Les 3 raisons du « non » de Christine Boutin

 

 

DÉPUTÉ des Yvelines et présidente du Forum des républicains sociaux associé à l’UMP, Christine Boutin se prononce pour le « non » à la Constitution

européenne.

 

Elle en a donné trois raisons au journal Le Monde, et chacune mérite considération.

 

Première raison :

 

« Le texte que j’ai lu en entier, ne reconnaît pas les racines judéo-chrétiennes de l’Europe. »

C’est en effet un motif qui devrait être prioritaire, au moins pour les chrétiens (mais aussi pour les incroyants, simplement alors par fidélité à l’histoire de France, comme c’était le cas de Charles Maurras).

 

Et ce motif vient à point, quand on en est aux déclarations du président épiscopal Joseph Homeyer dont nous parlions hier d’après La Croix, selon lesquelles les évêques européens seraient d’accord pour estimer regrettable une telle lacune, mais pas au point d’empêcher le « oui » à la ratification.

 

D’ailleurs, il faut le dire à Mgr Joseph Homeyer comme à Christine Boutin, cette absence n’est pas une lacune, n’est pas un oubli, on n’a pas besoin de lire le texte en son entier, car elle résulte d’une volonté fermement exprimée, farouchement proclamée : ne pas être un club chrétien, et pour verrouiller ce refus, faire entrer la Turquie dans le club.

 

Seconde raison :

 

« J’estime que ce traité [adoptant la Constitution] est excessivement libéral et ne prend pas

en compte la personne humaine, une erreur qui a amené en France la fracture sociale. »

 

Il y aurait beaucoup à dire sur ce que peut signifier « prendre en compte la personne humaine ». En général nous préférons parler de nature humaine (comme fait le missel romain lui-même) plutôt que de « personne », surtout en un temps où la pensée même religieuse est idéologiquement hypothéquée par un « personnalisme » excessif.

 

Nous n’épiloguerons pas davantage aujourd’hui sur ce point délicat.

 

Troisième raison:

 

« J’ai eu la surprise de voir qu’il [le traité sur la Constitution européenne] permet le clonage thérapeutique et qu’il ouvre la porte aux mariages homosexuels et à la possibilité pour ceux-ci d’adopter des enfants. »

 

Par quoi l’on voit que la Constitution européenne manifeste non seulement la volonté de ne pas être un club chrétien, mais celle d’être un club anti-chrétien, en commençant par être un club anti-naturel.

 

Mais il l’est aussi par sa destruction programmée des nations.

 

AINSI CHRISTINE BOUTIN prend place parmi ceux que l’on appelle, le plus souvent contre leur gré, les « souverainistes ». Etrange dénomination en effet, puisque la plupart d’entre eux n’argumentent pas, ou n’argumentent que très faiblement, à partir de la souveraineté nationale, n’ayant apparemment aucune pensée ferme et claire sur la réalité de la nation ni sur le concept de souveraineté.

 

Il y a bien sûr chez eux la précaution de ne parler à aucun prix de la préférence nationale, par crainte d’être pour cela mortellement assimilés par les médias à Le Pen, Hitler, Pie XII, Pétain, Torquemada et Ravaillac.

 

Il y a aussi la disparition programmée du sentiment national, ou plus exactement son remplacement par une adhésion purement idéologique. Dans mon enfance j’ai connu une

France que l’on faisait commencer en 1789, c’était « la patrie des droits de l’homme ». Nous en venons doucement à une France qui aurait commencé en 1905 avec « le pacte laïque », fondateur de la République, colonne du Temple, à quoi la France est consubstantiellement attachée. C’est le système des « valeurs ». L’adhésion n’est plus à la patrie française, mais à la laïcité, à la démocratie, aux droits de l’homme, à l’égalitarisme etc., et subsidiairement

à la France dans la mesure où elle peut en être dite la « patrie ». Le sentiment national est au contraire celui qui s’attache à la nation en tant que réalité dont

nous avons hérité, dont nous sommes les usufruitiers et non les propriétaires, et que nous devons transmettre comme nous l’avons reçue. Elle est notre naturelle société politique. Nous lui appartenons temporellement. Même s’il lui arrive d’être injuste. En considération du fait que « s’il y a des sociétés sans justice, il n’y a pas de justice sans société ». Et que « de toutes les libertés temporelles, la plus précieuse est l’indépendance de la patrie ».

JEAN MADIRAN