qui doit faire son éternel bonheur à titre de récompense ?

– Ce sont les actes de vertu.

– Qu’est-ce que vous entendez par les actes de vertu ?

– Ce sont les actes que l’homme fait par sa volonté en conformité de la volonté divine sous l’action de la grâce (q. 6 & 114).

– Que faut-il pour que les actes de l’homme soient faits par sa volonté ?

– Il faut qu’il les fasse spontanément et en connaissance de cause (q. 6, a. 1-8).

– Qu’est-ce que vous entendez quand vous dites qu’il faut qu’il les fasse spontanément ?

– J’entends qu’il faut qu’il les fasse de lui-même et sans y être contraint ou forcé (q. 6, a. 1-4-5-6).

– Comment l’homme peut-il être contraint ou forcé à faire quelque chose contre sa volonté ?

– L’homme peut être contraint ou forcé à faire quelque chose contre sa volonté de deux manières : par la violence et par la peur (q. 6, a. 4-5-6).

– Qu’entendez-vous par la violence ?

– J’entends une force extérieure à l’homme qui lie ses membres et qui l’empêche d’agir comme il voudrait, ou lui fait faire extérieurement ce que sa volonté repousse (q. 6, a. 4-5).

– Et qu’entendez-vous par la peur ?

– J’entends un mouvement intérieur qui porte l’homme à vouloir une chose qu’il ne voudrait pas en d’autres circonstances, mais qu’il consent à vouloir en telles circonstances pour éviter un mal qui le menace (q. 6, a. 6).

– Ce qu’on fait sous le coup de la violence est-il tout à fait involontaire ?

– Oui, ce qu’on fait sous le coup de la violence extérieure est tout à fait involontaire (q. 6, a. 5).

– Pourquoi dites-vous sous le coup de la violence extérieure ?

– Parce que le mot violence se prend aussi quelquefois pour le mouvement intérieur de la colère.

– Dans ce cas et dans le cas des autres mouvements intérieurs qui excitent ou inclinent la volonté, peut-on parler aussi d’acte involontaire ?

– Non, dans ces divers cas, on ne peut point parler d’acte involontaire, à moins que ces mouvements intérieurs ne soient si véhéments qu’ils arrivent à lier l’usage de la raison (q. 6, a. 7).

– Et, quand on agit par peur, y a-t-il alors acte involontaire ?

– Quand on agit par peur, l’acte est volontaire, mais il y a un certain mélange d’involontaire : en ce sens qu’on veut bien ce qu’on fait, mais qu’on le veut à contre cœur et à cause d’un mal qu’il s’agit d’éviter (q. 6, a. 6).

– Vous avez dit aussi qu’il faut, pour que les actes de l’homme soient faits par sa volonté, qu’ils soient faits en connaissance de cause ?

– Oui ; et cela veut dire que, si l’on fait une chose en se trompant au sujet de cette chose, la chose que l’on fait n’est pas volontaire (q. 6, a. 8).

– Cette chose-là est-elle involontaire ?

– Oui, si en la sachant, on ne l’eût point faite (q. 6, a. 8).

– Ce que l’on fait ou que l’on ne fait pas, à cause de l’ignorance ou de l’erreur dans laquelle on se trouve, peut-il quelquefois être cependant volontaire ?

– Oui ; ce le sera toujours, si l’on est responsable de son ignorance ou de son erreur (q. 6, a. 8).

– Et quand est-on responsable de son ignorance ou de son erreur ?

– Quand on l’a voulue directement ou qu’elle est l’effet d’une négligence coupable (q. 6, a. 8).

– L’acte que l’homme fait par sa volonté se présente-t-il revêtu de certaines circonstances dont il faille tenir compte et qui puissent contribuer au caractère de cet acte ?

– Oui ; et rien n’est plus important que la considération de ces circonstances pour apprécier comme il convient l’acte que l’homme fait par sa volonté (q. 7, a. 1-2).

– Pourriez-vous me dire quelles sont ces circonstances ?

– Ce sont les circonstances de personne, d’objet, ou d’effet produit, de lieu, de motif, de secours, de temps (q. 7, a. 3).

– Que faut-il entendre par ces diverses circonstances ?

– Ces diverses circonstances portent sur le caractère ou la condition de la personne qui agit, sur ce qu’elle fait ou ce qui résulte de son acte, sur le lieu où elle agit, sur le but pour lequel elle agit, sur ceux qui lui servent de moyens, sur le temps où elle agit (q. 7, a. 3).

– De ces circonstances, quelle est la plus importante ?

– C’est celle du motif pour lequel on agit, ou du but que l’on se propose dans son action (q. 7, a. 4).

– Est-ce toujours la volonté qui produit les actes que l’homme fait par sa volonté ?

– Oui, c’est toujours la volonté ; mais quelquefois la volonté toute seule ; et, d’autres fois, ce sont d’autres facultés ou même les membres extérieurs du corps, mais sous l’impulsion et par l’ordre de la volonté (q. 8 & 17).

– C’est donc toujours à la volonté que tout se ramène, pour l’homme, dans les actes qui constituent sa vie et le prix de cette vie en vue du bonheur du ciel à conquérir ou à perdre ?

– Oui, c’est toujours à la volonté que tout se ramène, pour l’homme, dans les actes qui constituent sa vie et le prix de cette vie en vue du bonheur du ciel à conquérir ou à perdre ; et cela veut dire que l’acte de l’homme n’a de valeur qu’autant qu’il émane de sa volonté : soit qu’elle-même le produise ; soit qu’elle meuve à la produire les autres facultés ou membres qui le produisent (q. 8 & 21).

– Quel est, de tous les actes intérieurs de la volonté, celui qui est le plus important et qui engage définitivement la responsabilité de l’homme ?

– C’est l’acte de choisir ou le choix (q. 13, a. 1-6).

– Pourquoi l’acte de choisir ou le choix ont-ils cette importance ?

– Parce qu’ils font que la volonté s’arrête, en connaissance de cause et après délibération, sur tel bien déterminé qu’elle accepte et qu’elle entend faire sien de préférence à ce qui n’est pas lui (q. 13, a. 1).

– Le choix est-il proprement l’acte même du libre arbitre ?

– Oui, le choix est proprement l’acte même du libre arbitre (q. 13, a. 6).

– C’est donc par le choix qu’il fait sur toutes choses que l’homme prend son vrai caractère moral et sa valeur réelle en vue de son bonheur éternel à conquérir ou à perdre ?

– Oui, c’est par le choix qu’il fait sur toutes choses que l’homme prend son vrai caractère moral et sa valeur réelle, en vue de son bonheur éternel à conquérir ou à perdre.

– Comment se divise le choix de l’homme quant à son vrai caractère et à sa valeur réelle en vue de son vrai bonheur éternel à conquérir ou à perdre ?

– Il se divise en choix bon et en choix mauvais (q. 18 à 21).

– Qu’est-ce que le choix bon ?

– C’est celui qui porte sur une chose bonne, en vue d’une fin bonne, et dont toutes les circonstances qui l’accompagnent sont bonnes (q. 18 & 19).

– D’où se tire la bonté de la chose, et la bonté de la fin, et la bonté des circonstances ?

– Cette bonté se tire du rapport qu’ont toutes ces choses avec la droite raison (q. 19, a. 3-6).

– Qu’entendez-vous par la droite raison ?

– J’entends la raison éclairée de toutes les lumières venues de Dieu, ou qui, du moins, ne leur est pas sciemment contraire.

– C’est donc quand l’homme veut ou choisit une chose conforme à la droite raison, dans un but ou pour une fin que la droite raison approuve, et avec les circonstances dont toutes et chacune s’harmonisent avec la droite raison, que l’acte voulu ou choisi et fait par l’homme est un acte bon ?

– Oui ; c’est alors, et alors seulement, que l’acte de l’homme est un acte bon. Si, sur un de ces points quelconques, l’acte de l’homme n’est pas conforme à la droite raison, il n’est plus un acte bon, et il devient, bien qu’à des degrés divers, un acte mauvais (q. 18 à 21).

– Comment s’appelle l’acte mauvais ?

– L’acte mauvais s’appelle la faute ou le péché (q. 21, a. 1).