32. La matière et la forme du sacrement de l’eucharistie ; — la transsubstantiation ; — la présence réelle ; — les accidents eucharistiques

— Quelle est la matière du sacrement de l’eucharistie ?

— La matière du sacrement de l’eucharistie est le pain de froment et le vin de vigne (q. 74, a. 1, 2).

— Que se passe-t-il dans la matière de ce sacrement, quand le sacrement se produit ?

— Il se passe que le pain, dans sa substance de pain, cesse d’être du pain ; et que le vin, dans sa substance de vin, cesse d’être du vin (q. 75, a. 2).

— Que deviennent cette substance du pain et cette substance du vin, qui, dans ce pain et dans ce vin, cessent d’être du pain et du vin, quand le sacrement se produit ?

— La substance du pain est changée au corps de Jésus-Christ ; et la substance du vin est changée au sang de Jésus-Christ (q. 75, a. 3, 4).

— De quel nom s’appelle ce changement ?

— Il s’appelle du nom de transsubstantiation (q. 75, a. 4).

— Que signifie ce mot de transsubstantiation ?

— Il signifie précisément le passage ou le changement de toute la substance du pain à la substance du corps de Jésus-Christ, et de toute la substance du vin à la substance du sang de Jésus-Christ.

— Comment peut se faire ce passage ou cette transsubstantiation ?

— Par la seule toute-puissance de Dieu (q. 75, a. 4).

— N’y a-t-il que la substance du pain, et la substance du vin, qui soient ainsi changées au corps et au sang de Jésus-Christ ; ou bien est-ce tout le pain et tout le vin qui le sont ?

— Ce n’est que la substance du pain et la substance du vin ; et leurs accidents demeurent (q. 75, a. 2, ad 3).

— Qu’entendez-vous par ces accidents qui demeurent ?

— J’entends toutes ces réalités d’ordre extérieur qui permettaient à nos sens d’atteindre le pain et le vin qui étaient là précédemment ; savoir : l’étendue ou la quantité avec sa forme ou sa figure, la couleur, le goût, les propriétés de résistance et le reste du même ordre.

— Pourquoi les accidents du pain et du vin demeurent-ils ?

— Les accidents du pain et du vin demeurent pour nous assurer la présence sacramentelle du corps et du sang de Jésus-Christ (Somme contre les Gentils, liv. IV, chapitre 63).

— Qu’arriverait-il si les accidents du pain et du vin étaient, eux aussi, changés au corps et au sang de Jésus-Christ ?

— Il s’ensuivrait qu’il ne resterait plus rien ici, mais que ce qui était ici du pain et du vin aurait été changé au corps et au sang de Jésus-Christ (ibid.).

— Et que s’ensuit-il, au contraire, de ce que les accidents du pain et du vin demeurent, alors que leur substance a été changée au corps et au sang de Jésus-Christ ?

— Il s’ensuit que le rapport qu’avait, à ces accidents, leur substance, le corps et le sang de Jésus-Christ, moyennant leur substance, l’ont désormais ; de telle sorte que, comme avant la transsubstantiation, en ayant ces accidents, nous avions la substance du pain et la substance du vin, nous avons maintenant, selon le mode de leur substance, tout ce qui est du corps et du sang de Jésus-Christ (ibid.).

— Est-ce le corps et le sang de Jésus-Christ tels qu’ils sont en eux-mêmes et dans leur réalité identique que nous avons ici en vertu de la transsubstantiation ?

— Oui ; c’est le corps et le sang de Jésus-Christ tels qu’ils sont en eux-mêmes et dans leur réalité identique que nous avons ici en vertu de la transsubstantiation (q. 75, a. 1).

— Jésus-Christ tout entier est-il dans ce sacrement ?

— Oui, Jésus-Christ tout entier est dans ce sacrement ; avec ceci pourtant que sous l’espèce du pain, en vertu des paroles sacramentelles, ne se trouve que le corps ; et, sous l’espèce du vin, ne se trouve que le sang ; mais, par voie de concomitance et parce que maintenant le corps et le sang de Jésus-Christ ne sont plus ni ne peuvent plus être séparés, comme ils le furent sur la croix, où se trouve le corps se trouvent aussi le sang et l’âme, et où se trouve le sang se trouve aussi le corps uni à l’âme. Quant à la personne et à la divinité du Fils de Dieu, depuis l’incarnation, elles n’ont jamais été séparées d’aucune des parties de la nature humaine de Jésus-Christ, non pas même quand le corps et l’âme étaient séparés l’un de l’autre par la mort sur la croix (q. 76, a. 1, 2).

— Jésus-Christ est-il tout entier sous chaque partie de l’espèce du pain et sous chaque partie de l’espèce du vin ?

— Oui, Jésus-Christ est tout entier, tel qu’il est en lui-même, sous chaque partie de l’espèce du pain et sous chaque partie de l’espèce du vin ; avec ceci que l’espèce du pain ou l’espèce du vin demeurant indivise, Jésus-Christ n’est sous chacune d’elles qu’une fois, et qu’il est, au contraire, sous chacune de ces espèces, autant de fois qu’on en fait de parties quand on les sépare ou qu’on les divise (q. 76, a. 3).

— Peut-on atteindre le corps de Jésus-Christ selon qu’il est en lui-même quand on atteint les espèces ou accidents eucharistiques du pain et du vin ?

— Nullement ; parce que ces accidents ne sont pas les accidents du corps de Jésus-Christ, par lesquels seulement nous pourrions atteindre sa substance (q. 75, a. 4-8).

— Que s’ensuit-il de cette vérité ?

— Il s’ensuit que les accidents eucharistiques du pain et du vin sont tout ensemble ce qui nous livre le corps de Jésus-Christ et ce qui le met à l’abri ; de telle sorte que s’il est des méchants qui veuillent profaner le corps de Jésus-Christ dans son sacrement, c’est bien le sacrement qu’ils profanent, mais ils ne peuvent atteindre le corps de Jésus-Christ en lui-même.

— Ces accidents eucharistiques du pain et du vin demeurent-ils toujours à l’état d’accidents eucharistiques, après la consécration du pain et du vin ?

— Non ; car aussitôt après la communion, ou quand ils ont été absorbés pour servir de nourriture et de breuvage, ils commencent à s’altérer et finissent bientôt par passer à un autre état. Ils peuvent aussi s’altérer et se corrompre par le simple fait des conditions atmosphériques, quand ils demeurent trop longtemps sans être renouvelés (q. 77, a. 4).

— Qu’arrive-t-il quand les accidents eucharistiques du pain et du vin cessent d’être les accidents du pain et du vin qui ont été consacrés ?

— Il arrive que le corps et le sang de Jésus-Christ cessent immédiatement d’être présents de leur présence eucharistique, le rapport qu’ils avaient à ces accidents et, par ces accidents, au lieu où ces accidents étaient, cessant par le fait même (q. 76, a. 6, ad 3).

— C’est donc uniquement en raison de la consécration du pain et du vin et de la permanence des accidents du pain et du vin consacrés, que Jésus-Christ est présent de sa présence eucharistique ?

— Oui, c’est uniquement en raison de la consécration du pain et du vin et de la permanence des accidents du pain et du vin consacrés, que Jésus-Christ est présent de sa présence eucharistique, les changements opérés dans le pain et dans le vin étant toute la raison de cette présence, sans que le corps de Jésus-Christ ait lui-même changé en rien (q. 76, a. 6, ad 3).

— Comment se fait cette consécration du pain et du vin ?

— Elle se fait par la prononciation, dans les conditions voulues, des paroles qui sont la forme du sacrement de l’eucharistie (q. 78).

— Quelles sont ces paroles ?

— Pour l’espèce du pain : Ceci est mon corps. Pour l’espèce du vin : Ceci est le calice de mon sang, le sang du Testament nouveau et éternel, mystère de foi, répandu pour vous et pour un grand nombre en rémission des péchés.