Les Nouvelles
de
Chrétienté


n°53

Le 26 mai  2006

L’enseignement de Benoît XVI

Sur le mystère de l’Ascension,

le Pape a insisté, lors du Regina Coeli de dimanche dernier, sur deux aspects fondamentauxdy Mystère de l’Ascension:

« Le livre des Actes des apôtres rapporte que Jésus, après sa résurrection, est apparu à ses disciples pendant quarante jours, et puis « fut élevé en haut sous leurs yeux » (At 1,9). C’est l’ascension, fête que nous célèbrerons jeudi 25 mai, même si dans certains pays, elle est transférée à dimanche prochain. La signification de ce dernier geste du Christ est double. Avant tout, en montant vers « le haut », il révèle sans équivoque sa divinité : il retourne là d’où il est venu, c’est-à-dire en Dieu, après avoir accompli sa mission sur la terre. En outre, le Christ monte au ciel avec l’humanité qu’il a assumée et qu’il a ressuscitée d’entre les morts : cette humanité c’est la nôtre, transfigurée, divinisée, devenue éternelle. L’Ascension révèle donc la « très haute vocation » (Gaudium et spes, 22) de toute personne humaine : elle est appelée à la vie éternelle dans le Royaume de Dieu, Royaume d’amour, de lumière et de paix.

Nous nous réjouissons à propos de cette fête, que le Christ notre Sauveur a pris place à la droite du Père, parce que là où il est allé nous avons l’espérance de le suivre ».

Les nouvelles de Rome

 

Le prochain voyage du Pape en Pologne.

 

Zenit nous informe du très prochain voyage du Pape Benoït XVI en Pologne.

 

ROME, Mardi 23 mai 2006 (ZENIT.org) – Des évêques de l'Église catholique en France se rendent en Pologne avec le pape Benoît XVI, indique la conférence des évêques de France (www.cef.fr).

Du jeudi 25 au dimanche 28 mai 2006, Benoît XVI effectue un voyage en Pologne, pays natal de son prédécesseur le pape Jean-Paul II.

Le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux et président de la Conférence des évêques de France, le cardinal Jean-Marie Lustiger, archevêque émérite de Paris, Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris, et Mgr Jean-Yves Riocreux, évêque de Pontoise, ont été invités en Pologne à cette occasion. Ils y rejoindront le pape Benoît XVI les 27 et 28 mai.

Le pape est attendu jeudi 25 mai en fin de matinée à Varsovie.


Vendredi 26 mai, il célébrera la messe sur la place Pilsudski, où Jean-Paul II a célébré une messe historique lors de son premier voyage dans sa patrie, en juin 1979, puis il se rendra au sanctuaire de la Vierge Noire de Jasna Góra à Czestochowa, puis à Cracovie.

Samedi 27 mai, Benoît XVI visitera notamment la maison natale de Jean-Paul II à
Wadowice et le sanctuaire de marial de Kalwaria Zebrzydowska où le jeune Karol Wojtyla se rendait souvent, en particulier avec son père.
En fin de journée, il rencontrera les jeunes dans le parc de Blonie à Cracovie.

Dimanche 28 mai, après avoir célébré la messe dans ce même parc, Benoît XVI se rendra sur les sites des camps d’extermination d’Auschwitz et de Birkenau, avant de quitter la Pologne en début de soirée.

 

« Histoire de la Messe interdite ».

 

Jean Madiran nous donne dans Présent  une « Histoire de la messe interdite »

 

A lire absolument.

O ! Comme Dom Guillou se serait réjoui de ces pages  de Jean Madiran.  Jean Madiran dit le vrai. Il est notre « mémoire ».

PRÉSENT — Mercredi 24 mai 2006

 

Histoire de la messe interdite (1966-2006)

 

Sommaire

Avant-propos. – L’avis de tempête. –

1967. – L’année climatérique. – 1970. – 1971. – 1972. – 1973. – 1974 (etc.).

 

Note. – La « messe traditionnelle », ainsi appelée en abrégé, est adéquatement nommée aussi « messe de saint Pie V », « messe tridentine », « messe ancienne », et inadéquatement « la messe en latin ».

 

Par messe traditionnelle nous entendons LA MESSE CATHOLIQUE TRADITIONNELLE, LATINE ET GRÉGORIENNE SELON LE MISSEL ROMAIN DE SAINT PIE V.

 

Avant-propos

 

Depuis une quarantaine d’années, l’ensemble des diocèses, la quasi-totalité des catholiques pratiquants, des nonpratiquants et des incroyants n’ont pas connu d’autre messe que la messe nouvelle, la messe de Paul VI, instituée en 1969, célébrée intégralement dans la langue locale. Si l’on excepte les catholiques réfractaires, qui numériquement ont été une très faible minorité, les catholiques ne connaissent plus qu’une messe, celle de leur évêque et de leur clergé, « la messe », que plus ou moins souvent ils n’appellent même plus ainsi mais dénomment « une eucharistie » ; ils ignorent d’où elle provient, elle est pour eux la messe de l’Eglise, la seule qu’aient jamais célébrée les prêtres diocésains ayant moins de soixante ou soixantecinq ans ; elle est d’ailleurs fort variable d’un diocèse à l’autre, d’une messe à l’autre.

 

Quant à l’opinion publique formatée par la télévision, elle entend quelquefois parler d’une « messe en latin » que conservent mystérieusement de singuliers croyants, regroupés à l’écart en petites « communautés », voire « sectes », suspectes d’être « intégristes » (l’intégrisme étant une fanatique radicalisation que l’on peut supposer en marge de n’importe quelle religion ; sa forme le plus souvent

mentionnée par les médias est l’intégrisme islamique, appelé aussi « islamisme » par distinction d’avec l’ « islam » supposé tolérant et pacifiste). Donc, la plupart des catholiques, pratiquant dans leurs paroisses les liturgies actuellement en usage, s’imaginent être ainsi les héritiers d’une tradition ecclésiastique remontant à Jésus-Christ, simplement émondée de quelques détails obsolètes.

 

Ils ignorent qu’en réalité ils sont les héritiers d’une révolution liturgique qui a très volontairement opéré une rupture dans la tradition catholique ; et qui l’a fait d’une manière brutale, cruelle, arbitraire. La messe traditionnelle s’est trouvée frappée en fait d’une injuste interdiction. C’est l’histoire méconnue ou ignorée de cette messe interdite que l’on présente ici au lecteur : quarante années du sort infligé à LA MESSE CATHOLIQUE TRADITIONNELLE, LATINE ET GRÉGORIENNE SELON LE MISSEL ROMAIN DE SAINT PIE V.

 

L’avis de tempête

 

 

La longue défiguration liturgique des quarante dernières années (1966-2006) est issue d’une lente fermentation. Elle n’est pas sortie d’un seul coup du concile Vatican II. Elle est venue de plus loin.

 

Ce concile a été clos à la fin de l’année 1965, le 8 décembre. L’année 1966 débute, le 5 février, par une retentissante démarche publique, la première réaction de grande dimension devant le désastre en cours dans

l’Eglise, et c’est une réaction de laïcs, qui dénoncent l’ampleur de la rupture révolutionnaire. Il s’agit d’une lettre-manifeste adressée au pape Paul VI pour le supplier de sauver le latin et le grégorien en voie de disparition.

 

La lettre a été rédigée par Cristina Campo, qui a obtenu la signature d’artistes et d’intellectuels ayant une notoriété internationale, comme Evelyn Waugh, Salvador de Madariaga, Gertrud von Le Fort, Pablo Cazals, Lanza del Vasto, etc. ; pour la France : Gilson, Gabriel Marcel, Maritain, Julien Green, François

Mauriac. La chasse au latin et au grégorien avait partout commencé dans l’Eglise dès l’ouverture du

concile et s’était amplifiée à partir de l’adoption de la constitution conciliaire sur la liturgie (4 décembre 1963). Pourtant cette constitution ordonnait en son article 36 : « L’usage de la langue latine doit être conservé dans les rites latins » ; en son article 101 : « selon la tradition séculaire du rite latin dans l’office divin, les clercs doivent garder la langue latine… » ; en son article 116 : « L’Eglise reconnaît dans le chant

grégorien le chant propre de la liturgie romaine. » Mais chaque fois la règle ainsi énoncée était suivie d’un « toutefois » ou d’un « on pourra » qui entr’ouvrait la porte aux exceptions : « On pourra accorder une plus large place à l’emploi de la langue du pays, surtout dans les lectures et les monitions. » Forts de cette « plus

large place » autorisée, la plupart des évêques donnaient toute la place à la langue du pays. Ceux des prêtres et des fidèles qui manifestaient quelque attachement au latin étaient traités d’attardés ne comprenant rien à l’« esprit nouveau », l’« esprit du concile ». Une défaveur générale frappait les doctrines et les

usages « antérieurs au concile », donc obsolètes. Au même moment, et pour le même motif, tous les petits livres de catéchisme existant antérieurement étaient disqualifiés et pratiquement interdits.

 

La disparition du latin entraînait celle du grégorien. D’ailleurs le pape Paul VI tenait pour acquise cette disparition. Dès le 7 mars 1965, il avait déclaré : « C’est un sacrifice que l’Eglise accomplit en renonçant au latin. »

 

Il avait cependant pris acte de la supplique internationale des laïcs organisée par Cristina Campo. Elle lui avait été remise le 5 février 1966. Le 15 août 1966, il envoie la lettre apostolique Sacrificium laudis aux supérieurs généraux des instituts religieux de clercs tenus au chœur. Il y désapprouve les monastères qui

« demandent de pouvoir utiliser la langue du peuple dans l’office choral ou veulent substituer au chant grégorien des chants modernes ». Contre cette « brusque poussée de fièvre », il se prononce pour le maintien du latin et du grégorien dans l’office choral et dans la messe conventuelle ou de communauté. Certes « l’Eglise, pour des raisons pastorales, c’est-à-dire pour le bien du peuple ignorant le latin, a introduit les langues du peuple dans la liturgie sacrée ». Mais cette même Eglise, écrit Paul VI, « vous donne mandat de garder la traditionnelle dignité, la beauté, la gravité de l’office choral dans sa langue comme dans son chant ». Malgré la solennité de ce « vous donne mandat », le « brusque accès de fièvre » contre le latin et le grégorien continua de plus belle dans un grand nombre de monastères.

Et l’idée de réserver le maintien du latin et du grégorien aux seuls instituts religieux tenus au chœur confirmait en quelque sorte leur abandon général dans les paroisses.

 

La lettre apostolique Sacrificium laudis ne changea donc rien au mouvement général. Le P. Congar, futur cardinal, avait voulu que le concile soit « la révolution d’octobre dans l’Eglise », formule qui faisait référence à la révolution léniniste d’octobre 1917 en Russie. De fait le latin, rempart contre une révolution liturgique, étant abandonné par la hiérarchie ecclésiastique, déblayé dans les diocèses et disqualifié dans beaucoup de monastères, cela ne pouvait annoncer qu’une rupture révolutionnaire.

 

Trois ans plus tard elle était consommée.

 

4 janvier 1967

 

La messe réformée selon l’esprit du concile devra donner « une image complètement différente de ce qu’elle était auparavant ».

 

(Conférence de presse du P. Annibal Bugnini, secrétaire du « Consilium pour l’exécution de la réforme liturgique » institué par Paul VI le 26 février 1964.)

 

7 mars 1967

 

Décret du saint-siège sur le passage du latin à la langue locale dans la liturgie.

 

4 mai 1967

 

Décret du saint-siège autorisant le canon de la messe prononcé à haute voix dans la langue du pays et supprimant un grand nombre de signes de croix et de génuflexions du célébrant.

 

25 mai 1967

 

Décret du saint-siège permettant, le samedi, d’anticiper la messe dominicale.

 

26 octobre 1967

 

Annibal Bugnini célèbre à la chapelle Sixtine devant le synode épiscopal une « messe normative » donnant, comme il l’avait annoncé en janvier, « une image complètement différente de ce qu’elle était auparavant ». Plusieurs évêques quittent la chapelle en signe de protestation. Ceux qui restent sur place sont appelés à répondre à la question : La structure générale de la messe normative vous convient elle ?

Sur 180 votes exprimés, il y a 71 oui, 62 juxta modum (c’est-à-dire sous réserve de modifications) et 43 non.

 

Décembre 1967

 

Parution du livre Le chant grégorien, par Henri et André Charlier : « Qu’on ne perde pas courage, mais qu’on s’apprête à une épreuve sévère. »

 

23 mai 1968

 

Décret du saint-siège instituant trois nouveaux canons de la messe.

 

3 avril 1969

 

Le pape Paul VI promulgue une nouvelle messe par la constitution apostolique Missale romanum.

Cette nouvelle messe reprend en les accentuant les caractéristiques de la « messe normative » de 1967, ce qui provoque immédiatement des réticences et des inquiétudes tournant vite à la contestation. En revanche, l’étrangeté de la situation juridique ainsi créée n’apparut qu’ultérieurement. La constitution apostolique paraissait rendre la messe nouvelle non pas seulement permise, mais obligatoire : ce qui avait pour conséquence inévitable d’interdire ou d’abolir LA MESSE CATHOLIQUE TRADITIONNELLE, LATINE ET GRÉ-

GORIENNE SELON LE MISSEL ROMAIN DE SAINT PIE V.

 

Or nulle part la constitution Missale romanum ne déclarait vouloir abolir la bulle Quo primum par laquelle saint Pie V avait codifié et déclaré irrévocable la messe traditionnelle. En conséquence, la situation juridique de la nouvelle messe ne pouvait être que celle d’une dérogation particulière aux prescriptions

générales et non abolies de saint Pie V. Considérer que la constitution Missale romanum rendait obligatoire

la messe nouvelle (et donc interdite la messe traditionnelle), c’était passer outre d’une part aux prescriptions toujours en vigueur de saint Pie V, d’autre part aux titres irrévocables qui sont ceux d’une coutume millénaire. C’est cependant ce que vont faire, avec une brutale rapidité, les évêques (notamment français), et plus tard, en 1976, le pape Paul VI en personne.

 

Avril-juin 1969

 

Intenses réunions de travail à Rome, à l’initiative de Cristina Campo et avec l’assentiment du cardinal Ottaviani, préparant un examen critique de la nouvelle messe.

 

29 mai 1969

 

Institution de la COMMUNION DANS LA MAIN par l’instruction Memoriale Domini de la congrégation

romaine pour le culte divin, « rédigée par mandat spécial du souverain pontife Paul VI » et « approuvée par lui-même ». Elle porte les signatures de Benno card. Gut, préfet, et d’Annibal Bugnini, secrétaire.

Dans une première partie, l’Instruction expose que le renouveau liturgique se développe admirablement, que « le signe du banquet eucharistique » est devenu plus manifeste et plus vivant, et que cette participation plus complète a suscité la pratique de la communion dans la main par des communautés qui en ont demandé l’autorisation mais ne l’ont pas reçue. Désobéissance grave, mais considérée plutôt comme l’anticipation d’une évolution ultérieure et d’une autorisation à venir.

 

Une seconde partie change brusquement de ton : avec une soudaine fermeté et un ample exposé

de motifs précis, l’Instruction se met à établir qu’il est meilleur « que ce soit le ministre lui-même qui dépose sur la langue du communiant une parcelle de pain consacré » et que « rien » ne doit être changé à cette manière de faire.

 

Mais un petit ajout en conclusion prononce que néanmoins, là où s’est déjà établie la communion dans la main (par désobéissance donc), les conférences épiscopales pourront l’autoriser.

 

C’est pourquoi là où les révolutionnaires n’avaient pas encore osé imposer la communion dans la main, ils n’ont qu’à s’empresser de désobéir et quand l’usage de communier dans la main aura été établi, l’autorisation suivra.

 

6 juin 1969

 

Lettre de la même congrégation, également signée Gut et Bugnini, adressée au président de l’épiscopat français et incitant à établir le rite nouveau de la communion qui, à cette date, n’était point en usage dans l’ensemble du territoire français. La lettre ajoute même une modalité nouvelle qui n’était pas prévue dans

la constitution apostolique Memoriale Domini : « On pourra aussi adopter une manière plus simple en laissant le fidèle prendre directement l’hostie dans le vase sacré. »

 

12 septembre 1969

 

Lettre à Paul VI (non publiée à l’époque) de Mgr de Castro Mayer, évêque de Campos : « Le Novus Ordo Missae non seulement n’inspire pas la ferveur, mais encore exténue la foi dans les vérités centrales de la vie

catholique, telles la présence réelle de Jésus dans le Très Saint Sacrement, la réalité du sacrifice propitiatoire, le sacerdoce hiérarchique. »

JEAN MADIRAN

 

La suite de cette « Histoire d’une messe interdite » paraîtra dans Présent du samedi 27 mai.

5, rue d’Amboise - 75002 Paris

Phone : 01.42.97.51.30

Fax : 01.42.61.97.79

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L’avis de tempête

1967

Des Nouvelles de France.

On parle de la béatification de Marthe Robin, fondatrice en France  des Foyers de Charité.

Entretien avec le postulateur de la cause de béatification de Marthe Robin

A l’occasion de la parution de « Vie de Marthe Robin »

ROME, Mardi 23 mai 2006 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous un entretien avec le père Bernard Peyrous, prêtre de la Communauté de l’Emmanuel et postulateur de la cause de béatification de Marthe Robin, qui vient de publier un ouvrage de référence sur la mystique française intitulé « Vie de Marthe Robin », aux Editions de l’Emmanuel et aux Editions des Foyers de Charité.

Zenit : Qui était Marthe Robin ?

P. B. Peyrous : Marthe Robin est une paysanne d'un petit village à 80 kilomètres au sud de Lyon, Châteauneuf-de-Galaure. Elle a vécu de 1902 à 1981. Elle est tombée malade très jeune et a passé sa vie dans son lit, comme une grabataire, souffrant terriblement. L’influence qu’elle a eue est impressionnante. En effet, elle a reçu dans sa chambre plus de 100.000 personnes, dont 60 évêques et cardinaux, des centaines de prêtres, de consacrés, des célébrités du monde intellectuel, de nombreux fondateurs d'ordres et communautés nouvelles. On retrouve sa trace dans une grande partie de ce qui se vit actuellement en France et qui manifeste les différents aspects vivants du catholicisme français. Elle a fondé une oeuvre, les Foyers de Charité présents dans le monde entier, où l'on prêche des retraites pour la formation des laïcs.

Zenit : Pourquoi avez-vous eu le désir d’écrire un livre sur Marthe Robin, en tant que postulateur de la cause ?

P. B. Peyrous : Du vivant de Marthe, comme elle était une personne extrêmement discrète pour tout ce qui la concernait, on a peu publié sur elle. Mais après sa mort, plus de vingt ouvrages ont été publiés à son sujet, certains traduits en de nombreuses langues, et environ un millier d'articles, sans parler des émissions de radio et de télévision. Pourtant, nous nous sommes aperçus, au fur et à mesure de l’instruction de son procès de béatification, que Marthe est une personne peu connue, dont l’image est par conséquent déformée, et dont on ramène la vie à des aspects de mystique spectaculaire. Nous avons recueilli plusieurs centaines de témoignages la concernant. Ceux-ci nous ont permis de resituer les diverses étapes de son itinéraire personnel, et de mieux comprendre les grandes options qui ont été les siennes. Le but de cet ouvrage a été de parler de manière plus précise de Marthe, de publier un livre de référence, scientifiquement établi.

Zenit : Marthe Robin vivait la passion du Christ tous les vendredis. Comment vivait-elle cette souffrance ?

P. B. Peyrous : Marthe Robin, nous l'avons dit, était gravement malade. Il ne faut pas croire qu'elle ait accepté la maladie avec joie. Elle a lutté, et tenté de vivre le mieux possible avec des moyens très pauvres. Elle a connu des années de combat. Elle disait elle-même qu'elle ne souhaitait à personne de vivre ce qu’elle avait vécu. La grande grâce qu'elle a reçue en 1928 a été de comprendre que cet état de maladie, de souffrance, de perte apparente de tout avenir, pouvait servir à quelque chose. Sa vie semblait perdue, inutile. Elle a compris qu'au contraire cette vie pouvait être féconde si elle était unie au Christ, au don d'amour du Christ pour les hommes, à sa Passion rédemptrice. Elle a transformé ses douleurs en don d'amour, elle a accepté de continuer à vivre pour aider ses frères, pour contribuer au salut de la France, son pays, du monde, pour l'avancée de l'Eglise tout entière. Peu après, elle a commencé à vivre la Passion du Christ. Sa souffrance a été dès lors comme inclue à l'intérieur du mystère du don d'amour de Jésus. Et sa vie est très vite devenue féconde.

Zenit : Quel est selon vous le message de Marthe Robin pour le monde aujourd'hui ?

P. B. Peyrous : Marthe nous montre que rien n'est jamais perdu, que Dieu peut faire des merveilles avec la personne la plus pauvre, la plus délaissée. Marthe était malade, grabataire, ignorante, perdue dans une ferme isolée, incomprise. Et voilà qu'elle est devenue l’une des personnalités les plus rayonnantes et les plus influentes de la seconde partie du vingtième siècle en France. C'est un espoir pour les pauvres, les malades, les humbles. Ce n'est pas la puissance qui change le monde. C'est Dieu qui est le maître des temps et de l'histoire, et ce sont les pauvres qui ont accès au Coeur de Dieu.
Le message de Marthe s'étend aussi au renouveau de l'Eglise. L’Eglise catholique est attaquée, les sociétés montent des projets sociaux dont elle est exclue, on veut créer un monde sans Dieu. Marthe a donné sa vie pour la nouvelle évangélisation, pour le renouveau de l'Eglise, pour une nouvelle Pentecôte d'amour dans la ligne du Concile. Elle y a cru de tout son coeur et elle a formé des milliers d'âmes en vue de ce renouveau. C'est une leçon d'espérance et de courage pour nous tous.

Zenit : Où en est le procès de béatification de Marthe Robin ?

P. B. Peyrous : Le procès a commencé 5 ans après la mort de Marthe. La phase diocésaine nous a permis de recueillir une abondante documentation, et nous a obligés à faire un certain nombre d'expertises. Le texte du procès qui a été transmis à Rome ne fait pas moins de 17.000 pages ! Nous sommes maintenant en train de rédiger la Positio, c'est-à-dire le résumé de ce procès, Position qui, une fois terminée, sera examinée en son temps par une commission de théologiens et de cardinaux. Si Marthe, à la suite de ces examens, est déclarée vénérable, nous présenterons un dossier de miracle en vue de sa béatification. Notons au passage que l'on peut prier Marthe comme une amie, et que nous constatons constamment qu'elle semble à l'origine de nombreuses grâces, et même de guérisons physiques.