Flash-Info au 14 mai 2008
Le cardinal Castrillon
Hoyos s’exprime sur le Motu Proprio de BenoîtXVI « Summorum Pontificum »
Le cardinal qui est à la tête de
Son Éminence est satisfaite. Le téléphone du bureau du rez-de-chaussée, dans le
palais de l'ex Saint Office, connaît une nouvelle vie, et sur les tables
s’accumule une correspondance venue du monde entier. Après la promulgation du
Motu proprio,
Éminence,
quelques mois après la promulgation du Motu proprio, quel bilan en faites-vous
?
« Avec le Motu proprio, le Pape a voulu offrir à tous une nouvelle occasion de
profiter de l'énorme richesse spirituelle, religieuse et culturelle présente
dans la liturgie de rite grégorien. Le Motu proprio a été conçu comme un trésor
offert à tous, et non fondamentalement pour répondre aux lamentations ou aux
demandes de qui que ce soit. Un bon nombre de personnes qui n’étaient pas
initialement impliquées dans cette forme extraordinaire du rite romain ont
maintenant pour lui une grande estime. Parmi les fidèles, je distinguerais
trois groupes : ceux qui ont un lien quasi organique avec
À propos
de la richesse, certains spécialistes de la liturgie soulignent le fait que le
rite extraordinaire n'offre pas la richesse biblique introduite par la novus ordo…
« Ils n'ont pas lu le Motu proprio, parce que le Pape affirme que les deux
formes doivent s’enrichir mutuellement. Et il est évident que cette richesse
liturgique ne va pas être gaspillée. Dans le novus
ordo, en quelques années, on lit pratiquement toute
Une autre
objection porte sur le risque que des célébrations séparées et différentes
créent des communautés séparées…
« C’est une multiplicité enrichissante ; c'est un surcroît de liberté
culturelle que le Pape introduit sous une forme audacieuse. Du reste, dans les
paroisses, il y a beaucoup de différences dans les célébrations, et je ne veux
pas parler des abus, parce que ce ne sont pas les abus qui constituent la
raison principale du Motu proprio ».
Votre secrétaire, monseigneur Camille Perl, a annoncé qu'il y aurait un
document d'éclaircissement sur le Motu proprio. Quand sera-t-il publié ?
« C’est le cardinal Bertone qui l’a annoncé, et il a
le droit de le faire. Mais moi qui suis un serviteur du Pape, je ne
l'annoncerai que quand le Pape me dira de le faire. Notre Commission a indiqué
au Souverain Pontife que de nombreuses demandes arrivent de chaque partie
du monde, dont un très grand nombre sont justifiées, mais dont certaines sont
basées sur un manque de connaissance. Le Saint-Père, et seulement lui, dira
s'il convient de publier un tel document et quand ».
Quelles
sont les demandes qui vous sont parvenues et lesquelles mériteraient une
réponse ?
« La première concerne le latin, parce que - disent les auteurs de ce type de
demande - célébrer dans une langue qu’on ne connaît n’est pas pratique.
Malheureusement les séminaristes, et même certains prêtres, ne l'ont pas étudié
et il leur est donc difficile de célébrer sous la forme extraordinaire. Pour ce
faire, ils devraient au moins connaître le canon de
« S'il manque de prêtres dans un diocèse et que seuls trois ou quatre fidèles
demandent le rite extraordinaire, le bon sens dit qu’il est difficile de
satisfaire cette demande. Cependant, puisque l'intention, la mens du
Pape est de concéder ce trésor pour le bien de l'Église, le mieux pour les
endroits où il n’y a pas de prêtres, serait d’offrir une célébration selon le
rite extraordinaire dans une des Messes dominicales paroissiales. Ce serait une
Messe pour tous ; tous, même les jeunes générations, profiteraient de la
richesse du rite extraordinaire, par exemple de ces instants de contemplation
qui, dans le novus ordo, ont disparu ».
Donc vous dites que, s'il n'y a pas de groupe consistant et stable, à l'avenir,
il est question de proposer une des Messes dominicales selon le rite
extraordinaire ?
« Je dirais que oui. D’ailleurs cette possibilité avait déjà été approuvée à
l'unanimité en 1986 par une commission cardinalice à laquelle participait le
cardinal Ratzinger lui-même (mais elle n'était pas devenue opérationnelle). Je
serais sûr que cela serait faisable maintenant. ».
Un autre point à éclaircir est la définition d’un « groupe stable et consistant
». Que veut dire cela exactement ?
« C’est une question de bon sens : pourquoi faire un problème si les personnes
qui demandent le rite viennent de paroisses différentes ? Si elles se
réunissent et, ensemble, demandent une Messe, elles deviennent un groupe
stable, même si elles ne se connaissaient pas au départ. Même le nombre est une
question de bonne volonté. Dans certaines paroisses, en particulier à la
campagne, les jours ouvrables, les personnes qui participent à
Donc le
futur document devrait être plus accueillant aux demandes émanant de petits
groupes ?
« Oui, mais il faut le voir non pas comme quelque chose qui va à l’encontre des
autres, de la majorité, mais qui vise à leur enrichissement et toujours en
évitant toute forme d’antagonisme ».
Il y a
ensuite le problème des sacrements : je pense au rite de l’Ordination ou à
celui de l’Onction des malades, pour lesquels on se réfère à des codes de droit
canonique différents et on emploie des formules différentes…
« A première vue, il y a certainement quelques problèmes par rapport à
l'Ordination, à l’Onction des malades et même aux divergences de calendrier. En
ce qui concerne l'Ordination, dans la forme ancienne, il y avait la tonsure,
les ordres mineurs et le sous-diaconat. Cette forme est encore en service et
continuera à l'être dans les Institutions liées de façon stable au rite ancien,
comme
Quels
sont les délais prévus pour la réconciliation avec
« Il y a des signes positifs ; il y a un dialogue non interrompu. Il y a
quelques jours à peine, j’ai écrit une nouvelle lettre à monseigneur Fellay, le supérieur de
Mais avec les Lefevbristes il y a aussi un problème
d'acceptation du dialogue œcuménique…
« Oui, en effet, il y des difficultés relatives à l'interprétation des témoins
du Concile à ce sujet et à certaines pratiques concrètes œcuméniques, mais
aucun évêque de
Après le
Motu proprio, certains membres de
« Oui, et d’autres souhaitent le faire aussi. Mais j'ai l'espoir que le groupe
entier vienne ; je ne voudrais pas qu'il se divise. Cependant si une personne
vient et dit qu'elle veut être rapidement en unité avec le Pape, nous devons
l’accepter. Le Motu proprio a aussi suscité le rapprochement d’autres
personnes. Par exemple, le 28 mars, j'ai reçu la lettre d'un évêque non
catholique qui a décidé d'entrer dans l'Église catholique avec d’autres évêques
et des prêtres qui célèbrent
Les
nouveaux pouvoirs d'« Ecclesia Dei »
n'entrent-ils pas en conflit avec le ministère des évêques ?
« Le Pape Benoît XVI, qui possède l'autorité sur toute l'Église, sur chacun des
fidèles et des évêques, a établi les nouvelles règles dans le Motu proprio, et
Dans
l'introduction à la réimpression du Compendium de Liturgie pratique de Trimeloni, vous écrivez que le Pape se sert de
« Le Pape Jean XXIII a incorporé la liturgie dans son désir de dialogue entre
l'Église et la culture contemporaine. Paul VI a donné un caractère organique
aux réformes nées de ce désir. L'Esprit Saint, qui accompagne l'Église en permanence,
inspire les changements nécessaires à tout moment de l'histoire, sans rupture
violente du processus de perfectionnement qu'il a lui-même inspiré au cours de
l’histoire. Benoît XVI, avec ce Motu proprio, unit les richesses des deux
stades du processus, en dissipant le malaise de ceux qui ont cru qu’il y avait
eu dans le domaine liturgique une rupture inacceptable ».
Après la
reformulation de la prière du Vendredi Saint, il a été dit
qu'on faisait un retour de 40 ans en arrière dans le dialogue entre juifs et
chrétiens. S’attendait-on à ces critiques ?
« N'est-il pas une bonne chose de prier pour nos frères, fils d'Abraham comme
nous ? Abraham est le père de la foi, mais il s’inscrit dans une chaîne de salvification dans laquelle on attend le Messie. Et le
Messie est arrivé. Dans les Actes des Apôtres nous lisons que 5000 juifs se
sont convertis en un jour. Je ne conteste pas la prière du novus
ordo, mais je considère comme parfaite celle, actuelle, du rite
extraordinaire. Et je prie volontiers pour la conversion de mes nombreux amis
juifs, parce que je crois vraiment que Jésus est le Fils de Dieu et le Sauveur
de tous ».
Vittoria Prisciandaro