Les Nouvelles
de
Chrétienté
n° 70
Le voyage du pape en Turquie
Ses discours.
A- Le 6 décembre, lors de
l’audience générale à Rome, le pape a dressé
le bilan de son voyage en Turquie
Nous en
publions ci-dessous le texte intégral.
Chers frères et sœurs!
Comme c'est désormais l'habitude après chaque voyage apostolique, je voudrais,
au cours de cette Audience générale, reparcourir les diverses étapes du
pèlerinage que j'ai accompli en Turquie, du mardi au vendredi de la semaine
dernière. Une visite qui, comme vous le savez, s'annonçait difficile, sous
divers aspects, mais que Dieu a accompagnée dès le début et qui a ainsi pu se
dérouler de façon heureuse. C'est pourquoi, comme je vous avais demandé de la
préparer et de l'accompagner par la prière, je vous demande à présent de vous
unir à moi pour rendre grâce au Seigneur pour son déroulement et sa conclusion.
C'est à Lui que je confie les fruits qui, je l'espère, pourront naître de cette
visite, aussi bien en ce qui concerne les relations avec nos frères orthodoxes,
que pour le dialogue avec les musulmans. Je ressens tout d'abord le devoir de
renouveler l'expression cordiale de ma reconnaissance au Président de
Me référant à la vision que le Concile Vatican II présente de l'Eglise (cf.
Const. Lumen gentium, nn. 14-16), je pourrais dire que les voyages
pastoraux du pape contribuent aussi à réaliser sa mission, qui se déroule en «
cercles concentriques ». Dans le cercle situé le plus à l’intérieur, le
Successeur de Pierre confirme les catholiques dans la foi ; dans le cercle
intermédiaire, il rencontre les autres chrétiens ; dans le cercle le plus à
l’extérieur il s'adresse aux non chrétiens et à toute l'humanité. La première
journée de ma visite en Turquie s'est déroulée dans le cadre de ce troisième «
cercle », le plus large : j'ai rencontré le Premier ministre, le Président de
La deuxième journée m'a conduit à Ephèse, et je me suis donc retrouvé
rapidement dans le « cercle » situé le plus à l’intérieur du voyage, en contact
direct avec
Le « cercle » intermédiaire, celui des relations œcuméniques, a occupé la
partie centrale de ce voyage, qui s'est déroulé à l'occasion de la fête de
saint André, le 30 novembre. Cette fête m'a offert le contexte idéal pour
consolider les relations fraternelles entre l'Evêque de Rome, Successeur de
Pierre, et le Patriarche œcuménique de Constantinople, Eglise fondée selon la
tradition par l'apôtre saint André, frère de Simon-Pierre. Sur les traces de
Paul VI, qui rencontra le Patriarche Athénagoras, et de Jean-Paul II, qui fut
accueilli par le Successeur d'Athénagoras, Dimitrios Ier, j'ai renouvelé avec
Sa Sainteté Bartholomaios Ier ce geste d'une grande valeur symbolique, pour
confirmer l'engagement réciproque de poursuivre la route vers le rétablissement
de la pleine communion entre catholiques et orthodoxes. Pour confirmer cette
ferme intention, j'ai signé avec le Patriarche œcuménique une Déclaration
commune, qui constitue une étape supplémentaire sur ce chemin. Il a été
particulièrement significatif que cet acte ait eu lieu au terme de
Chers frères et sœurs, je suis revenu ici, au Vatican, l'âme emplie de
gratitude envers Dieu et avec des sentiments d'affection sincère et d'estime
pour les habitants de la bien-aimée nation turque, par lesquels je me suis
senti accueilli et compris. La sympathie et la cordialité avec lesquelles ils
m'ont entouré, malgré les difficultés inévitables que ma visite a créées au
déroulement normal de leurs activités quotidiennes, restent en moi comme un
souvenir vivant qui m'incite à la prière. Que Dieu tout-puissant et
miséricordieux aide le peuple turc, ses dirigeants et les représentants des
diverses religions, à construire ensemble un avenir de paix, de manière à ce
que
B-- Discours de Benoît XVI au
Corps diplomatique (28 novembre)
Nous
reprenons ci-dessous le texte – publié par la salle de presse du Saint-Siège
(cf. www.vatican.va) – du discours que le
pape Benoît XVI a adressé au Corps diplomatique à la nonciature apostolique de
Ankara, le mardi, 28 novembre, en fin d’après-midi.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
J’ai préparé mon discours en français, car c’est la langue de la diplomatie,
espérant qu’il pourra être compris.
Je vous salue avec une grande joie, vous qui, en tant qu’Ambassadeurs, exercez
la noble charge de représenter vos pays auprès de
Je tiens d’abord à évoquer devant vous le souvenir des visites mémorables de
mes deux prédécesseurs en Turquie, le Pape Paul VI, en 1967, et le Pape
Jean-Paul II, en 1979. Comment ne pas faire mémoire également du Pape Benoît
XV, artisan infatigable de la paix au cours du premier conflit mondial, et du
Bienheureux Jean XXIII, le Pape «ami des Turcs», qui fut Délégué apostolique en
Turquie et Administrateur apostolique du Vicariat latin d’Istanbul, laissant à
tous le souvenir d’un pasteur attentif et plein de charité, spécialement
désireux de rencontrer et de connaître la population turque dont il était
l’hôte reconnaissant ! Je suis heureux d’être aujourd’hui l’hôte de
Il y a plus de quarante ans, le Concile Vatican II écrivait que «la paix n’est
pas une pure absence de guerre et qu’elle ne se borne pas seulement à assurer
l’équilibre de forces adverses», mais qu’elle «est le fruit d’un ordre inscrit
dans la société humaine par son divin Fondateur, et qui doit être réalisé par
des hommes qui ne cessent d’accéder à une justice plus parfaite» (Gaudium et
spes, n. 78). Nous avons en effet appris que la véritable paix a besoin de
la justice, pour corriger les déséquilibres économiques et les désordres
politiques qui sont toujours des facteurs de tensions et de menaces dans toute
société. Le développement récent du terrorisme et l’évolution de certains
conflits régionaux ont par ailleurs mis en évidence la nécessité de respecter
les décisions des Institutions internationales et aussi de les soutenir, en
leur donnant notamment des moyens efficaces pour prévenir les conflits et pour
maintenir, grâce à des forces d’interposition, des zones de neutralité entre
les belligérants. Tout cela reste pourtant inefficace si ce n’est pas le fruit
d’un vrai dialogue, c’est-à-dire d’une sincère rencontre entre les exigences
des parties concernées, afin de parvenir à des solutions politiques acceptables
et durables, respectueuses des personnes et des peuples. Je pense tout
particulièrement au conflit du Moyen-Orient, qui perdure de manière inquiétante
en pesant sur toute la vie internationale, au risque de voir se généraliser des
conflits périphériques et se diffuser les actions terroristes; je salue les
efforts des nombreux pays, dont
Comme je l’ai rappelé récemment, «nous avons impérativement besoin d’un
dialogue authentique entre les religions et entre les cultures, capable de nous
aider à surmonter ensemble toutes les tensions, dans un esprit de collaboration
fructueuse» (Discours lors de la rencontre avec les ambassadeurs des pays
musulmans, Castel Gandolfo, 25 septembre 2006). Ce dialogue doit permettre
aux diverses religions de mieux se connaître et de se respecter mutuellement,
afin d’œuvrer toujours plus au service des aspirations les plus nobles de
l’homme, en quête de Dieu et du bonheur. Je souhaite, pour ma part, redire à
l’occasion de ce voyage en Turquie toute mon estime pour les croyants musulmans,
les invitant à s’engager ensemble, grâce au respect mutuel, en faveur de la
dignité de tout être humain et pour la croissance d’une société où liberté
personnelle et attention à autrui permettent à chacun de vivre dans la paix et
la sérénité. C’est ainsi que les religions pourront participer à relever les
nombreux défis auxquels les sociétés sont actuellement confrontées. Assurément,
la reconnaissance du rôle positif que rendent les religions au sein du corps
social peut et doit inciter nos sociétés à approfondir toujours davantage leur
connaissance de l’homme et à respecter toujours mieux sa dignité, en le plaçant
au centre de l’action politique, économique, culturelle et sociale. Notre monde
doit réaliser de plus en plus que tous les hommes sont profondément solidaires
et les inviter à mettre en valeur leurs différences historiques et culturelles
non pour s’affronter mais pour se respecter mutuellement.
L’Église, vous le savez, a reçu de son Fondateur une mission spirituelle et
elle n’entend donc pas intervenir directement dans la vie politique ou
économique. Cependant, au titre de sa mission et forte de sa longue expérience
de l’histoire des sociétés et des cultures, elle souhaite faire entendre sa
voix dans le concert des nations, afin que soit toujours honorée la dignité
fondamentale de l’homme, et spécialement des plus faibles. Devant le
développement récent du phénomène de la mondialisation des échanges, le
Saint-Siège attend de la communauté internationale qu’elle s’organise
davantage, afin de se donner des règles permettant de mieux maîtriser les
évolutions économiques, de réguler les marchés, voire de susciter des ententes
régionales entre les pays. Je ne doute pas, Mesdames et Messieurs, que vous
ayez à cœur, dans votre mission de diplomates, de faire se rencontrer les
intérêts particuliers de votre pays et les nécessités de s’entendre les uns
avec les autres, et que vous puissiez ainsi contribuer grandement au service de
tous.
La voix de l’Église sur la scène diplomatique se caractérise toujours par la
volonté, inscrite dans l’Évangile, de servir la cause de l’homme, et je
manquerais à cette obligation fondamentale si je ne rappelais pas devant vous
la nécessité de mettre toujours davantage la dignité humaine au cœur de nos
préoccupations. Le développement extraordinaire des sciences et des techniques
que connaît le monde d’aujourd’hui, avec ses conséquences quasi immédiates sur
la médecine, sur l’agriculture et la production des ressources alimentaires,
mais également sur la communication des savoirs, ne doit pas se poursuivre sans
finalité ni sans référence, alors qu’il est question de la naissance de
l’homme, de son éducation, de sa manière de vivre et de travailler, de sa
vieillesse et de sa mort. Il est plus que nécessaire de réinscrire le progrès
d’aujourd’hui dans la continuité de notre histoire humaine et donc de le
conduire, selon le projet qui nous habite tous de faire grandir l’humanité et
que le livre de
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, sur vos personnes, sur vos familles et
sur tous vos collaborateurs, j’invoque de grand cœur les Bénédictions du Très-Haut.
.
C- Discours de Benoît XVI au
président des Affaires religieuses de Turquie (28 novembre)
Nous publions
ci-dessous le texte intégral du discours que le pape Benoît XVI a prononcé lors
de sa rencontre, le mardi 28 novembre, avec le président pour les Affaires
religieuses de Turquie, M. Ali Bardakoglu..
Excellences, Mesdames et
Messieurs !
Je suis heureux d'avoir l'opportunité de visiter cette terre, si riche
d'histoire et de culture, d'admirer ses beautés naturelles, de voir de mes yeux
la créativité du peuple turc, et de goûter votre culture ancienne tout comme
votre longue histoire, à la fois civile et religieuse.
Dès mon arrivée en Turquie, j'ai été gracieusement reçu par le Président de
J'ai à présent la joie de vous rencontrer, vous qui êtes le Président du
Directoire pour les Affaires religieuses. Je vous exprime mes sentiments
respectueux, en reconnaissance de vos grandes responsabilités, et j'étends mes
salutations à tous les responsables religieux de Turquie, en particulier aux
grands Muftis d'Ankara et d'Istanbul. A travers vous, Monsieur le Président, je
salue tous les musulmans en Turquie avec une estime particulière et une
considération affectueuse.
Votre pays est très cher aux chrétiens: un grand nombre des premières
communautés de l'Eglise ont été fondées ici et y ont connu leur maturité,
inspirées par la prédication des Apôtres, en particulier de saint Paul et de
saint Jean. La tradition qui est parvenue jusqu'à nous affirme que Marie,
Cette noble terre a également connu une remarquable floraison de la
civilisation musulmane dans les domaines les plus divers, dans l'art et la
littérature, ainsi que dans ses institutions.
Un grand nombre de monuments chrétiens et musulmans portent le témoignage du
glorieux passé de
Je me suis préparé à cette visite en Turquie avec les mêmes sentiments que ceux
exprimés par mon prédécesseur le bienheureux Jean XXIII, lorsqu'il arriva ici
en tant qu’Archevêque, Mgr Giuseppe Roncalli, pour assurer la charge de
Représentant pontifical à Istanbul: «Je ressens de l'amitié pour le peuple
turc, auprès duquel le Seigneur m'a envoyé... J'aime les Turcs, j'apprécie les
qualités naturelles de ce peuple qui a également toute sa place dans la marche
de la civilisation» (Journal d'une âme, pp. 231.237).
Pour ma part, je souhaite moi aussi souligner les qualités de la population
turque. Ici, je fais miennes les paroles de mon prédécesseur immédiat, le Pape
Jean-Paul II de vénérée mémoire, qui déclara à l'occasion de sa visite en 1979:
«Je me demande s'il n'est pas urgent, précisément aujourd'hui où chrétiens et
musulmans sont entrés dans une nouvelle période de l'histoire, de reconnaître
et de développer les liens spirituels qui nous unissent, afin de protéger et de
promouvoir ensemble, pour tous les hommes “la justice sociale, les valeurs
morales, la paix et la liberté”» (Discours à la communauté catholique
d'Ankara, 29 novembre 1979, n. 3; cf. ORLF n. 49 du 4 décembre 1979).
Ces questions ont continué à se poser au cours des dernières années ; en effet,
comme je l'ai indiqué au tout début de mon pontificat, elles nous poussent à
faire progresser notre dialogue comme un échange sincère entre amis. Lorsque
j'ai eu la joie de rencontrer des membres des communautés musulmanes l'année
dernière à Cologne, à l'occasion de
Chrétiens et musulmans, en suivant leurs religions respectives, insistent sur
la vérité du caractère sacré et de la dignité de la personne. C'est la base de
notre respect et de notre estime mutuels, c'est la base de notre collaboration
au service de la paix entre les nations et les peuples, le souhait le plus cher
de tous les croyants et de toutes les personnes de bonne volonté.
Pendant plus de quarante ans, l'enseignement du Concile Vatican II a inspiré et
guidé l'approche des relations avec les disciples d'autres religions, du
Saint-Siège et des Eglises locales du monde entier. En suivant la tradition
biblique, le Concile enseigna que toute la race humaine partage une origine
commune et un destin commun: Dieu, notre créateur et but de notre pèlerinage
terrestre. Chrétiens et musulmans appartiennent à la famille de ceux qui
croient dans le Dieu unique et qui, selon leurs traditions respectives, sont
les descendants d'Abraham (cf. Concile Vatican II, Déclaration sur les
Relations de l'Eglise avec les religions non-chrétiennes, Nostre Aetate 1,
3). Cette unité humaine et spirituelle au niveau de nos origines et de notre
destinée nous engage à chercher un itinéraire commun, tout en jouant notre rôle
dans cette recherche de valeurs fondamentales qui est si caractéristique des
personnes de notre époque. En tant qu'hommes et femmes de religion, nous sommes
placés face au défi de l'aspiration largement répandue à la justice, au
développement, à la solidarité, à la liberté, à la sécurité, à la paix, à la
protection de l'environnement et des ressources de la terre. Parce que nous
aussi, tout en respectant l'autonomie légitime des affaires temporelles, avons
une contribution spécifique à offrir dans la recherche des solutions adaptées à
ces questions pressantes.
En particulier, nous pouvons offrir une réponse crédible à la question qui se
dégage clairement dans la société d'aujourd'hui, même si elle est souvent
écartée, la question portant sur le sens et le but de la vie, pour chaque
individu et pour l'humanité tout entière. Nous sommes appelés à œuvrer
ensemble, afin d'aider la société à s'ouvrir au transcendant, en reconnaissant
à Dieu tout-puissant la place qui lui revient. Le meilleur moyen d'aller de
l'avant passe par le dialogue authentique entre chrétiens et musulmans, fondé
sur la vérité et inspiré par le souhait sincère de mieux nous connaître les uns
les autres, en respectant les différences et en reconnaissant ce que nous avons
en commun. Cela conduira à un respect authentique des choix responsables que
fait chaque personne, en particulier ceux qui concernent les valeurs
fondamentales et les convictions religieuses personnelles.
Pour illustrer le respect fraternel dans lequel chrétiens et musulmans peuvent
œuvrer ensemble, je voudrais citer les paroles adressées par le Pape Grégoire
VII en 1076 à un Prince musulman de l'Afrique du Nord qui avait agi avec une
grande bienveillance à l'égard des chrétiens dépendant de sa juridiction. Le
Pape Grégoire VII parla de la charité particulière que chrétiens et musulmans
se doivent mutuellement «parce que nous croyons en un seul Dieu, quoique d'une
manière différente, et parce que nous le louons et le vénérons chaque jour
comme créateur des siècles et gouverneur de ce monde» (PL 148, 451)
La liberté de religion, garantie par les institutions et respectée de manière
effective, tant pour les individus que pour les communautés, constitue pour
tous les croyants la condition nécessaire de leur contribution loyale à
l'édification de la société, dans une attitude de service authentique, en
particulier à l'égard des plus vulnérables et des plus pauvres.
Monsieur le Président, je souhaiterais terminer en rendant grâce à Dieu
tout-puissant et miséricordieux pour cette heureuse occasion qui nous permet de
nous retrouver ensemble en son nom. Je prie pour que cela constitue le signe de
notre engagement commun au dialogue entre chrétiens et musulmans, tout comme un
encouragement à persévérer sur ce chemin, dans le respect et l'amitié. Je
souhaite que nous puissions mieux nous connaître, en resserrant les liens
d'affection entre nous dans notre souhait commun de vivre ensemble dans
l'harmonie, la paix et la confiance mutuelle. En tant que croyants, nous tirons
de la prière la force nécessaire pour surmonter toutes traces de préjugés et
offrir un témoignage commun de notre solide foi en Dieu. Puisse sa Bénédiction
être toujours sur nous!
D- Homélie de Benoît XVI à
Ephèse (29 novembre)
Nous
publions ci-dessous le texte intégral de l’homélie que le pape Benoît XVI a
prononcée le mercredi 29 novembre au cours de la messe qu’il a présidée au Sanctuaire
« Meryem Ana Evì », à Ephèse.
Chers frères et sœurs,
Au cours de cette célébration eucharistique nous voulons rendre grâce au
Seigneur pour la maternité divine de Marie, un mystère qu’ici, à Ephèse, lors
du Concile œcuménique de 431, fut solennellement confessé et proclamé. En ce
lieu, l'un des plus chers à
Mère de Dieu - Mère de l'Eglise
Nous avons écouté le passage de l'Evangile de Jean qui invite à contempler le
moment de
Mère de Dieu - Mère de l'unité
La première Lecture nous a présenté ce que l'on peut définir comme l'«évangile»
de l'Apôtre des nations: tous, même les païens, sont appelés en Jésus Christ à
participer pleinement au mystère du salut. Le texte contient en particulier
l'expression que j'ai choisie comme devise de mon voyage apostolique: «Le
Christ, qui est notre paix» (Ep 2, 14). Inspiré par l'Esprit Saint, Paul
affirme non seulement que Jésus Christ nous a apporté la paix, mais qu'il «est»
notre paix. Et il justifie cette affirmation en se référant au mystère de
Demandons la paix pour Jérusalem et le monde entier
L'Apôtre des nations remarque que le Christ «des deux, il a fait un seul
peuple» (Ep 2, 14): une affirmation qui se réfère, au sens propre, à la
relation entre les Juifs et les Païens en ce qui concerne le mystère du salut
éternel; une affirmation qui peut cependant également s'étendre, sur le plan de
l'analogie, aux relations entre les peuples et les civilisations présentes dans
le monde. Le Christ «est venu annoncer la paix» (Ep 2, 17) non seulement parmi
les juifs et les non juifs, mais entre toutes les nations, car tous proviennent
du même Dieu, unique Créateur et Seigneur de l'univers. Réconfortés par
Magnificat
La liturgie d'aujourd'hui nous a fait répéter, comme refrain du Psaume
responsorial, le cantique de louange que
E- L’homélie de Benôit XVI en la cathédrale de
l’Esprit-Saint d’Istambul
Nous
publions ci-dessous l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de la
messe qu’il a présidée, le vendredi matin, 29 novembre, en la cathédrale de
l’Esprit Saint de Istanbul, en rite latin, en présence du patriarche de
Constantinople, Bartholomaios I et du patriarche arménien S.B. Mesrob II, ainsi
que de différents représentants des autres communautés ecclésiales et des
autres religions.
Chers Frères et Sœurs,
Au terme de mon voyage pastoral en Turquie, je suis heureux de rencontrer la
communauté catholique d’Istanbul et de célébrer avec elle l’Eucharistie pour
rendre grâce au Seigneur de tous ses dons. Je tiens à saluer en tout premier
lieu le Patriarche de Constantinople, Sa Sainteté Bartholomaios Ier, ainsi que
le Patriarche arménien, Sa Béatitude Mesrob II, Frères vénérés, qui ont tenu à
se joindre à nous pour cette célébration. Je leur exprime ma profonde gratitude
pour ce geste fraternel qui honore toute la communauté catholique.
Chers Frères et Fils de l’Église catholique, Évêques, prêtres et diacres,
religieux, religieuses et laïcs, appartenant aux différentes communautés de la
ville et aux divers rites de l’Église, je vous salue tous avec joie, reprenant
pour vous les mots de saint Paul aux Galates : «Que la grâce et la paix soient
avec vous de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus-Christ !» (Ga 1,
3). Je tiens à remercier les Autorités civiles présentes pour leur accueil
courtois, en particulier toutes les personnes qui ont permis que ce voyage
puisse se réaliser. Je veux saluer enfin les représentants des autres
communautés ecclésiales et des autres religions qui ont souhaité être présents
parmi nous. Comment ne pas penser aux différents événements qui ont forgé
ici-même notre histoire commune ? En même temps, je sens le devoir de rappeler
de manière particulière les nombreux témoins de l’Evangile du Christ, qui nous
pressent de travailler ensemble à l’unité de tous ses disciples, dans la vérité
et la charité !
Dans cette cathédrale du Saint-Esprit, j’ai souhaité rendre grâce à Dieu pour
tout ce qu’il accomplit dans l’histoire des hommes et invoquer sur tous les
dons de l’Esprit de sainteté. Comme vient de nous le rappeler saint Paul,
l’Esprit est la source permanente de notre foi et de notre unité. Il suscite en
nous la vraie connaissance de Jésus et il met sur nos lèvres les paroles de la
foi pour que nous reconnaissions le Seigneur. Jésus l’avait déjà déclaré à
Pierre après
Il y a vingt-sept ans, dans cette même cathédrale, mon prédécesseur le
Serviteur de Dieu Jean-Paul II formait le vœu que l’aube du nouveau millénaire
puisse «se lever sur une Église qui a retrouvé sa pleine unité, pour mieux
témoigner, au milieu des tensions exacerbées de ce monde, de l’amour
transcendant de Dieu manifesté en son Fils Jésus Christ» (Homélie à la
cathédrale d’Istanbul, n. 5) . Ce vœu ne s’est pas encore réalisé, mais le
désir du Pape est toujours le même et il nous presse, nous tous disciples du
Christ qui marchons avec nos lenteurs et nos pauvretés sur le chemin qui veut
conduire à l’unité, d’agir sans cesse «en vue du bien de tous», mettant la
perspective œcuménique au premier rang de nos préoccupations ecclésiales. Nous
vivrons alors vraiment selon l’Esprit de Jésus, au service du bien de tous.
Réunis ce matin dans cette maison de prière consacrée au Seigneur, comment ne
pas évoquer l’autre belle image qu’emploie saint Paul pour parler de l’Église,
celle de la construction dont les pierres sont toutes solidaires, agencées les
unes aux autres pour former un seul édifice, et dont la pierre angulaire, sur
qui tout repose, est le Christ. C’est lui la source de la vie nouvelle qui nous
est donnée par le Père, dans l’Esprit Saint. L’Évangile de saint Jean l’a
proclamé tout à l’heure : «Des fleuves d’eau vive jailliront de son cœur».
Cette eau jaillissante, cette eau vive que Jésus a promise à
Frères et Sœurs, vos communautés connaissent l’humble chemin du compagnonnage
de chaque jour avec ceux qui ne partagent pas notre foi mais qui déclarent
«avoir la foi d’Abraham et qui adorent avec nous le Dieu unique et
miséricordieux» (Lumen gentium, n. 16). Vous savez bien que l’Église ne
veut rien imposer à personne, et qu’elle demande simplement de pouvoir vivre
librement pour révéler Celui qu’elle ne peut cacher, le Christ Jésus qui nous a
aimés jusqu’au bout sur
Frères et Sœurs, remettons en cet instant notre désir de servir le Seigneur à
F- Déclaration conjointe du pape Benoît XVI et du patriarche
Bartholomaios I (30 novembre)
Nous
publions ci-dessous le texte intégral de
DECLARATION
CONJOINTE
«Voici le jour que le Seigneur a fait, qu’il soit notre bonheur et notre
joie» (Ps 117,24)!
La rencontre fraternelle que nous avons eue, nous, Benoît XVI, Pape de Rome, et
Bartholomaios I, Patriarche œcuménique, est l’œuvre de Dieu, et en quelque
sorte un don venant de Lui. Nous rendons grâce à l’Auteur de tout bien qui nous
permet encore une fois, dans la prière et l’échange, d’exprimer notre joie de
nous sentir frères et de renouveler notre engagement en vue de la pleine
communion. Cet engagement nous vient de la volonté de notre Seigneur et de
notre responsabilité de Pasteurs dans l’Église du Christ. Puisse notre
rencontre être un signe et un encouragement pour nous à partager les mêmes
sentiments et les mêmes attitudes de fraternité, de collaboration et de
communion dans la charité et dans la vérité. L’Esprit Saint nous aidera à
préparer le grand jour du rétablissement de la pleine unité, quand et comme
Dieu le voudra. Nous pourrons alors nous réjouir et exulter vraiment.
1. Nous avons évoqué avec gratitude les rencontres de nos vénérés
prédécesseurs, bénis par le Seigneur, qui ont montré au monde l’urgence de
l’unité et qui ont tracé des sentiers sûrs pour y parvenir, dans le dialogue,
la prière et la vie ecclésiale quotidienne. Le Pape Paul VI et le Patriarche
Athénagoras I, pèlerins à Jérusalem sur le lieu même où Jésus Christ est mort
et est ressuscité pour le salut du monde, se sont ensuite rencontrés de
nouveau, ici au Phanar et à Rome. Ils nous ont laissé une déclaration commune
qui garde toute sa valeur, soulignant que le vrai dialogue de la charité doit
soutenir et inspirer tous les rapports entre les personnes et entre les Églises
elles-mêmes, «doit être enraciné dans une fidélité totale à l’unique
Seigneur Jésus Christ et dans un respect mutuel de leurs propres traditions»
(Tomos Agapis, 195). Nous n’avons pas non plus oublié l’échange de visites
entre Sa Sainteté le Pape Jean-Paul II et Sa Sainteté Dimitrios I. C’est
précisément durant la visite du Pape Jean-Paul II, sa première visite
œcuménique, que fut annoncée la création de
En ce qui concerne les relations entre l’Église de Rome et l’Église de
Constantinople, nous ne pouvons oublier l’acte ecclésial solennel reléguant
dans l’oubli les anciens anathèmes qui, durant des siècles, ont affecté de
manière négative les rapports entre nos Églises. Nous n’avons pas encore tiré
de cet acte toutes les conséquences positives qui peuvent en découler pour
notre marche vers la pleine unité, à laquelle
2. Lors de la session plénière de
3. Comme Pasteurs, nous avons tout d’abord réfléchi à la mission d’annoncer
l’Évangile dans le monde d’aujourd’hui. Cette mission, «Allez donc, de toutes
les nations faites des disciples» (Mt 28, 19), est aujourd’hui plus que jamais
actuelle et nécessaire, même dans les pays traditionnellement chrétiens. De
plus, nous ne pouvons pas ignorer la montée de la sécularisation, du
relativisme, voire du nihilisme, surtout dans le monde occidental. Tout cela
exige une annonce renouvelée et puissante de l’Évangile, adaptée aux cultures
de notre temps. Nos traditions représentent pour nous un patrimoine qui doit
être partagé, proposé et actualisé continuellement. C’est pourquoi nous devons
renforcer les collaborations et notre témoignage commun devant toutes les
nations.
4. Nous avons évalué positivement le chemin vers la formation de l’Union
européenne. Les acteurs de cette grande initiative ne manqueront pas de prendre
en considération tous les aspects qui touchent à la personne humaine et à ses
droits inaliénables, surtout la liberté religieuse, témoin et garante du
respect de toute autre liberté. Dans chaque initiative d’unification, les
minorités doivent être protégées, avec leurs traditions culturelles et leurs
spécificités religieuses. En Europe tout en demeurant ouverts aux autres
religions et à leur contribution à la culture, nous devons unir nos efforts
pour préserver les racines, les traditions et les valeurs chrétiennes, pour
assurer le respect de l’histoire, ainsi que pour contribuer à la culture de la
future Europe, à la qualité des relations humaines à tous les niveaux. Dans ce
contexte, comment ne pas évoquer les très anciens témoins et l’illustre
patrimoine chrétiens de la terre où a lieu notre rencontre, en commençant par
ce que nous dit le livre des Actes des Apôtres, évoquant la figure de saint
Paul, Apôtre des nations. Sur cette terre, le message de l’Évangile et
l’ancienne tradition culturelle se sont rejoints. Ce lien, qui a tant contribué
à l’héritage chrétien qui nous est commun, demeure actuel et portera encore des
fruits dans l’avenir pour l’évangélisation et pour notre unité.
5. Notre regard s’est porté sur les lieux du monde d’aujourd’hui où vivent les
chrétiens et sur les difficultés auxquelles ils doivent faire face, en
particulier la pauvreté, les guerres et le terrorisme, mais également les
diverses formes d’exploitation des pauvres, des émigrés, des femmes et des
enfants. Nous sommes appelés à entreprendre ensemble une action en faveur du
respect des droits de l’homme, de tout être humain, créé à l’image et à la
ressemblance de Dieu, du développement économique, social et culturel. Nos
traditions théologiques et éthiques peuvent offrir une base solide de
prédication et d’action communes. Nous voulons avant tout affirmer que tuer des
innocents au nom de Dieu est une offense envers Lui et envers la dignité
humaine. Nous devons tous nous engager pour un service renouvelé de l’homme et
pour la défense de la vie humaine, de toute vie humaine.
Nous avons profondément à cœur la paix au Moyen-Orient, où notre Seigneur a
vécu, a souffert, est mort et est ressuscité, et où vivent, depuis tant de
siècles, une multitude de frères chrétiens. Nous désirons ardemment que soit
rétablie la paix sur cette terre, que se renforce la coexistence cordiale entre
ses diverses populations, entre les Églises et entre les différentes religions
qui s’y trouvent. Pour cela, nous encourageons l’établissement de rapports plus
étroits entre les chrétiens et d’un dialogue interreligieux authentique et
loyal, en vue de lutter contre toute forme de violence et de discrimination.
6. Actuellement, devant les grands dangers concernant l’environnement naturel,
nous voulons exprimer notre souci face aux conséquences négatives pour
l’humanité et pour la création tout entière qui peuvent résulter d’un progrès
économique et technologique qui ne reconnaît pas ses limites. En tant que chefs
religieux, nous considérons comme un de nos devoirs d’encourager et de soutenir
tous les efforts qui sont faits pour protéger la création de Dieu et pour
laisser aux générations futures une terre dans laquelle elles pourront vivre.
7. Enfin, notre pensée se tourne vers vous tous, les fidèles de nos Églises,
présents partout dans le monde, évêques, prêtres, diacres, religieux et
religieuses, hommes et femmes laïques engagés dans un service ecclésial et tous
les baptisés. Nous saluons en Christ les autres chrétiens, les assurant de
notre prière et de notre disponibilité au dialogue et à la collaboration. Avec
les paroles de l’Apôtre des Gentils, nous vous saluons tous: «À vous, grâce et
paix de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ»(2 Co 1, 2).
Phanar, le 30 Novembre 2006.
Benedictus PP. XVI - Bartholomaios I
G- Discours du pape au
Phanar, en la fête de saint André (30 novembre)
Nous
publions ci-dessous le texte intégral du discours que le pape Benoît XVI a
prononcé le jeudi matin, 30 novembre, après avoir assisté à
Cette
Divine Liturgie célébrée pour
Aujourd'hui, dans cette église patriarcale Saint-Georges, nous pouvons faire
l'expérience une nouvelle fois de la communion et de l'appel de deux frères,
Simon Pierre et André, à travers la rencontre entre le Successeur de Pierre et
son Frère dans le ministère épiscopal, le chef de cette Eglise fondée selon la
tradition par l'Apôtre André. Notre rencontre fraternelle souligne la relation
particulière qui unit les Eglises de Rome et de Constantinople comme Eglises
Sœurs.
Avec une joie profonde je rends grâce à Dieu de donner une nouvelle vitalité
aux relations qu'il a développées depuis la mémorable rencontre à Jérusalem en
décembre 1964 entre nos prédécesseurs, le Pape Paul VI et le Patriarche
Athénagoras. Leur échange de lettres, publié dans un ouvrage intitulé Tomos
Agapis, témoigne de la profondeur des liens qui ont grandi entre eux, des
liens qui se reflètent dans les relations entre les Eglise Sœurs de Rome et de
Constantinople.
Le 7 décembre 1965, à la veille de la session finale du Concile Vatican II, nos
vénérables prédécesseurs firent un nouveau pas unique et inoubliable
respectivement dans l'Eglise patriarcale Saint-Georges et dans
Dans le même esprit, ma présence ici aujourd'hui vise à renouveler notre
engagement pour avancer sur la route menant au rétablissement — par la grâce de
Dieu — de la pleine communion entre l'Eglise de Rome et l'Eglise de
Constantinople. Je peux vous assurer que l'Eglise catholique souhaite faire
tout son possible pour surmonter les obstacles et pour chercher, avec nos
frères et sœurs orthodoxes, des moyens toujours plus efficaces de coopération
pastorale à cette fin.
Les deux frères, Simon, appelé Pierre, et André, étaient des pêcheurs que Jésus
appela à devenir des pêcheurs d'homme. Le Seigneur ressuscité, avant son
Ascension, les envoya tous deux ainsi que les autres Apôtres avec la mission de
faire de toutes les nations ses disciples, en les baptisant et en proclamant
ses enseignements (cf. Mt 28, 19sqq; Lc 24, 47; At 1, 8).
Cette tâche qui nous a été laissée par les saints frères Pierre et André est
loin d'être achevée. Au contraire, aujourd'hui, elle est encore plus urgente et
nécessaire. Car elle ne concerne pas seulement les cultures qui n'ont été
touchées que de façon marginale par le message de l'Evangile, mais également
les cultures européennes depuis longtemps profondément enracinées dans la
tradition chrétienne. Le processus de sécularisation a affaibli l'influence de
cette tradition; elle est en effet remise en question, et même rejetée. Face à
cette réalité, nous sommes appelés, avec toutes les autres communautés
chrétiennes, à renouveler la conscience de l'Europe de ses racines, ses
traditions et ses valeurs chrétiennes, en leur donnant une nouvelle vitalité.
Nos efforts en vue de construire des liens plus étroits entre l'Eglise
catholique et les Eglises orthodoxes font partie de la tâche missionnaire. Les
divisions qui existent entre les chrétiens sont un scandale pour le monde et un
obstacle à la proclamation de l'Evangile. La veille de sa Passion et de sa
mort, le Seigneur, entouré par ses disciples, pria avec ferveur pour que tous
soient un, pour que le monde croie (cf. Jn 17, 21). Ce n'est qu'à travers la
communion fraternelle entre les chrétiens et à travers leur amour mutuel que le
message de l'amour de Dieu pour tous les hommes et les femmes deviendra
crédible. Toute personne qui pose un regard réaliste sur le monde chrétien
aujourd'hui verra l'urgence de ce témoignage.
Simon Pierre et André furent appelés ensemble à devenir des pécheurs d'hommes.
Mais cette même mission prit une forme différente chez chacun des deux frères.
Simon, malgré sa fragilité humaine, fut appelé «Pierre», le «roc» sur lequel
l'Eglise devait être construite: c'est à lui en particulier que furent confiées
les clés du Royaume des Cieux (cf. Mt 16, 18). Son itinéraire allait le
conduire de Jérusalem à Antioche, et d'Antioche à Rome, afin que dans cette
ville il puisse exercer une responsabilité universelle. La question du service
universel de Pierre et de ses Successeurs a malheureusement été à l'origine de
nos différences d'opinion, que nous espérons surmonter, grâce également au
dialogue théologique qui a été renoué récemment.
Mon vénérable prédécesseur, le Serviteur de Dieu, le Pape Jean-Paul II, parla
de la miséricorde qui caractérise le service d'unité de Pierre, une miséricorde
dont Pierre lui-même a été le premier à faire l'expérience (Encyclique Ut
unum sint, n. 91). C'est sur cette base que Jean-Paul II lança une
invitation à nouer un dialogue fraternel dans le but d'identifier les moyens
dont le ministère pétrinien peut être exercé aujourd'hui, tout en respectant sa
nature et son essence, afin de «réaliser un service d'amour reconnu par les uns
et par les autres» (ibid., n. 95). Je souhaite aujourd'hui rappeler et
renouveler cette invitation.
André, le frère de Simon Pierre, reçut une autre mission du Seigneur, une
mission suggérée par son propre nom. Comme il parlait le grec, il devint — avec
Philippe — l'Apôtre de la rencontre avec les Grecs qui venaient à Jésus (cf. Jn
12, 20sqq). La tradition nous dit qu'il fut missionnaire non seulement en Asie
mineure et dans les territoires du sud de
L'Apôtre André représente par conséquent la rencontre entre le christianisme
des origines et la culture grecque. Cette rencontre, notamment en Asie mineure,
devint possible en particulier grâce aux grands Pères de
La leçon du grain de blé qui meurt afin de pouvoir porter du fruit trouve
également un parallèle dans la vie de saint André. La tradition nous dit qu'il
a suivi le destin de son Seigneur et Maître, en finissant ses jours à Patras,
en Grèce. Comme Pierre, il a enduré le martyre sur une croix, la croix
diagonale que nous vénérons aujourd'hui comme la croix de Saint-André. De son
exemple nous apprenons que le chemin de chaque chrétien particulier, tout comme
de l'Eglise dans son ensemble, conduit à une vie nouvelle, la vie éternelle, à
travers l'imitation du Christ et l'expérience de sa croix.
Au cours de l’histoire, l'Eglise de Rome comme celle de Constantinople ont
souvent fait l'expérience de la leçon du grain de blé. Ensemble, nous vénérons
un grand nombre de martyrs dont le sang, selon les célèbres paroles de
Tertullien, devint la semence de nouveaux chrétiens (Apologeticum, 50,
13). Avec eux, nous partageons la même espérance qui pousse l'Eglise à «avancer
dans son pèlerinage à travers les persécutions du monde et les consolations de
Dieu» (Lumen gentium, n. 8; cf. saint Augustin, De Civitate Dei,
XVIII, 51, 2). Pour sa part, le siècle qui vient de s'achever a, lui aussi, vu
de courageux témoins de la foi aussi bien à l’Est qu’à l’Ouest. Même
aujourd’hui, il existe de nombreux témoins dans différentes régions du monde.
Nous nous souvenons d’eux dans notre prière et, de toutes les manières
possibles, nous leur offrons notre soutien, tout en demandant instamment aux
responsables du monde de respecter la liberté religieuse comme un droit de
l'homme fondamental.
Cette foi dans la mort rédemptrice de Jésus sur la croix, et cette espérance
que le Christ ressuscité offre à toute la famille humaine, sont partagées par
nous tous, orthodoxes et catholiques. Puisse notre prière et notre action
quotidiennes être inspirées par un fervent désir non seulement d'être présents
à