11. De l’unité ou de la multiplicité qui est en lui : quant à son être ; quant à sa volonté ; quant à son opération
— Jésus-Christ, ou
le Fils de Dieu incarné, constitue-t-il un seul être, ou est-il plusieurs ?
— Il ne constitue qu’un seul être, Dieu et homme tout
ensemble, en raison de l’unité de personne qui subsiste en l’une et l’autre
des deux natures divine et humaine (q. 17, a. 1, 2).
— Pouvons-nous parler
de multiplicité de volontés en Jésus-Christ, le Fils de Dieu incarné ?
— Oui ; car il y a en lui la volonté divine, comme
Dieu ; et la volonté humaine, comme homme (q. 18, a. 1).
— Y a-t-il aussi,
en lui, multiplicité de volontés, comme homme ?
— Oui ; à prendre le mot volonté dans un sens
large et selon qu’il désigne la faculté affective sensible en même temps que
la faculté affective intellectuelle ; ou encore selon qu’il désigne parfois
divers actes de ces mêmes facultés (q. 18, a. 2, 3).
— Jésus-Christ ou
le Fils de Dieu incarné eut-il et a-t-il dans sa nature humaine le libre arbitre ?
— Assurément, et d’une manière souverainement excellente ;
bien que d’ailleurs il fût dans l’absolue impossibilité de pécher, sa volonté
délibérée étant toujours et de tout point conforme à la volonté divine, même
quand la partie affective sensible ou le mouvement naturel de sa volonté, en
ce qui était de leur domaine propre, pouvaient se porter ailleurs qu’à ce que
voulait sa volonté délibérée en conformité avec le vouloir positif divin (q. 18,
a. 4).
— Pouvons-nous aussi
et devons-nous parler de multiplicité d’opérations en Jésus-Christ, le Fils
de Dieu incarné ?
— Oui, nous devons parler de multiplicité d’opérations
en Jésus-Christ, le Fils de Dieu incarné ; parce que si, du côté de la
personne ou du principe à qui sont attribuées les opérations, il y avait en
Jésus-Christ, le Fils de Dieu incarné, unité parfaite et absolue, du côté des
principes propres d’opérations, il y avait autant d’opérations diverses qu’il
y avait de diversité de principes ou de facultés d’agir dans sa nature humaine ;
et, en plus, la grande diversité des opérations propres à la nature divine distinctement
des opérations propres à la nature humaine (q. 19, a. 1, 2).
— Mais alors en quel
sens parle-t-on d’opération théandrique en Jésus-Christ, le Fils de Dieu incarné ;
et que signifie cette expression ?
— Cette expression signifie que Jésus-Christ étant
Dieu et homme tout ensemble, une sorte de subordination existait en lui, entre
tous ses principes d’opérations, notamment entre les principes d’opération propres
à la nature humaine, et la nature divine, principe de l’opération formellement
divine ; si bien que l’opération humaine, en lui, se trouvait divinement
perfectionnée et surélevée par le voisinage et l’influence de la nature divine,
et que l’opération propre à la nature divine s’humanisait en quelque sorte en
se communiquant au dehors par l’entremise ou avec le concours de l’opération
humaine (q. 19, a. 1, ad 1).
— Jésus-Christ ou
le Fils de Dieu incarné, par son opération humaine, a-t-il pu mériter quelque
chose pour lui-même ?
— Oui, il a pu mériter et il convenait qu’il méritât
pour lui-même tout ce dont l’absence temporaire n’était pas contraire à l’excellence
et à la dignité qui était la sienne ; comme la gloire du corps et tout
ce qui devait toucher à son exaltation extérieure au ciel ou sur la terre (q. 19,
a. 3).
— A-t-il pu aussi
mériter pour les autres ?
— Oui ; et d’un mérite parfait ou condigne, en
raison de l’unité mystique que forment avec lui tous les membres de son Église
dont il est la tête ; si bien que toutes ses actions valaient non seulement
pour lui personnellement, mais encore pour tous ceux qui, parmi les hommes,
font partie de son Église, au sens de l’universalité marquée plus haut, quand
il s’est agi de la grâce capitale du Fils de Dieu incarné, dans la nature humaine
qu’il s’est unie hypostatiquement (q. 19, a. 4).
— Que faut-il pour
que le mérite des actions du Fils de Dieu incarné atteigne les autres hommes ?
— Il faut qu’ils lui soient unis par la grâce du baptême,
qui est la grâce d’incorporation à Jésus-Christ ; comme nous aurons à le
dire plus tard (q. 19, a. 4, ad 3).