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Chrétienté "

 

n°35

 

 

Le 29 décembre 2005

 

Sommaire :

 

-        L’enseignement de Benoît XVI

-        Les nouvelles de Rome

-        Les nouvelles de France

-        Les nouvelles de Terre Sainte

-        La situation religieuse en Iran

 

 

 

L’enseignement de Benoît XVI

Le  dimanche 18 décembre

Benoît XVI, lors de l’Angelus du dimanche 18 décembre 2005, a joliment parlé de Saint Joseph.

Voilà ses propos.

Chers frères et soeurs,

En ces derniers jours de l’Avent la liturgie nous invite à contempler de manière spéciale la Vierge Marie et saint Joseph, qui ont vécu avec une intensité unique le temps de l’attente et de la préparation de la naissance de Jésus. J’aimerais aujourd’hui tourner mon regard vers la figure de saint Joseph. Dans l’Evangile d’aujourd’hui saint Luc présente la Vierge Marie comme « fiancée à un homme du nom de Joseph, de la maison de David » (Lc 1, 27). Mais l’évangéliste Matthieu met davantage en valeur le père putatif de Jésus, en soulignant que, par son intermédiaire, l’Enfant se trouvait légalement inséré dans la descendance de David et accomplissait ainsi les Ecritures qui prophétisaient que le Messie serait « fils de David ». Le rôle de Joseph ne peut toutefois se réduire à cet aspect légal. Il est le modèle de l’homme « juste » (Mt 1, 19), qui en parfaite harmonie avec son épouse accueille le Fils de Dieu fait homme et veille sur sa croissance humaine. Pour cette raison, les jours qui précèdent Noël, il est d’autant plus opportun d’établir une sorte de conversation spirituelle avec saint Joseph, afin qu’il nous aide à vivre en plénitude ce grand mystère de la foi.

Le bien-aimé pape Jean-Paul II, qui avait une grande dévotion pour saint Joseph, nous a laissé une merveilleuse méditation qui lui est consacrée, dans l’Exhortation apostolique Redemptoris Custos « Le Gardien du Rédempteur ». Parmi les nombreux aspects qu’il met en lumière figure l’accent particulier sur le silence de saint Joseph. Son silence est un silence imprégné de contemplation du mystère de Dieu, dans une attitude de totale disponibilité à la volonté divine. En d’autres termes, le silence de saint Joseph ne manifeste pas un vide intérieur mais au contraire, la plénitude de la foi qu’il porte dans le cœur, et qui guide chacune de ses pensées et chacune de ses actions. Un silence grâce auquel Joseph, à l’unisson avec Marie, conserve la parole de Dieu, découverte à travers les Saintes Ecritures, en la confrontant continuellement avec les événements de la vie de Jésus ; un silence tissé de prière constante, de prière de bénédiction du Seigneur, d’adoration de sa sainte volonté et d’abandon sans réserve à sa providence. Il n’est pas exagéré de penser que c’est de son « père » Joseph que Jésus a appris – sur le plan humain – cette robuste intériorité, prémisse de la justice authentique, la « justice supérieure », qu’un jour Il enseignera à ses disciples (cf. Mt 5, 20).

Laissons-nous « contaminer » par le silence de saint Joseph ! Nous en avons tant besoin, dans un monde souvent trop bruyant, qui ne favorise pas le recueillement intérieur, pour accueillir et garder Jésus dans notre vie.



Le vendredi 23 décembre 2005,

 

De l’interprétation du Concile Vatican II.

 

Benoît XVI s’est adressé aux membres de la Curie romaine, à l’occasion de la présentation des vœux de Noël.

Après avoir fait une belle médiation sur les années de souffrance que supporta saintement Jean Paul II, après avoir fait une jolie allusion aux JMJ de Cologne ainsi qu’au récent synode des Evêques, consacré à la Sainte Eucharistie,  conclusion de l’année eucharistique, le pape s’arrêta  longuement sur le Concile Vatican II dont nous fêtons le quarantième anniversaire de la clôture. Il se posa le problème de son interprétation. Question capitale en effet…Nous reviendrons sur cette importante déclaration.

 

….

« Le dernier événement de cette année sur lequel je voudrais m'arrêter en cette occasion, est la célébration de la conclusion du Concile Vatican II, il y a quarante ans. Ce souvenir suscite la question suivante : quel a été le résultat du Concile ? A-t-il été accueilli de la juste façon ? Dans l'accueil du Concile, qu'est-ce qui a été positif, insuffisant ou erroné ? Que reste-t-il encore à accomplir ?

Personne ne peut nier que, dans de vastes parties de l'Eglise, la réception du Concile s'est déroulée de manière plutôt difficile, même sans vouloir appliquer à ce qui s'est passé en ces années la description que le grand Docteur de l\'Eglise, saint Basile, fait de la situation de l'Eglise après le Concile de Nicée : il la compare à une bataille navale dans l'obscurité de la tempête, disant entre autres : « Le cri rauque de ceux qui, en raison de la discorde, se dressent les uns contre les autres, les bavardages incompréhensibles, le bruit confus des clameurs ininterrompues a désormais rempli presque toute l'Eglise en faussant, par excès ou par défaut, la juste doctrine de la foi...» (De Spiritu Sancto, XXX, 77; PG 32, 213 A; SCh 17bis, p. 524). Nous ne voulons pas appliquer cette description dramatique à la situation de l'après-Concile, mais quelque chose de ce qui s'est produit s'y reflète toutefois.

 

Une question se pose : pourquoi l'accueil du Concile, dans de grandes parties de l'Eglise, s'est-il jusqu'à présent déroulé de manière aussi difficile ? Tout dépend en réalité de la juste interprétation du Concile ou – comme nous le dirions aujourd'hui – de sa juste herméneutique, de la juste clef de lecture et d'application.

 

Les problèmes de la réception sont nés du fait que deux herméneutiques contraires se sont trouvées confrontées et sont entrées en conflit. L'une a engendré la confusion, l'autre, silencieusement mais de manière toujours plus visible, a porté et porte des fruits.

 

D'un côté, il existe une interprétation que je voudrais appeler « herméneutique de la discontinuité et de la rupture » ; celle-ci a souvent pu compter sur la sympathie des mass media, et également d'une partie de la théologie moderne.

D'autre part, il y a l'« herméneutique de la réforme », du renouveau dans la continuité de l'unique sujet-Eglise, que le Seigneur nous a donné ; c'est un sujet qui grandit dans le temps et qui se développe, tout en restant toujours le même, l'unique sujet du Peuple de Dieu en marche.

L'herméneutique de la discontinuité risque de finir par une rupture entre Eglise préconciliaire et Eglise post-conciliaire. Celle-ci affirme que les textes du Concile comme tels ne seraient pas encore la véritable expression de l'esprit du Concile. Ils seraient le résultat de compromis dans lesquels, pour atteindre l'unanimité, on a dû encore emporter avec soi et reconfirmer beaucoup de vieilles choses désormais inutiles. Ce n'est cependant pas dans ces compromis que se révélerait le véritable esprit du Concile, mais en revanche dans les élans vers la nouveauté qui apparaissent derrière les textes: seuls ceux-ci représenteraient le véritable esprit du Concile, et c'est à partir de ces textes et conformément à ces textes qu'il faudrait aller de l'avant. Précisément parce que les textes ne refléteraient que de manière imparfaite le véritable esprit du Concile et sa nouveauté, il serait nécessaire d'aller courageusement au-delà des textes, en laissant place à la nouveauté dans laquelle s'exprimerait l'intention la plus profonde, bien qu'encore indistincte, du Concile. En un mot: il faudrait non pas suivre les textes du Concile, mais son esprit.

 

Il reste ainsi évidemment une grande marge pour se demander comment on définit alors cet esprit et en conséquence, on laisse la place à n’importe quelle fantaisie. Mais de cette façon on interprète mal, à la racine, la nature d'un Concile en tant que tel. Il est ainsi considéré comme une sorte de Constituante, qui élimine une vieille constitution et en crée une nouvelle. Mais la Constitution a besoin d'un promoteur, puis d'une confirmation de la part du promoteur, c'est-à-dire du peuple auquel la constitution doit servir. Les Pères n'avaient pas un tel mandat et personne ne le leur avait jamais donné ; personne, du reste, ne pouvait le donner, car la constitution essentielle de l'Eglise vient du Seigneur et nous a été donnée afin que nous puissions parvenir à la vie éternelle et, en partant de cette perspective, nous sommes en mesure d'illuminer également la vie dans le temps et le temps lui-même. Les évêques, à travers le sacrement qu'ils ont reçu, sont les dépositaires du don du Seigneur. Ce sont « les administrateurs des mystères de Dieu » (1 Co 4, 1); en tant que tels ils doivent se présenter comme « fidèles et sages » (cf. Lc 12, 41-48). Cela signifie qu'ils doivent administrer le don du Seigneur de manière juste, afin qu'il ne demeure pas dans un lieu caché, mais porte des fruits et que le Seigneur, à la fin, puisse dire à l'administrateur : « En peu de choses tu as été fidèle, sur beaucoup je t'établirai » (cf. Mt 25, 14-30; Lc 19, 11-27). Dans ces paraboles évangéliques s'exprime la dynamique de la fidélité, qui est importante dans le service rendu au Seigneur, et dans celles-ci apparaît également de manière évidente comment, dans un Concile, la dynamique et la fidélité doivent devenir une seule chose.

A l'herméneutique de la discontinuité s'oppose l'herméneutique de la réforme comme l'ont présentée tout d'abord le pape Jean XXIII, dans son discours d'ouverture du Concile le 11 octobre 1962, puis le pape Paul VI, dans son discours de conclusion du 7 décembre 1965. Je ne citerai ici que les célèbres paroles de Jean XXIII, dans lesquelles cette herméneutique est exprimée sans équivoque, lorsqu'il dit que le Concile « veut transmettre la doctrine de façon pure et intègre, sans atténuation ni déformation » et poursuit: « Notre devoir ne consiste pas seulement à conserver ce trésor précieux, comme si nous nous préoccupions uniquement de l'antiquité, mais de nous consacrer avec une ferme volonté et sans peur à cette tâche, que notre époque exige... Il est nécessaire que cette doctrine certaine et immuable, qui doit être fidèlement respectée, soit approfondie et présentée d'une façon qui corresponde aux exigence de notre temps. En effet, il faut faire une distinction entre le dépôt de la foi, c'est-à-dire les vérités contenues dans notre vénérée doctrine, et la façon dont celles-ci sont énoncées, en leur conservant toutefois le même sens et la même portée » (S. Oec. Conc. Vat. II Constitutiones Decreta Declarationes, 1974, pp. 863-865).

 

Il est clair que cet engagement en vue d'exprimer de façon nouvelle une vérité déterminée, exige une nouvelle réflexion sur cette vérité et un nouveau rapport vital avec elle; il est également clair que la nouvelle parole ne peut mûrir que si elle naît d'une compréhension consciente de la vérité exprimée et que, d'autre part, la réflexion sur la foi exige également que l'on vive cette foi.

 

Dans ce sens, le programme proposé par le pape Jean XXIII était extrêmement exigeant, comme l'est précisément la synthèse de fidélité et de dynamique. Mais partout, cette interprétation a représenté l'orientation qui a guidé la réception du Concile, une nouvelle vie s'est développée et des fruits nouveaux ont mûri. Quarante ans après le Concile, nous pouvons révéler que l'aspect positif est plus grand et plus vivant que ce qu'il pouvait apparaître dans l'agitation des années qui ont suivi 1968. Aujourd'hui, nous voyons que la bonne semence, même si elle se développe lentement, croît malgré tout, et que notre profonde gratitude pour l'œuvre accomplie par le Concile croît également.

Paul VI, dans son discours lors de la conclusion du Concile, a ensuite indiqué une autre motivation spécifique pour laquelle une herméneutique de la discontinuité pourrait sembler convaincante. Dans le grand débat sur l'homme, qui caractérise le temps moderne, le Concile devait se consacrer en particulier au thème de l'anthropologie. Il devait s'interroger sur le rapport entre l'Eglise et sa foi, d'une part, et l'homme et le monde d'aujourd'hui, de l'autre (ibid. pp. 1066, sq). La question devient encore plus claire, si, au lieu du terme générique de « monde d'aujourd'hui », nous en choisissons un autre plus précis : le Concile devait déterminer de façon nouvelle le rapport entre l’Eglise et l'époque moderne. Ce rapport avait déjà connu un début très problématique avec le procès fait à Galilée. Il s'était ensuite totalement rompu lorsque Kant définit la « religion dans le cadre de la raison pure » et lorsque, dans la phase radicale de la Révolution française, fut diffusée une image de l'Etat et de l'homme qui ne voulait pratiquement plus accorder aucun espace à l'Eglise et à la foi. L'opposition de la foi de l'Eglise avec un libéralisme radical et également avec des sciences naturelles qui prétendaient embrasser à travers leurs connaissances toute la réalité jusque dans ses limites, dans l'intention bien déterminée de rendre superflue « l'hypothèse de Dieu », avait provoqué de la part de l'Eglise, au XIXe siècle, sous Pie IX, des condamnations sévères et radicales de cet esprit de l'époque moderne. Apparemment, il n'existait donc plus aucun espace possible pour une entente positive et fructueuse, et les refus de la part de ceux qui se sentaient les représentants de l'époque moderne étaient également énergiques.

 

Entre-temps, toutefois, l'époque moderne avait, elle aussi, connu des développements. On se rendait compte que la révolution américaine avait offert un modèle d'Etat moderne différent de celui théorisé par les tendances radicales apparues dans la seconde phase de la Révolution française. Les sciences naturelles commençaient, de façon toujours plus claire, à réfléchir sur leurs limites, imposées par leur méthode elle-même, qui, tout en réalisant des choses grandioses, n'était toutefois pas en mesure de comprendre la globalité de la réalité.

 

Ainsi, les deux parties commençaient progressivement à s\ouvrir l'une à l'autre.

 

Dans la période entre les deux guerres mondiales et plus encore après la seconde guerre mondiale, des hommes d'Etat catholiques avaient démontré qu'il peut exister un Etat moderne laïc, qui toutefois, n'est pas neutre en ce qui concerne les valeurs, mais qui vit en puisant aux grandes sources éthiques ouvertes par le christianisme. La doctrine sociale catholique, qui se développait peu à peu, était devenue un modèle important entre le libéralisme radical et la théorie marxiste de l'Etat.

 

Les sciences naturelles, qui professaient sans réserve une méthode propre à laquelle Dieu n'avait pas accès, se rendaient compte toujours plus clairement que cette méthode ne comprenait pas la totalité de la réalité et ouvraient donc à nouveau leurs portes à Dieu, conscientes que la réalité est plus grande que la méthode naturaliste, et de ce qu'elle peut embrasser.

 

On peut dire que s'étaient formés trois cercles de questions, qui à présent, à l'heure du Concile Vatican II attendaient une réponse.

 

Tout d'abord, il fallait définir de façon nouvelle la relation entre foi et sciences modernes ; cela concernait d'ailleurs, non seulement les sciences naturelles, mais également les sciences historiques, car, dans une certaine école, la méthode historique-critique réclamait le dernier mot sur l'interprétation de la Bible, et, prétendant l'exclusivité totale de la compréhension des Ecritures Saintes, s'opposait sur des points importants à l'interprétation que la foi de l'Eglise avait élaborée.

 

En second lieu, il fallait définir de façon nouvelle le rapport entre Eglise et Etat moderne, qui accordait une place aux citoyens de diverses religions et idéologies, se comportant envers ces religions de façon impartiale et assumant simplement la responsabilité d'une coexistence ordonnée et tolérante entre les citoyens et de leur liberté d'exercer leur religion.

 

Cela était lié, en troisième lieu, de façon plus générale avec le problème de la tolérance religieuse – une question qui exigeait une nouvelle définition du rapport entre foi chrétienne et religions du monde. En particulier, face aux récents crimes du régime national socialiste, en général, dans le cadre d'un regard rétrospectif sur une longue historie difficile, il fallait évaluer et définir de façon nouvelle le rapport entre l'Eglise et la foi d'Israël.

Il s'agit là de thèmes de grande portée – ce furent les thèmes de la seconde partie du Concile – sur lesquels il n'est pas possible de s'arrêter plus amplement dans ce contexte.

 

Il est clair que dans tous ces secteurs, dont l'ensemble forme un unique problème, une certaine forme de discontinuité pouvait ressortir et que, dans un certain sens, s'était effectivement manifestée une discontinuité dans laquelle, cependant, une fois établies les diverses distinctions entre les situations historiques concrètes et leurs exigences, il apparaissait que la continuité des principes n'était pas abandonnée – un fait qui échappe facilement au premier abord.

 

C'est précisément dans cet ensemble de continuité et de discontinuité à différents niveaux que consiste la nature de la véritable réforme.

 

Dans ce processus de nouveauté dans la continuité, nous devions apprendre à comprendre plus concrètement qu'auparavant, que les décisions de l'Eglise en ce qui concerne les faits contingents – par exemple, certaines formes concrètes de libéralisme ou d'interprétation libérale de la Bible – devaient nécessairement être elles-mêmes contingentes, précisément parce qu'elles se référaient à une réalité déterminée et en soi changeante. Il fallait apprendre à reconnaître que, dans de telles décisions, seuls les principes expriment l'aspect durable, en demeurant en arrière-plan et en motivant la décision de l'intérieur.

 

En revanche les formes concrètes ne sont pas aussi permanentes, elles dépendent de la situation historique et peuvent donc être soumises à des changements. Ainsi, les décisions de fonds peuvent demeurer valables, tandis que les formes de leur application dans des contextes nouveaux peuvent varier.

 

Ainsi, par exemple, si la liberté de religion est considérée comme une expression de l'incapacité de l'homme de trouver la vérité, et par conséquent, devient une exaltation du relativisme alors, de nécessité sociale et historique, celle-ci est élevée de façon impropre au niveau métaphysique et est ainsi privée de son véritable sens, avec pour conséquence de ne pas pouvoir être acceptée par celui qui croit que l'homme est capable de connaître la vérité de Dieu, et, sur la base de la dignité intérieure de la vérité, est lié à cette connaissance.

 

Il est, en revanche, totalement différent de considérer la liberté de religion comme une nécessité découlant de la coexistence humaine, et même comme une conséquence intrinsèque de la vérité qui ne peut être imposée de l'extérieur, mais qui doit être adoptée par l'homme uniquement à travers le mécanisme de la conviction. Le Concile Vatican II, reconnaissant et faisant sien à travers le Décret sur la liberté religieuse, un principe essentiel de l'Etat moderne, a repris à nouveau le patrimoine plus profond de l’Eglise.

 

Celle-ci peut être consciente de se trouver ainsi en pleine syntonie avec l'enseignement de Jésus lui-même (cf. Mt 22, 21), comme également avec l'Eglise des martyrs, avec les martyrs de tous les temps. L'Eglise antique, de façon naturelle, a prié pour les empereurs et pour les responsables politiques, en considérant cela comme son devoir (cf. 1 Tm 2, 2), mais, tandis qu'elle priait pour les empereurs, elle a en revanche refusé de les adorer, et, à travers cela, a rejeté clairement la religion d'Etat. Les martyrs de l'Eglise primitive sont morts pour leur foi dans le Dieu qui s'était révélé en Jésus Christ, et précisément ainsi, sont morts également pour leur liberté de conscience et pour leur liberté de professer leur foi, une profession qui ne peut être imposée par aucun Etat, mais qui ne peut en revanche être adoptée que par la grâce de Dieu, dans la liberté de conscience. Une Eglise missionnaire, qui sait qu'elle doit annoncer son message à tous les peuples, doit s'engager en vue de la liberté de la foi. Elle veut transmettre le don de la vérité qui existe pour tous, et assure dans le même temps aux peuples et à leurs gouvernements qu'elle ne veut pas détruire leur identité et leurs cultures, mais leur apporter au contraire une réponse qu’au fond, ils attendent, une réponse avec laquelle la multiplicité des cultures ne se perd pas, mais avec laquelle croît au contraire l'unité entre les hommes, et ainsi, également, la paix entre les peuples.

Le Concile Vatican II, avec la nouvelle définition de la relation entre la foi de l'Eglise et certains éléments essentiels de la pensée moderne, a revisité ou également corrigé certaines décisions historiques, mais dans cette apparente discontinuité, il a en revanche maintenu et approfondi sa nature intime et sa véritable identité.

 

L'Eglise est, aussi bien avant qu'après le Concile, la même Eglise une, sainte, catholique et apostolique, en chemin à travers les temps ; elle poursuit « son pèlerinage à travers les persécutions du monde et les consolations de Dieu », annonçant la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'Il vienne (cf. Lumen gentium, n. 8).

 

Ceux qui espéraient qu'à travers ce « oui » fondamental à l'époque moderne, toutes les tensions se seraient relâchées et que l'« ouverture au monde » ainsi réalisée aurait tout transformé en une pure harmonie, avaient sous-estimé les tensions intérieures et les contradictions de l'époque moderne elle-même; ils avaient sous-estimé la dangereuse fragilité de la nature humaine qui, dans toutes les périodes de l'histoire, et dans toute constellation historique, constitue une menace pour le chemin de l'homme. Ces dangers, avec les nouvelles possibilités et le nouveau pouvoir de l'homme sur la matière et sur lui-même, n'ont pas disparu, mais prennent en revanche de nouvelles dimensions : un regard sur l'histoire actuelle le démontre clairement.

 

Mais à notre époque, l'Eglise demeure un « signe de contradiction » (Lc 2, 34). Ce n'est pas sans raison que le pape Jean-Paul II, alors qu'il était encore cardinal, avait donné ce titre aux Exercices spirituels prêchés en 1976 au pape Paul VI et à la curie romaine. Le Concile ne pouvait avoir l'intention d'abolir cette contradiction de l'Evangile à l'égard des dangers et des erreurs de l'homme.

 

En revanche, son intention était certainement de mettre de côté les contradictions erronées ou superflues, pour présenter à notre monde l'exigence de l'Evangile dans toute sa grandeur et sa pureté. Le pas accompli par le Concile vers l'époque moderne, qui de façon assez imprécise a été présenté comme une « ouverture au monde », appartient en définitive au problème éternel du rapport entre foi et raison, qui se représente de façons toujours nouvelles.

 

La situation que le Concile devait affronter est sans aucun doute comparable aux événements des époques précédentes.

 

Saint Pierre, dans sa première Lettre, avait exhorté les chrétiens à être toujours prêts à rendre raison (apo-logia) à quiconque leur demanderait le logos, la raison de leur foi (cf. 3, 15). Cela signifiait que la foi biblique devait entrer en discussion et en relation avec la culture grecque et apprendre à reconnaître à travers l'interprétation la ligne de démarcation, mais également le contact et l'affinité qui existait entre elles dans l'unique raison donnée par Dieu.

 

Lorsqu'au XIIIe siècle, avec les philosophes juifs et arabes, la pensée aristotélicienne entra en contact avec le christianisme médiéval formé par la tradition platonicienne, et que la foi et la raison risquèrent d'entrer dans une opposition inconciliable, ce fut surtout saint Thomas d'Aquin qui joua le rôle de médiateur dans la nouvelle rencontre entre foi et philosophie aristotélicienne, plaçant ainsi la foi dans une relation positive avec la forme de raison dominante à son époque.

 

Le douloureux débat entre la raison moderne et la foi chrétienne qui, dans un premier temps, avait connu un début difficile avec le procès fait à Galilée, connut de nombreuses phases, mais avec le Concile Vatican II, arriva le moment où une nouvelle réflexion était nécessaire. Dans les textes conciliaires, son contenu n'est certainement tracé que dans les grandes lignes, mais cela a déterminé la direction essentielle, de sorte que le dialogue entre religion et foi, aujourd'hui particulièrement important, a trouvé son orientation sur la base du Concile Vatican II. A présent, ce dialogue doit être développé avec une grande ouverture d'esprit, mais également avec la clarté dans le discernement des esprits que le monde attend à juste titre de nous précisément en ce moment.

 

Ainsi, aujourd'hui, nous pouvons tourner notre regard avec gratitude vers le Concile Vatican II: si nous le lisons et que nous l'accueillons guidés par une juste herméneutique, il peut être et devenir toujours plus une grande force pour le renouveau toujours nécessaire de l'Eglise ».

….

Le Vendredi 23 décembre 2005

Benoît XVI a fait l’éloge de la « noblesse » et la « grandeur » du travail manuel à l’occasion de la fin des travaux de son appartement pontifical

En effet l’appartement pontifical a été rénové en trois mois.

Le pape a remercié les quelque 200 employés qui ont accompli ce travail, en les recevant vendredi matin en la salle Clémentine du Palais apostolique, en soulignant la « noblesse » et la « grandeur » de leur travail. Il leur a parlé du Christ comme artisan charpentier, et du Créateur, Celui qui de ses mains a créé l’homme. 
« En moins de trois mois, disait-il encore , vous avez fait un travail immense pour rénover mon appartement. Ma nouvelle bibliothèque me plaît particulièrement avec le beau plafond ancien. Maintenant les étages et mes livres sont arrivés ».

Le pape ajoutait cette note personnelle: « Maintenant, à la veille de la fête de Noël, c’est le moment de dire « merci » pour tout cela, pour votre travail qui m’encourage – puisque vous vous êtes donnés à fond – à me donner à fond autant que je peux moi aussi, en cette heure tardive de ma vie ».

Le dimanche 25 décembre 2005

Benoît XVI  a donné son premier message de Noël au monde.

Nous remarquerons l’inquiétude du pape : c’est « l’atrophie spirituelle » qui menace le monde, d’où  son appel au monde à s’ouvrir au Christ et à son message :

Nous retiendrons plus particulièrement cette phrase. Elle donne le ton du message.

« L’homme de l’ère technologique risque cependant d’être victime des succès mêmes de son intelligence et des résultats de ses capacités d’action s’il se laisse prendre par une atrophie spirituelle, par un vide du cœur. C’est pourquoi il est important qu’il ouvre son esprit et son cœur à la Naissance du Christ, événement de salut capable d’imprimer une espérance renouvelée dans l’existence de tout être humain ».

Voici le message dans son intégralité.

Message

«Je vous annonce une grande joie... aujourd’hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David. Il est le Messie, le Seigneur» (Lc 2, 10-11). Cette nuit, nous avons écouté à nouveau les paroles de l’Ange aux bergers, et nous avons revécu le climat de cette sainte Nuit, la Nuit de Bethléem, lorsque le Fils de Dieu s’est fait homme et que, naissant dans une pauvre grotte, il a établi sa demeure parmi nous.

En ce jour solennel, retentit l’annonce de l’Ange et pour nous aussi, hommes et femmes du troisième millénaire, c’est une invitation à accueillir le Sauveur. Que l’humanité d’aujourd’hui n’hésite pas à le faire entrer dans ses maisons, dans ses villes, dans ses nations et en tout point de la terre! Il est vrai, qu’au cours du millénaire qui s’est achevé il y a peu, et spécialement pendant les derniers siècles, les progrès accomplis dans le domaine technique et scientifique ont été nombreux; les ressources matérielles dont nous pouvons disposer aujourd’hui sont importantes. L’homme de l’ère technologique risque cependant d’être victime des succès mêmes de son intelligence et des résultats de ses capacités d’action s’il se laisse prendre par une atrophie spirituelle, par un vide du cœur. C’est pourquoi il est important qu’il ouvre son esprit et son cœur à la Naissance du Christ, événement de salut capable d’imprimer une espérance renouvelée dans l’existence de tout être humain.

«Homme, éveille-toi: pour toi, Dieu s’est fait homme» (saint Augustin, Discours, 185). Éveille-toi, homme du troisième millénaire! À Noël, le Tout-Puissant s’est fait petit enfant et il demande aide et protection; sa façon d’être Dieu provoque notre façon d’être hommes; le fait qu’il frappe à nos portes nous interpelle, interpelle notre liberté et nous demande de revoir notre rapport à la vie et notre façon de l’envisager. L’époque moderne est souvent présentée comme une période de réveil du sommeil de la raison, comme la venue de l’humanité à la lumière, émergeant ainsi d’une période obscure. Néanmoins, sans le Christ, la lumière de la raison ne suffit pas à éclairer l’homme et le monde. C’est pourquoi la parole évangélique du jour de Noël – «La lumière véritable qui éclaire tout homme en venant dans le monde» (Jn 1, 9) – retentit plus que jamais comme une annonce du salut pour tous. «Le mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe incarné» (const. Gaudium et spes, n. 22). L’Église répète sans se lasser ce message d’espérance repris par le Concile Vatican II, qui s’est achevé il y a exactement quarante ans.

Homme moderne, adulte pourtant parfois faible dans sa pensée et dans sa volonté, laisse-toi prendre par la main par l’Enfant de Bethléem; ne crains pas, aie confiance en Lui! La force vivifiante de sa lumière t’encourage à t’engager dans l’édification d’un nouvel ordre mondial, fondé sur de justes relations éthiques et économiques. Que son amour guide les peuples et éclaire leur conscience commune d’être une «famille» appelée à construire des relations de confiance et de soutien mutuel. L’humanité unie pourra affronter les problèmes nombreux et préoccupants du moment présent: de la menace terroriste aux conditions d’humiliante pauvreté dans laquelle vivent des millions d’êtres humains, de la prolifération des armes aux pandémies et à la dégradation de l’environnement qui menace l’avenir de la planète.

Le Dieu qui s’est fait homme par amour de l’homme soutient ceux qui, en Afrique, agissent en faveur de la paix et du développement intégral, s’opposant aux luttes fratricides, pour que se consolident les transitions politiques actuelles encore fragiles et que soient sauvegardés les droits les plus élémentaires de ceux qui se trouvent dans de tragiques situations humanitaires, comme au Darfour et en d’autres régions de l’Afrique centrale. Qu’Il incite les peuples latino-américains à vivre dans la paix et la concorde. Qu’Il donne courage aux hommes de bonne volonté qui agissent en Terre Sainte, en Iraq, au Liban, où les signes d’espérance qui, s’ils ne manquent pas, attendent d’être confirmés par des comportements inspirés par la loyauté et la sagesse; qu’Il favorise les processus de dialogue dans la Péninsule coréenne et dans d’autres Pays d’Asie, pour que, les dangereuses divergences étant surmontées, on parvienne, dans un esprit amical, à des solutions de paix cohérentes, ce qui est tant attendu de ces populations.

À Noël, notre esprit s’ouvre à l’espérance en contemplant la gloire divine cachée dans la pauvreté d’un Enfant enveloppé de langes et déposé dans une mangeoire : c’est le Créateur de l’univers réduit à l’impuissance d’un nouveau-né. Accepter un tel paradoxe, le paradoxe de Noël, c’est découvrir la Vérité qui rend libres, l’Amour qui transforme l’existence. Dans la Nuit de Bethléem, le Rédempteur se fait l’un de nous, pour être notre compagnon sur les routes de l’histoire semées d’embûches. Accueillons la main qu’il nous tend: c’est une main qui ne veut rien nous enlever, mais seulement donner.

Avec les bergers, entrons dans la grotte de Bethléem sous le regard aimant de Marie, témoin silencieux de cette prodigieuse naissance. Qu’elle nous aide à vivre un bon Noël; qu’elle nous apprenne à conserver dans notre cœur le mystère de Dieu qui, pour nous, s’est fait homme; qu’elle nous conduise à être dans le monde des témoins de sa vérité, de son amour, de sa paix.


Les nouvelles de Rome

C’était le 16 décembre

Benoît XVI a élevé l'Eglise métropolitaine gréco-catholique roumaine (c’est à dire l’Eglise catholique de Roumanie de rite byzantin) au rang d'Eglise archiépiscopale majeure.

Pour repère, rappelons que c’est le statut qu’a également l’Eglise catholique ukrainienne de rite byzantin.

En même temps, le pape a élevé Mgr Lucian Muresan à la dignité d'archevêque majeur de Fagaras et Alba Iulia des Roumains.

Les fidèles des 5 circonscriptions ecclésiastiques gréco-catholiques de Roumanie sont quelque 737 900, les prêtres diocésains 716, et les séminaristes, pas moins de 347.

Les 5 évêques de l’éparchie collaborent étroitement avec les 6 évêques catholiques latins. Ils forment ensemble la conférence épiscopale roumaine qui a son siège à Bucarest. Egalement intense, la collaboration avec le Saint-Siège et la nonciature guidée par l’archevêque français Jean-Claude Périsset.

Le nonce apostolique en Roumanie, Mgr Gerald P. O’Hara, avait été expulsé en 1950. Les relations diplomatiques ont repris avec le Saint-Siège avec le retour à la démocratie.

Un peu d’histoire pour notre culture catholique

Au XVIIIe s. les Roumains de Transylvanie s’unissent à Rome et gardent leur rite

C’est au début du XVIIIe siècle que la grande majorité des Roumains de Transylvanie se sont unis à Rome, avec à leur tête leur évêque Athanase, tout en conservant leur rite oriental, rappelle une note publiée par la salle de presse du Saint-Siège.

Cette note du Vatican précise que le christianisme est parvenu dans la région du Danube puis en Dacie à l’époque apostolique.

A l’époque médiévale, les Roumains du Nord étaient encore en contact avec les Roumains « Olahi » et les monastères de Mitrovitsa, l’antique Sirmium, capitale de l’Illyrie et la patrie de Saint Demétrius, le grand saint des Roumains et des Balkans.

Après la fondation des principautés les catholiques étaient présents dans les principales villes de Valachie. Ce fut alors que les Dominicains évangélisèrent les Cumains.

L’évêque Théodoric s’installa en 1227 a Milcov, et dépendait directement de Rome.

Avec l’invasion mongole de 1242, le siège épiscopal disparut mais subsista en tant que titre honorifique pendant 3 siècles environ.

Les diocèses de rite latin de Severin (1246), de Siret (1370), d’Arges¸ (1381) et de Baia (1413) ne firent pas long feu non plus. A Cetatea Alba (Akkerman), on parle d’un évêque catholique sous Etienne le Grand, jusqu’à la conquête de la ville de la part des Turcs (1484).

A partir du XVIIe s., le soin pastoral des fidèles fut confié à l’évêque de Nicopolis, en Bulgarie, et à des visiteurs ou préfets apostoliques.

Ce n’est qu’en 1883 que Léon XII fondait des diocèses latins de Iasi et Bucarest.

En effet, dès 1700, la quasi-totalité des Roumains de Transylvanie s’était unie à Rome, avec à leur tête leur évêque Athanase, tout en conservant leur rite oriental.

En 1721, la résidence épiscopale fut transférée à Alba Iulia, et Fagaras, puis, sous l’évêque Innocent Micu Klein, à Blaj (1737), ville qui, avec ses écoles, allait être le foyer de la renaissance nationale de tous les Roumains.

Mais c’est le 6 juin 1777, que le pape Pie VI créa pour les gréco-catholiques une nouvelle Eparchie à Oradea. Le 26 novembre 1853, Pie IX en érigea deux autres, à Gherla et Lugoj, et les soumit, avec celle d’Oradea, à l’éparchie de Blaj, elle-même élevée au rang de siège métropolitain, avec le titre d’Alba Iulia.

L’Eglise gréco-catholique de Roumanie fut persécutée sous le communisme

Deux grandes figures de la résistance

L’Eglise gréco-catholique de Roumanie a été systématiquement persécutée sous le communisme: Staline voulait sa disparition pure et simple.

Au début du mois d’octobre 1948, explique la note du Vatican, le régime communiste qui avait pris le pouvoir lança une politique visant à la suppression de l’Eglise gréco-catholique roumaine, qui, alors comptait 1, 5 million de fidèles regroupés en 6 circonscriptions ecclésiastiques.

Tous les évêques furent déposés, et, par la fraude et par la terreur, on commença à recueillir des signatures pour le passage soi disant « spontané » des fidèles gréco-catholiques à l’Eglise orthodoxe, par des pressions auprès des prêtres puis des fidèles.

Et c’est le jour même du 250e anniversaire de l’union des fidèles de rite oriental avec l’Eglise de Rome (le 21 octobre 1948), que le gouvernement communiste donna cette fois l’ordre de leur passage à l’Eglise orthodoxe. Les 6 évêques furent arrêtés et détenus en attente d’un procès. Les 4 cathédrales catholiques furent données aux Orthodoxes, et l’on mit les écoles et les hôpitaux catholiques sous séquestre.

Le 1er décembre 1948, un décret du présidium de la grande assemblée nationale déclara comme éteints les diocèses, les communautés religieuses, toutes les autres institutions de l’Eglise gréco-catholique, et les paroisses furent cédées aux Orthodoxes.

Deux évêques furent particulièrement héroïques : Mgr Iuliu Hossu (1885-1970) et le cardinal Alexandru Todea (1912-2002).

Mgr Hossu fut arrêté avec une centaine de prêtres et de fidèles qui s’étaient refusés à abandonner la foi catholique. Ce fut le début de ce qu’il appelait le « Calvaire de l’Eglise », la « voie des Béatitudes », et le long pèlerinage d’une prison à l’autre.

Depuis sa résidence forcée, Mgr Hossu intensifia les prières pour l’Eglise. Il faisait chaque année parvenir au président de la république un pro-memoria demandant le respect des lois nationales et des engagements internationaux vis à vis de l’Eglise gréco-catholique.

En 1969, le pape Paul VI manifesta son estime à l’évêque Hossu, en l’invitant à accepter la dignité cardinalice. Mais lui demanda au pape de le laisser avec ses fidèles et il fut créé cardinal « in pectore ». L’annonce en fut donnée trois ans après sa mort, lors du consistoire du 5 mars 1975.

De son côté, le cardinal Alexandru Todea exerça son ministère en différentes paroisses jusqu’à sa nomination comme évêque, en 1950, et son ordination clandestine en la cathédrale Saint-Joseph de Bucarest le 19 novembre de cette année-là.

Il fut arrêté en 1951, subit un procès et fut condamné à la prison à vie. Il ne fut amnistié que treize ans plus tard, en 1964.

En 1990, après la chute du régime communiste, il fut nommé évêque de Fagaras et Alba Iulia des Roumains et travailla à la réorganisation de la vie ecclésiale.

En mars 1991, il fut élu premier président de la conférence des évêques catholiques de Roumanie.

Le pape Jean-Paul II le « créa » cardinale le 28 juin 1991, et lors de son voyage en Roumanie, le pape put l’embrasser avec émotion dans la cathédrale de Bucarest, le 8 mai 1999.

Le témoignage héroïque du cardinal Todea a aidé l’Eglise catholique de rite oriental à résister à l’implacable persécution communiste.

La figure du cardinal Todea ne représente pas seulement la grande histoire chrétienne du peuple roumain, mais est motif d’espérance pour la construction d’un avenir meilleur.

Avec le retour à la démocratie en décembre 1989, la hiérarchie gréco-catholique a été reconstituée en Roumanie. Elle a peu à peu repris sa place dans l’Eglise universelle.

Elle avait refusé tout compromis avec le pouvoir athée, pour revendiquer le destin plus vrai de l’homme et la place que Dieu doit avoir dans sa vie.

Récemment, des propriétés confisquées par le régime communiste et passée à l’Eglise orthodoxe ont été restituées, en particulier les cathédrales de Cluj, Fagaras, Lugoj et Oradea Mare.

La commission mixte de dialogue entre les deux Eglises devrait reprendre son travail pour chercher des solutions justes et satisfaisantes pour les problèmes qui demeurent encore.

 

Les nouvelles de France

a-Mgr Michel Pansard, nouvel évêque de Chartres

Le pape Benoît XVI a nommé évêque de Chartres Mgr Michel Pansard, vicaire général de Nanterre depuis 2000.

Le siège épiscopal de Chartres était vacant depuis la nomination de Mgr Bernard-Nicolas Aubertin à Tours.

Mgr Michel Pansard est né en 1955 à Rennes, il est titulaire d’une maîtrise de théologie. Il a été ordonné prêtre en 1982 pour le diocèse de Nanterre.

Il a été, entre1988 et 2000, professeur et directeur au Séminaire Saint-Sulpice-d’Issy-les-Moulineaux, et, de 1994 à 2003, responsable diocésain de la formation permanente des prêtres.

 

b-Le coût de l'immigration

(Correspondance européenne) "Assumer la diversité de la société française", comme le demande Jacques Chirac, suppose un coût qui n'a pas jusqu'ici été évalué dans sa totalité tant les " faux frais " sont nombreux et inattendus. S'il faut tout faire pour " corriger les discriminations raciales qui empêchent des jeunes d'accéder normalement aux fonctions qu'ils méritent ", alors que les trop nombreux chômeurs des cités ne font pas toujours l'effort d'adaptation que la France est en droit d'attendre d'eux, la facture risque de s'annoncer salée. En réalité, ce n'est que maintenant, comme l'a fait la Fondation Singer-Polignac dans un Essai d'évaluation des coûts et des effets économiques de l'immigration que la question du coût commence à être posée.

S'appuyant notamment sur les travaux d'Yves-Marie Laulan, président de l'Institut de géopolitique des populations, et des professeurs d'économie Jacques Bichot et Gérard Lafay, l' Essai estime le coût de l'immigration et de son intégration (éducation, formation professionnelle, logement, santé, lutte contre la délinquance, maintien de la sécurité, etc.) à 36 milliards d'euros par an, soit 80 % du déficit public, 13,5 % des dépenses publiques, 3,5 fois le "trou" de la Sécu, 2 fois de budget de la recherche et de l'enseignement supérieur, 87 % du budget de la défense...

D'après M. Laulan : " Il ressort que chaque immigré qui franchit la frontière (250 000 par an) coûte 100 000 euros par an à la collectivité nationale, soit vingt fois plus que les Corses. (...) Nous rejoignons ainsi les calculs de Maurice Allais, Prix Nobel d'économie, qui estimait voici plusieurs années à quatre fois son salaire annuel le coût d'installation d'un immigré. A ceci près que M. Allais estimait qu'il s'agissait d'un coût effectué une fois pour toutes alors qu'ici il s'agit d'un coût annuel ".

Comme l'explique le Professeur Lafay, ce prix à payer est celui " des erreurs commises par tous les gouvernements successifs depuis trente ans ". Erreurs ayant consisté à laisser s'installer une immigration familiale, sans qualification professionnelle et sans désir de s'intégrer à la culture d'accueil ("Le Figaro", 18 novembre 2005). Cette analyse tient-elle compte de la " fuite de capitaux " immanquablement liée à l'immigration ? En 2004, 2,5 milliards d'euros est la somme que les immigrés installés en France ont envoyée dans leur pays, en priorité pour aider leurs proches.

Ce chiffre est donné par la Banque de France. Les immigrés originaires du Maghreb sont ceux qui envoient le plus, suivis par ceux du Portugal. 520 000 Marocains de France envoient de l'argent pour 750 millions d'euros au total. Ceux nés en France gardent pour eux leurs économies, alors que les clandestins et les prostituées transfèrent " par des canaux non visibles " une grande partie de leurs revenus ("Figaro économie", 17 novembre 2005). Il ne faut pas oublier non plus l'augmentation vertigineuse du nombre des travailleurs sociaux en France passé à 600 000. Ce chiffre a pratiquement doublé ces dix dernières années (367 000 en 1993 contre 600 000 en 2002) ("Le Parisien - Aujourd'hui en France", 28 novembre 2005). (C. B. C.) (CE 141/01 du 31/12/05)

 

Les nouvelles de Terre Sainte

Message de Noël du patriarche Sabbah, patriarche latin de Jérusalem

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Frères et Sœurs,

Heureuse et saint fête de Noël.

1. Notre message est celui des anges le jour de Noël: “Soyez sans crainte, car voici que je vous annonce une grande joie: aujourd’hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur » (Lc 2 :10-11). Soyez sans crainte, malgré toutes les difficultés que nous vivons et qui peuvent inspirer la peur et l’insécurité. Jésus nous dit aussi : « Que votre cœur ne se trouble ni ne s’effraie » (Jn14.27). Avec la foi, avec la lumière et la sagesse, nous pouvons fonder notre sécurité, et contribuer à la tranquillité générale dont a besoin notre société.

Le deuxième message de Noël est la joie. L’ange dit : « Je vous annonce une grande joie : un Sauveur vous est né qui est le Christ Seigneur ». Que la joie, qui provient de la grâce de Dieu, comble vos cœurs, car vous en avez besoin dans les souffrances que vous endurez. A tous nos fidèles, à tous ceux qui ont peur, ceux qui comptent parmi les membres de la famille un prisonnier ou quelqu’un sous les tortures, à ceux qui ont connu la mort, à tous ceux qui sont enclins à remplir leurs cœurs de haine, nous disons : Purifiez vos cœurs, et que la joie de Noël renouvelle en vous toute votre vie.

Notre message à tous nos fidèles et à tous nos frères et sœurs dans cette Terre Sainte, à tout palestinien et à tout israélien : Dieu vous a créé non pour avoir peur l’un de l’autre ou pour vous entretuer, mais pour vous aimer les uns les autres, pour construire et collaborer ensemble.

2. A nos chefs politiques qui décident par leur politique de la vie ou de la mort de plusieurs dans cette Terre Sainte, nous disons : « Soyez des constructeurs de la vie, non de la mort. Apprenez enfin que la démolition, la mort et la lutte n’ont porté et ne porteront que démolition, mort et permanence de la lutte. Il est temps de changer de voies et de prendre les bonnes décisions pour arriver une fois pour toutes à la paix et à la justice. Toute lenteur à résoudre, avec la permanence des injustices sous ses différents aspects, le mur, les barrières, les prisonniers, les assassinats, tout cela ne fait que nourrir la violence. Lorsque les injustices cesseront, la violence cessera et la sécurité règnera. Nous espérons pouvoir commencer une nouvelle période dans laquelle toute violence cessera des deux côtés, israélien et palestinien.

Et nous répétons : la sécurité pour les Israéliens veut dire liberté et souveraineté pour les Palestiniens. Deux réalités interdépendantes et incontournables. Et les demi-mesures, demi liberté, ou demi-souveraineté, ne nous mèneront nulle part, sinon à retomber dans un cycle de violence et d’insécurité interminable.
La position palestinienne actuelle qui consiste à réclamer tous les droits avec les voies de la non-violence dit que la paix et la justice sont choses possibles. Du côté israélien aussi, nous avons vu et entendu de nouveaux signes et de nouvelles expressions. Nous espérons qu’ils indiquent une nouvelle vision et une nouvelle décision. Les difficultés sont nombreuses. Mais une volonté sincère réduit toute difficulté et lui trouve la solution. Si par contre il n’y a pas de volonté sincère chaque difficulté devient un obstacle insurmontable.

Notre Terre Sainte est assoiffée de retrouver sa paix et sa sainteté. Procurez aux deux peuples la vie, la sécurité et la dignité qu’ils réclament. Le gouvernement est don et service, et non l’occasion d’occuper des sièges ou de faire des bénéfices. Il faut mettre fin aux souffrances multiples qui ont trop duré dans cette terre. Nous espérons que nos chefs cette fois mettront toutes leurs énergies pour accomplir ce qu’il fallait accomplir depuis toujours : la paix et la justice pour deux peuples capables de vivre côte à côte en paix et en bon voisinage.

3. Frères et sœurs, vivant ici tout près de la grotte de Bethléem, à vous et au monde entier, qui tourne ses regards aujourd’hui vers Bethléem, ville du Prince de la Paix, je vous souhaite un Noël de sainteté et de courage pour écarter toute peur et toute violence et pour construire la paix et la justice dont tous nous avons besoin.

Heureuse et sainte fête de Noël.

+Michel Sabbah
Patriarche Latin de Jérusalem

  

La situation religieuse en Iran

 

La liberté religieuse des non-musulmans est très lourdement réprimée

(Correspondance européenne) En Iran, la liberté religieuse de ceux qui n'appartiennent pas à l'islam schiite est très fortement réprimée. Les plus persécutés sont certainement les fidèles de la religion bahaï, née justement en Iran au XIXe siècle. Mais également la petite communauté chrétienne qui traverse de sérieuses difficultés. En Iran, l'Eglise a des origines très anciennes, qui remontent au IIe siècle.

Se mêlant au zoroastrisme, alors dominant, et au manichéisme, elle s'affirma en dehors de l'influence de Rome et de Constantinople et n'adhéra donc pas aux dogmes christologiques fixés par le concile de Calcédoine. L'avènement successif de l'islam stimula son expansion missionnaire en Orient, jusqu'en Chine. Aujourd'hui, en Iran, les chrétiens appartiennent en majorité à l'Eglise arménienne apostolique dite grégorienne, alors que les catholiques sont environ 10 000. Le fait de représenter des minorités ethniques - arméniens et assyro-chaldéens - outre que religieuses rend les chrétiens doublement étrangers au sein de l'Iran khomeyniste.

Sur la vie des chrétiens en Iran, circulent peu d'informations. Un certain nombre se trouvent dans la revue "Oasis", qui, dans son dernier numéro, publié à la fin octobre (n. 2, 2005) publie un reportage sur les chrétiens en Iran, rédigé par Camille Eid, un Libanais, reportage dont nous reproduisons quelques extraits.

" Alors que la population iranienne a presque doublé depuis l'institution de la République islamique, passant de 35 à 68 millions d'habitants, le nombre des chrétiens a drastiquement diminué, passant de 5 à 1 pour mille. Aujourd'hui, les estimations les plus optimistes font état d'un total de 100000 chrétiens environ en Iran, dont 80 000 arméniens grégoriens, 8 000 assyro-chaldéens catholiques et autant d'orthodoxes, 5 000 protestants, 2 000 catholiques latins et 500 arméniens catholiques. (…) Déjà, sous la monarchie, et malgré les bonnes dispositions du Shah à leur égard, le discours nationaliste officiel ne favorisait pas leur intégration. Mais la législation de la révolution islamique a rendu cette intégration encore plus difficile ".

L'article 13 de la Constitution précise, il est vrai, que " les Iraniens zoroastriens, juifs et chrétiens sont les seules minorités religieuses reconnues qui, dans les limites prévues par la loi, sont libres d'accomplir leur rites religieux et cérémonies propres et d'agir selon leur propre canon en matière d'affaires personnelles et d'instruction religieuse ".

Mais l'article 14 du même texte fondamental, tout en soulignant le devoir de l'Etat et de tous les musulmans de " traiter les non-musulmans en conformité avec les normes éthiques et les principes de la justice et de l'équité islamique, et de respecter leurs droits humains " avertit que " ce principe s'applique à tous ceux qui s'abstiennent de prendre part à des conspirations ou à des activités contre l'islam et la République islamique d'Iran ".

Les structures de l'Eglise latine, suspectées de nourrir des sympathies envers l'Occident, ont été démantelées au cours des deux premières années de la révolution khomeyniste : 14 écoles catholiques ont ainsi été fermées (dont de prestigieux instituts), des pensionnats et des dispensaires confisqués, des prêtres et des religieuses expulsés. " Nous sommes ici parce qu'il n'est pas juste que les chrétiens demeurent seuls ", nous a confié une religieuse étrangère qui vit en Iran depuis de nombreuses années. (CE 141/02 du 31/12/05)