Mgr Richard Williamson est le supérieur du séminaire de
“ Minute ” :
Monseigneur,
Mgr Richard Williamson :
Les catholiques se trouvent dans une grande confusion parce que l’on perd le
dogme de la foi.
Pardon de vous
interrompre mais que signifie cette expression un peu étrange : “ dogme de la foi ” ?
L’expression est de
Donc que le monde perde le sens de la vérité doctrinale, quand l’Eglise
catholique ne fait pas son travail, rien de plus normal. Que l’Eglise perde ce
sens, c’est un drame : celui du concile de Vatican II, qui, au lieu
d’illuminer le monde, a voulu être illuminé par lui ! Or, la force et
l’unité de FSSPX, telles qu’on les a connues, venaient de cette clarté
doctrinale que Mgr Lefebvre
a transmise aux prêtres de sa Fraternité. Mais pour peu que ces prêtres (et
évêques) se laissassent influencer par le monde omniprésent et par l’Eglise du
concile, ils perdraient leur clarté doctrinale, et à ce moment-là la confusion
serait complète.
Pas de salut dans la liberté religieuse !
Que
pensez-vous des rencontres récentes entre Mgr Fellay,
le supérieur de
J’ai suivi les événements
avec attention au travers des médias, comme tout le monde. De plus, quelques
jours après la réunion du 15 novembre à Rome entre Mgr Fellay et le cardinal Castrillón Hoyos,
préfet de
Qu’avez-vous
pensé du discours de Benoît XVI le 22 décembre 2005, établissant notamment
une distinction entre le texte et l’esprit du concile Vatican II ?
Ce discours semble
présenter le programme de son pontificat. Son idée force est que le concile
Vatican II serait la solution des problèmes entre l’Eglise et le monde moderne
et que la clef de cette solution serait le principe de la liberté religieuse. Benoît XVI défend ce principe avec
trois arguments.
Premièrement, il cite
le texte de l’Evangile : “ Rendez
à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ”,
comme si César n’avait rien à rendre à Dieu ! Mais la “ socialité ” étant intrinsèque
à la nature humaine, tout homme doit à Dieu un culte non seulement individuel
mais aussi social. Donc César en tant que chef de la société doit rendre un
culte public à Dieu.
Deuxièmement, les martyrs chrétiens, dit Benoît XVI, sont morts pour des
raisons de conscience, donc pour la liberté religieuse. C’est faux. Ils sont
morts pour la vraie foi de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Troisièmement, Benoît
XVI dit encore des martyrs sous l’Empire romain qu’ils ont refusé le culte de
l’empereur et donc qu’ils ont refusé la religion de l’Etat. C’est faux. Ce
qu’ils refusaient était ce culte faux et non le principe d’une religion d’Etat.
Or ce principe de la
liberté religieuse est au cœur de la perte du dogme de la foi. Il est au cœur
de ce monde moderne anti-catholique. Il est responsable de la dissolution à
laquelle nous assistons de toute pensée, de toute doctrine, de toute vérité.
Le discours du 22 décembre montre donc que
Que peuvent
donc espérer de ce pontificat les catholiques fidèles à
A moins d’un grand miracle
de Dieu pour rendre aux hommes de l’Eglise du concile leur sens du dogme de la
foi, il ne semble pas qu’il y ait grand-chose, humainement parlant, à espérer
de ce pontificat. Mais “ divinement
parlant ”, les catholiques doivent garder une grande espérance
car cette situation inédite de l’Eglise leur fait gagner d’immenses mérites !
“ Que reste-t-il à discuter ? ”
Pensez-vous
que le dialogue avec Rome soit possible ?
Il me semble que, depuis
les sacres de 1988, le dialogue entre cette Rome conciliaire et
De plus, le dialogue lui-même n’est pas sans danger, car il suscite faux
espoirs, controverses et déceptions s’il n’aboutit pas. Son ouverture même doit
être mûrement réfléchie. Or je sais que depuis la rupture des conversations
entre
Tout dialogue
est-il donc définitivement exclu ?
Si la discussion doit avoir
lieu, le grand principe doit être la primauté de la doctrine de la foi. La
tension entre cette Rome conciliaire et
Certains
fidèles semblent fatigués du combat de
Courage ! Méditez,
méditez, méditez les fins dernières ! Que profitera à un homme de gagner
tout Rome s’il y laisse miner sa foi ? Qu’importe-t-il à un homme de
perdre ses amis, sa tranquillité, son prestige, jusqu’à son foyer et –
apparemment – même son Eglise, s’il garde le dogme de la foi et, en gardant
cette foi, peut encore sauver son âme ? Tout lasse, tout passe, sauf
l’éternité !
Dieu ne nous oublie pas. Chacun des cheveux de nos têtes est compté. C’est une
vérité de foi. Il est le maître du temps. Il nous sauvera à l’heure qu’il a
fixée. D’ici là, il nous voit dans nos difficultés et sa grâce ne nous manquera
jamais. Prenons donc courage et attendons sereinement l’heure de Dieu.
Telle qu’elle a été fondée
par Mgr Lefebvre,
Mgr Lefebvre n’a jamais abandonné la messe de Saint-Pie
V [la messe en latin, Ndlr] parce qu’elle exprime
cette doctrine. Il a formé les prêtres de
Les fidèles ont pour
L’environnement de
Il y a un merveilleux texte du père Garrigou-Lagrange
: “ Miséricorde et fermeté doctrinale
ne peuvent subsister qu’en s’unissant ; séparées l’une de l’autre elles
meurent et ne laissent plus que deux cadavres : le libéralisme humanitaire
avec sa fausse sérénité et le fanatisme avec son faux zèle. On a dit :
“L’Eglise est intransigeante en principe parce qu’elle croit, elle est
tolérante en pratique parce qu’elle aime.” Les ennemis de l’Eglise sont
tolérants en principe parce qu’ils ne croient pas, et intransigeants en
pratique parce qu’ils n’aiment pas. ” (Dieu, son existence et sa nature, Paris
1923, p. 725)
Jusqu’en 1991,
Sur quels
points devront désormais porter les efforts de
Nous devons, me
semble-t-il, armer davantage nos futurs prêtres contre les erreurs du monde
libéral. La bonne doctrine classique ne suffit plus. Les séminaristes ont
besoin d’une formation contre-révolutionnaire fondée notamment sur les grandes
encycliques anti-libérales des papes pré-conciliaires
auxquelles Mgr Lefebvre tenait tant.
De même, les prêtres de
Une foi ainsi éclairée est naturellement apostolique et missionnaire,
c’est-à-dire charitable. Les prêtres comme les laïcs doivent avoir pour la
multitude des âmes égarées qui nous entourent le souci qu’a pour elles notre
mère l’Eglise catholique.
Des départs qui auraient pu être évités
Tout d’abord ne pensons pas
qu’il n’y ait que
Nous avons vu qu’au cœur de
cette crise est la perte du sens de la vérité, de la primauté de la doctrine et
de la pureté de la foi catholique. Voilà donc ce que devra maintenir en
priorité le prochain supérieur général. De là, il lui sera plus facile de faire
comprendre et pratiquer cette vraie charité dont parle saint Paul et dont les âmes ont éperdument
besoin.
Mais,
Monseigneur, qu’est-ce que cela signifie concrètement ?
Eh bien, le futur supérieur
général aura à piloter la petite barque de
L’Eglise conciliaire se délite et nous allons voir le clergé officiel se
raréfier encore. En même temps, les autres religions acquièrent chaque jour
plus de droits dans nos vieilles chrétientés. Le poids des idéologies
antichrétiennes se fait lourd, celui de l’Etat démocratique aussi. Les
structures familiales faiblissent, même chez les catholiques. Tout ceci pèse
directement sur la vie des fidèles et de notre congrégation.
A vue humaine, rien n’apparaît capable de freiner cette décadence. Le supérieur
général aura donc la charge de maintenir la foi et le zèle de nos prêtres dans
cet environnement qui s’éloigne toujours plus de la réalité, naturelle et
surnaturelle.
Oui. Ou elle prend la route
héroïque des cimes et, refusant prestige et honneur, accepte d’être honnie et
persécutée par le monde. Elle sera alors aimée et suivie par le “ petit troupeau ” de Notre
Seigneur Jésus-Christ.
Ou bien elle prend la route du confort et de la facilité, en se compromettant
avec le monde et l’Eglise du monde, c’est-à-dire l’Eglise conciliaire. Elle
sera alors peu à peu abandonnée par les brebis, qui ne reconnaîtront plus en elle
la voix du Divin Maître.
Quelles seront
les qualités les plus importantes du futur supérieur général pour affronter ces
enjeux ?
D’abord être fort dans la
foi, et ensuite humain, surtout envers ses prêtres. Il lui faudra aussi
jugement, prudence et capacité d’adaptation pour discerner et sauvegarder
l’essentiel. C’était là une des grandes qualités de Mgr Lefebvre lui-même.
Par contre le supérieur n’a pas besoin d’être un saint. Pour un supérieur, la
sainteté est un luxe, pour ainsi dire. Saint Thomas d’Aquin
l’a dit une fois pour toutes : “ Qu’il
enseigne, s’il est savant. Qu’il prie, s’il est saint. Qu’il gouverne, s’il est
prudent. ”.
Un dernier
message ?
Veillons et prions Notre
Dame.