Mémoire sur
la solution proposée par Mgr Lefebvre, le21 avril 1987, pour une
« réintégration et une normalisation des rapports de la Fraternité
avec Rome »
Cette
« réintégration » tenait à cœur à Mgr Lefebvre. Pour lui, mieux valait
régler ce problème, au plus tôt, que de l’ignorer et surtout que de ne pas le
considérer ou que de le considérer comme secondaire et sans importance. Le
mystère de l’église nous invite
fortement à en garder une constante préoccupation.
Cependant
il ne faudrait pas vouloir et accepter cette « réintégration »
si la solution envisagée nous obligait à
abandonner la vérité ou nous exposait à
perdre le droit et la faculté de dire la messe Saint Pie X et cela
exclusivement.
L’expérience
de Campos montre que Rome n’est plus opposée, par principe, à octroyer cette
« facultas » en faveur du rite tridentin, à ceux qui veulent le
garder. Ce qui est absolument nouveau par rapport à 1976, à 1984, à 1999.
Mgr
Lefebvre insistait sur l’attachement de la Fraternité et des œuvres amis, à la
Tradition catholique et à la liturgie traditionnelle. En soi, cet attachement
est légitime, mais il est également légitime, eu égard aux « fruits
extraordinaires que produit ce climat de la tradition catholique »(Lettre au Cardinal Gagnon du 21 novembre 1987). Fruits
qu’ont pu constater le Cardinal Gagnon et son assesseur lors de leur visite
canonique de 1987.
Tous unis,
comme en une grande famille, il n’est donc pas question que nous abandonnions
un tel trésor, qui nous lie, de fait et essentiellement, à l’Eglise romaine,
« à Pierre et à ses Successeurs »
Par contre,
nous restons absolument et radicalement allergiques à l’esprit conciliaire de
la liberté religieuse, de l’œcuménisme, de la collégialité, à l’esprit
d’Assise, fruit du modernisme, du libéralisme tant de fois condamné par le
Saint-Siège. Allergie, en soi, légitime, au seul titre de la vérité, mais,
également eu égard aux fruits de cet aggionamento conciliaire :
difficultés extrèmes dans lesquelles se
trouvent l’église, diminution grave du nombre de prêtres, échec absolu de la
catéchèse, baisse grave de la pratique religieuse. On juge un arbre à ses
fruits.
De cet
esprit conciliaire, nous voulons nous protéger et en « protéger la
jeunesse de nos foyers catholiques ». ( lettre de
Mgr Lefebvre au Cardinal Gagnon ) .Quoi de plus légitime !
On
retrouve, ici, le sens de la déclaration
du 21 novembre 1974 de Mgr Lefebvre.
Cette
déclaration reste au cœur du débat. Le Saint Siège y fut absolument opposé et
hostile, depuis le début du « conflit ».Toutefois, étant donné le constat
que tous peuvent faire aujourd’hui sur la situation particulièrement
difficile de l’église, il y aura moins
« d’arrogance » à notre égard de la part des cardinaux aujourd’hui
qui hier. Nous nous souvenons en effet du rapport que nous faisait Mgr Lefebvre
de la fameuse visite au Saint Office avec les Cardinaux Garonne, Tabera et
Wright. N’oublions pas que « leur pastoral » est un echec. Dans leur cœur,
ils ne peuvent pas ne pas le confesser, même si extérieurement, ils continuent
de parler avec amphase des fruits du Concile. L’exposé du Pape, sur la
situation de l’église en Europe, en est un bon constat. Dès lors, le Saint
Siège est certainement mieux disposé à notre égard aujourd’hui qu’hier et, volontiers,
nous laisserait faire « l’expérience de la Tradition ». Le cas de
Campos est un bel exemple et un « confirmatur » de ce que j’avance..
Rome doit
donc nous considérer comme « une armada », « une petite
armée »(cf art.19 Proposition), ayant « l’esprit
des Maccabées », au milieu des nations « perverses », décidés, à
tout prix, à demeurer catholiques face à la déchristianisation qui s’opère à
l’extérieur et à l’intérieur de l’église. C’est, encore une fois le constat du
Pape dans son exhortation apostoilique sur l’église en Europe. (cf . analyse de la situation des nations européennes
dans « Ecclesia in Europa »)
Rome
connaît cette résolution de la Fraternité : « une petite armée »
et veut, cependant, « régulariser » la situation. Le Cardinal Castrillon-Hoyos
l’a dit, le Pape le désire.
Et
de fait, le Vatican ne peut qu’être sensible ,
aujourd’hui, à cette résolution de la Fraternité : « être une petite armée » lui qui
encourage toutes les nations européennes à reprendre, sans crainte, le «
Livre de l’Evangile » (Ecclesia in Europa, n. 65), constatant à son
tour une déchristianisation réelle des nations d’Europe ( sans nier, pour
autant, les aspects positifs, comme les nombreux martyrs de l’Europe de l’Est…)
.
Le Vatican
doit être également plus sensible
aujourd’hui que hier, à notre desir de garder la liturgie traditionnelle, lui
qui vient de publier l’encyclique « Ecclesia de Eucharistia », qui
reconnaît les « ombres » graves qui entourent les célébrations
liturgiques actuelles, qui veut y porter remèdes (cf Ecclesia de Eucharistia),
et qui, dans son dernier texte sur « l’église en Europe » demande
« que soit ravivé le sens authentique de la liturgie »(n.70) .
Ces considérations sont également
nouvelles par rapport à 1987-88 et peuvent laisser présager une heureuse
issue dans le cas de nouveaux contacts ou du moins pourrait justifier une
reprise de contact. Mgr Lefebvre, alors pourtant toujours en opposition avec la
hiérarchie, acceptait, cependant, très volontiers, cette perspective de « normalisation ».
Il écrivait : « Nous acceptons très volontiers d’être
reconnus par le Pape ». Cette
phrase est importante. Est-ce le souhait de tous ? Surtout avec ce Pape là ?
Mgr lefebvre ne demandait pas que, préalablement à cette reconnaissance, le Concile soit
corrigé de ses imperfections, erreurs ou équivoques. Je fais remarquer à mes
confrères que c’est là une tache du
Magistère. Nous ne sommes que « l’église enseignée ». Nos évêques, ne l’oublions pas
, non pas de juridiction. Ce qu’ils ont pour mission de faire : c’est d’ user de leur pouvoir épiscopale pour
transmettre « confirmation »et « sacerdoce » pour la
pérennité du sacrifice de la messe qui fut, un temps, très sérieusement menacé,
plus hier qu’aujourd’hui. Nous devons garder dans cette période de crise, la
doctrine catholique intégrale, sans nous laisser contaminer par le principe
même de la crise de l’Eglise : le subjectivisme moderniste, par trop
répandu dans le clergé. C’est notre
devoir. C’est ce que nous avons toujours fait .
Ce qui nous a obligé à justifier notre résistance
théologiquement, par nos nombreuses études et exposés théologiques. Mais nous n’avons pas à nous substituer à la
hiérarchie, à nous croire et agir comme
si nous étions la hiérarchie, à imposer nos « diktats » à Rome. Notre
rôle est tout autre. N’y aurai-il pas, par malheur, une légère
« deviance » aujourd’hui parmi nous ?
Notre rôle,
j’y insiste, reste toujours celui que Dom Gueranger précisait, en ces
termes :
« Il est dans le trésor de la
Révélation des points essentiels, dont tout chrétien, a la connaissance
nécessaire et la garde obligée…. Les vrais fidèles sont les hommes qui puisent
dans leur baptême (-en période d’hérésie-) l’inspiration d’une ligne de
conduite ; non les pusillanimes qui, sous le prétexte spécieux de la
soumission aux pouvoirs établis, attendent, pour courir à l’ennemi, un
programme qui n’est pas nécessaire et qu’on ne doit point leur donner ».
Ce rôle est
capital. Du temps de Mgr Lefebvre, et avec Mgr Lefebvre, nous l’avons merveilleusement «
mené ». Il est merveilleux de
grandeur et de gloire. Il nous suffit. Nous n’avons pas le droit de nous en
imaginer un autre.
Mgr
Lefebvre accéptait donc « volontiers d’être
reconnu par le Pape ». Il précisait même vouloir « avoir un siège »
à Rome, « dans la Ville Eternelle », et « apporter même
notre collaboration au renouveau de l’Eglise », le Concile étant ce qu’il
est. J’y insiste. Restant ce qu’il est , même pas
encore corrigé de ses erreurs, imperfections…, Mgr Lefebvre envisageait,
cependant, malgré tout une « normalisation » avecRome. Ce qui ne veut pas dire pour autant que le
Concile Vatican II ne doive pas être nécessairement corrigé…demain, après
demain, un jour, le plus vite sera le mieux, par la hiérarchie. Ce qui fut déjà
fait par le pape Paul VI avec la « nota praevia » à propos de la collégialité, pourrait et même
devrait l’être, de la même manière, pour les autres problèmes :
l’œcuménisme en en précisant la finalité, la liberté religieuse, en rappelant
le « droit public de l’église », les finalités du mariage, en en
précisant leur ordre…
Et de fait, la « normalisation » de
notre situation canonique nous permettrait d’apporter plus facilement notre «
collaboration au renouveau de l’Eglise ». N’oublions pas que Mgr Lefebvre, lui-même, envisageait de
porter notre aide à la restauration de
l’eglise.
Cette
reconnaissance par le Pape allait , pour Mgr Lefebvre
, de soi. Ce désir était nourri par son amour de Rome, lui « qui n’a
jamais voulu rompre avec Rome ni avec le Saint Siège ni considéré le siège de
Pierre vacant ». Mgr Lefebvre disait cela du pape actuel, le pape
d’Assise, du pape du baiser du Coran …Ne soyons pas plus royaliste que le
Roi. Nous risquerions de perdre l’esprit de notre fondateur !
B) Condition de cette
normalisation
Mais pour
cette reconnaissance par le Pape, pour cette « réintégration »,
pour cette « normalisation » de notre situation, Mgr Lefebvre
posait une condition sine qua non : « Nous reconnaître tels que nous
sommes ». C’est le paragraphe 4 du texte « proposition » :
« Si le Saint-Siège désire
sincèrement que nous devenions officiellement des collaborateurs efficaces pour
le renouveau de l’Eglise, sous son autorité, il est de toute nécessité que nous
soyons reçus comme nous sommes, qu’on ne nous demande pas de modifier notre
enseignement, ni nos moyens de sanctifications, qui sont ceux de l’Eglise de
toujours ».
Vous
remarquerez que Mgr Lefebvre ne pose pas, ici encore, de préalable…ni sur le
Concile ou sa correction, ni sur une déclaration « urbi et orbi » en
faveur de la messe tridentine. Restons pragmatiques et ouverts aux suggestions proposées par Mgr
Lefebvre. Ces suggestions sont écrites , et
d’interprétation facile. Une simple
lecture y suffit. Défendons-les
simplement sans craindre d’être taxés par les « lefebvristes »
d’infidélité à la pensée de Mgr Lefebvre…
Mgr Lefebvre demandait :
« qu’on nous prenne, qu’on nous reçoive tels que nous
sommes ».
Notons
encore que Mgr Lefebvre ne parlait pas
d’ « accord », de « réconciliation », mais bien de
« réintégration » et de « normalisation ». Les mots ont
leur importance.
Quel serait
donc le but de cette « normalisation », de « cette
réintégration » ?
Mgr lefebvre nous le précisait dans le « projet »
qu’il remettait au Cardinal Gagnon et qu’il intitulait :
« Proposition de règlement apportant
une solution au problème des Œuvres et des initiatives en faveur de la liturgie
traditionnelle dans L’Eglise »
Là, il
donnait « sa solution » et sa finalité. Quelle est-elle ?
Je ferais
tout d’abord remarquer que les œuvres pour lesquelles il proposait à Rome une solution sont les
« œuvres » déterminées,
spécifiées par une fin : la garde de « la liturgie traditionelle dans
l’église ». Ce sont celles qui ont pour but de pérenniser la liturgie
traditionnelle dans l’église. C’est leur but. Ne les détournons pas de cette
fin. N’inventons pas, ne donnons pas à ces œuvres d’autres fins. Il y a une grande cohérence
dans la pensée de Mgr Lefebvre. Toute sa pensée tourne autour de la messe
catholique. S’il fonde une œuvre sacerdotale, c’est pour la messe.S’il est en
« opposition » avec la « Rome conciliaire », c’est pour la
messe. Tout est finalisé dans la pensée de Mgr Lefebvre par la messe, le
sacrifice de la Croix. Ce fut sa pensée exprimée clairement au sermon des
ordinations de 1976 à Econe. Ce fut sa pensée exprimée clairement aussi à la Porte de Versailles, en 1978, lors de
son Jubilé sacerdotal. Son sermon, en ce jour, fut considéré, par tous, comme
son testament. Il nous demanda de rester fidèles au Sacrifice de Notre
Seigneur. Il ne nous confia pas d’abord et avant tout la lutte contre le
Concile Vatican II. Mgr Lefebvre a une pensée positive. Tout en luttant contre
le Libéralisme, il n’aimait pas tellement l’expression d’ « anti-
libéral ».Il nous confia la garde de la messe de Saint PieV. C’est notre
raison d’être. C’est notre mission. Et c’est
parce que nous restons fidèles à cette messe que nous luttons
nécessairement contre tout ce qui détruit cette messe :l’oecuuménisme,
la liberté religieuse, le Libéralisme, le laïcisme, le Rationalisme, la
Franc-maçonnerie. Nous travaillons pour tout ce qui magnifie cette messe :
le Régne social de Notre Seigneur Jesu-Christ etc
Ainsi, en
prolongement, on peut dire que la finalité de la solution proposée par Mgr
Lefebvre pour régler le problème de nos «œuvres », c’est encore et
toujours la messe, le grand trésor de l’église. Pour qu’il soit plus surement
gardé et qu’il puisse rayonner toujours davantage
N’oublions
pas non plus la pensée sans cesse missionnaire de Mgr Lefebvre. Ce trésor
qu’est la messe, ce n’est pas seulement un trésor pour nous, mais pour la
multitude. Si donc il cherche une solution, s’il propose une solution, c’est aussi dans cet esprit missionnaire. Pour que
la messe « serve » au plus grand nombre de catholiques possibles.
Cette solution envisagée réellement par Mgr Lefebvre n’est pas pour que nous
perdions ce trésor, mais bien, au contraire, pour qu’il rayonne davantage de
nos mains sacerdotales.
D) Le
« concret » de la solution
Le
raisonnement de Mgr Lefebvre :
Il part du
constat de l’attachement de beaucoup, de part le monde, à la messe dite de
Saint Pie V. Rome ne peut le nier, et de fait ne le nie plus. Le Cardinal
Ratzinger souhaite vraiment une solution. Il dit même ne pas comprendre
l’opposition dont font montre, aujourd’hui encore, beaucoup d’épiscopats. Il
l’a écrit dans un de ses derniers livres : « L’ésprit
liturgique »
Monseigneur
constate que Rome veut une solution. Il en veut pour preuve la lettre du
Cardinal Ratzinger de 1987. Nous pourrions donner aujourd’hui bien d’autres
preuvesen ce sens.
Cet
attachement de beaucoup à la messe, de part le monde, à la messe tridentine est
une exigence « nouvelle ». Rome aussi le constate et en prend acte.
Plus que jamais. J’en veux pour preuve tous les récents livres du Cardinal
Ratzinger,les interventions nombreuses du Cardinal Stikler, la dernière
encyclique de Jean-Paul II sur l’Eucharistie, le règlement de la situation des
pères de Campos, nos amis, la messe du 24 mai 2003 à Sainte Marie Majeure…..
L’Eglise catholique, toujours réaliste, prend toujours en
compte « les nouvelles exigences » du peuple de Dieu. Hier comme
aujourd’hui. Mgr Lefebvre en veut pour preuve les déclarations du Concile Vatican II au numéro
10 de « Presbyterorum ordinis ». Je ne serais pas étonné que
cette déclaration du Concile Vatican II
soit de fait une proposition de Mgr Lefebvre lui-même. Où, sinon mieux qu’en
mission, peut-on trouver de nouvelles exigences ? Qui fut plus
missionnaire que lui ?
C’est en
effet la deuxième fois que Mgr Lefebvre cite
ce passage du Concile Vatican II. Il le citait déjà alors qu’il déposait
dans les mains de Mgr Charrière la
demande d’érection du séminaire à Fribourg et sa demande de fondation de la
Fraternité Saint Pie X. Voyez les documents en question. Je ne les ai pas ici
sous les yeux. Je cite de mémoire. Mais je suis sur de ce que j’avance.
Voilà ce
fameux texte qui semble donc bien important pour Mgr Lefebvre :
« Là où les conditions de l’apostolat
la réclameront, on facilitera non seulement la répartition des prêtres, mais
encore les œuvres pastorales adaptées aux différents milieux sociaux à
l’échelle d’une région, d’une nation ou de divers endroits dans le monde. Il
pourra être utile de créer à cette fin des séminaires internationaux, diocèses particuliers(I), prélatures personnelles(2), et autres
institutions auquelles les prêtres pourront être affectés ou incardinés pour le
bien commun de toute l’Eglise(3), suivant des modalités à établir pour chaque
cas et toujours dans le respect des droits des ordinaires locaux ».(n. 10)
(1) Voyez le cas de la
création de l’administration apostolique Saint Jean Marie Vianney, érigée en
véritable diocèse particulier pour prendre en compte cette exigence nouvelle de
toute une portion du peuple de Dieu désirant légitimement rester fidèle à la
Messe saint Pie V
(2) Voyez le cas de l’opus
Dei, vraie prélature personnelle, pour prendre en compte, ce me semble, toute
une spiritualité aimée de beaucoup.
(3) Voyez le
« Vicariat aux armées », véritable institution ad hoc du personnel
militaire de tout un pays, avec juridiction cumulative avec les évêques du lieu
Beaux exemples de pragmatisme organisateur. En un
mot, l’église est fort réaliste, elle s’adapte aux nouvelles réalités, tout en gardant le sens de la hiérarchie.
Et c’est
ainsi que :
-
constatant que l’église en son dernier Concile n’est pas opposée
à ce que des œuvres soient favorisées, organisées, même à l’échelon d’une nation,
voire même à l’échelon mondial, pour prendre en compte des « exigence
nouvelles »,
-
constatant que « l’extension des demandes en faveur de la messe
tridentine » est précisément une « circonstance nouvelle »,
Mgr
Lefebvre fait sa proposition.
Cette proposition,
j’y insiste, est fondée sur une recommandation conciliaire. Ne laissons pas
dire que nous sommes , d’une manière absolue et
générale, indistinctement, opposés au Concile Vatican II. C’est à l’esprit
moderniste qui a soufflé sur le Concile que nous sommes surtout et radicalement
opposé, non, purement et simplement, au
Concile. Nous acceptons le Concile comme l’acceptait à l’époque un Jean
Madiran, un abbé Dulac, un Mgr Lefebvre, un père Berto, un père Calmel. Mgr
lefebvre y a puisé, dès le début, un principe de son action épiscopale. C’est
bien de ce texte cité qu’il faut comprendre l’existence, dans notre institut
sacerdotal, de « séminaires internationaux ». C’est sur ce texte
qu’il fonda la légitimité de sa demande à Mgr Charrière, de fonder la
Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, dans le diocèse de Fribourg.
Ceci étant
dit et admis par tous, et par Rome et
par Mgr Lefebvre, il serait légitime, dès lors, de créer une « institution
particulière » qui prendrait en compte cette « exigence nouvelle » :la réclamation soutenue en faveur de la messe tridentine,
tout en respectant les droits des ordinaires locaux.
Cette
institution proposée par Mgr Lefebvre au Saint Siège prendra, alors, en compte,
bien évidemment, la réalité des « œuvres et des intiatives en faveur de la
liturgie traditionnelle » et pour ce faire, pourrait s’inspirer des règles édictées, le 21
avril 1986, au sujet de «
l’Ordinariat aux armées ».
a) Prendre en compte la
« réalité » de la Fraternité et des œuvres amis et leur extension.
Cette extension semble
exiger, pour Mgr Lefebvre, la création d’un « Secrétariat Romain ».
« L’extensioin mondiale rapide de
la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X et la multiplication d’œuvres similaires
réclament une organisation qui ait son siège à Rome, à l’instar d’un
Secrétariat ou d’une Commission… » (art »
7).
Rome s’est
manifestement inspirée de cette proposition de Mgr Lefebvre dans son texte
« Ecclesia Dei Adflicta » de juillet 1988. Elle créa, de fait, une
commission appelée « Ecclesia Dei ».
La finalité de ce
Secrétariat :
« …..un Secrétariat ou une
Commision pour le maintien et le développement de la liturgie latine selon les
prescriptions de Jean XXIII ».
Ce
secrétariat serait assez semblable à la Propagande vis à vis des territoires de
mission ou à l’Orientale vis-à-vis des Rites Orientaux (
art 9)
Donc, ce que
l’Orientale est aux Rites Orientaux, le Secrétariat en question le serait vis-à-vis du Rite
tridentin. Et que l’on ne dise pas que ce serait créer ainsi « une réserve
d’Indiens ». Mgr Lefebvre ne pensait pas ainsi.
Il pourrait avoir la
même composition et les mêmes pouvoirs que les congrégations nommées ci-dessus.
Même composition : « A l’instar
des autres secrétariats et commissions de ce genre, c’est-à-dire - un Cardinal Préfet, nommé par le Pape avec
agrément du Supérieur général de la Fraternité Saint PieX,
- un archévêque ou êvêque, secrétaire et président et quelques
« minutanti », présentés par le Supérieur Général de la Fraternitié
Saint Pie X ».( art. 8)
Même pouvoirs : « Ils seraient
assez semblables à ceux qu’ont la Propagande vis-à-vis des territoires de
Missiosn et l’Orientale vis-à-vis des Rites Orientaux ». (art 9)
Le but de ces
pouvoirs : « Ces pouvoirs auraient pour but de normaliser les
œuvres et les initiatives en faveur de la tradition et de les aider à remplir
leur rôle dans l’église, dans les circonstances présentes, spécialement pour la
FSSP X :
-veiller à leur
continuité par l’octroi de l’épiscopat à plusieurs membres,
-veiller à leur
développement harmonieux et dans la paix vis-à-vis des Evêques diocésains et de
la part de ceux-ci
-veiller à amener les
Ordinaires des lieux à comprendre le bien de la collaboration, par exemple,
pour les séminaires. » (art. 10)
C’est ce qu’a très
souvent exprimé le Cardinal Ratzinger
dans ses récents ouvrages et, en particulier, dans sa conférence donnée à Rome
aux communautés dites « Ecclesia Dei » lors de leur pèlerinage romain
d’action de grace.
L’extension ou les
œuvres dépendant de ce Secrétariat :
cf art. 11.
b) situation canonique des
œuvres et des initiatives en faveur de la liturgie traditionnelle dans
l’Eglise.
Mais avant même cette réglementation canonique, il
faut comme préalable à tout :
- lever les suspenses et interdits.
- reconnaître à nouveau les statuts de la
Fraternité Sacerdotale Saint Pie X. ( art 12)
Il est
clair que Rome a laissé entendre que cela allait de soi.
Mgr Rifan,
alors encore simple prêtre, attirait notre attention sur l’attitude de Rome
vis-à-vis des orthodoxes : la levée des sanctions pour faciliter les
contacts et la confiance. Ce qui fut fait pour les Orthodoxes, le pourrait, à
plus forte raison, pour la Fraternité !
Devrait
être également réglé le problème de la succession épiscopale de Mgr Lefebvre,
ce qui entrainerait une légère modification des statuts de l’Insitut. (art 12-3)
L’exemple
de Campos laisse entendre que Rome n’y verrait pas une difficulté majeure
puisque Rome accepta de pourvoir à la succession de Mgr Rangel. Elle le dit, l’écrivit dans la lettre du Pape
à Mgr Rangel et le réalisa, de fait, avec le sacre de Mgr Rifan, en août 2002.
Les
circonstances historiques ont fait que
Mgr Lefebvre se donna quatre
auxiliaires. Tout laisse entendre que Rome les reconnaîtrait, comme elle
a reconnu l’épiscopat de Mgr Rangel, le confirmant dans son état épiscopal,
voulant même qu’il participe, comme co-concécrateur, au sacre de Mgr Rifan.
Manière discrète, romaine, de réhabiliter, dans un premier temps, la mémoire de
deux évêques courageux : Mgr de Castro-Meyer, Mgr Lefebvre.
c) organisation canonique
Enfin,
quant à l’organisation canonique proprement dite, Mgr Lefebvre suggèrait que
l’on s’inspire de la réglementation canonique prévue pour l’Ordinariat aux
armées, dont les statuts ont du être révisés en avril 1986 (art 12, 4) :
« Canoniquement il semble que l’on puisse se référer à ce qui a été
décidé l’an dernier, le 21 avril 1986,au sujet de
l’Ordinariat aux armées ».
La
Fraternité pourrait alors être considérée « comme le support de l’Ordinariat »
(art 14,1) (Support = objet placé sous
un autre pour le soutenir ou le consolider).
Ainsi entendu, la Fraternité serait considérée comme l’élément essentiel
de « l’ordinariat des
traditionalistes », de la même manière qu’il y a un ordinariat aux
armées. Et de fait, la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X peut bien être
considérée comme une petite armée. C’est ce que dit Mgr Lefrebvre à l’article 19 : « Les normes de la
Constitution apostolique « Spirituali militum curae » (c’est le nom
des statuts qui organisent l’Ordinariat aux armées) ….peuvent bien être
appliquées à la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X chargées des soins
spirituels d’une petite armée de ceux qui maintiennent la Tradition
liturgique »
Ainsi,
comme il est prévu, dans cet Ordinariat,
une juridiction « cumulative »
entre l’ordinaire du lieu et l’autorité de l’Ordinariat, ainsi en serait-il
avec l’ordinariat des traditionalistes. Mgr Lefebre y semble très favorable. Il
écrit : « l’application de la juridiction cumulative semble très
réaliste et résout beaucoup de problèmes. » C’est aussi ce qui fut prévu
pour les pères de Campos. C’est dire que Rome est aussi favorable à cette
solution. N’oubliez pas que Rome est
très attentive à tout ce que nous écrivons et faisons. A plus forte raison, à
ce qu’écrivait et faisait Mgr Lefebvre. La preuve ! Il semble bien que , dans cette affaire canonique, Rome suive volontiers
les suggestions de Mgr Lefebvre. Raison supplémentaire pour que nous ne les
oublions pas et que nous nous présentions au Vatican avec ces propositions en
mains.
Ainsi,
comme les sujets sont incardinés dans
cet Ordinariat., il en pourrait être de même pour les prêtres,
frères …dans la Fraternité. Ils pourraient être incardinés, de la même
manière, dans la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X.
Ainsi le
problème de la juridiction pour les
confessions et les mariages serait-il réglé. Les prêtres de la Fraternité
recevraient la juridiction de Rome par le supérieur Général (art .21)
Toutefois,
les sacrements, tous les sacrements seraient donnés, les prescriptions du Droit étant respectées, selon le rituel de
1962( art 22). Mais cela aussi a été proposé par Rome
aux pères de Campos. Et même avec quelle résolution, du côté du Cardinal
Castrillon-Hoyos, puisque cela n’ayant pas été spécifié dans le premier texte
rédigé par la Congrégation des évêques, le Cardinal ne voulut pas que le texte
soit publié avant la correction expressément faite…Il n’y avait la aucun piège,
comme certains voulurent le croire, mais simple rigueur.
Cette
solution canonique, ainsi envisagée et proposée, ne devrait pas soulever de
« difficultés majeures », ni du côté de Rome ni du côté de la
Fraternité, ni même du coté des fidèles. C’est l’article de conclusion du texte
de Mgr Lefebvre : « ll ne semble pas qu’il doive y avoir de
difficultés majeures du point de vue canonique,(il faudrait ajouter, me
semble-t-il, « ni du côté de Rome
ni du côté de la Fraternité ») ni de la part des fidèles de la Tradition,
si les indications ci-dessus sont exactement observées » ( art23), la
principale étant que Rome nous prenne tels que nous sommes et ne cherche pas à
nous faire dévier de notre désir ferme de rester fidèles à la Tradition et à la
liturgie traditionnelle. C’est la grande
crainte de Mgr Fellay, comme elle fut celle de Mgr Lefebvre. A nous d’être
forts…La situation de l’église devrait nous le permettre, bien plus facilement
qu’en 1988…
Les points canoniques ici suggérés par Mgr
Lefebvbre, seraient, certainement,
acceptés par Rome puisqu’elle s’en inspira, pour beaucoup, dans le
règlement du problème de Campos.
Conclusion : C’est
sur ce texte « proposition… », écrit
par Mgr Lefebvre lui-même qu’il faudrait entrer en contact avec Rome pour cette
« normalisation » de nos rapports avec Rome, normalisation souhaitée
par beaucoup, par moi certainement. Et cela, sans retard. Avant qu’il ne soit
trop tard.
Abbé Paul Aulagnier.