de
Chrétienté
N°
178
Au 22 mai 2009
Le voyage apostolique de Benoît XVI
en
Israël
A- Arrivée en Israël : Discours de Benoît XVI à
l´aéroport de Tel Aviv
Voici le discours que le pape Benoît XVI a prononcé à son arrivée à l'aéroport Ben Gourion de Tel Aviv, le lundi 11 mai, où il a été accueilli par le président de l'Etat d'Israël, M. Shimon Peres, et par le premier ministre M. Benjamin Netanyahu.
Monsieur le Président,
Monsieur le Premier Ministre,
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Merci de votre chaleureux accueil dans l'État d'Israël, sur cette terre qui est tenue pour sainte par des millions de croyants à travers le monde. Je suis reconnaissant au Président, Monsieur Shimon Peres, pour ses aimables paroles, et j'apprécie l'opportunité qui m'a été offerte de venir en pèlerinage sur une terre consacrée par les pas des patriarches et des prophètes, une terre que les chrétiens ont en particulière vénération puisque c'est là que se déroulèrent la vie, la mort et la résurrection de Jésus Christ.
Je prends place dans une longue file de pèlerins chrétiens venus dans ces lieux, un cortège qui remonte aux premiers siècles de l'histoire de l'Église et qui, j'en suis sûr, se prolongera dans le futur.
Je viens, comme tant d'autres avant moi, pour prier sur ces lieux saints, pour prier spécialement pour la paix - la paix ici en Terre Sainte, et la paix dans le monde.
Monsieur le Président, le Saint-Siège et l'État d'Israël partagent de nombreuses valeurs, en particulier la préoccupation de donner à la religion sa juste place dans la société. Le juste ordonnancement des relations sociales présuppose et requiert le respect de la liberté et de la dignité de chaque être humain, que les Chrétiens, les Musulmans et les Juifs croient être créé par un Dieu aimant, à son image et à sa ressemblance. Quand la dimension religieuse de la personne est niée ou marginalisée, le fondement même de la juste compréhension des droits humains inaliénables est mis en péril.
Le peuple juif a tragiquement fait l'expérience des
terribles conséquences d'idéologies qui nient la dignité fondamentale de toute
personne humaine. Il est juste et
opportun que, pendant mon séjour en Israël, je puisse avoir la possibilité
d'honorer la mémoire des six millions de Juifs victimes de
Durant mon séjour à Jérusalem, j'aurai le plaisir de rencontrer de nombreux responsables religieux éminents de ce pays. Les trois grandes religions monothéistes ont, entre autres, en commun une vénération particulière pour cette cité sainte. C'est mon espérance la plus chère que tous les pèlerins qui se rendent sur les lieux saints puissent y avoir accès librement et sans restriction, qu'ils puissent prendre part aux célébrations religieuses et qu'ils puissent soutenir le digne entretien des lieux de culte qui se trouvent sur les sites sacrés. Puissent les termes de la prophétie d'Isaïe s'accomplir : de nombreuses nations afflueront vers la montagne du Temple du Seigneur, pour qu'Il puisse leur enseigner ses chemins, pour qu'elles puissent suivre ses sentiers - des sentiers de paix et de justice, des sentiers qui conduisent à la réconciliation et à l'harmonie (cf. Is 2, 2-5).
Bien que le nom de Jérusalem signifie « ville de la paix », il est trop évident que, depuis des décennies, la paix a tragiquement fait défaut aux habitants de cette Terre Sainte. Les yeux du monde sont tournés vers les peuples de cette région alors qu'ils s'efforcent de trouver une solution juste et durable aux conflits qui ont causé tant de souffrances. Les espoirs d'innombrables hommes, femmes et enfants de connaître un avenir plus stable et plus sûr dépend de l'issue des négociations pour la paix entre Israéliens et Palestiniens. Avec les hommes de bonne volonté, où qu'ils soient, je plaide pour qu'avec tous les responsables soient explorées toutes les possibilités afin d'aboutir à une solution juste aux difficultés persistantes, de telle sorte que les deux peuples puissent vivre en paix dans leur propre pays, à l'intérieur de frontières sûres et internationalement reconnues. À cet égard, j'espère et je prie pour qu'un climat de plus grande confiance puisse bientôt être créé qui permettra aux parties d'accomplir de réels progrès sur la route de la paix et de la stabilité.
J'adresse un salut particulier aux Évêques catholiques et
aux fidèles ici présents. Sur cette terre, où Pierre a reçu la mission de faire
paître le troupeau du Seigneur, je viens comme le successeur de Pierre pour
exercer mon ministère parmi vous. Ce sera une joie toute spéciale pour moi de
me joindre à vous pour les célébrations finales de l'Année de
Monsieur le Président, mesdames et messieurs, je renouvelle mes remerciements pour votre accueil et je vous assure de mes sentiments de bonne volonté. Puisse Dieu donner force à son peuple ! Puisse Dieu bénir son peuple par la paix !
B-Discours de Benoît XVI à la résidence du
président Shimon Peres
Voici le discours que le pape Benoît XVI a prononcé au palais présidentiel de Jérusalem, lors de sa visite de courtoisie au président Shimon Peres, le lundi après-midi, 11 mai 2009
Monsieur le Président,
Excellences,
Mesdames, Messieurs,
En signe de cordiale hospitalité, le Président Peres nous accueille ici dans sa résidence, me permettant ainsi de vous saluer tous et de saisir cette occasion pour partager quelques réflexions avec vous. Je vous remercie, Monsieur le Président, de cet aimable accueil et des vœux courtois que vous m'avez adressés, vous offrant à mon tour ceux que je forme cordialement à votre intention. Je remercie également les musiciens qui nous ont réjoui par leur belle interprétation.
Monsieur le Président, dans le message de félicitations que je vous avais adressé au moment où vous inauguriez votre mandat, j'évoquais avec plaisir votre remarquable service du bien commun caractérisé par un engagement résolu à poursuivre les efforts de justice et de paix, et je vous assurais alors de ma prière.
Cet après-midi, je souhaite vous redire, à vous-même, au Premier Ministre Netanyahu et aux membres du Gouvernement qu'il vient de former, ainsi qu'à tout le peuple de l'État d'Israël, que le pèlerinage que j'accomplis aux Lieux Saints, est une démarche de prière pour le don précieux de l'unité et de la paix pour le Moyen-Orient et pour toute l'humanité. Oui, je prie chaque jour pour que la paix, née de la justice, revienne en Terre Sainte et dans toute la région, apportant la sécurité et une espérance renouvelée pour tous.
La paix est avant tout un don divin. Car la paix est la promesse du Tout-Puissant à l'humanité et elle est porteuse d'unité. Dans le Livre du prophète Jérémie nous lisons : « Car je sais, moi - c'est le Seigneur qui parle - les desseins que je forme pour vous, desseins de paix et non de malheur, pour vous donner un avenir et une espérance » (29, 11). Le prophète nous rappelle la promesse du Tout-Puissant, disant qu'Il « se laisse trouver », qu'Il « écoutera », et qu'Il « nous rassemblera ». Mais il y a une condition : nous devons « le chercher » et le « chercher de tout notre cœur » (cf. ibid. 12-14).
Aux Chefs religieux qui sont ici présents, je souhaite dire que la contribution spécifique des religions à la recherche de la paix se trouve essentiellement dans une recherche de Dieu authentique, ardente et unifiée. Il nous revient de proclamer - et d'en être les témoins -, que le Tout-Puissant est présent, qu'Il peut être connu même s'il semble caché à notre regard, qu'Il agit dans notre monde pour notre bien et que l'avenir de la société est marqué du sceau de l'espérance quand elle se met en syntonie avec l'ordre divin. C'est la présence dynamique de Dieu qui pousse les cœurs à se rassembler et qui assure l'unité. En effet, le fondement ultime de l'unité entre les personnes se trouve dans la parfaite unité et universalité de Dieu, qui a créé l'homme et la femme à son image et à sa ressemblance afin de nous attirer dans sa propre vie divine pour que tous soient un.
Les Chefs religieux doivent donc être attentifs au fait que toute division ou tension, toute tendance au repliement sur soi ou à la suspicion parmi les croyants ou entre des communautés, peut facilement conduire à une contradiction qui masque l'unité du Tout-Puissant, trahit notre propre unité et s'oppose à l'Unique qui se révèle lui-même comme Celui qui est « riche en grâce et en fidélité » (Ex 34, 6 ; Ps 138, 2 ; Ps 85, 11).
Mes amis :
Jérusalem, qui a longtemps été un carrefour pour de nombreux peuples d'origines
différentes, est une cité qui permet aux Juifs, aux Chrétiens et aux Musulmans
aussi bien d'assumer le devoir et de jouir du privilège de témoigner ensemble
de la coexistence pacifique depuis si longtemps désirée par ceux qui adorent le
Dieu unique ; de mettre en évidence le dessein du Tout-Puissant sur l'unité
de la famille humaine annoncée à Abraham ; et de proclamer la nature
véritable de l'homme qui est d'être un chercheur de Dieu. Prenons la résolution
de faire en sorte que, à travers l'enseignement et l'orientation que nous
donnons à nos communautés respectives, nous aidions leurs membres à être
fidèles à ce qu'ils sont en tant que croyants, toujours plus conscients de la
bonté infinie de Dieu, de l'inviolable dignité de tout être humain et de
l'unité de la famille humaine tout entière.
Il n'y a qu'une manière de protéger et de promouvoir ces valeurs : les mettre en pratique ! En vivre ! Aucune personne, famille, communauté ou nation n'est exemptée du devoir de vivre selon la justice et de travailler à la paix. Il va de soi que l'on attend des dirigeants civils et politiques qu'ils assurent une sécurité juste et convenable aux personnes qu'ils ont mission de servir. Cet objectif fait partie de la promotion authentique des valeurs communes à l'humanité et ne peut donc pas entrer en conflit avec l'unité de la famille humaine. Les valeurs authentiques et les buts d'une société, qui protègent toujours la dignité humaine, sont indivisibles, universels et interdépendants (cf. Allocution aux Nations Unies, 18 avril 2008). Ils ne peuvent plus être respectés quand ils deviennent la proie d'intérêts particuliers ou de politiques sectorisées. Le véritable intérêt d'une nation est toujours servi par la recherche de la justice pour tous.
Mesdames et Messieurs, la question de la sécurité durable repose sur la confiance, elle s'alimente aux sources de la justice et du droit, et elle est scellée par la conversion des cœurs qui nous pousse à regarder l'autre dans les yeux et à reconnaître le « Toi » comme mon égal, mon frère, ma sœur. N'est-ce pas de cette manière que la société elle-même devient le « verger » (Is 32,15) où fleurissent non pas des blocs opposés et l'obstruction, mais la cohésion et l'accord ? Ne peut-elle pas devenir une communauté ayant de nobles aspirations où tous peuvent avoir un accès sans restriction à l'éducation, à un toit, à un travail, une société décidée à construire sur les fondements solides de l'espérance,
En concluant, je voudrais me tourner vers les familles simples de cette ville et de cette terre. Quels sont les parents qui pourraient vouloir la violence, l'insécurité ou la désunion pour leur fils ou leur fille ? Quel but politique humain peut-il être jamais servi par le conflit et la violence ? J'entends le cri de ceux qui vivent dans ce pays et qui réclament la justice, la paix, le respect de leur dignité, la sécurité durable, une vie quotidienne sans crainte des menaces venant de l'extérieur ou d'une violence aveugle. Et je sais qu'un nombre important d'hommes et de femmes, de jeunes aussi, travaillent en faveur de la paix et de la solidarité à travers des programmes culturels et des initiatives qui manifestent concrètement compassion et souci de l'autre ; ils sont assez humbles pour savoir pardonner, ils ont le courage de saisir le rêve auquel ils ont droit.
Monsieur le Président, je vous remercie de votre courtoisie à mon égard et je vous assure encore de ma prière pour le Gouvernement et pour tous les citoyens de cet État. Puisse une authentique conversion de tous les cœurs conduire à un engagement toujours plus résolu et fort en faveur de la paix et de la sécurité à travers la justice pour chacun ! Shalom !
C-Discours de Benoît XVI au Mémorial Yad Vashem
à Jérusalem
Voici ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a prononcé le lundi après-midi, 11 mai 2009, au Mémorial de « Yad Vashem » à Jérusalem, monument à la mémoire de l'holocauste. Le pape a prononcé son discours après avoir salué six survivants de l'holocauste.
« Je leur donnerai dans ma maison et dans mes remparts un monument et un nom (...) ; je leur donnerai un nom éternel qui jamais ne sera effacé » (Is 56, 5).
Ce passage du Livre du prophète Isaïe offre les deux mots
simples qui expriment solennellement le sens profond de ce lieu vénéré : yad
« mémorial » ; shem « nom ». Je suis venu pour
rester en silence devant ce monument, érigé pour honorer la mémoire de millions
de Juifs tués dans l'horrible tragédie de
Il est possible de dérober à un voisin ce qu'il possède, son avenir ou sa liberté. Il est possible de tisser un réseau insidieux de mensonges pour convaincre les autres que certains groupes ne méritent pas d'être respectés. Néanmoins, quoique vous fassiez, il est impossible d'enlever son nom à un être humain.
L'Écriture Sainte nous enseigne l'importance du nom pour conférer à une personne une mission unique ou un don spécial. Dieu appelle Abram, « Abraham », car il va devenir le « Père d'une multitude de nations » (Gn 17, 5). Jacob fut appelé « Israël » car il avait « été fort contre Dieu et contre les hommes et il l'avait emporté » (cf. Gn 32, 29). Les noms inscrits dans ce sanctuaire auront toujours une place sacrée parmi les descendants innombrables d'Abraham. Comme lui, leur foi a été éprouvée. Comme Jacob, ils ont été plongés dans le combat pour discerner les desseins du Très-Haut. Que les noms de ces victimes ne périssent jamais ! Que leur souffrance ne soit jamais niée, discréditée ou oubliée ! Et que toutes les personnes de bonne volonté demeurent attentives à déraciner du cœur de l'homme tout ce qui peut conduire à de telles tragédies !
L'Église catholique, professant les enseignements de Jésus et attentive à imiter son amour pour tous les hommes, a une profonde compassion pour les victimes dont il est fait mémoire ici. De même, elle se fait proche de tous ceux qui, aujourd'hui, sont objet de persécution à cause de leur race, de leur couleur, de leur condition de vie ou de leur religion - leurs souffrances sont les siennes, et sienne est leur espérance de justice. En tant qu'Évêque de Rome et Successeur de l'Apôtre Pierre, je réaffirme l'engagement de l'Église à prier et à travailler sans cesse pour faire en sorte que cette haine ne règne plus jamais dans le cœur des hommes. Le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob est le Dieu de la paix (cf. Ps 85, 9).
Les Écritures enseignent que nous avons le devoir de rappeler au monde que ce Dieu est vivant, même s'il nous est parfois difficile de comprendre ses chemins mystérieux et impénétrables. Il s'est révélé lui-même et il continue d'agir dans l'histoire humaine. Il est le seul à gouverner le monde avec justice et à se prononcer sur toutes les nations avec droiture (cf. Ps 9, 9).
En regardant les visages qui se reflètent à la surface de la nappe d'eau immobile à l'intérieur de ce mémorial, on ne peut pas ne pas se rappeler que chacun d'eux porte un nom. Je peux seulement imaginer la joyeuse attente de leurs parents alors qu'ils se préparaient avec impatience à accueillir la naissance de leurs enfants. Quel nom donnerons-nous à cet enfant ? Qu'adviendra-t-il de lui ou d'elle ? Qui pouvait imaginer qu'ils auraient été condamnés à un sort aussi déplorable !
Tandis que nous sommes ici, en silence, leur cri résonne encore dans nos cœurs. C'est un cri élevé contre tout acte d'injustice et de violence. C'est le reproche continuel du sang innocent versé. C'est le cri d'Abel montant de la terre vers le Très-Haut. En professant fermement notre foi en Dieu, nous faisons monter ce cri en utilisant les mots du Livre des Lamentations qui sont si pleins de sens pour les Juifs comme pour les Chrétiens.
« Les faveurs du Seigneur ne sont pas finies, ni ses compassions épuisées ;
elles se renouvellent chaque matin, grande est sa fidélité !
Ma part, c'est Dieu ! dit mon âme, c'est pourquoi j'espère en lui. »
Le Seigneur est bon pour qui se fie à lui, Pour l'âme qui le cherche.
Il est bon d'attendre en silence le salut de Dieu ». (Lm 3, 22-26).
Chers amis, je suis profondément reconnaissant envers Dieu et envers vous de cette occasion qui m'a été donnée de m'arrêter ici, en silence : silence pour se souvenir, silence pour prier, silence pour espérer.
D-Discours de Benoît XVI au « Notre-Dame
Center » de Jérusalem
Rencontre avec des organisations pour le dialogue interreligieux
ROME, Lundi 11 mai 2009 (ZENIT.org) - Nous publions ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a prononcé le lundi, 11 mai 2009, en fin d'après-midi, au « Notre-Dame Center » de Jérusalem, en présence d'organisations chargées de la promotion du dialogue interreligieux et de représentants de différentes religions présentes en Terre sainte.
Chers Frères Évêques,
Honorables chefs religieux,
Chers amis,
C'est pour moi une source de grande joie que de pouvoir vous rencontrer ce soir. Je désire remercier Sa Béatitude le Patriarche Fouad Twal pour les aimables paroles de bienvenue qu'il m'a adressées en votre nom à tous. Et, en retour des sentiments chaleureux dont j'ai reçu l'assurance, je vous salue avec joie, vous tous, ainsi que les membres des groupes et organisations que vous représentez.
« Dieu dit à Abram, ‘Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père, pour le pays que je t'indiquerai ... Abram partit... et prit sa femme Saraï avec lui » (Gn 12, 1-5). L'appel soudain de Dieu, qui marque le début de l'histoire de nos traditions de foi, a retenti au cœur de l'existence quotidienne ordinaire d'un homme. Et l'histoire qui s'est ensuivie, se modela, non pas de façon isolée, mais à travers la rencontre avec les cultures égyptienne, hittite, sumérienne, babylonienne, perse et grecque.
La foi est toujours vécue à l'intérieur d'une culture. L'histoire des religions montre qu'une communauté de croyants avance progressivement dans la foi en Dieu, prenant appui sur la culture qu'elle rencontre et la modelant. Le même mouvement se retrouve pour chaque croyant des grandes traditions monothéistes : en syntonie avec la voix de Dieu, tout comme Abraham, nous répondons à son appel et nous nous mettons en marche cherchant l'accomplissement de ses promesses, désireux de nous soumettre à sa volonté, et traçant une voie dans notre culture propre.
De nos jours, presque quatre mille ans après Abraham, la rencontre des religions avec la culture n'advient pas simplement sur un plan géographique. Certains aspects de la mondialisation et particulièrement tout ce qui concerne internet ont fait naître une vaste culture virtuelle dont la valeur est tout aussi diverse que ses innombrables manifestations. Il ne fait pas de doute que l'on est parvenu à créer en bien des cas une certaine impression de proximité et d'unité au sein de l'ensemble de la famille humaine. Pourtant, en même temps, la série illimitée de portails qui sont mis à la disposition des gens pour leur donner accès facilement à toutes sortes de sources d'information peut facilement devenir un instrument de fragmentation sociale croissante : l'unité de la connaissance vole en éclats et les aptitudes complexes à la critique, au discernement et au jugement, acquises grâce aux savoirs académiques et éthiques sont souvent délaissées ou comptées comme négligeables.
La question qui vient alors spontanément à l'esprit est de savoir quelle est la contribution que la religion apporte aux cultures du monde devant les effets d'une mondialisation rapide. Dès lors que nombreux sont ceux qui soulignent volontiers les apparentes oppositions entre les religions, il nous revient, en tant que croyants, de relever le défi de présenter clairement ce que nous partageons ensemble.
Les premiers pas d'Abraham sur le chemin de la foi, et les
pas que nous faisons pour aller ou revenir de la synagogue, de l'église, de la
mosquée ou du temple, battent le sentier de notre unique histoire humaine, et
ouvrent, au fur et à mesure, la route vers
La croyance
religieuse présuppose la vérité. Quelqu'un
qui croit est quelqu'un qui cherche la vérité et en vit. Bien que le moyen par
lequel nous comprenons la découverte et la communication de la vérité soit en
partie différent d'une religion à l'autre, cela ne devrait pas nous détourner
de nos efforts en vue de témoigner du rayonnement de la vérité. Ensemble, nous
pouvons proclamer que Dieu existe et qu'on peut le connaître, que la terre est
sa création, que nous sommes ses créatures, et qu'il appelle tout homme et
toute femme à vivre de manière à respecter son dessein sur le monde. Chers
amis, si nous croyons que nous avons un critère de jugement et de discernement
qui est d'origine divine et qui est valable pour toute l'humanité, alors nous
ne devons pas nous lasser de faire en sorte que cette connaissance puisse avoir
une influence sur la vie civile. La vérité devrait être proposée à tous ;
elle est au service de tous les membres de la société. Elle éclaire les
fondements de la morale et de l'éthique, et elle insuffle à la raison la force
de dépasser ses propres limites pour donner forme aux aspirations les plus
profondes que nous avons en commun. Loin d'être une menace pour la tolérance vis-à-vis
des différences culturelles ou du pluralisme (culturel), la vérité rend
possible un consensus et permet au débat public de rester rationnel, honnête et
solide, elle ouvre enfin le chemin de la paix. Encourager la volonté d'obéir à
la vérité, permet en fait d'élargir notre conception de la raison et son champ
d'application et rend possible le dialogue authentique entre cultures et
religions qu'il est si urgent de développer aujourd'hui.
Chacun de nous ici sait bien que, malgré tout, la voix de Dieu se fait entendre moins clairement aujourd'hui, que la raison elle-même en bien des cas devient sourde au divin.
Toutefois, ce « vide » n'est pas celui du silence. Bien au contraire, c'est la cacophonie des requêtes de l'égoïsme, des promesses vaines et des fausses espérances, qui le plus souvent envahissent les espaces mêmes où Dieu nous cherche. Pouvons-nous dès lors créer des lieux, - des oasis de paix et de méditation profonde - où la voix de Dieu puisse de nouveau être entendue, où sa vérité puisse être découverte au cœur de la raison universelle, où chaque individu, quelles que soient son origine, son appartenance ethnique ou politique, ou sa croyance religieuse, puisse être respecté comme une personne, comme un semblable ? En cet âge d'accès immédiat à l'information et marqué par des tendances sociales qui engendrent une forme de monoculture, une réflexion approfondie sur la présence permanente de Dieu pourra enhardir la raison, stimuler le génie créatif, faciliter une évaluation critique des pratiques culturelles et renforcer la valeur universelle de la croyance religieuse.
Chers amis, les institutions et les groupes que vous
représentez vous engagent dans le dialogue interreligieux et la promotion
d'initiatives culturelles à des niveaux très divers. Depuis des institutions
académiques - permettez-moi ici de saluer spécialement les brillantes
réalisations de l'Université de Bethléem - à des groupes de parents
affligés ; depuis des initiatives musicales ou artistiques à l'exemple
courageux donné par des pères ou des mères de famille ordinaires ; depuis
des groupes organisés de dialogue aux organismes caritatifs, vous démontrez votre conviction que notre
devoir envers Dieu ne s'exprime pas seulement à travers le culte que nous lui
rendons mais aussi dans l'amour et le souci que nous avons pour la société,
pour la culture, pour notre monde et pour tous ceux qui vivent sur cette terre.
Certains voudraient nous faire croire que nos différences sont nécessairement une cause de division et donc, ne doivent être au plus que tolérées. Quelques autres affirment même que nous devrions être réduits au silence. Mais nous savons que nos différences ne doivent jamais être dénaturées au point d'être considérées comme une cause inévitable de friction ou de tension soit entre nous, soit avec la société dans son ensemble. Au contraire, elles fournissent une merveilleuse opportunité pour les personnes des différentes religions de vivre ensemble dans un profond respect, dans l'estime et la considération, s'encourageant les unes les autres sur les chemins de Dieu.
Avec l'aide du Tout-Puissant et éclairés par sa vérité, puissiez-vous continuer d'avancer avec courage, en respectant tout ce qui nous rend différents et en promouvant tout ce qui nous unit comme créatures bénies par le désir d'apporter l'espérance à nos communautés et au monde ! Que Dieu nous guide tout le long de ce chemin !
E-Discours de Benoît XVI à
Voici ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a prononcé le mardi matin, 12 mai 2009, en présence d'importants représentants de la communauté musulmane, à Jérusalem. Le pape est arrivé en voiture à l'Esplanade des mosquées. Il a été accueilli au Dôme du Rocher, le plus ancien monument musulman en Terre sainte, par le grand mufti et le président du Conseil du « Waqf » (biens religieux musulmans). Après avoir rapidement visité le lieu, le pape a prononcé son discours dans le bâtiment du « al-Kubbah al-Nahawiyya ».
Chers Amis Musulmans,
As-salámu ‘aláikum ! La paix soit avec vous !
Je remercie cordialement le Grand Mufti, Muhammad Ahmad
Hussein, ainsi que le Président du Waqf Islamique de Jérusalem, Sheikh Mohammed
Azzam al-Khatib al-Tamimi, et le Chef du Conseil Awquaf, Sheikh Abdel Azim
Salhab, pour leurs aimables paroles de bienvenue. Je vous suis profondément
reconnaissant de m'avoir invité à visiter ce lieu sacré, et je présente
volontiers mes respects à vous-mêmes et aux responsables de
Le dôme du Rocher invite nos cœurs et nos esprits à réfléchir sur le mystère de la création et sur la foi d'Abraham. Ici, les chemins des trois grandes religions monothéistes du monde se rencontrent, nous rappelant ce qu'elles ont en commun. Chacune croit en un Dieu unique, créateur et régissant toute chose. Chacune reconnaît en Abraham un ancêtre, un homme de foi auquel Dieu accorda une bénédiction spéciale. Chacune a rassemblé de nombreux disciples tout au long des siècles et a inspiré un riche patrimoine spirituel, intellectuel et culturel.
Dans un monde tristement déchiré par les divisions, ce lieu sacré sert de stimulant et met aussi les hommes et les femmes de bonne volonté au défi de travailler afin que soient dépassés les malentendus et les conflits du passé et que soit ouvert le chemin d'un dialogue sincère destiné à construire un monde de justice et de paix pour les futures générations.
Puisque les enseignements des traditions religieuses concernent, en fin de compte, la réalité de Dieu, le sens de la vie et la destinée commune de l'humanité - c'est-à-dire, tout ce qu'il y a de plus sacré et de plus précieux pour nous -, on peut être tenté ici de s'engager dans un tel dialogue avec crainte et doute quant aux possibilités de succès.
Néanmoins, nous pouvons commencer par nous appuyer sur la foi au Dieu unique, source infinie de justice et de miséricorde, puisqu'en lui ces deux qualités existent dans un parfaite unité. Ceux qui croient en son nom ont le devoir de s'efforcer inlassablement d'être justes en imitant son pardon, car les deux qualités sont orientées intrinsèquement vers la coexistence pacifique et harmonieuse de la famille humaine.
Pour cette raison, il est de la plus haute importance que ceux qui adorent le Dieu Unique puissent montrer qu'ils sont à la fois enracinés dans et orientés vers l'unité de la famille humaine tout entière. En d'autres termes, la fidélité au Dieu Unique, le Créateur, le Très-Haut, conduit à reconnaître que les êtres humains sont fondamentalement en relation les uns avec les autres, puisque tous doivent leur existence véritable à une seule source et tous marchent vers une fin commune. Marqués du sceau indélébile du divin, ils sont appelés à jouer un rôle actif en réparant les divisions et en promouvant la solidarité humaine.
Cela fait peser sur nous une grande responsabilité. Ceux qui honorent le Dieu Unique croient qu'il tiendra les êtres humains responsables de leurs actions. Les Chrétiens affirment que le don divin de la raison et de la liberté est à la base de ce devoir de répondre de ses actes. La raison ouvre l'esprit à la compréhension de la nature et de la destinée communes de la famille humaine, tandis que la liberté pousse les cœurs à accepter l'autre et à le servir dans la charité. L'amour indivisible pour le Dieu Unique et la charité envers le prochain deviennent ainsi le pivot autour duquel tout tourne. C'est pourquoi nous travaillons infatigablement pour préserver les cœurs humains de la haine, de la colère ou de la vengeance.
Chers amis, je suis venu à Jérusalem pour un pèlerinage de foi. Je remercie Dieu de cette occasion qui m'est donnée de vous rencontrer comme Évêque de Rome et Successeur de l'Apôtre Pierre, mais aussi comme fils d'Abraham, en qui « seront bénies toutes les familles de la terre » (Gn 12, 3 ; cf. Rm 4, 16-17). Je vous assure que l'Église désire ardemment coopérer au bien-être de la famille humaine. Elle croit fermement que la réalisation de la promesse faite à Abraham est universelle dans son ampleur, embrassant tout homme et toute femme, sans considération pour sa provenance ou pour son statut social. Tandis que Musulmans et Chrétiens poursuivent le dialogue respectueux qu'ils ont entamé, je prie pour qu'ils cherchent comment l'Unicité de Dieu est liée de façon inextricable à l'unité de la famille humaine. En se soumettant à son dessein d'amour sur la création, en étudiant la loi inscrite dans le cosmos et gravée dans le cœur de l'homme, en réfléchissant sur le don mystérieux de l'autorévélation de Dieu, puissent les croyants continuer à maintenir leurs regards fixés sur la bonté absolue de Dieu, sans jamais perdre de vue la manière dont elle se reflète sur le visage des autres !
Avec ces sentiments, je demande humblement au Tout-Puissant de vous apporter la paix et de bénir l'ensemble des populations bien-aimées de cette région. Puissions-nous nous efforcer de vivre dans un esprit d'harmonie et de coopération, rendant témoignage au Dieu Unique en servant généreusement les autres ! Merci.
F- Discours de Benoît XVI à
Voici ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a prononcé le mardi matin 12 mai 2009, au Grand Rabbinat de Jérusalem, en présence des deux grands rabbins d'Israël : le grand rabbin askenazita Yona Metzger et le grand rabbin sefardita Shlomo Amar.
Messieurs les Grands Rabbins,
Chers Amis,
Je vous suis reconnaissant de m'avoir invité à visiter Heichal Shlomo et à vous rencontrer durant mon voyage en Terre Sainte en tant qu'Évêque de Rome. Je remercie le Rabbin Sépharade Shlomo Amar et le Rabbin Ashkenaze Yona Metzger pour leurs paroles chaleureuses de bienvenue et pour le désir qu'ils ont exprimé de continuer à renforcer les liens d'amitié que l'Église catholique et le Grand Rabbinat se sont efforcés avec assiduité de forger au cours des dernières décennies. Vos visites au Vatican en 2004 et 2005 sont un signe de la bonne volonté qui caractérise le développement de nos relations.
Messieurs les Rabbins, en retour, je vous exprime mes propres sentiments de respect et d'estime, que j'étends à vos communautés, et je vous assure de mon désir d'approfondir la compréhension mutuelle et la coopération entre le Saint-Siège, le Grand Rabbinat d'Israël et le peuple juif à travers le monde.
C'est une source de grande satisfaction pour moi, depuis le
début de mon pontificat, de voir les fruits produits par le dialogue en court
entre
Notre rencontre, aujourd'hui, est une occasion des plus
appropriées de remercier le Tout-Puissant pour les nombreuses bénédictions qui
ont accompagnées le dialogue conduit par
Une indication du potentiel de ces rencontres peut être facilement aperçue à travers notre commune préoccupation face au relativisme moral et aux violations qu'il engendre contre la dignité de la personne humaine. En abordant les questions éthiques les plus urgentes de notre époque, nos deux communautés sont confrontées au défi d'engager les hommes de bonne volonté à se placer au niveau de la raison, tandis que simultanément, elles doivent mettre en évidence les fondements religieux qui soutiennent le mieux les valeurs morales ultimes. Puisse le dialogue qui a commencé, continuer à susciter des idées sur la manière dont les Chrétiens et les Juifs peuvent travailler afin que grandisse l'estime de la société envers la contribution remarquable de nos traditions religieuses et éthiques. Ici, en Israël, étant donné que les Chrétiens ne constituent seulement qu'une petite portion de la population totale, ils attachent une valeur particulière aux occasions de dialogue avec leurs voisins juifs.
La confiance est sans aucun doute un élément essentiel du dialogue véritable. Aujourd'hui, m'est offerte la possibilité de répéter que l'Église catholique est engagée de façon irrévocable sur le chemin choisi par le Concile Vatican II en faveur d'une réconciliation authentique et durable entre les Chrétiens et les Juifs. Comme Nostra Aetate le dit clairement, l'Église continue de valoriser le patrimoine commun aux Chrétiens et aux Juifs et désire une compréhension mutuelle et un respect toujours plus profonds à travers les études bibliques et théologiques comme à travers les dialogues fraternels. Puissent les sept rencontres des Commissions bilatérales qui se sont déjà tenues entre le Saint-Siège et le Grand Rabbinat en être une preuve ! Je vous suis donc reconnaissant de l'assurance que vous avez manifestée que les relations entre le Saint-Siège et le Grand Rabbinat continueront, à l'avenir, à croître dans le respect et la compréhension.
Chers amis, je vous exprime à nouveau ma profonde appréciation pour l'accueil que vous m'avez réservé aujourd'hui. Je suis sûr que notre amitié continuera d'être un exemple de confiance dans le dialogue entre Juifs et Chrétiens à travers le monde. En regardant les réalisations accomplies jusqu'à présent, et en tirant notre inspiration des Saintes Écritures, nous pouvons regarder l'avenir avec confiance concernant la coopération toujours plus ardente entre nos communautés - ainsi qu'avec toutes les personnes de bonne volonté - afin de dénoncer la haine et les persécutions à travers le monde. Je prie pour que Dieu, qui cherche nos cœurs et connaît nos pensées (Ps 139, 23), continue à nous éclairer de sa sagesse, afin que nous puissions suivre ses commandements de l'aimer de tout notre cœur, de toute notre âme et de toutes nos forces (cf. Dt 6, 5), et d'aimer notre prochain comme nous-mêmes (Lv 19, 18). Je vous remercie.
G- Discours de Benoît XVI au Cénacle en présence
des Ordinaires de Terre sainte
Ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a prononcé le
mardi, 12 mai 2009, en fin de matinée, au Cénacle (où le Christ apparut aux
apôtres après la résurrection et où eut lieu
Chers Frères Évêques,
Révérend Père Custode,
Je vous salue avec grande joie, vous les Évêques de Terre
Sainte, en cette Chambre Haute où le Seigneur ouvrit son cœur aux disciples
qu'il s'était choisis et où il célébra le Mystère pascal et où l'Esprit Saint,
le jour de
« Jésus, sachant que son heure était venue de passer de
ce monde vers le Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima
jusqu'à la fin » (Jn 13, 1).
L'appel à la communion d'esprit et de cœur, si étroitement
lié au commandement de l'amour et au rôle central et unifiant de l'Eucharistie
dans nos vies, est particulièrement ressenti en Terre Sainte. Les différentes Églises
chrétiennes que l'on trouve ici
représentent un patrimoine spirituel riche et diversifié, et elles sont le signe qu'existent de
multiples formes d'interaction entre l'Évangile et les différentes cultures.
Elles nous rappellent aussi que la mission de l'Église est de prêcher l'amour
universel de Dieu et de rassembler tous ceux qui, au loin ou plus près de nous,
sont appelés par lui afin que, avec leurs traditions et leurs talents, ils
arrivent à former l'unique famille de Dieu.
Depuis le deuxième Concile du Vatican, en particulier, un nouveau dynamisme
spirituel vers la communion dans la diversité a vu le jour à l'intérieur de
l'Église catholique ainsi qu'une nouvelle conscience œcuménique. L'Esprit meut
nos cœurs avec douceur vers l'humilité et la paix, vers l'acceptation mutuelle,
la compréhension et la coopération. Cette disposition intérieure vers l'unité
sous la motion de l'Esprit Saint est d'une importance décisive si nous voulons
que les Chrétiens soient capables de remplir leur mission dans le monde (cf. Jn
17, 21).
C'est dans la mesure où le don de l'amour est accepté et qu'il grandit dans l'Église, que la présence chrétienne en Terre Sainte et dans les régions voisines peut être une présence ardente. Et elle est d'une importance capitale pour le bien de la société toute entière. Les paroles sans équivoque de Jésus sur le lien intime entre l'amour de Dieu et l'amour du prochain, sur la miséricorde et la compassion, sur la douceur, la paix et le pardon, sont un ferment capable de transformer les cœurs et de modeler nos actions. Les Chrétiens au Moyen-Orient, avec toutes les personnes de bonne volonté, apportent leur contribution, en tant que citoyens responsables et loyaux, à la promotion et au renforcement d'un climat de paix dans la diversité, et cela en dépit des difficultés et des restrictions. Je désire leur redire ce que j'affirmais dans mon message de Noël 2006 aux Catholiques du Moyen-Orient : « J'exprime avec affection ma proximité personnelle dans la situation d'insécurité humaine, de souffrance quotidienne, de peur et d'espérance que vous êtes en train de vivre. Avant tout, je répète à vos communautés les paroles du Rédempteur : ‘Sois sans crainte, petit troupeau, car votre Père s'est complu à vous donner le Royaume' (Lc 12, 32) » (Message du Pape Benoît XVI aux Catholiques vivant au Moyen-Orient, 21 décembre 2006).
Chers Frères Évêques, vous pouvez compter sur mon soutien et sur mes encouragements tandis que vous faites tout votre possible pour permettre à vos frères et sœurs chrétiens de rester ici sur la terre de leurs ancêtres et à être des messagers et des promoteurs de la paix. J'apprécie vos efforts pour leur proposer, comme à des citoyens responsables et conscients, des valeurs et des principes d'action qui puissent les aider à jouer leur rôle dans la société. Par l'éducation, la formation professionnelle et d'autres initiatives économiques et sociales, leurs conditions de vie pourront être assurées et améliorées.
Quant à moi, je renouvelle mon appel à nos frères et sœurs
du monde entier afin qu'ils apportent leur soutien aux communautés chrétiennes
de Terre Sainte et du Moyen-Orient, se souvenant d'elles dans leurs prières. Et
dans ce contexte, je veux exprimer combien j'apprécie le service qui est rendu
aux innombrables pèlerins et visiteurs qui viennent en Terre Sainte pour y
chercher inspiration et renouveau de vie sur les pas de Jésus. Les récits de
l'Évangile, contemplés dans leur environnement historique et géographique,
prennent une coloration vivante et l'on en reçoit une compréhension plus claire
de la signification des paroles de notre Seigneur et de ses gestes. Bien des
expériences mémorables de pèlerins de
Chers Frères, en adressant tous ensemble à Marie, Reine du Ciel, notre prière joyeuse, mettons avec confiance entre ses mains le bien-être et le renouveau spirituel de tous les Chrétiens de Terre Sainte. Puissent-ils, guidés par leurs Pasteurs, grandir dans la foi, l'espérance et l'amour, et persévérer dans leur mission de promoteurs de communion et de paix !
H- Messe dans la vallée de Josaphat : Discours de Benoît
XVI
En face du Jardin des Oliviers
Nous publions ci-dessous le texte de l'homélie que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de la messe qu'il a célébrée dans la vallée de Josaphat, à Jérusalem, en face de la basilique de Gethsémani et du Jardin des Oliviers, le mardi 12 mai 2009..
Chers Frères et Sœurs,
« Le Christ est
ressuscité, alléluia ! ». Par ces mots, je vous salue avec une
très grande affection. Je remercie le Patriarche Fouad Twal pour les paroles de
bienvenue qu'il m'a adressées en votre nom, et avant tout, j'exprime ma joie de
pouvoir célébrer cette Eucharistie avec vous, qui êtes l'Église à Jérusalem.
Nous sommes rassemblés sous le Mont des Oliviers, où notre Seigneur a prié et a
souffert, où il a pleuré par amour de cette Ville et à cause du désir qu'elle
puisse connaître ce qui pouvait lui « donner la paix » (Lc 19,
42). De ce lieu, il est retourné vers le Père, donnant son ultime bénédiction
terrestre à ses disciples et à nous. Aujourd'hui, recevons cette bénédiction.
Il vous la donne d'une façon particulière, chers frères et sœurs, qui êtes
reliés par une chaîne interrompue avec les premiers disciples qui ont rencontré
le Seigneur ressuscité et l'ont reconnu à la fraction du pain, ceux qui ont été
convertis en écoutant la prédication de saint Pierre, et ceux qui, les
premiers, ont fait l'expérience de l'Esprit répandant la plénitude de ses dons
à
Comme Successeur de saint Pierre, j'ai mis mes pas dans les siens afin de proclamer au milieu de vous le Christ ressuscité, de vous confirmer dans la foi de vos pères et d'invoquer sur vous la consolation qui est le don du Paraclet.
Me tenant devant vous aujourd'hui, je ne peux oublier les difficultés, les frustrations, les épreuves et les souffrances que tant de vous ont dû supporter à cause des conflits qui ont affecté ces terres, sans parler des amères expériences de déplacement auquel tant de vos familles ont été contraintes et - qu'à Dieu plaise - puissiez-vous ne plus connaître. J'espère que ma venue ici est ressentie comme le signe que vous n'êtes pas oubliés, que votre présence persévérante et votre témoignage sont hautement précieux aux yeux de Dieu et importants pour l'avenir de ces terres. En raison justement des profondes racines que vous avez dans cette terre, de votre culture chrétienne, forte et ancienne, ainsi que de votre confiance inébranlable dans la fidélité de Dieu à ses promesses, vous, Chrétiens de Terre Sainte, vous êtes appelés à servir non seulement comme une lumière-témoin de foi pour l'Église universelle, mais aussi comme un levain d'harmonie, de sagesse et d'équilibre dans la vie d'une société qui, traditionnellement, a été pluraliste, multiethnique et plurireligieuse et qui continue à l'être.
Dans la deuxième lecture de ce jour, l'Apôtre Paul demande aux Colossiens de « rechercher les réalités d'en haut : c'est là qu'est le Christ, assis à la droite de Dieu » (Col 3, 1). Ses paroles résonnent avec une force particulière ici, au pied du Mont des Oliviers où Jésus a accepté le calice de la souffrance dans une complète soumission à la volonté du Père, et d'où, selon la tradition, il est monté pour siéger à la droite du Père intercédant sans cesse pour nous, les membres de son Corps. Saint Paul, le héraut puissant de l'espérance chrétienne, savait bien quel est le prix de cette espérance, ce qu'elle coûte en souffrances et persécutions pour la cause de l'Évangile, néanmoins il n'a jamais fléchi dans sa conviction que la résurrection du Christ marque le début d'une nouvelle création. Et il nous dit : « Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire » (Col 3, 4) !
L'exhortation de Paul
à « rechercher les réalités d'en haut » doit résonner sans cesse en nos
cœurs. Par ses paroles, il nous oriente vers le plein accomplissement de la
vision de foi dans
Voilà l'espérance,
voilà la vision, qui inspire tous ceux qui aiment
Mais, sous les murs
de cette même Cité, nous sommes amenés à constater avec tristesse combien notre
monde est éloigné de l'accomplissement plénier de cette prophétie et de cette
promesse. Dans cette Ville Sainte où
C'est pour cela que
Tandis que nous sommes ici rassemblés au pied des remparts de cette cité, que les disciples de trois grandes religions considèrent comme sacrés, comment pouvons-nous ne pas songer à la vocation universelle de Jérusalem ? Annoncée par les prophètes, cette vocation apparaît aussi comme un fait indiscutable, comme une réalité à jamais enracinée dans l'histoire complexe de cette ville et de ses habitants. Les Juifs, les Musulmans tout comme les Chrétiens considèrent cette cité comme leur patrie spirituelle. Comme il reste beaucoup à faire pour faire en sorte qu'elle soit véritablement une « cité de paix » pour tous les peuples, où tous peuvent venir en pèlerinage pour chercher Dieu et écouter sa voix, une voix qui « annonce la paix » (cf. Ps 85, 9) !
De fait, Jérusalem est depuis toujours une ville où résonne dans les rues l'écho de langues différentes, où cheminent sur les pavés des peuples de toute race et langue, et dont les murs sont un symbole de l'amour providentiel de Dieu pour la famille humaine tout entière. Comme un microcosme de notre univers mondialisé, cette Ville, si elle veut vivre en conformité à sa vocation universelle, doit être un lieu qui enseigne l'universalité, le respect des autres, le dialogue et la compréhension mutuelle ; un lieu où les préjugés, l'ignorance et la peur qui les alimentent, sont mis en échec par l'honnêteté, le bon droit et la recherche de la paix. Il ne devrait pas y avoir place, à l'intérieur de ces murs, pour la violence, l'étroitesse d'esprit, l'oppression et la vengeance. Ceux qui croient en un Dieu miséricordieux - qu'ils se reconnaissent comme Juifs, Chrétiens ou Musulmans - doivent être les premiers à promouvoir cette culture de réconciliation et de paix, sans se laisser décourager par la pénible lenteur des progrès ni par le lourd fardeau des souvenirs du passé.
Ici, je voudrais parler sans détours de la tragique réalité
- qui ne peut manquer d'être source de préoccupations pour tous ceux qui aiment
cette Ville et cette terre - du départ
de tant de membres de
Chers amis, dans l'Évangile qui vient d'être proclamé, saint
Pierre et saint Jean courent vers le tombeau vide, et Jean, nous dit-on :
« vit et crut » (Jn 20, 8). Ici, sur
Dans