L'oeil, l'oreille et le cœur d'un pèlerin.

 

Année spéciale à Sainte-Anne-de-Beaupré ! Quelle merveilleuse journée que fut ce 26 juillet 2003.

Lors des semaines précédent le pèlerinage, l'on nous avait bien annoncé la possibilité que la messe puisse avoir lieu cette année dans la basilique même de Sainte-Anne-de-Beaupré, au lieu de se dérouler chez les Frères Maristes ou ailleurs. Que d'espérances secrètes. Scepticisme naturel, mêlé de confiance pieuse. On attendait.

Aussi quelle joie avons-nous eu d'apprendre que le grand pas avait été fait : que la réponse était positive et que nous pourrions avoir la possibilité d'assister à la messe traditionnelle dans ce vénérable édifice qui a vu tant de fidèles, venus de tous horizons, à toutes les époques, fidèles de toutes conditions et d'expériences de vie, tous converger vers le sanctuaire de celle qui est la patronne de la Province de Québec. Sans compter que cette année nous fêtions l'anniversaire de Sainte-Anne le même jour que notre pèlerinage annuel. Nous avions tous nos faveurs personnelles à demander à cette Grand-maman thaumaturge qui a exaucé si souvent les demandes de ses fidèles.

Malgré une matinée copieusement arrosée par une pluie souvent forte, les pèlerins-marcheurs ont pu dîner à l'abri, grâce à la générosité renouvelée des Frères Maristes qui nous ont accueillis encore cette année dans leur grande salle afin de tous nous reposer et de nous restaurer un peu pour le dîner.

Avec le beau temps revenu, le départ après le dîner était fébrile pour tous. C'était la dernière partie du pèlerinage de cette journée mémorable, avant l'arrivée des marcheurs tant attendue dans la crypte de la basilique où les aînés les attendaient.

Il fallait voir avec quelle ardeur, plus accentuée cette année, les marcheurs entonnant les hymnes et cantiques jusque près du parvis de la basilique. Un court moment de silence près des murs de l'église afin de ne pas déranger des Pères qui priaient dehors avec des groupes de fidèles. Toutefois, c'est le cœur rempli d'émotion que les fidèles de la Fraternité Saint-Pie X ont pu reprendre leurs chants pour faire leur entrée modeste, toute empreinte de simplicité mais combien intense, dans la grande allée de la crypte. Les centaines de personnes de tous âges composant le cortège se sont alors installées dans les bancs de l'église. Les porteurs de bannières se sont avancés dans le choeur pour les tenir en fond de scène derrière l'autel où serait célébrée la messe dite de Saint-Pie V, en version originale : latine bien sûr. Il faut noter ici le moment exceptionnel où le porteur de la bannière de Sainte-Anne (l'aîné des pèlerins), a gravi les marches au pied du chœur et a transporté cet étendard fièrement et avec beaucoup d'émotion. Il était conscient et heureux de représenter en cet instant tous les pionniers et les aînés présents ou disparus qui ont conservé depuis 30 ans la tradition catholique. Toute la reconnaissance et les regards des membres des nombreuses familles soutenaient sans doute les bras et les jambes de cet homme afin qu'il puisse témoigner par ce geste du remerciement et de la confiance envers notre patronne.

Les préparatifs de la messe se terminaient pendant que nos oreilles se familiarisaient avec les échos des répons des Ave et des Pater de la foule, initiés par les scouts marins et les guides, tous bien mis dans leurs uniformes.

Combien de personnes sont arrivées d'une façon impromptue, par les couloirs des côtés de l'église autour du chœur, ou par derrière l'église, en bavardant de choses et d'autres mais qui ont spontanément temporisé leur conversation au fur et à mesure qu'ils approchaient de la nef, ne sachant pas qu'une messe différente se déroulerait bientôt. Intrigués par tant de décorum et de respect palpable par les prières des fidèles et leur tenue, ils se sont laissés gagner d'abord par la curiosité. Au fur et à mesure que le temps avançait, les bancs libres se remplissaient de ces touristes québécois, canadiens, américains, amérindiens, hispaniques, noirs, etc.

Les fidèles de la tradition étaient émus d'entendre leurs propres prières se répercuter à travers cette grande église. L'organiste de son côté, était heureux de pouvoir mettre à profit son expérience et sa compétence grâce à un si bel instrument. Les membres de la chorale faisaient retentir leurs chants dans les voûtes de toute l'église. Les porteurs soutenant dignement la statue de Sainte-Anne et les servants de messe tous en soutane rouge ou noire et surplis, complétaient le décorum du chœur déjà magnifique de la crypte de la basilique.

L'entrée tant attendue du célébrant a permis de débuter la messe dans un déroulement qui a rappelé à plusieurs touristes attendris qui se joignaient au groupe, d'heureux moments de leur jeunesse. Quant à ceux de moins de 40 ans, leurs regards traduisaient une curiosité et une surprise de pouvoir assister à une messe d'un " style nouveau pour eux ".

Le déroulement de la messe se fit harmonieusement, grâce à la participation active des fidèles aux répons et chants, auxquels se mêlaient, chose surprenante, de plus en plus les voix des touristes qui " se souvenaient ". Parmi ces derniers, plusieurs personnes ont même pu chanter toutes les paroles en latin des divers chants liturgiques.

Lors de l'homélie, les participants ont pu apprécier les propos tenus par le célébrant qui a brossé un tableau historique de l'importance de Sainte-Anne pour les fidèles venus de toutes les régions. Il a exhorté les gens à continuer à mettre en pratique les valeurs prônées par l'Église catholique, valeurs si souvent mises de côté de nos jours : le respect de Dieu, du prochain, de la vie, de la transmission des valeurs chrétiennes au sein des familles, etc. Il a aussi rappelé les éléments de la culture de la mort si souvent fustigés par le Pape Jean-Paul II. Le prédicateur a repris les propos du souverain pontife concernant l'importance du chapelet en cette Année Mariale. L'abbé a terminé en exprimant le vœu que l'année prochaine la messe puisse être dite cette fois en haut, dans la basilique. Ce souhait confiant a été vivement et très positivement ressenti par les participants.

Les nombreux signes d'adoration divine (génuflexions, etc) durant la messe ont permis à beaucoup de touristes de se rendre compte du respect du sacré si souvent absent de nos jours dans nos églises.

Après le point culminant de la Consécration, les allées latérales étaient devenues plus remplies de touristes. Si bien qu'avant la communion des fidèles, l'abbé animateur des chants a du aviser la foule qui avait maintenant rempli tous les bancs, que par crainte de manque d'hosties, les prêtres ne pourraient donner la communion qu'aux fidèles du pèlerinage. Les touristes se sont mêlés aux pèlerins en une réaction toute empreinte de piété, de dévotion et de volonté de ne pas rater cette occasion unique pour eux. Heureusement les prêtres n'ont pas eu à fractionner les hosties, mais ce fut juste. On en tiendra compte avec joie, dans les préparatifs pour l'an prochain. C'était émouvant de voir des touristes à cette occasion s'agenouiller pour communier sur la langue comme le veut la tradition. À leur regard et à leur attitude révélatrice, il était évident que ceux-ci faisaient une communion sincère, sereine et reconnaissante à Dieu de pouvoir avoir eu le privilège d'assister à une telle messe. Sinon, ils seraient restés en haut dans la basilique, où une messe moderne bilingue se déroulait, avec traduction simultanée français-anglais. Tandis qu'en bas dans la crypte le latin, langue universelle, ralliait pèlerins et touristes de langues diverses.

Plusieurs personnes dans les allées latérales se sont informées pour savoir qui étaient ces pèlerins.

Beaucoup de touristes arrivés en couple ont participé à toute la messe. Un autre homme très intéressé, a insisté auprès de sa compagne qui elle, après quelques minutes, voulait quitter l'allée latérale d'où ils pouvaient voir la messe. Ce dernier est resté et a pu assister le plus longtemps possible à la messe. Sa conjointe étant revenue plus tard. Aussi, ces deux américaines qui se demandaient d'où venaient ces pèlerins, etc

Un petit événement inusité haut en couleur, s'est cependant produit à la fin de la communion des fidèles. Un touriste d'une quarantaine d'années est allé communier. Après, ce dernier s'est retiré dans une allée latérale pour prier, non pas debout comme on aurait pu s'y attendre, mais agenouillé, très recueilli, le visage dans ses mains. C'est alors qu'il a éclaté en sanglots durant de longues minutes, à quelques pieds des fidèles et des jeunes guides interloquées. Était-ce une contrition? Une demande spéciale à Sainte-Anne? Un remerciement pour une grâce obtenue? Une situation difficile dans sa vie? Une joie intense? Une conversion? Dieu seul sait ce qui a déclenché ses larmes, mais chose certaine, les grâces obtenues par cette messe en sont grandement responsables. On peut certainement avancer que la vie de cet inconnu est maintenant changée! Si c'était une conversion, ne serait-ce seulement que celle de ce touriste, la sainte messe aurait apporté une âme de plus à Dieu. Quelle belle fin de pèlerinage!


Signé : Un pèlerin qui a hâte au prochain pèlerinage de 2004!