de
Chrétienté
N°
186
Au 10 juillet
2009
L’Année sacerdotale
(suite)
Lors de l’audience
générale du mercredi 1er juillet 2009, le pape Benoît XVI est revenu
sur l’année sacerdotale. Il en précise de nouveau la finalité. On sent que
cette année sacerdotale lui tient à cœur. Nous sommes heureux de voir proposer
le saint Curé d’Ars comme modèle du prêtre. Ce n’est plus l’heure de la remise
en question de l’identité sacerdotale. L’identité sacerdotale, c’est le saint
Curé d’Ars. Il sera, à la fin de cette année sacerdotale, du reste, déclaré,
par Benoît XVI, « patron céleste de
tous les prêtres catholiques ».
Chers frères et sœurs,
Avec la célébration des premières Vêpres de la solennité des
saints apôtres Pierre et Paul dans la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs, s'est
conclue, comme vous le savez, le 28 juin, l'Année paulinienne, en souvenir du
deuxième millénaire de l'apôtre des nations. Nous rendons grâce au Seigneur
pour les fruits spirituels que cette importante initiative a apportés dans de
nombreuses communautés chrétiennes. En tant que précieux héritage de l'Année
paulinienne, nous pouvons accueillir l'invitation de l'apôtre à approfondir la
connaissance du mystère du Christ, afin qu'il soit le cœur et le centre de
notre existence personnelle et communautaire. En effet, telle est la condition
indispensable pour un véritable renouveau spirituel et ecclésial. Comme je l'ai
déjà souligné lors de la première célébration eucharistique dans la chapelle
Sixtine après mon élection comme successeur de l'apôtre Pierre, c'est
précisément dans la pleine communion avec le Christ que «naît tout autre
élément de la vie de l'Eglise, en premier lieu la communion entre tous les
fidèles, l'engagement d'annoncer et de témoigner l'Evangile, l'ardeur de la charité
envers tous, et en particulier envers les pauvres et les petits» (cf.
Insegnamenti, I, 2005, pp. 8-13). Cela vaut en premier lieu pour les prêtres.
C'est pourquoi nous remercions
De même que pendant l'Année paulienne, notre référence
constante a été saint Paul, ainsi, au cours des prochains mois, nous nous
tournerons en premier lieu vers saint Jean-Marie Vianney, le saint curé d'Ars,
en rappelant le 150e anniversaire de sa mort. Dans la lettre que j'ai écrite
aux prêtres pour cette occasion, j'ai voulu souligné ce qui resplendit le plus
dans l'existence de cet humble ministre de l'autel: «sa totale identification à
son ministère». Il aimait dire qu'«un bon pasteur, un pasteur selon le cœur de
Dieu, c'est là le plus grand trésor que le bon Dieu puisse accorder à une
paroisse et un des plus précieux dons de la miséricorde divine». Et, comme s'il
n'arrivait pas à croire à la grandeur du don et du devoir qui avaient été
confiés à une pauvre créature humaine, il soupirait: «Oh! que le prêtre est
quelque chose de grand! S'il se comprenait, il mourrait... Dieu lui obéit: il
dit deux mots et Notre Seigneur descend du ciel à sa voix et se renferme dans
une petite hostie».
En vérité, en considérant précisément le binôme «identité-mission», chaque
prêtre peut mieux ressentir la nécessité de cette identification avec le Christ
qui lui garantit la fidélité et la fécondité du témoignage évangélique.
L'intitulé même de l'Année sacerdotale - Fidélité du Christ, fidélité du prêtre
- souligne que le don de la grâce divine précède toute possible réponse humaine
et réalisation pastorale, et ainsi dans la vie du prêtre, annonce missionnaire
et culte sont inséparables, de même que ne peuvent jamais être séparées
identité ontologique-sacramentelle et mission évangélisatrice. D'ailleurs,
l'objectif de la mission de chaque prêtre, pourrions-nous dire, est
«cultuelle»: afin que tous les hommes puissent s'offrir à Dieu comme hostie
vivante, sainte et agréable à Dieu (cf. Rm 12, 1), qui dans la création même,
dans les hommes, devient culte, louange du Créateur, en recevant la charité
qu'ils sont appelés à dispenser en abondance les uns aux autres. Nous le
percevons clairement dans les débuts du christianisme. Saint Jean Chrysostome
disait, par exemple, que le sacrement de l'autel et le «sacrement du frère» ou,
comme il dit, le «sacrement du pauvre», constituent deux aspects du même
mystère. L'amour pour le prochain, l'attention à la justice et aux pauvres ne
sont pas seulement des thèmes d'une morale sociale, mais plutôt l'expression
d'une conception sacramentelle de la moralité chrétienne car, à travers le
ministère des prêtres, s'accomplit le sacrifice spirituel de tous les fidèles,
en union avec celui du Christ, unique Médiateur: sacrifice que les prêtres
offrent de façon non sanglante et sacramentelle dans l'attente de la nouvelle
venue du Seigneur. Telle est la dimension principale, essentiellement
missionnaire et dynamique, de l'identité et du ministère sacerdotal: à travers
l'annonce de l'Evangile, ils suscitent la foi chez ceux qui ne croient pas
encore, afin qu'ils puissent unir leur sacrifice au sacrifice du Christ, qui se
traduit en amour pour Dieu et pour le prochain.
Chers frères et sœurs, face à tant d'incertitudes et de difficultés notamment dans l'exercice du ministère sacerdotal, il est urgent de retrouver un jugement clair et sans équivoque sur le primat absolu de la grâce divine, en rappelant ce qu'écrit saint Thomas d'Aquin: «Le plus petit don de la grâce dépasse le bien naturel de tout l'univers» (Summa Theologiae, I-II, q.113, a. 9, ad 2). La mission de chaque prêtre dépendra donc également et surtout de la conscience de la réalité sacramentelle de son «nouvel être». De la certitude de son identité, non pas construite de manière artificielle, mais donnée et écoutée gratuitement et divinement, dépend l'enthousiasme toujours renouvelé du prêtre pour la mission. Ce que j'ai écrit dans l'Encyclique Deus caritas est vaut également pour les prêtres: «A l'origine du fait d'être chrétien il n'y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive» (n. 1).
Ayant reçu un don de grâce aussi extraordinaire par leur
«consécration», les prêtres deviennent les témoins permanents de leur rencontre
avec le Christ. En partant précisément de cette conscience intérieure, ils
peuvent accomplir pleinement leur «mission», à travers l'annonce de
Lorsqu'on ne tient pas compte du «dyptique»
consécration-mission, il devient véritablement difficile de comprendre
l'identité du prêtre et de son ministère dans l'Eglise. En effet, qui est le
prêtre, sinon un homme converti et renouvelé par l'Esprit, qui vit de la
relation personnelle avec le Christ, faisant constamment siens les critères
évangéliques? Qui est le prêtre, sinon un homme d'unité et de vérité, conscient
de ses limites et dans le même temps, de la grandeur extraordinaire de la
vocation reçue, c'est-à-dire celle de contribuer à étendre le Royaume de Dieu
jusqu'aux extrémités de la terre? Oui! Le prêtre est un homme qui appartient
entièrement au Seigneur, car c'est Dieu lui-même qui l'a appelé, et l'a
constitué dans son service apostolique. Et précisément en appartenant
totalement au Seigneur, il appartient totalement aux hommes pour les hommes. Au
cours de cette année sacerdotale, qui se prolongera jusqu'à la prochaine
solennité du Très Saint-Cœur de Jésus, prions pour tous les prêtres. Que se
multiplient dans les diocèses, dans les communautés religieuses, en particulier
celles monastiques, dans les associations et dans les mouvements, dans les
divers groupes pastoraux présents dans le monde entier, des initiatives de
prière et, en particulier, d'adoration eucharistique, pour la sanctification du
clergé et les vocations sacerdotales, répondant à l'invitation de Jésus à prier
«le maître de la moisson à envoyer des ouvriers à sa moisson» (Mt 9, 38). La
prière est le premier engagement, le véritable chemin de sanctification des
prêtres, et l'âme de l'authentique «pastorale des vocations». Le faible nombre
d'ordinations sacerdotales dans certains pays non seulement ne doit pas
décourager, mais doit inciter à multiplier les espaces de silence et d'écoute
de