Un petit livre rouge - décembre 1969
la date
où paraîtra le présent numéro, le nouvel ORDO MISSAE, bouleversant
de fond en comble la messe catholique, risque d'entrer en vigueur avec une
« obligation » hâtive et brutale. A l'heure où nous écrivons ces lignes, nous
savons seulement que, quelques jours avant le ter décembre,
la plupart des prêtres et des fidèles ignorent tout de la nouvelle messe,
ne peuvent même pas s'en procurer les textes qui, soit en latin soit en vernac,
ne sont pas encore en librairie, - et à plus forte raison n'ont reçu
aucune explication capable de faire comprendre l'utilité d'une mutation aussi
soudaine et aussi complète. Le segretario
Hannibal Bugnini prétend que cette fabrication est un chef-d'oeuvre
dépassant de loin. les plus belles liturgies pratiquées par l'Eglise:
pendant deux mille ans (Déclaration
rapportée par Louis Salleron dans Carrefour
du 22 octobre : R Au moment même
où j'étais d Rome, le jeudi 16 octobre, ce secrétaire Mgr Annibal Bugnini,
déclarait publiqLrE'ment (je l'ai entendu)
que le nouveau missel aurait une richesse plus grande que tout ce qu'on a vu depuis vingt siècles ») : aurait-il raison en cela, et la nouvelle messe
serait-elle effectivement d'une beauté sans précédent, grâce au génie
jusqu'ici inégalé de l'actuelle génération de bureaucrates ecclésiastiques,
la hâte brutale avec laquelle on l'impose sans avoir eu le temps de l'expliquer
ni même de la faire connaître serait, à elle seule, un signe singulièrement
sinistre, absolument étranger
aux meurs, habitudes et comportements de lEglise catholique.
Nous parlerons de l'obligation si elle devient en France
un fait accompli. Nous savons qu'elle est possible, qu'elle est probable,
qu'elle est menaçante, et que, sous des dehors libéraux et temporisateurs,
c'est en réalité un autoritarisme secret, impatient, terrible, qui s'exerce
administrativement avec une violence sans entrailles et sans merci. Le segretario Hannibal Bugnini a pu écrire sans
rougir, dans L'Osservatore
romano du 31 octobre, que « le nouveau rite et l'ancien continueront
à coexister pacifiquement jusqu'au 28 novembre 1911 », soit pendant une période
de deux ans consentie à la tranzitione
et à la transazione,
comme il dit. C'est un faux semblant : car cette rémission est consentie non
point à ceux qui la désirent, mais aux seules Conférences épiscopales, lesquelles
sont d'autre
part mises en demeure de n'en point user.
De fait, voici un autre signe
singulièrement sinistre : tout le monde savait que ce délai de deux ans était celui demandé par de nombreux
évêques d'Italie. On ne le leur a donc pas refusé en théorie ; on le leur
a consenti en principe ; mais on a fait en sorte qu'à cette même date du 31
octobre, ce soit la presidenza
della Conf erenza episcopale italiana qui, elle-même, d'elle-même,
« spontanément » , décrète dans un brusque comunicato ( Publié par L'Osservatore romano du 1er
novembre.)
« A partir du 30 novembre 1969,
l'usage du nouveau rite de la messe devient obligatoire sur tout le territoire national. »
Il n'est même pas laissé à chaque
évêque de décider s'il usera du délai théorique de deux années. Le jacobinisme
liturgique, pour l'ensemble du territoire national, décide et ordonne. Son
« communiqué » du 31 octobre annonce que le texte de la nouvelle messe pour
l'Italie sera en librairie le 15 novembre. Du 15 au 30, il y a exactement
quinze jours (à supposer que, pour une fois, par miracle, il n'y ait aucun
retard d'imprimerie)
quinze jours pour que « tout le
territoire national », manœuvrant en formation serrée, se mette au pas d'une
messe inédite et, deux semaines plus tôt, encore inconnue du clergé et du
peuple italiens.
Nous ne savons pas ce que la bureaucratie
collégiale aura décidé pour la France. Nous en parlerons quand nous le saurons
: et nos lecteurs connaîtront, comme nous avons l'habitude de faire, notre
pensée telle qu'elle est (C'est, semble-t-il, dans son Assemblée p!lé,nière du 10 au 14
nove-mbre que la Conférence épiscopale française publiera sa décision.) .
Nous leur parlerons aujourd'hui
du nouvel ORDO Missae en lui-même : nous l'avons
en main depuis le printemps, sous la forme du petit livre rouge de son
édition vaticane, avec sa Constitution apostolique Missale romanum, son Institutio
generalis, son Ordo Missae
cum populo, son Ordo Missae sine populo, son Appendix et ses
Cantus in celebratione Misses occurentes. Depuis
le printemps, nous en méditons le contenu.
C'est en sa page 15, au numéro
7 de l'Institutio, qu'est
promulguée LA NOUVELLE DÉFINITION DE LA MESSE
Cena dominica sive Missae est, sacra synaxis seu congregatio populi Dei in
unum convenientis, sacerdote praeside, ad memoriale Domini celebrandum. Qu.are
de sanctce Ecclesioe locali congregatione eminenter valet prorreissio Christi
« Ubi sunt duo vel tres congregati in nomme meo, ibi
sum in medio eorum » (Mt., XVIII, 20).
La Cène du Seigneur, appelée aussi
la Messe, est la sainte assemblée ou le rassemblement du peuple de Dieu qui
se réunit sous la présidence du prêtre afin de célébrer le mémorial du Seigneur.
C'est pourquoi, à ce rassemblement local de l'Église s'applique éminemment
la promesse du Christ : « Là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom,
là je suis au milieu d'eux. »
Il s'agit bien d'une DÉFINITION,
énonçant ce qu'est
la messe
en son essence.
Cette DÉFINITION
est celle que professent la plupart des protestants.
C'est celle qui va désormais être
enseignée dans tous les séminaires et imposée à tous les fidèles, si elle
n'est pas promptement abrogée - et formellement désavouée.
Nous adhérons entièrement et point
par point à la lettre que les cardinaux Ottaviani et Bacci ont adressée à
Paul VI pour demander l'abrogation de ce nouvel ORDO MISSAE.
Cette lettre, on en trouvera le
texte intégral en appendice au présent éditorial.
Nous nous bornerons à en souligner
et commenter les principales affirmations.
1 - LE NOUVEL « ORDO MISSÈE » S'ÉLOIGNE, D'UNE FAÇON IMPRESSIONNANTE,
DANS L'ENSEMBLE COMME DANS LE DÉTAIL, DE LA THÉOLOGIE CATHOLIQUE DE LA SAINTE
MESSE FIXÉE PAR LE CONCILE DE TRENTE.
Cette affirmation solennelle du
cardinal Ottaviani, qu'aucun lecteur ne dise qu'elle passe audessus de sa
tête parce qu'il s'agit de « théologie ».
La théologie est, sous ce rapport,
la même chose que le catéchisme.
Comme l'enseignait le saint abbé
Berto, le catéchisme est « l'exposé des principes de la théologie », « qui sont les dogmes de la foi, la morale
catholique, les sacrements catholiques, la prière catholique ».
La théologie catholique de la
sainte messe, ce que chacun, même non théologien, est tenu d'en savoir, vous
l'avez tous sous la main : dans le Catéchisme
du Concile de Trente, pages 203 à 247, - pages que vous avez le devoir
présent, le devoir urgent de connaître et de faire connaître, d'étudier et
de faire étudier, de méditer et de faire méditer.
Après quoi, vous l'aurez encore,
en résumé, en formules nettes et amies de la mémoire, dans le Catéchisme de S. Pie X, pages
65 à 72 du « Petit catéchisme », pages 211 à 226 du « Grand catéchisme » :
pages à apprendre par coeur si
vous voulez ne pas être emportés comme fétus dans le raz-de-marée
de l'apostasie immanente.
2 - DANS LE NOUVEL « ORDO MISSAE »),
TANT DE NOUVEAUTÉS APPARAISSENT, TANT DE CHOSES ÉTERNELLES SE TROUVENT RELÉGUÉES
A UNE PLACE MINEURE, SI MÊME ELLES Y TROUVENT ENCORE UNE PLACE...
C'est-à-dire : un
bouleversement complet, au profit de fabrications nouvelles, au détriment
de ce qui est immuable et éternel.
3 - QUE (conséquence de ce qui
précède) SE TROU. VE RENFORCÉ LE DOUTE SELON LEQUEL DES VÉRITÉS TOUJOURS CRUES
PAR LE PEUPLE CHRÉTIEN POURRAIENT CHANGER OU ÊTRE PASSÉES SOUS SILENCE.
Relisons attentivement tout ce
passage du cardinal Ottaviani :
« Tant de nouveautés apparaissent dans le nouvel ORDO MlSSAE,
et, en revanche, tant de
choses éternelles s'y trouvent reléguées à une place mineure ou à une autre
place - si même elles y trouvent encore une place - que pourrait
se trouver renforcé et changé en certitude le doute qui malheureusement s'insinue
en de nombreux milieux - selon lequel des vérités toujours crues par
le peuple chrétien pourraient changer ou être passées sous silence sans qu'il
y ait infidélité au dépôt de la doctrine auquel la foi catholique est liée
pour l'éternité. »
Tout change, y compris la foi
: telle est la fausse croyance partout répandue, et qui se trouverait confirmée
par une transformation aussi radicale de la sainte messe.
On fait encore, dans les discours
officiels, quelque mention incidente de l'immutabilité de la foi chrétienne
: mais cette mention apparaît comme purement théorique, quand les actes imposent à tous les esprits le
spectacle et la réalité d'un changement
sans trêve et sans limites.
Le Bulletin diocésain de Paris,
en septembre 1969, affirmait avec désinvolture, en un simple Nota bene et comme allant de soi (Cité par Louis Salleron : cf. Itinéraires, numéro
137 de novembre 1969, page 302.)
« IL n'est plus possible, à un moment où l'évolution du monde est. rapide,
de considérer les rites comme définitivement fixés. »
La promulgation d'un nouvel ORDO MISSE
/« presque entièrement nouveau » vient confirmer dans les
faits cette idée aberrante ; et renforcer l'assurance que nous aurons désormais
un ORDO MIss,E différent tous les cinq ou dix ans.
Le célèbre Bulletin diocésain
de Metz avait éditorialement énoncé au sujet du catéchisme (Eglise de
Metz, numéro,du l'er octobre
1968, - Cf. Itinéraires, numéro
128 de décembre 1968, page 6.)
« IL y a un nouveau catéchisme parce qu'il y a un monde nouveau. »
C'est une ivresse. Une ivresse
du monde : du monde moderne, du monde changeant. Une ivresse contagieuse qui
déferle comme un déluge.
Une hérésie ?
Bien sûr. Sous réserve qu'elle
échappe sans doute à la qualification canonique d' « hérésie »
elle demeure en-deçà et
au-dessous, par son insondable inconsistance, par sa bêtise informe
et sans fond.
Ils imaginent, les imbéciles,
que pour la première fois dans l'histoire le monde est « moderne », que
pour la première fois il est « nouveau », que pour la première fois il « change
». Ils se croient les contemporains, ou les participants, ou les acteurs d'une
« mutation » sans précédent. Ils ne soupçonnent même pas que le monde, à toutes
les époques, a toujours été moderne et a toujours été changeant - sans
rien changer pour autant, jusqu'ici, à la messe ni au catéchisme.
Leur imbécillité aurait pu n'avoir
aucune conséquence religieuse : on peut être à la fois complètement idiot
et bon chrétien (mais alors on aperçoit, par grâce, que l'on est idiot, et
l'on se garde de vouloir témérairement améliorer l’Eglise, le catéchisme et la messe).
Seulement, ils sont en outre iDOLATRES.
Ils ont l'idolâtrie du monde. Ils ont donné au monde leur ferveur et leur
foi. C'est la religion de SaintAvold, c'est l'hérésie du xxe siècle : La trans f orvnation du monde impose un changement dans
la conception même du salut (Voir notre ouvrage : L'hérésie du XXe
siècle, un volume aux Nouvelles Editions Latines. - Aux pages 215
à 224 : les six premières propositions hérétiques de la religion de SaintAvold.). Ils
ne se contentent pas de le dire. Ils sont passés aux actes. Ils sont, en cela,
cohérents. Ils le disent eux-mêmes : un catéchisme nouveau parce que le monde est nouveau ; une nouvelle
messe parce
que le monde évolue. Sous le nom encore conservé de « catholique
», ils enseignent et ils organisent la religion du monde.
Mais, de leur propre aveu, leur
nouvelle religion, leur nouveau catéchisme et leur nouvelle messe n'ont aucune
valeur : puisqu'eux-mêmes, de leurs propres mains, ils les changeront
encore, ils les changeront toujours, ils les changeront sans fin, au fil du courant, à la remorque des évolutions
et des mutations de ce monde. Leur religion, leur catéchisme et leur messe
vogueront à pleines voiles sur l'océan du progrès scientifique, du perfectionnement
technique : sans cesse innovés, sans cesse améliorés, comme les automobiles,
les dessous en nylon et les matières plastiques.
Scandale pour la foi. Mystère
d'iniquité. Mais déjà profonde absurdité pour la raison naturelle. Le Play
disait : « L'esprit d'innovation
est aussi stérile dans l'ordre moral qu'il est fécond dans l'ordre matériel.
» « En sciences, découvrir des vérités nouvelles; en morale, pratiquer la
vérité connue. »
4 - DE NOUVEAUX CHANGEMENTS DANS
LA LITURGIE . NE POURRONT PAS SE FAIRE SANS CONDUIRE AU DÉSARROI LE PLUS TOTAL
DES FIDÈLES QUI DÉJA MANIFESTENT QU'ILS LEUR SONT INSUPPORTABLES. DANS LA
MEILLEURE PART DU CLERGÉ CELA SE MARQUE PAR UNE CRISE DE CONSCIENCE TORTURANTE
DONT NOUS AVONS DES TÉMOIGNAGES INNOMBRABLES ET QUOTIDIENS.
Il est bon que cela aussi ait
été dit à Paul VI par le cardinal Ottaviani.
(Parenthèse. J'estime qu'il est bon que cela aussi ait été dit
par le cardinal Ottaviani, parce que Paul VI s'est placé hors d'atteinte de
ces choses : le désarroi des fidèles, la souffrance des prêtres. Demain, les
historiens n'auront aucune peine à montrer - en faisant état de précisions
multiples qui ne sont pas secrètes, mais sont encore couvertes par la discrétion
- que le Pontife actuellement régnant est isolé du peuple chrétien et
prisonnier d'une bureaucratie : isolé et emprisonné par des hommes qu'il a
lui-même choisis et promus, ce qui fait que cette situation, s'il la
subit, il l'a aussi, il l'a d'abord créée, apparemment de propos délibéré
et de son plein gré. Entre cent autres exemples, on pourra donner le nom d'un
écrivain français que tout désignait pour obtenir facilement une audience
du Saint-Père : sa famille, ses relations dans le monde et dans l'Eglise,
sa notoriété catholique, l'accueil chaleureux que lui avait fait Pie XII.
L'audience avait été plusieurs fois demandée pour lui par quelques-uns
des plus grands noms de l'Europe chrétienne et aussi du collège des cardinaux.
Je le sais fort bien, l'ayant polir ma part encouragé à tenter cette démarche
et à y persévérer. On n'en était pas encore au point véritablement extrême
où l'on en est aujourd'hui : mais cette souffrance des prêtres, mais ce désarroi
des fidèles, déjà immenses et grandissant chaque jour, notre illustre ami,
en simple témoin de son temps, comme il dit, voulait en déposer un témoignage
filial et confiant aux pieds du Saint-Père. Il était qualifié pour le
faire, en outre, par l'étendue exceptionnelle de son information, due à ses
travaux et aux circonstances dans lesquelles il s'était trouvé. La réponse
paradoxale qu'il obtint fut qu'il serait reçu par le Pape seulement quand
l'épiscopat français y aurait donné son consentement préalable. La même réponse,
on le sait maintenant, a été faite dix et cent fois, dans les occurrences
les plus diverses, voire les plus opposées, et même par un communiqué public,
pendant le Synode. On n'a plus aucune chance d'être entendu par le Pape si
l'on n'est pas en plein accord avec son évêque et en quelque sorte présenté
par lui, ou, mieux encore, par la bureaucratie collégiale de son épiscopat
national. Ce système, pratiqué depuis des années, a été officiellement déclaré
au mois d'octobre. Il a de multiples conséquences pratiques : il porte atteinte
au droit de chaque chrétien d'en appeler directement au Pape (par dessus la
tête de son évêque, voire contre lui, mais oui) ; il supprime en fait la juridiction
du Pontife romain sur chaque partie de l'Eglise et sur chaque chrétien : il
en supprime du moins le caractère IMMÉDIAT,
en rendant désormais obligatoire de facto
la médiation épiscopale, il faut passer par l'évêque ou
par l'épiscopat, il faut avoir leur consentement préalable pour être reçu,
cet usage nouveau est une volonté personnelle de Paul VI. - A quoi s'ajoute
que les évêques suspects de quelque caractère et jugés susceptibles de faire
entendre un cri d'alarme, quand ils parviennent par chance et malgré tout
à obtenir une audience, reçoivent cette recommandation impérative et paralysante
du grand maître des réceptions
« Le Saint
Père est très souffrant en ce moment; il vous fait quand même la faveur de
vous recevoir ; surtout, ne lui dites rien qui puisse l'inquiéter et compromettre
davantage sa santé »
Le Courrier de Rome a publié la chose : la connaissant moi-même
d'une autre source et par d'autres témoignages, je lui apporte ici cette confirmation.
Mais ce grand maître des audiences a été promu par un choix personnel de Paul
VI, un choix que ne proposait aucun protocole ni aucune ancienneté ni rien
de ce genre, c'était plutôt le contraire et ce fut un choix c à la cote d'amour
», comme on dit dans le civil (et dans l'armée). De cette manière, par ces
circonstances, dans cette situation, qui ne lui ont pas été imposées du dehors
mais qui résultent uniquement de sa volonté, Paul VI est absolument coupé
de tout témoignage direct sur le désarroi des fidèles et la souffrance des
prêtres matraqués ou asphyxiés par la bureaucratie collégiale. En dehors des
mondanités consenties aux cosmonautes, aux diplomates, aux sportifs, aux célébrités
publicitaires, aux acteurs de cinéma et autres vedettes de la société moderne,
capitaliste ou communiste, il n'a plus de rapports personnels, dans l'Eglise,
qu'avec la bureaucratie collégiale, et selon la hiérarchie subtile mais réelle
de cette bureaucratie. D'où le sentiment qui s'étend, chez tous ceux qui demeurent
étrangers à cette bureaucratie ou qui en sont victimes, d'un ÉLOIGNEMENT DU PÈRE, voire d'une sorte d'ABSENCE DU PÈRE. Il est
objectivement constatable que Paul VI en personne a voulu et organisé toutes
les causes, tous les moyens, tous les instruments d'une telle situation. En
a-t-il consciemment voulu aussi les inévitables conséquences,
je ne sais, Dieu le sait. Fin de la parenthèse.)
Comme on nous a menti ! C'est
en matière liturgique que l'on nous a menti de la manière la plus énorme et
la plus visible.
Depuis 1962, on nous racontait
que les réformes liturgiques n'étaient que pour répondre aux aspirations,
aux besoins, aux demandes des fidèles.
Il faut désormais renoncer à ce
mensonge.
Les fidèles n'avaient rien demandé
de semblable au nouvel ORDO MISSAE,
ils ne souhaitaient absolument pas ce bouleversement de la messe, ils protestent
contre ces innovations sans fin.
Alors, on ne leur dit plus que
c'était pour leur être agréable.
On leur dit maintenant que c'est
un ordre, que c'est la loi, qu'ils n'ont pas voix au chapitre, qu'ils ne comptent
pas, qu'on leur impose
le bouleversement
et que l'on écrasera
leurs réticences.
Ils souffrent ? Les bureaucrates
ricanent de leurs souffrances. Ils sont plongés par la nouvelle messe dans
un insoluble cas de conscience ? On crache sur eux. Ils veulent se faire entendre
? On leur claque au nez toutes les portes, de bronze ou de papier-journal.
Mais on n'étouffe pas la voix
d'un cardinal Ottaviani. Pour l'honneur de l’Eglise, sa lettre à Paul VI,
- solennel avertissement, de la catégorie de ceux qu'il appartient aux
cardinaux d'adresser au Pape dans les cas les plus extrêmes, - viendra
s'inscrire dans l'histoire à la page même qui enregistrera l'incroyable promulgation,
en l'an 1969 , d'un incroyable
ORDO MISSE.
5 - TOUS LES SUJETS, POUR LE BIEN
DESQUELS EST PORTÉE LA LOI, ONT LE DEVOIR, SI LA LOI SE RÉVÈLE NOCIVE, DE
DEMANDER SON ABROGATION.
Le nouvel ORDO MISSE
est en effet une loi dans l'Eglise.
Le cardinal Ottaviani la déclare
nocive.
Il demande fermement son abrogation.
Une telle réclamation, il appartenait
à un cardinal d'être le premier à la formuler.
Mais tous les sujets ont eux aussi le droit et le devoir de demander
hardiment que la loi nocive soit abrogée : si le cardinal Ottaviani le rappelle
en termes formels, ce n'est sans doute pas sans intention.
Aux dernières nouvelles, au moment
de conclure, nous arrive un nouvel affront, une nouvelle provocation, une
nouvelle injure. Le segretario
tout puissant, le sinistre fossoyeur Hannibal Bugnini annonce que par faveur
gracieuse et exceptionnelle, on laissera l'ancien Missel romain à quelques prêtres malades,
infirmes, séniles, et à condition qu'ils célèbrent sans assistance.
En dehors de quoi, le rite traditionnel de la messe catholique serait
donc frappé d'interdit ?
Attention !
Jean Madiran.