2. La foi : sa nature ; les conditions de son acte ; le Credo ; la formule de l'acte de foi ; les péchés qui lui sont opposés : l'infidélité ; l'hérésie ; l'apostasie ; le blasphème

— Qu’est-ce que la foi ?

— La foi est une vertu surnaturelle qui fait que notre intelligence adhère très fermement et sans crainte de se tromper, bien qu’elle ne le voie pas, à ce que Dieu nous a révélé, notamment sur lui-même et sur sa volonté de se donner un jour lui-même à nous comme objet de notre bonheur parfait (q. 1, 2 et 4).

— Comment notre intelligence peut-elle adhérer fermement, sans crainte de se tromper, à ce que Dieu a révélé et qu’elle ne voit pas ?

— En se fondant sur l’autorité de Dieu, qui ne peut ni se tromper, ni nous tromper (q. 1, a. 1).

— Et pourquoi Dieu ne peut-il ni se tromper, ni nous tromper ?

— Parce qu’il est la vérité même (q. 1, a. 1 ; q. 4, a. 8).

— Mais comment savons-nous que Dieu nous a révélé ce que vous dites ?

— Nous le savons par ceux à qui il l’a révélé et par ceux à qui il a confié le dépôt de sa révélation (q. 1, a. 6 et 10).

— Quels sont ceux à qui Dieu l’a révélé ?

— C’est d’abord le premier homme lui-même, à qui Dieu s’est manifesté directement ; ce sont ensuite tous les prophètes de l’Ancien Testament ; et, enfin, les apôtres au temps de Jésus-Christ (q. 1, a. 7).

— Comment savons-nous que Dieu s’est ainsi révélé au premier homme, aux prophètes, aux apôtres ?

— Nous le savons par l’histoire qui nous le rapporte et qui nous dit aussi les prodiges ou les miracles faits par Dieu pour convaincre les hommes de son intervention surnaturelle.

— Le miracle prouve-t-il d’une façon absolue que Dieu est intervenu ?

— Oui, puisqu’il est le signe même de Dieu, nulle créature ne pouvant l’accomplir par sa propre vertu.

— Où se trouve l’histoire de ces interventions surnaturelles de Dieu et de sa révélation ?

— Cette histoire se trouve surtout dans l’Écriture sainte ou la Bible.

— Qu’entendez-vous par l’Écriture sainte ou la Bible ?

— J’entends un ensemble de livres divisés en deux groupes qu’on appelle l’Ancien et le Nouveau Testament.

— Ces livres ressemblent-ils à tous les autres livres ?

— Non, ces livres ne ressemblent pas à tous les autres livres ; car les autres livres sont écrits par des hommes, tandis que ceux-là ont été écrits par Dieu lui-même.

— Que voulez-vous dire quand vous dites que ces livres ont été écrits par Dieu lui-même ?

— Je veux dire que Dieu est l’auteur principal de ces livres ; et qu’il s’est servi, pour les écrire, des hommes choisis par lui, comme autant d’instruments.

— Tout ce qui est contenu dans ces livres, y a donc été mis par Dieu ?

— Oui, tout ce qui est contenu dans ces livres y a été mis par Dieu, à parler du premier exemplaire autographe écrit par les écrivains sacrés ; car les autres ne sont divins qu’autant qu’ils sont conformes au premier.

— Lors donc que nous lisons ces livres, c’est comme si nous entendions Dieu lui-même nous parler ?

— Oui, quand nous lisons ces livres, c’est comme si nous entendions Dieu lui-même nous parler.

— Mais ne pouvons-nous pas nous tromper sur le sens de cette parole de Dieu ?

— Oui, nous pouvons nous tromper sur le sens de cette parole de Dieu ; car, s’il est des passages qui sont par eux-mêmes très clairs, il en est d’autres qui sont obscurs.

— D’où vient cette obscurité de la parole de Dieu dans l’Écriture sainte ou la Bible ?

— Cette obscurité vient d’abord des mystères mêmes qu’elle renferme, puisqu’il s’agit, en ce qu’elle a de plus essentiel, de vérités que Dieu seul connaît par lui-même, et qui dépassent toute intelligence créée ; elle vient aussi de l’ancienneté de ces livres, écrits premièrement pour des peuples qui n’avaient ni notre langue, ni nos habitudes de vie ; et, enfin, elle vient des fautes qui ont pu se glisser, soit dans les copies de la langue originale, soit dans les traductions qui en ont été faites et les copies de ces traductions.

— Y a-t-il quelqu’un qui soit assuré de ne pas se tromper sur le sens de la parole de Dieu dans l’Écriture sainte, et où qu’elle se trouve ?

— Oui, c’est le souverain pontife, et par lui l’Église catholique dans son enseignement universel (q. 1, a. 10).

— Pourquoi dites-vous que le souverain pontife et, par lui, l’Église catholique dans son enseignement universel ne peuvent pas se tromper sur le sens de la parole de Dieu dans l’Écriture sainte, et où qu’elle ait été conservée ?

— Parce que Dieu lui-même a voulu qu’ils fussent infaillibles.

— Et pourquoi Dieu a-t-il voulu qu’ils fussent infaillibles ?

— Parce que sans cela les hommes n’auraient pas eu les moyens nécessaires d’arriver sûrement à la fin surnaturelle à laquelle il les appelle (q. 1, a. 10).

— Est-ce là ce qu’on veut dire quand on dit que le pape et l’Église sont infaillibles dans les questions qui touchent à la foi et aux mœurs ?

— Oui, et c’est là très exactement le sens de ces expressions, et l’on veut dire que le pape et l’Église ne peuvent jamais se tromper ni nous tromper, quand ils livrent ou interprètent aux hommes la parole de Dieu, en ce qui touche aux vérités essentielles qui regardent les choses qu’il faut croire ou qu’il faut faire, pour obtenir ce qui doit être un jour notre bonheur parfait.

— Existe-t-il un résumé de ces vérités essentielles qui regardent ce qu’il faut croire et sont le fondement de ce qu’il faut faire pour obtenir un jour notre bonheur parfait ?

— Oui, c’est le symbole des apôtres ou le Credo (q. 1, a. 6).

— Pourriez-vous me dire le symbole des apôtres ou le Credo ?

— Le voici, tel que le récite chaque jour l’Église catholique :

Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre ;

et en Jésus-Christ, son Fils unique, Notre Seigneur,

qui a été conçu du Saint-Esprit ;

est né de la Vierge Marie ;

a souffert sous Ponce Pilate, a été crucifié, est mort, a été enseveli ;

est descendu aux enfers ;

le troisième jour est ressuscité d’entre les morts ;

est monté aux cieux, est assis à la droite de Dieu le Père tout-puissant ;

d’où il viendra pour juger les vivants et les morts.

Je crois au Saint-Esprit ;

à la sainte Église catholique, à la communion des saints, à la rémission des péchés ;

à la résurrection de la chair, à la vie éternelle.

Ainsi soit-il.

— La récitation de ce symbole des apôtres, ou de ce Credo, est-il l’acte de foi par excellence ?

— Oui, la récitation de ce symbole des apôtres, ou de ce Credo, est l’acte de foi par excellence ; et l’on ne saurait trop le recommander à tous les fidèles comme pratique de chaque jour.

— Pourriez-vous me donner encore une autre formule de l’acte de foi, courte et précise, qui serait, elle aussi, excellemment, l’acte de la vertu surnaturelle de foi, qui est la première des vertus théologales ?

— Oui ; et voici cette formule, sous forme d’hommage à Dieu : Mon Dieu, je crois, sur votre parole, tout ce que vous avez révélé, en vue de vous-même, voulant être, un jour, notre bonheur parfait.

Quels sont ceux qui peuvent faire cet acte de foi ?

— Ceux-là seuls qui ont la vertu surnaturelle de foi (q. 4, a. 5).

— Les infidèles ne peuvent donc pas faire cet acte de foi ?

— Les infidèles ne peuvent pas faire cet acte de foi ; parce qu’ils ne croient pas ce que Dieu a révélé en vue de leur bonheur surnaturel : soit qu’ils l’ignorent, et ne s’abandonnent point, confiants, à l’action de Dieu, pouvant et voulant leur donner leur bien selon qu’il lui plaît ; soit que, l’ayant connu, ils aient refusé d’y donner l’assentiment de leur esprit (q. 10).

— Et les impies peuvent-ils faire cet acte de foi ?

— Non, les impies ne peuvent pas faire cet acte de foi ; parce que, même s’ils tiennent pour certain ce que Dieu a révélé, en raison de l’autorité de Dieu, qui ne peut ni se tromper, ni nous tromper, l’adhésion de leur esprit n’est point l’effet d’une sympathie surnaturelle à l’endroit de la parole de Dieu, qu’ils détestent au contraire, bien que ne pouvant pas ne pas la subir (q. 5, a. 2, ad 2).

— Y a-t-il des hommes qui puissent croire de la sorte, sans pourtant faire l’acte de foi de la vertu surnaturelle ?

— Oui, et ils ne font en cela qu’imiter les démons (q. 5, a. 2).

— Les hérétiques peuvent-ils faire l’acte de foi de la vertu surnaturelle ?

— Non, les hérétiques ne peuvent pas faire l’acte de foi de la vertu surnaturelle ; parce que, même s’ils adhèrent, par leur esprit, à tel ou tel point de la doctrine révélée, ils n’y adhèrent point sur la parole de Dieu, mais sur leur propre jugement (q. 5, a. 3).

— Ces hérétiques sont-ils encore plus en défaut, par rapport à l’acte de foi, que les impies ou les démons ?

— Oui, parce que la parole de Dieu ou son autorité n’est même pas ce qui motive l’adhésion de leur esprit.

— Et les apostats, peuvent-ils faire l’acte de foi ?

— Non, les apostats ne peuvent pas faire l’acte de foi ; parce que leur esprit a complètement rejeté ce à quoi ils avaient cru d’abord sur la parole de Dieu (q. 12).

— Les pécheurs peuvent-ils faire l’acte de foi, même comme acte de la vertu surnaturelle ?

— Oui, les pécheurs peuvent faire l’acte de foi, même comme acte de la vertu surnaturelle, quand ils ont, en effet, cette vertu : et ils peuvent l’avoir, quoique dans un état imparfait, quand ils n’ont pas la charité ou qu’ils sont en état de péché mortel (q. 4, a. 1 et 4).

— Tout péché mortel n’est donc pas un péché contre la foi ?

— Non, tout péché mortel n’est pas un péché contre la foi (q. 10, a. 1 et 4).

— En quoi consiste exactement le péché contre la foi ?

— Le péché contre la foi consiste à ne pas vouloir soumettre son esprit à la parole de Dieu par respect et par sympathie pour cette parole (q. 10, a. 1 et 3).

— Est-ce toujours la faute de l’homme, s’il ne soumet pas ainsi son esprit à la parole de Dieu, par respect et par sympathie pour cette parole ?

— Oui, c’est toujours la faute de l’homme et parce qu’il résiste à la grâce actuelle de Dieu l’invitant à faire cet acte de soumission (q. 6, a. 1 et 2).

— Tous les hommes qui vivent sur cette terre ont-ils toujours cette grâce actuelle ?

— Oui, tous les hommes qui vivent sur cette terre ont toujours cette grâce actuelle, bien qu’à des degrés divers, et selon qu’il plaît à Dieu de la distribuer dans les conseils de sa Providence.

— Est-ce une grande grâce de Dieu d’avoir la vertu de foi surnaturelle ?

— Oui, d’avoir la vertu de foi surnaturelle est, d’une certaine manière, la plus grande grâce de Dieu.

— Pourquoi dites-vous que d’avoir la foi surnaturelle est la plus grande grâce de Dieu ?

— Parce que, sans la foi surnaturelle, on ne peut absolument rien dans l’ordre du salut ; et qu’on est entièrement perdu pour le ciel, à moins qu’on ne la reçoive de Dieu avant de mourir (q. 2, a. 5 et 8 ; q. 4, a. 7).

— Ce serait donc, quand on a le bonheur de la posséder, une grande faute de s’exposer à la perdre par des fréquentations, ou des conversations, ou des lectures qui seraient de nature à y porter atteinte ?

— Oui, ce serait une très grande faute, si on le faisait sciemment ; et c’est toujours chose très regrettable de courir un pareil danger, même si tout d’abord il n’y avait pas de sa faute.

— Il importe donc souverainement de bien choisir ses fréquentations et ses lectures, en vue de ne pas exposer, mais, au contraire, pour conserver et développer en soi le grand bien de la foi ?

— Oui, cela importe souverainement, alors surtout que, dans le monde, et avec la liberté effrénée de la presse, on peut rencontrer aujourd’hui tant d’occasions qui sont un péril pour la foi.

— Y a-t-il encore un autre péché contre la foi ?

— Oui, c’est le péché de blasphème (q. 13).

— Pourquoi dites-vous que le blasphème est un péché contre la foi ?

— Parce qu’il va directement contre l’acte extérieur de la foi, qui est la confession de cette foi par nos paroles : tout blasphème, en effet, consiste à proférer quelque parole qui est injurieuse à Dieu ou à ses saints (q. 13, a. 1).

— Le blasphème est-il un grand péché ?

— Le blasphème est toujours de soi un très grand péché (q. 13, a. 2 et 3).

— Est-ce que l’habitude de proférer des blasphèmes excuse ou amoindrit leur gravité, quand on les profère ?

— Au contraire, cette habitude les aggrave plutôt, puisqu’au lieu de travailler à s’en corriger, on a laissé ce mal si grave s’enraciner si profondément (q. 13, a. 2, ad 3).