Les Nouvelles
de
Chrétienté
n°57
Le 27 juin 2006
Sommaire.
A-Les nouvelles de Rome : les nominations.
B- Le secrétaire d’Etat,
premier collaborateur du pape dans le gouvernement de l’Eglise.
C-
D-Les Nouvelles de France.
« Histoire de la messe interdite »
A-Les nouvelles de Rome : les
nominations.
Un an après son élection par le Conclave, Benoît XVI
fait ses premières nominations
Présent du samedi 24 juin 2006 nous donne cette
excellente interview de M l’abbé Barthe
sur la nomination du cardinal Bertone au poste, si important aujourd’hui, de
Secrétaire d’Etat.
Le
secrétaire d’Etat est le collaborateur le plus proche du Pape.
Un nouveau Secrétaire d’Etat du Vatican
Le cardinal Tarcisio Bertone
L’abbé Claude Barthe répond aux questions de “Présent”
Benoît XVI a nommé jeudi le cardinal Tarcisio Bertone,
actuel archevêque de Gênes, et l’un de ses plus proches collaborateurs à la
tête de
Le Pape a également nommé son actuel ministre des
Affaires étrangères, Mgr Giovanni Lajolo, au gouvernement de
— Qui est le cardinal Bertone ?
— Le cardinal Tarcisio Bertone est un Italien du Nord, du diocèse d’Ivrea, près de Turin, cinquième enfant d’une famille qui en compte huit. C’est un homme de 71 ans, sérieux mais plein d’humour, d’une forte stature physique et de grande
capacité intellectuelle. Religieux salésien (Don Bosco), ordonné en 1960, il a étudié à Turin, avant d’enseigner à l’Université salésienne de Rome (dont il est devenu « Recteur magnifique »), tant la morale que le droit de l’Eglise.
C’est donc tout à la fois un canoniste et un moraliste, spécialiste de droit public ecclésiastique, qui connaît bien le domaine de la liberté religieuse. Sa dissertation de licence avait d’ailleurs pour thème : Tolérance et liberté religieuse.
— C’est un proche du cardinal Ratzinger ?
— C’est un des plus proches, sinon le plus proche parmi les hauts personnages ecclésiastiques. Quand a-t-il été remarqué par le Cardinal, qui avait les yeux toujours fixés sur le personnel professoral romain ?
Je ne saurais dire. Il s’occupait déjà de la rédaction du Nouveau directoire œcuménique de 1993. Et même avant, en 1988, il faisait partie du groupe qui assistait le cardinal Ratzinger dans la tentative de réconciliation avec Mgr Lefebvre.
Il
est devenu secrétaire de
aujourd’hui
choisi pour remplacer le cardinal Sodano à ce poste de « Premier ministre ». Au
début du pontificat, la rumeur le voyait à
Benoît XVI, il n’a cessé de faire des allées et venues entre Gênes et Rome. Il est consulté constamment.
— Plutôt connu à
— Oui ! et c’est très intéressant, car cela confirme que Benoît XVI veut redonner à la doctrine la première place dans le gouvernement de l’Eglise. Il faut se rappeler que, jusqu’à Paul VI, le Saint-Office (devenu ensuite Congrégation de la
doctrine
de la foi) était dit
de Vatican II a été de réduire cette puissance. Le Secrétaire d’Etat a certes, toujours eu une très grande importance, celle d’un Premier ministre qui coordonne les autres et qui s’occupe de toutes les affaires de poids. Mais depuis Paul VI, celui-
ci
avait acquis encore plus d’importance. On dit que Benoît XVI veut rendre à
donne un signe d’un rééquilibrage en ce sens.
— En effet,
—
Jusqu’à présent, non. Le cardinal Sodano, dans les temps qui ont précédé le
dernier conclave n’était certes pas un « ratzinguérien ». Mais les choses
changent très vite. Aujourd’hui, les membres de
— Le cardinal Bertone a été en relations
suivies avec sœur Lucie, à Fatima. Mais nos milieux le connaissent peu.
— Le monde traditionnel d’une manière générale ne le connaît pas ; c’est dommage, car c’est un personnage intéressant. Il faut ainsi savoir qu’il a célébré récemment, et pontificalement, la messe de saint Pie V. Sur les questions liturgiques, je
pense qu’il est en parfaite syntonie avec Benoît XVI.
— Et en ce qui concerne les relations avec
les religions non chrétiennes et l’œcuménisme ?
— Il
est extrêmement sensible comme Benoît XVI, et comme le cardinal Ruini, autre «
ratzinguérien » de poids, au danger de l’islamisme, et à celui du terrorisme.
Quant à l’œcuménisme proprement dit, il s’est notamment beaucoup intéressé,
quand il était à
— Que peut-on donc espérer de cette
nomination ?
—
Tout simplement que l’ensemble de
s’amplifier
peut-être. D’autres nominations vont suivre. La rumeur actuelle veut que Mgr
Baldelli, l’actuel nonce à Paris soit nommé à la place de Mgr Lajolo (aux
relations avec les Etats), ou à celle de Mgr Sandri comme substitut à
Vatican,
serait nommé pour remplacer le cardinal Castrillon Hoyos à la tête de
Pour en revenir au cardinal Bertone, c’est un personnage qui, compte tenu de ses capacités et de la confiance que lui porte Benoît XVI, va jouer un rôle important dans le pontificat, et compter pour l’Eglise dans les années à venir.
Propos recueillis
par Olivier Figueras
_
Auteur d’un certain nombre d’ouvrages de
réflexion sur la crise actuelle de l’Eglise, l’abbé Claude Barthe vient de
publier, aux Editions François-Xavier de Guibert (www.fxdeguibert.com), une
nouvelle édition de son Trouvera-t-il
encore la foi sur la terre ?, dans laquelle il prolonge son étude jusqu’aux
nouveaux développements mis en place par Benoît XVI dans la perspective d’une réforme
de la réforme.
B- Le
secrétaire d’Etat, premier collaborateur du pape dans le gouvernement de
l’Eglise
Organisation de
Le secrétaire d’Etat, qui à partir
du 15 septembre prochain sera le cardinal Tarcisio Bertone, S.D.B., est « le
Premier collaborateur du pape dans le gouvernement de l'Eglise universelle ».
Nous reprenons l’explication que la page web du Vatican propose de l’histoire
et de l’organisation de
« Le Cardinal Secrétaire d'Etat peut être considéré comme l'acteur principal de
l'activité diplomatique et politique du Saint-Siège, représentant, en des
circonstances particulières, la personne même du Souverain Pontife.
« L'origine de
« Léon X créa un autre poste, celui de Secrétaire privé (Secretarius intimus),
pour aider le Cardinal qui prit la direction des affaires d'Etat et pour la
correspondance en langue vernaculaire, principalement avec les Nonces
apostoliques, qui commençaient alors à être mis en place avec des attributions
diplomatiques stables.
« Le Secrétaire privé, que l'on appelait encore Secrétaire du Pape (Secretarius
Papæ) ou Premier Secrétaire (Secretarius maior), fut pendant longtemps presque
toujours un prélat, souvent revêtu de la dignité épiscopale. Ce n'est qu'au
début du pontificat d'Innocent X que fut appelée à cette haute charge une
personnalité déjà revêtue de la pourpre et sans rapport de parenté avec lui.
Innocent XII abolit définitivement la charge de Cardinal-neveu et le Cardinal
Secrétaire d'Etat en assuma seul les pouvoirs.
« Le 19 juillet 1814, Pie VII fonda
Par
« Le 28 juin 1988, Jean-Paul II promulgua
«
« Conformément aux articles 41-44 de
«
« Conformément aux articles 45-47 de
« La seconde Section de
C-
Mgr
Malcom Ranjith, secrétaire de
Olivier Figuéras, dans Présent de samedi 24
juin donne ce rapide commentaire sur la déclaration de Mgr Malcom Ranjith,
secrétaire de
« Mgr Malcom Ranjith, nommé en
décembre par Benoît XVI secrétaire de
Il précise que, après le concile Vatican
II, « certains changements peu réfléchis ont été faits, dans la rapidité et
l’enthousiasme », qui ont conduit à « une situation opposée à celle que l’on
souhaitait ». Bref ! Mgr Ranjith dénonce la trahison d’un esprit, dans la
droite ligne de cette réforme de la réforme petit à petit mise en place par le
Pape. – O.F.
C’est et mieux que la récention qu’en fait
« le Salon Beige ».
De cette déclaration importante, j’en fais
moi-même un commentaire que vous trouverez sur « Regard sur le
monde » cette semaine.
D-Les Nouvelles de France.
« Histoire de la messe interdite »
On lit dans Présent, sous la plume de Jean Madiran
cette « Histoire de la messe interdite » (IV)
Les
trois premières parties de cette histoire ont paru dans Présent des 24,
27 et 31 mai.
3
octobre 1984 (suite)
L’intégralité du texte latin de la lettre Quattuor abhinc annos est publiée en France par la revue Itinéraires.
La voici en traduction : « Il y a quatre ans, à la demande du pape Jean-Paul II, les évêques de toute l’Eglise furent invités à faire une enquête : « – sur la manière dont, dans leur diocèse, prêtres et fidèles avaient reçu le missel promulgué
par
le pape Paul VI en vertu des décisions du concile Vatican II ;
« –
sur les difficultés rencontrées ;
«
– sur les résistances qu’il avait éventuellement fallu surmonter.
«
Le résultat de cette enquête fut communiqué à tous les évêques. D’après leurs
réponses, on semblait avoir presque complètement résolu le problème des prêtres
et des fidèles qui demeuraient attachés au rite “tridentin”.
«
Mais puisque ce problème subsiste, le souverain pontife en personne, désirant
se montrer favorable à ces groupes, accorde aux évêques des diocèses la faculté
de consentir par un indult que les prêtres et les fidèles qui en feront nommément
la demande à leur évêque puissent célébrer la messe en utilisant le missel
romain dans son édition officielle de 1962, mais en respectant les règles
suivantes :
« a) Qu’il
soit établi sans ambiguïté et même publiquement que ce prêtre et ces fidèles se
tiennent à l’écart de ceux qui mettent en doute la légitimité et l’orthodoxie
du missel romain…» [Se tiennent à l’écart de ceux… « Nullam
partem habere cum iis…»
Le secrétariat de l’épiscopat traduit : « n’ont aucune connivence avec ceux… », mais connivence en français signifie entente secrète, ou au moins accord tacite : voilà une traduction qui pourrait ouvrir la voie à des inquisitions poussées fort
loin, s’il faut enquêter sur les sentiments secrets des personnes… L’Osservatore romano a traduit : « n’ont rien à voir ». Le camarade Joseph Vandrisse, dans le Figaro, a compris qu’il fallait n’avoir « rien de commun ». Quelle que soit la traduction, ceux qui ont des doutes sur la messe de Paul VI continueront donc à être traités comme des parias.
« … La
légitimité et l’orthodoxie du missel romain promulgué en 1970 par le pape Paul
VI. »
La référence « en 1970 » est curieusement imprécise.
La messe de Paul VI a été en principe promulguée par sa constitution apostolique Missale romanum qui est non pas de 1970, mais de 1969 (le 3 avril).
Et c’est le 12 novembre 1969 que l’épiscopat français a prétendu la rendre obligatoire : il ne pouvait rendre immédiatement obligatoire une messe qui ne serait promulguée qu’en 1970. Il est vrai que dans son discours consistorial de 1976 (plus haut à la date du 24 mai), Paul VI ne faisait référence à aucun autre document romain sur la messe que « l’instruction du 14 juin 1971 », qui pourtant n’était pas une « promulgation ».
Il est vrai aussi que, d’avril 1969 à juin 1971, le nouvel Ordo missae a connu au moins trois éditions vaticanes successives, avec des versions différentes, et deux définitions successives de la messe ellemême, par les deux versions du triste article 7 de cette Institutio generalis qui énonçait les intentions et la doctrine de la messe nouvelle. Dans les anomalies, ambiguïtés, hésitations et erreurs, de forme et de fond, qui ont marqué la promulgation de la nouvelle messe, on peut voir un autre « cas majeur et particulièrement manifeste » de ce que le P. Joseph de Sainte-Marie Salleron nommait « la division intérieure du
Magistère
» (
dans la réforme liturgique ».)]
« b) Que
cette célébration se fasse seulement pour les groupes qui la demandent ;
qu’elle ait lieu dans les églises et oratoires désignés par l’évêque du diocèse
(mais non point dans les églises paroissiales, à moins que l’évêque ne le
permette pour des occasions exceptionnelles) ; et seulement les jours et dans
les conditions que l’évêque lui-même aura approuvés soit en laissant se
développer une coutume soit par décrets. »
[Que cette célébration se fasse seulement pour des groupes qui…! C’est-à-dire qu’il s’agit d’une célébration
fermée, comme une célébration maçonnique. La célébration de la messe catholique était jusqu’alors ouverte à
tous, même aux incroyants, à la seule condition de s’y tenir convenablement. Il ne doit plus en être ainsi ; la messe traditionnelle doit être strictement réservée aux personnes qui en ont fait nommément la demande à leur évêque (qui in
petitione
proprio episcopo exhibenda EXPLICITE INDICABUNTUR).]
« c) Que
cette célébration soit faite selon le missel romain de 1962 et en latin.
« d) Qu’il
n’y ait aucun mélange des deux missels quant au texte ou au rite.
« e) Que
chaque évêque fasse connaître à la congrégation du culte les autorisations
qu’il aura données et, un an après cet indult, les résultats qu’il aura ainsi
obtenus. « Une telle concession est le signe de la sollicitude du Père commun
pour
tous ses enfants. « Elle devra être utilisée sans causer aucun préjudice au
renouvellement liturgique qui doit être
respecté
par chaque communauté ecclésiale. »
Et voilà.
Dans cette lettre de la congrégation romaine pour le culte divin, la contradiction la plus violente est entre le dispositif et les sentiments. Les sentiments exprimés par deux fois sont ceux de Jean- Paul II : sa sollicitude pour ses fils, son désir de se montrer favorable.
Le dispositif est quasiment d’excommunication des traditionalistes : nullam partem.
Finalement, le schéma est soigneusement bouclé. D’un côté, les seuls admis à demander l’autorisation sont ceux qui n’ont aucun motif de le faire : ceux qui n’ont aucun « doute » (dubium) sur la messe de Paul VI. De l’autre côté, ceux qui reçoivent la faculté de donner l’autorisation sont ceux qui, pour la plupart, n’ont aucune intention de la donner : les évêques de la nouvelle messe et du nouveau catéchisme. Néanmoins, on a noté un progrès considérable : officiellement, on a donc renoncé à prétendre que la messe traditionnelle a été abolie et qu’elle n’existe plus. Elle existe, elle ne peut pas ne pas exister, seulement on l’a mise en cage, elle est prisonnière.
Dans une enquête menée en 1985, le quotidien Présent demandait aux évêques qui déclaraient n’avoir reçu aucune demande de prêtres ou de fidèles de leur diocèse :– Mais vous-même, Monseigneur,avez-vous demandé pour vous cette
autorisation
?
Ils n’y avaient pas pensé, ils ne l’avaient pas demandée, cette messe qui était celle de leur ordination, ils ne l’avaient donc pas aimée, ou bien ils ne l’aimaient donc plus. En tout cas, désormais, les responsabilités sont claires : à partir du 3 octobre 1984, partout où elle n’est pas célébrée du tout, c’est parce que l’évêque du diocèse l’a obstinément voulu ainsi.
Quatre ans après (quattuor abhinc annos) l’enquête du saint-siège auprès des évêques, et malgré leur réponse entièrement négative, Jean-Paul II reste donc suffisamment préoccupé par la messe traditionnelle pour marquer, dans un acte officiel, qu’elle n’est pas interdite.
La question a été posée par le Pape à
une commission de neuf cardinaux
:
–
La célébration ordinaire de la messe tridentine a-t-elle été juridiquement interdite
par le pape Paul VI ou tout autre autorité compétente ?
Huit cardinaux sur les neuf ont répondu non. Cette réponse, et l’existence même de cette commission cardinalice, sont restées inconnues pendant une dizaine d’années. A partir de 1995 seulement, divers témoignages publics font connaître premièrement cette réponse sur l’interdiction, et secondement les recommandations et suggestions élaborées par la même commission.
L’abbé Aulagnier, dans son livre La bataille de la messe, a recensé (pages 66-71) l’ensemble des sources accessibles à ce sujet. Toutes donnent « 1986 », voire « l’été 86 », comme date de la commission cardinalice et de sa réponse.
Cependant un fait et deux indices contredisent ou nuancent cette datation.
Le
fait, dans le quotidien Présent du 21 février 1985. Au cours de l’enquête
déjà citée sur la messe, Rémi Fontaine pose à Mgr Marcel Lefebvre
la question :
–
Avez-vous eu connaissance de cette commission de huit (sic) cardinaux qui
aurait été instituée par le Saint-Père avant la circulaire [Quattuor abhinc
annos] du 3 octobre pour établir qu’en définitive la messe tridentine
n’avait jamais
été
juridiquement interdite ?
Mgr Lefebvre répond simplement
:
–
J’en ai entendu parler.
Une rumeur, donc. Mais singulière : en février 1985 ! Elle aurait anticipé la création d’une commission, son ordre du jour et sa réponse qui ne viendront que plus d’un an plus tard…
Premier indice concordant : on imagine mieux Jean-Paul II s’assurant que la messe tridentine n’est pas interdite avant plutôt qu’après la lettre circulaire Quattuor abhinc annos.
D’où notre hypothèse : les sources accessibles ont pu opérer ou suggérer une confusion entre deux commissions cardinalices, ou deux sessions de la même commission. Quand la commission élabore des recommandations et suggestions en raison du peu d’effet de Quattuor abhinc annos, c’est évidemment après.
Mais quand elle répond à la question de savoir si la messe tridentine est ou non frappée d’une interdiction juridiquement valable, c’est logiquement avant.
Second indice : le cardinal Stickler, dans une conférence du 20 mai 1995, parle d’une commission de neuf cardinaux, dont huit répondent que la messe tridentine n’est pas interdite. Eric de Saventhem, dans sa lettre du 27 mai 1994 à Mgr Giovanni Battista Re, parle de huit, mais c’est alors « une commission de huit cardinaux de curie constituée pour contrôler si l’indult de 1984 était susceptible de fonctionner ». Cela inciterait à supposer qu’il s’agit de la même commission, privée en sa seconde session du cardinal qui avait été discordant en la première.
Dans ses recommandations, la commission cardinalice souhaitait d’abord que l’honneur qui lui est dû soit accordé à la langue latine, et qu’à cet effet les évêques aient à s’assurer que tous les dimanches au moins une messe en latin soit célébrée dans chaque localité importante ; et ensuite, que pour toute messe en latin, le célébrant puisse choisir librement entre la messe de Paul VI et la messe traditionnelle.
Depuis 1986, ces recommandations sont en quelque sorte sur la table du souverain pontife.
6
juin 1985
Parution en Allemagne du rapport d’Eric de Saventhem sur l’application par les évêques de l’ « indult » du 3 octobre 1984 (traduction française en septembre suivant dans Una Voce helvetica, reproduction intégrale dans Itinéraires de novembre).
C’est une effarante radiographie du corps épiscopal à cette époque : une détestation militante et féroce à l’égard de la messe traditionnelle. Le rapport Saventhem a été établi à la suite des rapports détaillés présentés à l’assemblée générale
bisannuelle
de
Selon ce rapport, la résistance à l’application de l’« indult » est générale parmi les évêques. C’est une résistance tantôt retardatrice, tantôt obstructionniste et tantôt aggravante.
LARÉSISTANCE OBSTRUCTIONNISTE : « Dans de nombreux cas, les évêques locaux firent aussitôt savoir qu’ils ne voyaient aucune nécessité pastorale de célébrer la messe tridentine dans notre diocèse. Ou bien : L’autorisation romaine est si rigoureusement limitée qu’elle ne peut que difficilement être appliquée dans notre diocèse. Ou encore plus lapidairement :
J’ai décidé de ne pas accorder d’autorisation et je préfère ne pas alourdir cette lettre en donnant mes raisons. Si le refus est motivé, il l’est souvent, spécialement en France, pour non-réalisation des conditions imposées, mais sans indication
de
quelles conditions il s’agit. La plupart de ces décisions négatives non
motivées semblent résulter d’une profonde aversion de l’évêque actuel (ou de
son proche entourage) pour l’ancienne messe comme telle. »
de présenter une requête [qui soit reconnue comme] valable. « On se base presque partout sur l’obligation d’une indication explicite pour exiger le dépôt de listes contenant tous les noms de ceux qui veulent assister aux messes sollicitées. Celui qui ne figure pas sur la liste risque d’être refoulé à la porte de l’église. A Columbus, USA, on exige en outre, avec un cynisme à peine voilé, que chaque requérant présente une confirmation écrite du curé local qu’il a
soutenu et encouragé activement la réforme liturgique dans sa paroisse. Dans plusieurs diocèses, principalement
en
Amérique du Nord, les intéressés ont été invités par publication officielle
dans le bulletin diocésain à s’adresser individuellement à l’évêque : ils
recevaient alors une légitimation les autorisant personnellement – mais pas
leurs amis ou les membres de leur famille – à assister à une unique ou première
messe tridentine qui serait célébrée prochainement.
«
Il est incompatible avec la nature de la sainte messe de ne pas permettre à
tous les fidèles d’y assister sans autre formalité. Aucun autre rite catholique
n’a été soumis à de telles restrictions ! Chaque système d’autorisation
comporte en
outre
en soi le risque d’abus inquisiteur et de manipulation arbitraire. « Au nombre
des résistances obstructionnistes et aggravantes, il faut
mentionner la pratique adoptée presque partout de n’autoriser des messes
tridentines qu’occasionnellement et de limiter aux jours ouvrables les
autorisations éventuelles de célébrer ces messes.
Cette
pratique ne tient pas compte du fait que l’Indult concerne la sainte messe et
non pas un quelconque exercice de piété préconciliaire. L’assistance à une
messe célébrée selon un rite catholique reste obligatoire les dimanches et jours
de fête, selon les commandements de l’Eglise. [Mais souvent] les
directives diocésaines prévoient que cette autorisation n’est
accordée
que pour des messes en semaine (…). Il est insoutenable de prendre
méthodiquement soin que les célébrations de l’ancienne messe ne
permettent pas de satisfaire à l’accomplissement du devoir dominical.
»
JEAN MADIRAN
Nous en
sommes ainsi arrivés à la première moitié de cette « histoire d’une messe
interdite » (1966-2006). La suite, qui n’est pas encore rédigée, sera ultérieurement
publiée dans Présent. Le tout constituera en quelque sorte le canevas
chronologique d’un livre plus complet et plus détaillé qui ne sera probablement
pas publié avant un an ou deux.– J.M.