Réflexions
sur l’œcuménisme.
Pour
mieux comprendre ce qui se passe à Fatima. Et lever une « Croisade ».
Il n’y a pas
d’évènements importants de notre vie politique, sociale et religieuse qui ne
soient pas désormais « sanctifiés » par des célébrations œcuméniques.
Hier, elles l’auraient été par des cérémonies catholiques. Aujourd’hui, elles
le sont encore mais uniquement par des cérémonies œcuméniques.
La vie
liturgique de l’Eglise aujourd’hui s’exprime,
essentiellement lors de ces grands événements médiatisés, dans des cérémonies
œcuméniques.
C’est Monsieur l’abbé de la Roque qui fait ce
constat dans sa dernière « lettre à nos frères prêtres » de
juin 2004. Et il donne des preuves :
« - Les
fêtes de Pâques furent en beaucoup d’endroits (cf
liste sur le site de la Conférence épiscopale de France, à la rubrique
« Œcuménisme ») célébrées exclusivement de manière œcuménique.
Chemins de Croix ou veillées pascales, fête de Pâques ou prédications de
Carême, le fidèle catholique n’eut alors d’autres choix que d’assister à une
cérémonie œcuménique, de se faire l’auditeur d’un pasteur qui n’était pas de sa
religion.
« -
Lorsque les évêques catholiques du Comece (Commission
des épiscopats de la Communauté européenne) partent en pèlerinage sur les
routes de saint Jacques de Compostelle (16-20 avril 2004), il faut qu’à chaque
messe soit lu, tel un nouvel évangile, un passage de la Carta oecumenica ; les vêpres, quant à elles, seront
toujours présidées par un « évêque » d’une confession chrétienne
séparée, avec prédication dudit évêque à l’appui (source : La Croix du 22
O4 O4)
« -
L ‘élargissement de l’Europe n’eut pour toute célébration religieuse que
des cérémonies œcuméniques : 175 mouvements chrétiens, ainsi que 25
évêques catholiques, orthodoxes et 14 responsables évangéliques se sont ainsi
retrouvés à Stuttgart pour célébrer l’élargissement de l’Europe. Selon Andrea Rioccardi, de la communauté san’Egidio
qui s’est investi dans ce projet, cette rencontre ne fut pas un « cartel
de mouvements », mais plutôt une « polyphonie »
(source : la Croix du O6 O5 O4)
« - Les drames de
notre vie sociales n’ont pour écho religieux que des cérémonies œcuméniques,
voire inter religieuses. C’est ainsi qu’en réponse à la scandaleuse profanation
du cimetière d’Herrlisheim, fut organisée une
cérémonie inter religieuse à laquelle participèrent le cardinal Lustiger et Mgr
Doré. Curieusement la profanation du cimetière catholique datant de la même
période ne donna lieu à aucune cérémonie catholique de réparation…
Ces
quelques faits, pris sur le vif de l’actualité, manifestent l’omniprésence et
l’excroissance de la pratique œcuménique au sein de notre vie chrétienne. La
religion œcuménique l’aurait-elle emportée sur la pratique catholique ?
Et Monsieur
l’abbé de la Roque conclut ce petit constat par cette phrase un peu
surprenante « Pourtant,
l’œcuménisme bien vécu ne peut faire que bon ménage avec le
catholicisme ».
De fait il y a un vrai
œcuménisme catholique qui se distingue, comme le jour de la nuit, de
l’œcuménisme « conciliaire » pratiqué aujourd’hui.
Monsieur l’abbé de la
Roque se charge, dans le même numéro, d’en établir la preuve. Suivons-le.
L’œcuménisme catholique
De quoi s’agit-il ?
Le mot est synonyme d’ « universel »,
de « catholique ». « Le renouveau de l’emploi du mot
« œcuménique » est dû au fait que les Protestants, voulant désigner
une universalité et trouvant le mot « catholique » déjà au service de
l’Eglise romaine, ont choisi son équivalent :
« œcuménique » » (Ch Boyer, Œcuménisme
chrétien, DTC)
Sa
définition :
Le concile Vatican II n’a donné qu’une définition très large de
l’œcuménisme : « Par « mouvement œcuménique », on entend
les entreprises et les initiatives provoquées et organisées en faveur de l’unité
des chrétiens, selon les nécessités variées de l’Eglise
et selon les circonstances. » (Unitatis redintegratio n°4). Demeurant volontairement imprécis, le
décret conciliaire ne dit pas ce qu’il entend par « unité des
chrétiens » ni ce que sous-entendent les expressions :« nécessités variées de l’Eglise »
et « circonstances ».
Sa
compréhension : Si l’on ne reprend de cette définition que ses éléments
principaux (« entreprises et initiatives provoquées et organisées en
faveur des chrétiens) alors l’œcuménisme est une pratique constante de l’Eglise, o combien importante. Depuis la conférence de
Carthage avec Saint Augustin (411) jusqu’aux conciles de Lyon (1439), en
passant par les célèbres rencontres de Saint Dominique avec les Albigeois, l’Eglise a toujours cherché à mettre fin aux séparations nées
des hérésies et des schismes.
Le but poursuivi par l’Eglise à travers les siècles était clairement défini :
l’effort œcuménique n’avait d’autre objet que de faciliter le retour des
hérétiques et schismatiques à l’unique Eglise catholique, en leur faisant
renoncer à leurs erreurs et rebellions. Cet œcuménisme, dit de
« retour », fut la pratique constante de l’Eglise.
Tel est ce que prouve l’histoire.
Léon XIII (lettre praeclara gratulationis du 20 06
1894), à l’occasion de son jubilé épiscopal, invite les protestants et autres
non catholiques à revenir à l’Eglise
catholique : « Nous nous tournons vers ces
peuples et, avec une charité toute paternelle, nous les prions et conjurons
d’effacer toute trace de division et de revenir à l’unité » et de
louer l’exemple des protestants qui sont revenus à l’Eglise
catholique : « Il s’en trouva, esprits judicieux et cœurs avides de
vérité, qui sont venus chercher dans l’Eglise catholique
la voie qui conduit sûrement au salut. Ils comprirent qu’ils ne pouvaient
adhérer à la tête qui est Jésus-Christ s’ils n’appartenaient au corps de
Jésus-Christ qui est l’Eglise (catholique) ».
Pie IX (lettre Iam vos omnes, 13 09 1868) avait
agi de même à l’occasion du concile Vatican I. Il précisait :
« Quiconque considère avec soin et médite l’état dans lequel se trouvent
les diverses sociétés religieuses divisées entre elles et séparées de l’Eglise catholique devra se convaincre facilement qui ni aucune
de ces sociétés, ni toutes réunies ensemble, ne constituent en aucune façon et
ne sont cette Eglise une et catholique que le Christ, le Seigneur, a fondée et
bâtie, et qu’il a voulu voir exister, et qu’elles ne peuvent pas non plus être
considérées en aucune façon comme un membre ou une partie de cette même Eglise,
puisqu’elles sont séparées visiblement de l’unité
catholique » (DzH 2998)
En 1595,
Clément VII (Instr.Magnus Dominus,
23 12 1595) disait des évêques de Kiev : « Grâce à la lumière du Saint-Esprit
qui illuminait leur cœur, ils ont commencé à considérer sérieusement qu’ils
n’étaient plus membres du Corps du Christ qu’est l’Eglise
puisqu’ils n’étaient pas liés avec sa tête visible
qu’est le Souverain Pontife de Rome. C’est pourquoi ils décidèrent de
rentrer dans l’Eglise romaine qui est leur mère
et celle de tous les fidèles. »
En 1439, le
Concile de Florence réclame des Arméniens le retour à l’Eglise
catholique et romaine pour les déclarer dans l’unité de communion (DzH 1328). En 1274, le 2ème concile de Lyon
avait déjà réclamé un tel retour de la part des Grecs (DzH
861).
En 523, le
Pape Hormisdas réclame du clergé issu du schisme d’Acace,
pour qu’il retrouve la communion perdue,
qu’il « suive en toutes choses le Siège apostolique et prêche tout ce que
celui-ci a décrété » (Dzh 365)
Le
nécessaire « œcuménisme de retour ».
Si « l’œcuménisme
de retour » est la pratique de l’Eglise, c’est
parce qu ‘une telle conduite est dictée par les livres saints. Selon le
Nouveau Testament, l’hérésie est en effet l’égarement loin de la vérité et donc
séparation d’avec le Christ qui est Vérité : « Vous avez rompu avec
le Christ, vous qui cherchez la justice dans la Loi ; vous êtes déchus de
la grâce(…)Votre course partait bien ; qui a
entravé votre élan de soumission à la vérité ? « Gal 5, 4 et 7).
Aussi la démarche de charité à l’endroit de celui qui s’est ainsi égaré
consiste-t-elle, de la part du catholique, à ramener la brebis perdue dans la
vérité : « Mes frères, si quelqu’un parmi vous s’égare loin de la
vérité et qu’un autre l’y ramène, qu’il sache : celui qui ramène un
pécheur de son égarement sauvera son âme de la mort et couvrira une multitude
de péchés » (Jc 5 19-20). Tel est donc le
véritable œcuménisme : ramener l’égaré à l’unique bercail qu’est l’Eglise catholique, détentrice de la Révélation et unique
arche de salut.
C’est
pourquoi Pie XI, dans son encyclique « Mortalium
animos » sur l’œcuménisme (6 janvier 1928)
condamne toute démarche œcuménique qui ne viserait pas au retour des dissidents :
« Il n’est pas permis de procurer la réunion de chrétiens autrement qu’en
poussant au retour les dissidents à la seule véritable Eglise du Christ
(….) Le retour à l’unique véritable Eglise, disons-Nous, bien visible à tous
les regards, et qui, par la volonté de son fondateur, doit rester
perpétuellement telle qu’il l’a instituée lui-même pour le salut de
tous. »
Cet « œcuménisme
de retour », spécialement développé par les papes pendant la première
moitié du XX° siècle, porta de nombreux fruits. Pour ne regarder que l’Europe,
l’Angleterre compta 121 793 conversions d’anglicans au catholicisme entre 1920
et 1930, l’Allemagne quelque 10 000 par an, tandis que le catholicisme prenait
racine dans le pays où il n’existait plus, tels le Danemark ou la Norvège (D
Rops, « un combat pour Dieu, tome 12-1 de l’Histoire
de l’Eglise du Christ, Paris 1967, p. 118 à 126).
Le Cardinal W. Kasper, Président du Conseil pontifical pour la promotion de l’Unité des chrétiens, affirme ouvertement ce rejet :
« Le vieux concept d’œcuménisme du retour a été remplacé aujourd’hui par
celui d’itinéraire commun, qui dirige les chrétiens vers le but de la communion
ecclésiale comprise comme unité dans la diversité réconciliée » (W. Kasper, DC n° 2220 du 20 02 2000)
Qu’est-ce
que cela veut dire ? Que désormais, la conversion des hérétiques et
schismatiques n’est plus réclamée, ni même souhaitable : « L’œcuménisme
ne se fait pas en renonçant à notre propre tradition de foi . Aucune
Eglise ne peut pratiquer ce renoncement ». (W.Kasper,
ibid.) En effet, continue-t-il ailleurs, :
« Nous ne pouvons jeter par dessus bord ce qui nous a portés et tenus
jusqu’à présent, ce dont nos devanciers ont vécu, en des circonstances souvent
difficiles, et nous ne devons pas attendre cela de nos frères et de nos sœurs
du protestantisme et de l’orthodoxie. Ni eux ni nous ne pouvons devenir
infidèles (DC n° 2298 du 21 09 2003)
Un article,
pris au hasard des revues diocésaines, explique ce changement radical qui a été
opéré : « Incompréhensible ! A partir de l’Evangile,
trois univers chrétiens se sont créés : orthodoxe, catholique et
protestant. La vie les a rendus de plus en plus différents et hostiles. On se
résignait. On finissait par vivre comme si les autres n’existaient pas.
Pourtant, chez les catholiques on rêvait d’une unité retrouvée par le
« retour au bercail ». Orthodoxes et protestants allaient
venir à Rome en avouant : « Vous seuls, catholiques, êtes dans le
vrai ». C’était vraiment du rêve, et on s’est réveillé. En 1950, à la
première conférence missionnaire générale d’Edimbourg, on a enfin réalisé que
cette division ne pouvait plus durer, mais que le chemin de l’unité ne passait
pas par le suicide des orthodoxes et des protestants. Tous devaient exister à
fond, se comprendre, et sympathiser » (Bulletin de la Paroisse Saint
Bénigne, n° 64 –2000)
Le nouvel
oecuménisme consiste alors à imaginer et à réaliser un « futur modèle
élargi de l’unité » (W. Kasper, DC n° 2298 du 21
09 2003. l’obtention d’une unité visible en matière de foi, de sacrements et de
ministère, réclamera en effet de donner à ces trois fondements de l’unité
« une forme spirituellement rénovée » (ibid.)
On assiste
alors à une redéfinition – o combien floue – de la foi, des sacrements et de la
charge ministérielle ; redéfinition supposée capable d’englober les
différentes conceptions propres à chaque confession chrétienne, sans qu’aucune
n’ait à renoncer à sa spécificité. L’Eglise du Christ serait alors une entité générique,
englobant les différentes confessions chrétiennes. C’est une telle Eglise qui
est décrite dans le récent message pascal signé communément par les
responsables des différentes Eglises chrétiennes d’Ile
de France, dont un cardinal et 11 évêques catholiques : « Unis en son
Corps (du Christ), nous constituons l’Eglise qui,
malgré ses faiblesses, est, par la seule grâce de Dieu, le signe de sa présence dans le monde (…) Nous sommes l’Eglise du Christ pour le monde et pour notre mission au
service de tous »
Ce nouvel
œcuménisme est une reprise de la « théorie des branches » du XIX
siècle, selon laquelle « la véritable Eglise de Jésus-Christ est formé
d’une part de l’Eglise romaine, d’autre part de la gréco-schismatique et de l’anglicane, qui auraient avec l’Eglise romaine un même Seigneur, une même foi, un même
baptême ». Cette théorie réclamait la récitation de prières « pour
que les trois communions chrétiennes qui, comme il est suggéré, constituent
toutes ensemble l’Eglise catholique, se réunissent
enfin pour former un unique corps. »
Or cette
théorie est condamnée par le Magistère : « Son fondement (…) est
tel qu’il renverse de fonds en comble la constitution divine de l’Eglise ». C’est pourquoi sa prière pour l’unité,
selon « une intention profondément souillée et infectée par l’hérésie, ne
peut absolument pas être tolérée » (DZH 2886-87)
L’œcuménisme
du Cardinal W. Kasper n’est pas celui de l’Eglise.
A la
lumière de cette brève étude, notre foi fortifiée ne peut que dénoncer le
projet aujourd’hui mis en œuvre de la
construction d’une basilique œcuménique à Fatima, vivant de cet œcuménisme là.
Nous
lancerons une croisade pour l’honneur de l’Eglise et de
Notre Dame de Fatima.