Aide-mémoire sur la nouvelle Messe

L'une des leçons à tirer de la crise actuelle au sein de la Fraternité Saint Pierre est la nécessité, pour les fidèles, de bien comprendre les motifs qui justifient leur attachement à la messe traditionnelle, motifs qui sont avant tout doctrinaux et qui, pour être bien compris, supposent un minimum de connaissance des origines et des caractéristiques de la nouvelle messe et des moyens mis en œuvre pour l'imposer.
La présente note apporte sur ces sujets quelques données élémentaires et signale quelques-uns des documents permettant d'aller plus au fond de la question.

PLAN

1. Origine de la nouvelle messe
2. Objectifs de la nouvelle messe
3. Caractéristiques de la nouvelle messe
   - de graves défauts doctrinaux
   - comment ils se manifestent dans la nouvelle messe
   - le principe de créativité d'où résulte une mobilité permanente
   - l'emploi systématique du vernaculaire entraînant la disparition du latin
4. La désinformation sur la nouvelle messe
5. Que peuvent faire des laïcs pour la sauvegarde de la messe traditionnelle?
Conclusion

ACTION FAMILIALE ET SCOLAIRE
31, rue Rennequin - 75017 PARIS
Tél. : 01.46.22.33.32

1. ORIGINE DE LA NOUVELLE MESSE

La nouvelle messe n'est pas née par génération spontanée.
Elle a été préparée par l'effort continu que mena, pendant une cinquantaine d'années (en gros 1920-1969), un certain nombre d'ecclésiastiques groupés au sein de ce qu'on appela "le mouvement liturgique".

Ce mouvement, né sous l'impulsion de dom Guéranger, fut progressivement dévoyé sous l'influence de personnalités comme dom Lambert Beauduin (1873-1966), grand ami de l'abbé Roncalli, futur pape Jean XXIII.
(Dom Guéranger (1805-1875), restaurateur en France de l'ordre bénédictin, de la liturgie romaine et du chant grégorien; le mouvement liturgique qu'il mit en œuvre avait pour but de mieux faire connaître, comprendre et aimer la liturgie romaine par le clergé et les fidèles.),

Deux idées clefs caractérisent la déviation du mouvement :

- l'inversion des fins de la liturgie obtenue en donnant le primat à la pastorale sur le culte.
  (rappelons que la liturgie a pour finalité principale le culte divin, l'enseignement des fidèles ne venant qu'en second).

(Voici comment la notion " culte divin" est présentée dans l'encyclique Mediator Dei du pape Pie XII :
(20 novembre 1947)
   Le Divin Rédempteur voulut (... ) que la vie sacerdotale qu'il avait commencée dans son corps mortel par ses prières et son sacrifice, fût continuée sans interruption au cours des siècles dans son Corps mystique qui est l'Eglise. Il institua donc un sacerdoce visible pour offrir en tout lieu l'oblation pure, afin que tous les hommes, de l'Orient à l'Occident, délivrés du péché, servissent Dieu, par devoir de conscience, librement et spontanément.  
L'Eglise, fidèle au mandat reçu de son Fondateur, continue donc la fonction sacerdotale de Jésus-Christ, principalement par la sainte liturgie. Elle le fait d'abord à l'autel, où le sacrifice de la Croix est perpétuellement représenté et renouvelé, la seule différence étant dans la manière de l'offrir; ensuite par les sacrements, qui sont pour les hommes les moyens spéciaux de participer à la vie surnaturelle; enfin par le tribut quotidien de louange offert à Dieu, souverain Bien.)

- l'adaptation de la liturgie aux besoins de "l'union des Eglises" telle qu'elle est trop souvent comprise dans l'œcuménisme d'aujourd'hui.

(réunion des églises chrétiennes toutes mises sur le même plan et également considérées, le catholicisme n'ayant plus aucun caractère de prééminence et d'exclusivité)

(Selon le véritable "œcuménisme", l'unique vraie union des Églises ne peut se faire que par le retour des protestants et des orthodoxes à la seule véritable Église : l'Église catholique (voir le chapitre L'œcuménisme du livre "Iota Unum" de Romano Amerio, Nouvelles éditions latines et l'encyclique Mortalium animos de Pie XI - 6 janvier 1928)).

Pour transformer la messe selon ces idées clefs (primat de la pastorale sur le culte, ouverture à l'œcuménisme), le mouvement liturgique s'efforcera d'accréditer les réformes suivantes :

- adoption du vernaculaire à la place du latin,
- extension de la "liturgie de la parole",
- célébration face au peuple,
- moindre insistance sur les dogmes que récusent les protestants
  (sacrifice, présence réelle, sacerdoce ...)
- toutes caractéristiques que l'on retrouvera dans la nouvelle messe de 1969
  (A ce sujet, voir le livre de l'abbé Bonneterre Le mouvement liturgique, éditions Clovis).

 

2. OBJECTIFS DE LA NOUVELLE MESSE

Le 3 avril 1969, le pape Paul VI signait la constitution apostolique Missale romanum, dont le titre disait qu'elle "promulguait le Missel romain restauré sur l'ordre du deuxième concile œcuménique du Vatican".
La nouvelle messe était née.
Ses objectifs correspondent aux idées clefs précédemment évoquées : adapter la messe aux nécessités de l'apostolat (primat de la pastorale sur le culte) et aux urgences de l'union des Églises (ouverture à l'œcuménisme).

Voici le témoignage de Jean Guitton - qui fut un grand ami de Paul VI - sur la manière dont celui-ci concevait cette ouverture à l'œcuménisme :

"Je crois ne pas me tromper en disant que l'intention de Paul VI, et de la nouvelle liturgie qui porte son nom, c'est de demander aux fidèles une plus grande participation à la messe, c'est de faire une plus grande place à l'Ecriture et une moins grande place à tout ce qu'il y a, certains disent "de magique", d'autres "de consécration consubstantielle", transsubstantielle, et qui est la foi catholique. Autrement dit, il y a chez Paul VI une intention œcuménique d'effacer, ou du moins de corriger, ou du moins d'assouplir, ce qu'il y a de trop "catholique", au sens traditionnel, dans la messe, et de rapprocher la messe catholique, je le répète, de la messe calviniste"
(Jean Guitton, participation au débat organisé par "Lumière 101", radio du dimanche de Radio-courtoisie, le 19 décembre 1993 sur le livre d'Yves Chiron "Paul VI, le pape écartelé").

 

3. CARACTÉRISTIQUES DÉFECTUEUSES DE LA NOUVELLE MESSE

Trois caractéristiques défectueuses seront abordées ici :

- les défauts doctrinaux
- le principe de créativité
- l'usage systématique de la langue vernaculaire

La nouvelle messe étant une messe évolutive (voir ci-dessous le § sur le principe de créativité), il faudrait étudier ces défauts à chacun des stades de l'évolution.

Nous nous limiterons ici à examiner sommairement les défauts de la version initiale (1969) en latin de la nouvelle messe, version dont la théologie a été précisée dans un exposé de présentation intitulé "Institutio generalis".

Deux textes suffiront à présenter ces défauts de façon résumée, l'un des cardinaux Ottaviani (le Cardinal Ottaviani était à l'époque préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi) et Bacci, l'autre du père Joseph de sainte Marie :

- Cardinaux Ottaviani et Bacci

"Le nouvel Ordo Missae, si l'on considère les éléments nouveaux, susceptibles d'appréciations fort diverses, qui y paraissent sous-entendus ou impliqués, s'éloigne de façon impressionnante, dans l'ensemble comme dans le détail, de la théologie catholique de la sainte messe, telle qu'elle a été formulée à la XXème session du Concile de Trente, lequel, en fixant définitivement les "canons" du rite, éleva une barrière infranchissable contre toute hérésie qui pourrait porter atteinte à l'intégrité du mystère"
(Extrait de la lettre des cardinaux Ottaviani et Bacci remise au pape Paul VI en septembre 1969 pour lui présenter le texte connu sous le titre de "Bref examen critique du nouvel "ordo missae"")

- R.P. Joseph de sainte Marie :

"Composé en collaboration avec des protestants sur la base d'une théologie hérétique (Institutio generalis, article 7, et les autres allant dans le même sens), le nouveau rite tendait à effacer le triple dogme de foi qui fait la messe :
1) "présence réelle" du Christ;
2) oblation et immolation de son sacrifice rédempteur;
3) pouvoir sacramentel ministériel du prêtre.

Par ces déclarations (de l'Institutio generalis) et par la nouvelle pratique introduite, le Concile de Trente était publiquement renié. Certes, l'Église a fait, par la suite, corriger le texte (de l'Institutio generalis) triplement hérétique. Mais (...) la nouvelle pratique liturgique, introduite dans les intentions ainsi dévoilées, continuait de produire ses effets "
(Missus Romanus (pseudonyme du père Joseph de sainte Marie), La révolution permanente dans la liturgie, p.11-12.).

Retenons les trois dogmes de la foi que la nouvelle messe tend à effacer :
sacrifice, présence réelle, sacerdoce.

C'est par des omissions, des insinuations, des ambiguïtés que les défauts doctrinaux précédemment évoqués ont été introduits dans la nouvelle messe.

Donnons quelques exemples:

Ce principe auquel doit se conformer la nouvelle messe (c'est l'une de ses principales caractéristiques) a été ainsi expliqué par le secrétaire de la Congrégation pour le culte divin, Mgr Hannibal Bugnini :
(Mgr Hannibal Bugnini, prélat romain (1912-1982), secrétaire de la Sacrée congrégation pour le culte divin de 1969 à 1975; il fut l'un des artisans de la nouvelle messe. Paul VI le mit à l'écart en 1976 parce qu'il le croyait franc-maçon).

"Le parcours de la réforme (liturgique) est visible selon quatre stades vitaux:

- Le premier, le passage vers les langues vivantes, dans les années 1965-67
- Le second, la réforme des livres liturgiques, environ dans les années 1964-1974 (…);
- Le troisième, c'est la traduction des nouveaux livres liturgiques (…);
- Le quatrième, c'est l'adaptation ou "incarnation" de la forme romaine de la liturgie dans les usages et dans les mentalités de chaque Église (…).

Enfin, un stade général est la nécessaire adaptation, profonde et vitale, dans chacune des assemblées en prière, "Églises vivantes dans l'Église une""
(Résumé d'une conférence de Mgr Hannibal Bugnini reproduit dans Notitiae, revue de la Congrégation pour le culte divin, n°92 d'avril 1974.)

Sous le nom "d'adaptation profonde et vitale" ou "d'incarnation" dans les usages et les mentalités, la créativité est ainsi présentée comme un caractère propre de la réforme liturgique en général et du nouveau rite de la messe en particulier.

Quels en furent les résultats?

Une série de mesures destructrices dont nous avons vu les effets se répandre dans les paroisses au cours des trente dernières années :

- les textes sacrés partiellement remplacés par des improvisations;
- les autels laissant la place à de simples tables;
- le mobilier liturgique vendu aux antiquaires;
- les chasubles romaines mises au rancart;
- la pénétration dans les églises des rythmes matériels d'excitation corporelle de la musique profane alors qu'étaient éliminés grégorien et polyphonie...;

bref le sens du sacré a très souvent cédé la place soit à une vulgarité ennuyeuse, soit à une euphorie profane, analogue à celle des "community singing" des sectes protestantes; toute une beauté a disparu dont beaucoup de fidèles, les plus jeunes surtout, n'ont même pas idée.

La nouvelle messe connaît aujourd'hui une certaine remise en ordre qui tend à gommer, voire à redresser, ces improvisations destructrices. La musique et les chants deviennent plus dignes et un coup d'arrêt semble avoir été donné aux excès de créativité, si bien que les offices gagnent, dans la forme, en dignité. Mais ces aménagements, s'ils peuvent redonner à la nouvelle messe un caractère au moins religieux sinon sacré, ne règlent en rien les graves insuffisances doctrinales du nouvel ordo missae.
( Sur le principe de créativité qui régit la nouvelle messe, voir la brochure du père Joseph de sainte Marie "La révolution permanente dans la liturgie" (éditions DMM).
( Le père Joseph de sainte Marie, théologien carme, mort en 1985, est l'auteur d'ouvrages fondamentaux sur la messe).

Ce sont les trois langues du titre de la croix et les trois langues des livres de la Nouvelle Alliance (Nouveau Testament)
(Voir à ce sujet le très bel ouvrage de dom Guéranger Les institutions liturgiques, partiellement réédité par Diffusion de la pensée française (voir p. 240 à 246 de cette réédition)).

La liturgie - et tout spécialement la messe - doit bénéficier du privilège d'une langue sacrée; celle-ci, pour l'Église latine, ne peut être que le latin.
En faisant pratiquement abandonner l'usage du latin - qui, entre autres avantages, présente celui d'être une langue fixe bien adaptée à l'expression de vérités éternelles - la réforme liturgique en cours dévalorise la messe et contribue à casser l'unité de l'Eglise
(On sait que la constitution conciliaire sur la sainte liturgie laisse au latin la première place tout en ouvrant la porte à l'extension du vernaculaire; par la suite seule cette extension fut retenue... et le latin fut mis au rancart.)

Sur ce sujet, voici ce que prévoyait Louis Salleron en 1976:

"Imaginons la suppression complète du latin. En vingt ans, le catholicisme serait disloqué. Chaque pays aurait ses rites propres et bientôt ses propres croyances, car ce que l'unité de langage ne fixerait plus s'éparpillerait dans toutes les directions. Rome ne pourrait plus communiquer avec les évêchés et les paroisses car il n'y aurait plus que des traductions, qui varieraient entre elles. Aussi bien, les églises nationales affirmeraient de plus en plus leur indépendance( ... ).
Ne parlons pas de la théologie et de la philosophie traditionnelles; elles disparaîtraient avec le latin qui fait corps avec elles"
(Louis Salleron, La nouvelle messe, p.20).

Toutes prévisions qui se sont en bonne partie réalisées...
On voit par là l'extrême utilité de conserver - surtout dans la messe - l'usage du latin.

4. LA DÉSINFORMATION SUR LA NOUVELLE MESSE

Selon une remarque fréquemment faite, "nous sommes en présence d'une messe (...) imposée par voie disciplinaire sans que la loi de l'Église l'impose aucunement" (Louis Salleron).

Comment la chose a-t-elle été possible?
Par un abus de pouvoir camouflé par une désinformation.
(cf Brian Houghton, La paix de Mgr Forester).

Aujourd'hui encore, la plupart des fidèles sont persuadés que la création du nouveau rite de la messe a entraîné l'interdiction de l'ancien et que celui-ci n'est autorisé que dans des conditions très limitées (celles en particulier de la lettre de la Congrégation pour le culte divin du 3 octobre 1984, accordant aux évêques la faculté de consentir le fameux indult ... ).
Il s'agit là d'une désinformation d'autant plus remarquable qu'elle dure depuis trente ans.
En réalité, la messe traditionnelle n'a jamais été interdite par l'autorité compétente, comme la chose a été prouvée par de nombreuses études jamais réfutées.
(Voir la brochure Note sur la situation juridique de la messe traditionnelle, éditée par l'Action Familiale et Scolaire).
De ce fait, l'indult mentionné ci-dessus ne peut avoir de signification juridique.
Trompés sur ce point depuis trente ans, la plupart des fidèles se sont soumis, par esprit de discipline, à ce qui n'était, et n'est toujours, qu'un abus de pouvoir.
(En autorisant de façon très restrictive la messe traditionnelle, les mesures romaines prises en 1984 (lettre du 3 octobre 1984 de la Congrégation pour le culte divin autorisant les évêques à accorder l'indult), et en 1988 (motu proprio Ecclesia Dei) ont quelque peu atténué les effets de l'abus de pouvoir tout en renforçant la désinformation : s'il faut un indult pour célébrer la messe traditionnelle, c'est donc que, sans cet indult, elle est interdite, se disent les fidèles).

5. QUE PEUVENT FAIRE DES LAÏCS POUR LA SAUVEGARDE DE LA MESSE TRADITIONNELLE?

Nous avons suffisamment montré les défauts de la messe nouvelle pour qu'il soit nécessaire d'insister sur l'importance de conserver la messe traditionnelle.

Que peuvent faire les laïcs en ce domaine?

Voici quelques-uns des points sur lesquels ils peuvent avoir une influence:

CONCLUSION

 

Quelques livres et brochures sur le problème de la nouvelle messe
(en vente à l'A.F.S.)


· Bref examen critique du nouvel ordo missae, présenté à Paul VI par les card. Ottaviani et Bacci (éd. Ass. Noël Pinot) (1969) - 25F
· La Nouvelle messe, de L.Salleron, Nouvellesédit.latines(1981) - 120F
· La révolution permanente dans la liturgie, de Missus Romanus, éditions D.M.M. (1976) - 30F
· Le sacrifice de la messe dans la nouvelle catéchèse et le nouvel ordo, livre rédigé en majeure partie par le père Joseph de sainte Marie, éd. D.M.M. (1985) - 75F
· La dimension œcuménique de la réforme liturgique, de G.Celier éditions Clovis (1987) - 65F
· La réforme liturgique en question, de Mgr Gamber, éditions Sainte Madeleine (1992) - 65F
· Note sur la situation juridique de la messe traditionnelle, tiré à part A.F.S. (1988) - 5F
· La raison de notre combat: la messe catholique, éditions Clovis (1999) - 130F

Du fait de sa concision (moins de 40 pages) et de l'autorité des personnes qui l'ont présenté au pape Paul VI (cardinal Ottaviani, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, et cardinal Bacci), le Bref examen critique du nouvel ordo missae présente un intérêt particulier.
Toute personne s'intéressant à la messe traditionnelle devrait posséder cette brochure et la relire de temps à autre.

ACTION FAMILIALE ET SCOLAIRE
31, rue Rennequin - 75017 PARIS
Tél. : 01.46.22.33.32