LLLLes Nouvelles

 de

Chrétienté

 

N° 135

 

 

Le Sacré-Coeur à la Grande Guerre.
  En ce mois de juin, pour nous entretenir dans la dévotion au Sacré-Cœur, je vous donne ces considérations sur le sacré-Cœur et la grande guerre de 14-18

Des généraux pratiquants.

Édouard de Curières de Castelnau fait des études secondaires au collège Saint-Gabriel, tenu par des jésuites, à Saint-Affrique. Castelnau prend dans son entourage son neveu Pierre, jésuite, comme secrétaire et chapelain. Commandant la IIe Armée en 1914 il sauve le Grand Couronné de Nancy. Le 17 novembre 1918, il fait poser un ex-voto à Notre-Dame de Bon Secours à Nancy, avec pour inscription : " A Notre-Dame de Bon Secours,éternelle gratitude. Nisi Dominus custodierit civitatem. Général de Castelnau, 12 septembre 1914. "

Fayolle, dans ses " Cahiers secrets de la Grande Guerre ", évoque sa foi, invoque Notre-Dame de Lourdes, Jeanne d’ Arc, Notre-Dame de la Victoire. Chaque dimanche il se rend à la messe pour retrouver Dieu. Le 1er janvier 1917, Fayolle met l’année nouvelle " sous la protection de la Vierge miraculeuse ". Le 15 juin, en pleines mutineries, il écrit : " Fête du Sacré-Coeur qui sauvera ce pays et moi aussi. " Le militaire conclut le 11 novembre 1918 :

" Les hommes d’armes batailleront, Dieu donnera la victoire, disait Jeanne d’Arc. Ainsi fut fait et Dieu nous a donné une fois de plus la victoire. Le peuple de France comprendra-t-il que c’est bien Dieu qui l’a sauvé une nouvelle fois ? Oui car il ne nous a pas sauvés pour nous laisser périr ensuite. "

Foch, élève des jésuites, connu pour sa foi et sa piété, son prestige militaire, n’a jamais livré le secret de sa consécration. Le chanoine Crépin écrit : " Il y a à Montmartre, depuis le 3 août, un précieux autographe qui reposera sous le pied du grand ostensoir pendant la durée de la guerre : consécration d’une partie de notre armée par l’un des ses chefs les plus qualifiés. Foch commande le 20e corps d’armée de Nancy, sous les ordres de Castelnau ; sa dévotion au Sacré-Coeur ne fait aucun doute, l’autographe a dû être envoyé par la poste.

Foch représente l’exemple type du soldat catholique. En 1918, Clemenceau arrive à l’improviste au quartier général de Bonbon (près de Melun), demande le général. On lui répond qu’il est à la messe mais va être prévenu. Clémenceau répond : " Ne le dérangez pas, cela lui a trop bien réussi. J’ attendrai ! "

L’abbé Paul Noyer, curé de Bonbon, écrit le 8 juillet 1918 une lettre à Foch : " Mon Généralissime, avant de quitter bientôt peut-être ma paroisse, veuillez, je vous prie, agenouillé devant une statue du Sacré-Coeur de Jésus, Roi de France, lui consacrer toutes vos armées françaises. Demandez-lui avec supplication une prochaine et décisive victoire et que la France reste triomphante tant et surtout par ses Traités que par ses glorieux succès. Veuillez agréer, mon Généralissime, les très humbles sentiments de votre serviteur entièrement dévoué, Paul Noyer, Curé de Bonbon."

La lettre est remise le jour même.

Le 16 juillet, Foch rend visite au curé : " Monsieur le Curé, je viens vous remercier, j’ai fait tout ce que vous m’avez demandé et même plus. "

Le 17 octobre, Foch fait ses adieux à son curé, lui explique qu’il a consacré les armées au Sacré-Coeur,avec deux ou trois personnes devant la grande statue du Sacré-Coeur, près du maître-autel, au fond de l’église à droite.

Le P.Perroy jésuite de l’Oeuvre de l’Insigne du Sacré-Coeur, qui le 17 novembre 1918, du haut de la chaire de la cathédrale de Saint-Vincent de Chalon révèle :" A genoux devant le Sacré-Coeur, le général Foch a demandé au Sacré-Coeur, en lui consacrant les armées dont il avait la charge : premièrement une victoire prompte et définitive, deuxièmement une paix glorieuse pour la France. "

"  Cette victoire nous la devons à Dieu et c’est pour le remercier que je suis venu ici ", explique Foch au chanoine Schenékelé lors de sa visite à la cathédrale de Strasbourg.

Le 15 juillet la dernière attaque allemande en Champagne échoue, l’Allemagne a perdu la guerre.
 
  La bataille de la Marne, 5-8 septembre 1914.

L’aspect miraculeux de la bataille est très vite vivace côté français.

Après l’échec du plan Joffre en Lorraine, l’échec de la bataille des frontières, l’invasion et la retraite, l’armée française recule, mais quel facteur pourrait la sauver du désastre ?

La Ière Armée von Klück, chargée d’investir Paris, délaisse la ville pour participer à la curée des armées adverses. Le demi-tour des Français le 6 septembre, brusque, inattendu, frappe de stupeur les Allemands. Il faut se battre, or les homme sont sous-alimentés, épuisés, les pieds meurtris. Le trou entre les Ière et IIème Armées atteint 30 kilomètres, il faut ressouder les armées allemandes sur l’Aisne, le 9 l’ordre de repli général est donné. La vérité historique est simple, von Klück trop sûr de son armée a pris l’initiative de la poursuite de forces qu’il estimait en déroute.

Le journal catholique, " Le Courrier de la Manche " du dimanche 14 janvier 1917 publie un article citant des sources allemandes dignes de foi puisqu’ il s’agit d’un prêtre et de deux officiers. La Vierge a barré la route de Paris et 100.000 hommes l’ont vue, mais doivent se taire sous peine d’être fusillés. Le récit explicite bien le retournement inespéré de la bataille de la Marne qui tient du miracle puisqu’il se produit entre le premier vendredi de septembre et l’octave de la Nativité de la Vierge Marie.

L’article " Le Sacré-Coeur de Jésus signe de la victoire " rappelle la vocation de la basilique dans la protection de Paris et de la France. Nous rendrons grâce au Sacré-Coeur de Jésus, à la Très Sainte Vierge Marie et à sainte Geneviève, notre patronne, à l’ intervention desquels nous attribuons à bon droit d’ avoir donné le succès à l’énergie clairvoyante de nos généraux et à l’héroïsme de nos soldats, et d’avoir ainsi arrêté les envahisseurs déjà parvenus presque aux portes de Paris. Ce fut, en effet, le premier vendredi de ce mois de septembre que l’armée allemande se détourna soudain de la capitale pour aller se faire battre sur les bords de la Marne.

Oui, Montmartre a été la citadelle inexpugnable qui a protégé Paris et arrêté les barbares. Le pape Saint Pie X l’avait en quelque sorte prophétisé lorsque, recevant le 10 avril 1910 les pèlerins français, il leur avait fit ces paroles souvent rappelées dans le Bulletin du Voeu National : "  Ne perdez jamais confiance dans la Providence mais priez le Sacré-Coeur de Jésus qui garde la France du haut de Montmartre. "

Le 3 janvier 1915 " Un prêtre allemand blessé et fait prisonnier à la bataille de la Marne, est mort dans une ambulance française où se trouvaient des religieuses. Il leur dit : < Comme soldat, je devrais garder le silence, comme prêtre, je crois devoir dire ce que j’ai vu. Pendant la bataille de la Marne, nous étions surpris d’ être refoulés car nous étions légion, comparés aux Français et nous comptions bien arriver à Paris. Mais nous vîmes la Sainte Vierge toute habillée de blanc avec une ceinture bleue, inclinée vers Paris... elle nous tournait le dos et de la main droite, semblait nous repousser... Cela je l’ai vu et un grand nombre des nôtres aussi. Dans les jours où ce prêtre allemand parlait ainsi, deux officiers allemands, prisonniers, comme lui, et blessés, entraient dans une ambulance française de la Croix-Rouge. Une dame infirmière parlant allemand les accompagne. Quand ils entrèrent dans une salle où se trouvait une statue de Notre-Dame de Lourdes, ils se regardèrent et dirent : " Oh ! La Vierge de la Marne ! "

La meilleure preuve d’ authenticité du récit qui précède est le suivant, qui se rapporte au même fait : une religieuse qui soigne les blessés à Issy-les-Moulineaux, écrit : " C’était après la bataille de la Marne, parmi les blessés soignés à l’ambulance d’Issy, se trouvait un Allemand très grièvement atteint et jugé perdu. Grâce aux soins qui lui furent prodigués, il vécut encore plus d’un mois, il était catholique et témoignait de grands sentiments de foi. Les infirmiers étaient tous prêtres. Il reçut les secours de la religion et ne savait comment témoigner sa gratitude ; il disait souvent : " Je voudrais faire quelque chose pour vous remercier. " Enfin, le jour où il reçut l’ extrême-onction, il dit aux infirmiers : " Vous m’avez soigné avec beaucoup de charité, je veux faire quelque chose pour vous en vous racontant ce qui n’est pas à notre avantage, mais qui vous fera plaisir. Je paierai ainsi un peu de ma dette.

"  Si j’ étais sur le front, je serais fusillé, car défense a été faite de raconter, sous peine de mort ce que je vais vous dire : vous avez été étonnés de notre recul si subit quand nous sommes arrivés aux portes de Paris ." Nous n’avons pas pu aller plus loin, une Vierge se tenait devant nous, les bras étendus, nous poussant chaque fois que nous avions l’ordre d’avancer. Pendant plusieurs jours nous ne savions pas si c’était une de vos saintes nationales, Geneviève ou Jeanne d’ Arc. Après, nous avons compris que c’était la Sainte Vierge qui nous clouait sur place. Le 8 septembre, Elle nous repoussa avec tant de force, que tous, comme un seul Homme, nous nous sommes enfuis. Ce que je vous dis, vous l’entendrez sans doute redire plus tard, car nous sommes peut-être 100.000 hommes qui l’avons vu. "

(Le courrier de la Manche, du dimanche 14 janvier 1917.)
 
  Récits anonymes du Sacré Coeur au front.

Nombreux sont les récits relatifs aux bienfaits du Sacré-Coeur pour les soldats aux tranchées.

Le livre de l’abbé Charles Marcault, " Réalisons le Message du Sacré-Coeur ", paru en 1934 comporte un chapitre consacré à la " Merveilleuse protection accordée par le Sacré-Coeur aux porteurs de fanions dans les combats ". La source des témoignages a pour origine le Père Perroy et l’Oeuvre de l’Insigne du Sacré-Coeur ou des récits confiés à Marcault. Le Sacré-Coeur protège le soldat, quelle que soit la situation.

Les archives de Montmartre classées sous le titre " Culte du Sacré-Coeur au front pendant la guerre " (cotes Ol-04), les archives sont des extraits de lettres du front. Les archives du Sacré-Coeur de Montmartre ont la même origine que les extraits de Marcault," l’Oeuvre de l’Insigne du Sacré-Coeur " à Lyon ; les récits se complètent.

La dévotion au Sacré-Coeur égale sinon dépasse la ferveur à l’arrière. Au front où sa vie est en danger, le soldat catholique affirme sa foi. Face à la mort la pratique religieuse se moque des interdits. " Nos soldats portent les insignes ostensiblement sur la poitrine ou sur le képi, nos officiers, pour la plupart, donnent l’exemple. Quelle belle et riche idée d’avoir inventé ces insignes ! Vous ne pourriez croire combien tous sont heureux de s’en parer comme de la plus belle décoration ". Caporal brancardier.

Face à ce raz de marée que constitue la dévotion extérieure au Sacré-Coeur, les autorités républicaines, en particulier Malvy ministre de l’Intérieur, rappellent la neutralité religieuse de l’État. L’interdiction de porter des emblèmes religieux ne casse pas le mouvement mais l’amène à être plus discret. "  Nos soldats ont été obligés comme les officiers de faire disparaître du képi ou de la capote les petits insignes du Sacré-Coeur. Ils les portent à l’intérieur duvêtement ou plus fréquemment à leur bracelet de montre, où il est plus souvent visible. Ces misères n’auront qu’un temps. Je suis convaincu que l’heure n’est pas si éloignée que l’on pourrait croire, ou ceux qui auront survécu auront toute liberté d’honorer le Sacré-Coeur et où la France elle-même, lui apportera un hommage officiel. "

Le rôle de l’aumônier, directeur de conscience, confident, rassembleur, semble décisif dans l’extension du mouvement. Le " curé sac à dos" n’est plus un " planqué " mais à ce titre la République en fait un poilu comme les autres. Quelle que soit sa fonction au Front, le prêtre appartient " à ceux qui prient " même si la République anticléricale les classe dans " ceux qui se battent ". Le prêtre au front reste un homme d’Eglise, mais la boue des tranchées le désacralise, l’intègre et dans cette vie de catacombes lui permet de redevenir le missionnaire du Christ.

" J’ai reçu votre lettre ainsi que le paquet, je vous remercie de ce beau drapeau, c’est en effet le modèle des drapeaux de l’armée. Le jour de son arrivée il a servi à une manifestation à l’église. L... faisait ses Pâques et au salut chanté par la musique du régiment, nous avons fixé à la place d’honneur l’étendard qui venait d’arriver. Je partage, avec vous, le désir de voir flotter ce drapeau sur le champ de bataille... vous pouvez être certain que je ferai pour cela tout ce qui est possible". Aumônier militaire.

Les officiers jouent un rôle important en tolérant la dévotion au Sacré-Coeur quand ils ne s’y associent pas. " Après le triomphe, en tête de notre régiment, nous le disposons pieusement dans notre petite chapelle de Jeanne d’Arc que nous venons de créer au milieu de nos gourbis. Que le Sacré-Coeur nous garde et nous donne la victoire ! ". Le Col. X... du X...

Parmi les nombreux récits anonymes, certains peuvent retrouver leur identité. Deux récits se complètent, celui du " Général de X... " : J’ ai bien reçu le colis que les ouvrières lyonnaises ont brodé en souvenir de mon enfant chéri, glorieusement tombé pour la France. " Et celui d’un " Aumônier " : " Mon général de... est le général de... En voilà un brave qui n’a peur de rien et qui communie tous les jours quand il peut : Il a déjà deux fils de tués. Le général s’appelle De Castelnau, le premier fils est tué le 21 août 1914, le deuxième le 7 septembre 1915. Le troisième est blessé et fait prisonnier le 10 septembre 1915, le quatrième tué le 2 octobre 1915.
 
  La consécration des soldats.

Cet acte solennel rencontre des difficultés en raison de la vie en première ligne. La préparation se fait par une sorte de retraite avec nombreuses confessions et communions. Chacun s’engage à mener une vie chrétienne, à réinstaller le Christ au foyer. Femme et enfants sont avertis de l’acte et de la promesse par une feuille signée.

Le plus souvent la consécration se fait en groupe, en unités, associée au drapeau du Sacré-Coeur.

"Dimanche 31 mai, le drapeau a été béni à l’infirmerie par un des aumôniers de la division, la cérémonie s’est faite très simplement ; notre capitaine était présent. A l’issue de la messe, Monsieur l’aumônier a béni le drapeau que lui présentait le plus ancien sous-officier de la Cie, puis, avec l’autorisation du capitaine, au nom de nos camarades absents, on a lu la consécration de la compagnie au Sacré-Coeur".

Après la guerre, M. Du Plessis de Grenédan, doyen de la faculté catholique de droit d’Angers, écrit : " Depuis le début de la guerre jusqu’à ma démobilisation, le 25 février 1919, j’ ai constamment arboré, soit au cantonnement, soit dans ma chambre, soit en ligne, dans mon poste de commandement, le drapeau du Sacré-Coeur, contre la paroi de la pièce ou de l’abri, bien en évidence. Quand je logeais à la belle étoile, il était, soit dans ma musette, soit au bout d’un bâton fiché dans le sol. J’ai consacré deux fois, en 1917 et en 1918, mon bataillon au Sacré-Coeur, le jour de sa fête. "

La consécration du fort de Vaux, un bâtiment, montre qu’un lieu considéré comme sanctuaire peut bénéficier de ce rite. Henri Bordeaux dans la Délivrance de Verdun, p. 116, évoque " la première messe de Vaux : quel souvenir inoubliable pour les assistants ! " sans parler du Sacré-Coeur.
 
  Histoires de drapeaux du Sacré-Coeur.

Charles Marchant (1880-1919) choisit la carrière des armes à Saint-Cyr en 1901. Né 26 juillet 1917, Marchant prend le commandement du 17e Bataillon de Chasseurs Alpins. Sa dévotion au Sacré-Coeur s’affirme dans un petit drapeau frangé d’or visible au musée des Chasseurs à Vincennes, une sauvegarde avec épinglette.

Le récit de l’aumônier Lenoir, (Georges Guitton, Louis Lenoir, Aumônier des Marsouins,Édition de Gigorg, 1921, p. 174.) porte un précieux renseignement concernant le général Henri Gouraud (1867-1946). Quand, après le repos de Hans, le 4e reparut, le 15 avril, au Fortin, il y apportait un drapeau du Sacré-Coeur, offert au régiment par la mère du général Gouraud et béni la veille par l’aumônier. "

Le 116e R.I. appartient à la 22e D.I. jusqu’en octobre 1917, puis passe à la 170e D.I. Le régiment est consacré par son colonel Charles-René d’Arnoux, le lundi 26 mars 1917 et, en 1918, auprès de l’évêque de Luçon, en juin. (Claude Mouton, dans Au plus fort de la tourmente, parle de trois attestations comptant cent seize signatures, p. 88-89.)

Le récit du colonel de Gouvello, rédigé après la guerre, (Jacques Péricard, Le soldat de Verdun, Éd. Baudillière,p. 228 et suiv.) explique les conséquences de l’attaque allemande du 1er juin : " Le 8 juin, les Allemands prononcèrent une grosse attaque sur le front de notre division, la 151e, et de la 21e division. La ferme de Thiaumont tomba aux mains de l’ennemi et, dans le courant de l’après-midi, je reçus de mon commandant de brigade le message suivant: " La ferme de Thiaumont est prise, je suis obligé de reporter mon P.C. en arrière, et faites, l’impossible pour contenir l’ ennemi. " C’est le cas où jamais d’arborer mon drapeau du Sacré-Coeur. Allez le prendre et fixez-le à une perche au-dessus de mon P.C. pour que tous les hommes du régiment le voient. "

Pendant la Grande Guerre la dévotion au Sacré-Coeur se pratique dans toutes les armes, terre, air, mer.

Dans les archives du Sacré-Coeur de Montmartre un document de la 1re Armée navale contient deux lettres du 29 décembre 1915.

1re Armée navale, 29 décembre 1915. Le commandant en chef a voulu lui-même accuser réception à votre Comité du pieux et précieux envoi fait à l’armée navale. L’amiral me fait le grand honneur de me confier le dépôt de ce magnifique drapeau qui fait l’admiration de tous ceux qui l’ont vu. Nous allons organiser une grande fête au cours de laquelle cet emblème de notre foi et de notre patriotisme sera solennellement béni : il sera notre centre de ralliement dans toutes nos cérémonies religieuses. Et je le garderai à la disposition du chef de notre Flotte pour l’arborer au moment du combat, et dans toute autre circonstance qu’il jugera favorable. R...Aumônier de la 1ère Armée navale.

29 décembre 1915. J’ai reçu hier et remis de suite à notre aumônier le beau drapeau que vous avez eu la pensée touchante d’offrir à l’armée navale. Il ne peut que nous porter bonheur, et je l’accepte avec toute la gratitude que mérite un tel témoignage de l’intérêt que votre Comité porte à la Marine. D... L’ amiral D... dont parle l’aumônier est le vice-amiral Dartige du Fournet.
 
Conclusion : 

Ainsi la dévotion au Sacré-Coeur connaît son apothéose en 1917. Insignes, fanions, drapeaux circulent au front par millions; l’Eglise développe l’Intronisation du Sacré-Coeur dans les familles, autre forme de consécration.

En 1919, la France reconstruit ses régions dévastées, pleure ses morts. Une nouvelle France apparaît, vainqueur au prix d’un holocauste, en état de choc, souhaitant la " der des der ". Les préoccupations ne sont pas spirituelles, encore moins religieuses, il faut gagner la paix, construire une société civile plus juste. La paix religieuse s’instaure, les catholiques ont bien mérité de la patrie, même les prêtres sont morts au champ d’honneur.

Aussi la basilique de Montmartre fête-t-elle sa consécration du 16 au 19 octobre 1919, consécration interrompue par la guerre. Le cantique chanté le jour de la dédicace s’intitule " Merci mon Dieu ! Le Sacré-Coeur et la France ". La France élue de Dieu est sauvée par le Christ qui lui a donné la victoire comme jadis à Clovis et Jeanne d’Arc. Cette cérémonie nationale, qui rassemble l’ épiscopat français et le légat du Pape, on note l’absence des autorités civiles.

Marguerite-Marie Alacoque et Jeanne d’Arc sont canonisées le 13 mai 1920 par le pape Benoît XV. Le patriotisme religieux français reconnu par le Pape, confirme le rôle de la dévotion au Sacré-Coeur, y compris le drapeau par les références à ces saintes, et donne une impulsion nouvelle au culte en développant le pèlerinage de Paray-le-Monial.

Entre les deux guerres, dans la foulée de la Victoire, les consécrations au Sacré-Coeur continuent, liées à la fête du Christ-Roi. Cette vie dynamique se développe à Montmartre face aux périls idéologiques.