LLLLes Nouvelles
de
Chrétienté
N° 135
Le Sacré-Coeur à
En ce mois de juin, pour nous entretenir dans la
dévotion au Sacré-Cœur, je vous donne ces considérations sur le sacré-Cœur et
la grande guerre de 14-18
Des généraux pratiquants.
Édouard de Curières de Castelnau fait des études secondaires au
collège Saint-Gabriel, tenu par des jésuites, à Saint-Affrique. Castelnau prend
dans son entourage son neveu Pierre, jésuite, comme secrétaire et chapelain. Commandant
Fayolle, dans ses " Cahiers secrets de
" Les hommes d’armes batailleront, Dieu donnera la victoire, disait Jeanne d’Arc. Ainsi fut fait et Dieu nous a donné une fois de plus la victoire. Le peuple de France comprendra-t-il que c’est bien Dieu qui l’a sauvé une nouvelle fois ? Oui car il ne nous a pas sauvés pour nous laisser périr ensuite. "
Foch, élève des jésuites, connu pour sa foi et sa piété, son prestige militaire, n’a jamais livré le secret de sa consécration. Le chanoine Crépin écrit : " Il y a à Montmartre, depuis le 3 août, un précieux autographe qui reposera sous le pied du grand ostensoir pendant la durée de la guerre : consécration d’une partie de notre armée par l’un des ses chefs les plus qualifiés. Foch commande le 20e corps d’armée de Nancy, sous les ordres de Castelnau ; sa dévotion au Sacré-Coeur ne fait aucun doute, l’autographe a dû être envoyé par la poste.
Foch représente l’exemple type du soldat catholique. En 1918, Clemenceau arrive à l’improviste au quartier général de Bonbon (près de Melun), demande le général. On lui répond qu’il est à la messe mais va être prévenu. Clémenceau répond : " Ne le dérangez pas, cela lui a trop bien réussi. J’ attendrai ! "
L’abbé Paul Noyer, curé de Bonbon, écrit le 8 juillet 1918 une lettre à
Foch : " Mon Généralissime, avant de quitter bientôt peut-être ma
paroisse, veuillez, je vous prie, agenouillé devant une statue du Sacré-Coeur
de Jésus, Roi de France, lui consacrer toutes vos armées françaises.
Demandez-lui avec supplication une prochaine et décisive victoire et que
La lettre est remise le jour même.
Le 16 juillet, Foch rend visite au curé : " Monsieur le Curé, je viens vous remercier, j’ai fait tout ce que vous m’avez demandé et même plus. "
Le 17 octobre, Foch fait ses adieux à son curé, lui explique qu’il a consacré les armées au Sacré-Coeur,avec deux ou trois personnes devant la grande statue du Sacré-Coeur, près du maître-autel, au fond de l’église à droite.
Le P.Perroy jésuite de l’Oeuvre de l’Insigne du Sacré-Coeur, qui le 17
novembre 1918, du haut de la chaire de la cathédrale de Saint-Vincent de Chalon
révèle :" A genoux devant le Sacré-Coeur, le général Foch a demandé au
Sacré-Coeur, en lui consacrant les armées dont il avait la charge :
premièrement une victoire prompte et définitive, deuxièmement une paix
glorieuse pour
" Cette victoire nous la devons à Dieu et c’est pour le remercier que je suis venu ici ", explique Foch au chanoine Schenékelé lors de sa visite à la cathédrale de Strasbourg.
Le 15 juillet la dernière attaque allemande en Champagne échoue,
l’Allemagne a perdu la guerre.
La bataille de
L’aspect miraculeux de la bataille est très vite vivace côté français.
Après l’échec du plan Joffre en Lorraine, l’échec de la bataille des frontières, l’invasion et la retraite, l’armée française recule, mais quel facteur pourrait la sauver du désastre ?
Le journal catholique, " Le Courrier de
L’article " Le Sacré-Coeur de Jésus signe de la victoire "
rappelle la vocation de la basilique dans la protection de Paris et de
Oui, Montmartre a été la citadelle inexpugnable qui a protégé Paris et
arrêté les barbares. Le pape Saint Pie X l’avait en quelque sorte prophétisé
lorsque, recevant le 10 avril 1910 les pèlerins français, il leur avait fit ces
paroles souvent rappelées dans le Bulletin du Voeu National : " Ne
perdez jamais confiance dans
Le 3 janvier 1915 " Un prêtre allemand blessé et fait prisonnier à la
bataille de
La meilleure preuve d’ authenticité du récit qui précède est le suivant,
qui se rapporte au même fait : une religieuse qui soigne les blessés à
Issy-les-Moulineaux, écrit : " C’était après la bataille de
" Si j’ étais sur le front, je serais fusillé, car défense a
été faite de raconter, sous peine de mort ce que je vais vous dire : vous avez
été étonnés de notre recul si subit quand nous sommes arrivés aux portes de
Paris ." Nous n’avons pas pu aller plus loin, une Vierge se tenait devant
nous, les bras étendus, nous poussant chaque fois que nous avions l’ordre
d’avancer. Pendant plusieurs jours nous ne savions pas si c’était une de vos
saintes nationales, Geneviève ou Jeanne d’ Arc. Après, nous avons compris que
c’était
(Le courrier de
Récits anonymes du Sacré Coeur au front.
Nombreux sont les récits relatifs aux bienfaits du Sacré-Coeur pour les soldats aux tranchées.
Le livre de l’abbé Charles Marcault, " Réalisons le Message du Sacré-Coeur ", paru en 1934 comporte un chapitre consacré à la " Merveilleuse protection accordée par le Sacré-Coeur aux porteurs de fanions dans les combats ". La source des témoignages a pour origine le Père Perroy et l’Oeuvre de l’Insigne du Sacré-Coeur ou des récits confiés à Marcault. Le Sacré-Coeur protège le soldat, quelle que soit la situation.
Les archives de Montmartre classées sous le titre " Culte du Sacré-Coeur au front pendant la guerre " (cotes Ol-04), les archives sont des extraits de lettres du front. Les archives du Sacré-Coeur de Montmartre ont la même origine que les extraits de Marcault," l’Oeuvre de l’Insigne du Sacré-Coeur " à Lyon ; les récits se complètent.
La dévotion au Sacré-Coeur égale sinon dépasse la ferveur à l’arrière. Au front où sa vie est en danger, le soldat catholique affirme sa foi. Face à la mort la pratique religieuse se moque des interdits. " Nos soldats portent les insignes ostensiblement sur la poitrine ou sur le képi, nos officiers, pour la plupart, donnent l’exemple. Quelle belle et riche idée d’avoir inventé ces insignes ! Vous ne pourriez croire combien tous sont heureux de s’en parer comme de la plus belle décoration ". Caporal brancardier.
Face à ce raz de marée que constitue la dévotion extérieure au Sacré-Coeur,
les autorités républicaines, en particulier Malvy ministre de l’Intérieur,
rappellent la neutralité religieuse de l’État. L’interdiction de porter des
emblèmes religieux ne casse pas le mouvement mais l’amène à être plus discret.
" Nos soldats ont été obligés comme les officiers de faire
disparaître du képi ou de la capote les petits insignes du Sacré-Coeur. Ils les
portent à l’intérieur duvêtement ou plus fréquemment à leur bracelet de montre,
où il est plus souvent visible. Ces misères n’auront qu’un temps. Je suis
convaincu que l’heure n’est pas si éloignée que l’on pourrait croire, ou ceux
qui auront survécu auront toute liberté d’honorer le Sacré-Coeur et où
Le rôle de l’aumônier, directeur de conscience, confident, rassembleur,
semble décisif dans l’extension du mouvement. Le " curé sac à dos"
n’est plus un " planqué " mais à ce titre
" J’ai reçu votre lettre ainsi que le paquet, je vous remercie de ce beau drapeau, c’est en effet le modèle des drapeaux de l’armée. Le jour de son arrivée il a servi à une manifestation à l’église. L... faisait ses Pâques et au salut chanté par la musique du régiment, nous avons fixé à la place d’honneur l’étendard qui venait d’arriver. Je partage, avec vous, le désir de voir flotter ce drapeau sur le champ de bataille... vous pouvez être certain que je ferai pour cela tout ce qui est possible". Aumônier militaire.
Les officiers jouent un rôle important en tolérant la dévotion au Sacré-Coeur quand ils ne s’y associent pas. " Après le triomphe, en tête de notre régiment, nous le disposons pieusement dans notre petite chapelle de Jeanne d’Arc que nous venons de créer au milieu de nos gourbis. Que le Sacré-Coeur nous garde et nous donne la victoire ! ". Le Col. X... du X...
Parmi les nombreux récits anonymes, certains peuvent retrouver leur
identité. Deux récits se complètent, celui du " Général de X... " :
J’ ai bien reçu le colis que les ouvrières lyonnaises ont brodé en souvenir de
mon enfant chéri, glorieusement tombé pour
La consécration des soldats.
Cet acte solennel rencontre des difficultés en raison de la vie en première ligne. La préparation se fait par une sorte de retraite avec nombreuses confessions et communions. Chacun s’engage à mener une vie chrétienne, à réinstaller le Christ au foyer. Femme et enfants sont avertis de l’acte et de la promesse par une feuille signée.
Le plus souvent la consécration se fait en groupe, en unités, associée au drapeau du Sacré-Coeur.
"Dimanche 31 mai, le drapeau a été béni à l’infirmerie par un des
aumôniers de la division, la cérémonie s’est faite très simplement ; notre
capitaine était présent. A l’issue de la messe, Monsieur l’aumônier a béni le
drapeau que lui présentait le plus ancien sous-officier de
Après la guerre, M. Du Plessis de Grenédan, doyen de la faculté catholique de droit d’Angers, écrit : " Depuis le début de la guerre jusqu’à ma démobilisation, le 25 février 1919, j’ ai constamment arboré, soit au cantonnement, soit dans ma chambre, soit en ligne, dans mon poste de commandement, le drapeau du Sacré-Coeur, contre la paroi de la pièce ou de l’abri, bien en évidence. Quand je logeais à la belle étoile, il était, soit dans ma musette, soit au bout d’un bâton fiché dans le sol. J’ai consacré deux fois, en 1917 et en 1918, mon bataillon au Sacré-Coeur, le jour de sa fête. "
La consécration du fort de Vaux, un bâtiment, montre qu’un lieu considéré
comme sanctuaire peut bénéficier de ce rite. Henri Bordeaux dans
Histoires de drapeaux du Sacré-Coeur.
Charles Marchant (1880-1919) choisit la carrière des armes à Saint-Cyr en 1901. Né 26 juillet 1917, Marchant prend le commandement du 17e Bataillon de Chasseurs Alpins. Sa dévotion au Sacré-Coeur s’affirme dans un petit drapeau frangé d’or visible au musée des Chasseurs à Vincennes, une sauvegarde avec épinglette.
Le récit de l’aumônier Lenoir, (Georges Guitton, Louis Lenoir, Aumônier des Marsouins,Édition de Gigorg, 1921, p. 174.) porte un précieux renseignement concernant le général Henri Gouraud (1867-1946). Quand, après le repos de Hans, le 4e reparut, le 15 avril, au Fortin, il y apportait un drapeau du Sacré-Coeur, offert au régiment par la mère du général Gouraud et béni la veille par l’aumônier. "
Le 116e R.I. appartient à la 22e D.I. jusqu’en octobre 1917, puis passe à la 170e D.I. Le régiment est consacré par son colonel Charles-René d’Arnoux, le lundi 26 mars 1917 et, en 1918, auprès de l’évêque de Luçon, en juin. (Claude Mouton, dans Au plus fort de la tourmente, parle de trois attestations comptant cent seize signatures, p. 88-89.)
Le récit du colonel de Gouvello, rédigé après la guerre, (Jacques Péricard, Le soldat de Verdun, Éd. Baudillière,p. 228 et suiv.) explique les conséquences de l’attaque allemande du 1er juin : " Le 8 juin, les Allemands prononcèrent une grosse attaque sur le front de notre division, la 151e, et de la 21e division. La ferme de Thiaumont tomba aux mains de l’ennemi et, dans le courant de l’après-midi, je reçus de mon commandant de brigade le message suivant: " La ferme de Thiaumont est prise, je suis obligé de reporter mon P.C. en arrière, et faites, l’impossible pour contenir l’ ennemi. " C’est le cas où jamais d’arborer mon drapeau du Sacré-Coeur. Allez le prendre et fixez-le à une perche au-dessus de mon P.C. pour que tous les hommes du régiment le voient. "
Pendant
Dans les archives du Sacré-Coeur de Montmartre un document de la 1re Armée navale contient deux lettres du 29 décembre 1915.
1re Armée navale, 29 décembre 1915. Le commandant en chef a voulu lui-même accuser réception à votre Comité du pieux et précieux envoi fait à l’armée navale. L’amiral me fait le grand honneur de me confier le dépôt de ce magnifique drapeau qui fait l’admiration de tous ceux qui l’ont vu. Nous allons organiser une grande fête au cours de laquelle cet emblème de notre foi et de notre patriotisme sera solennellement béni : il sera notre centre de ralliement dans toutes nos cérémonies religieuses. Et je le garderai à la disposition du chef de notre Flotte pour l’arborer au moment du combat, et dans toute autre circonstance qu’il jugera favorable. R...Aumônier de la 1ère Armée navale.
29 décembre 1915. J’ai reçu hier et remis de suite à notre aumônier le beau
drapeau que vous avez eu la pensée touchante d’offrir à l’armée navale. Il ne
peut que nous porter bonheur, et je l’accepte avec toute la gratitude que
mérite un tel témoignage de l’intérêt que votre Comité porte à
Conclusion :
Ainsi la dévotion au Sacré-Coeur connaît son apothéose en 1917. Insignes, fanions, drapeaux circulent au front par millions; l’Eglise développe l’Intronisation du Sacré-Coeur dans les familles, autre forme de consécration.
En 1919,
Aussi la basilique de Montmartre fête-t-elle sa consécration du 16 au 19
octobre 1919, consécration interrompue par la guerre. Le cantique chanté le
jour de la dédicace s’intitule " Merci mon Dieu ! Le Sacré-Coeur et
Marguerite-Marie Alacoque et Jeanne d’Arc sont canonisées le 13 mai 1920 par le pape Benoît XV. Le patriotisme religieux français reconnu par le Pape, confirme le rôle de la dévotion au Sacré-Coeur, y compris le drapeau par les références à ces saintes, et donne une impulsion nouvelle au culte en développant le pèlerinage de Paray-le-Monial.
Entre les deux guerres, dans la foulée de