Paroisse catholique Saint Michel

Dirigée par

 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

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Semaine du 13 au 19 décembre 2004

quatriéme dimanche de l’Avent.

 

 

I - Les textes de la messe du Samedi des quatre temps de l’Avent.

Introït tiré du Ps 79 4


Viens, fais luire sur nous ta face, ô Seigneur qui trônes sur les chérubins, et nous serons sauvés. R/ Prête l’oreille, pasteur d’Israël, toi qui conduis Joseph comme un troupeu.V/ Gloire au Père.

Collecte

« Dieu qui voyez l’affliction que nous vaut notre perversité, donnez-nous de trouver la consolation dans la grâce de votre venue. Vous qui, étant Dieu, vibvez et régnez.


Première lecture tirée du prophète Isaïe 19 20-22

En ces jours là, ils crieront vers le Seigneur, et il leur enverra un Sauveur, un défenseur qui les délivrera. Et le Seigneur se fera connaître à l’Egypte et les Egyptiens connaîtront le Seigneur en ce jours-là. Ils lui offriront sacrifices et offrandes ; ils feront des vœux au Seigneur et les accompliront. Le Seigneur ne frappera plus l’Egypte que pour la guérir. Ils se convertiront au Seigneur, et il se laissera fléchir et les guérira, lui, le Seigneur notre Dieu ».


Graduel tiré du Ps 18 7

Il part d’une extrémité des cieux et sa course le mène à l’autre extrémité. V/ Les cieux racontent la gloire de Dieu et le firmament publie l’oeuvre de ses mains3 ;

Collecte

Dans l’accablement où nous tient l’antique exclavage du péché, faites, Dieu tout puissant, que la naissance de votre Fils unique, source de vie nouvelle, vienne, en notre attente, nous apporter la délivrance, Lui qui, étant Dieu, vit et règne.

Deuxième lecture tirée du prophète Isaïe 35 1-7

« Voici ce que dit le Seigneur : « Que le désert et la steppe se réjouissent, que la lande exulte et fleurisse comme le narcisse ; qu’elle se couvre de fleurs, qu’elle exulte et pousse des cries de joie ! La gloire du Liban lui sera donné, la splendeur du Carmel et de Saron. On verra la gloire du Seigneur, la magnificence de notre Dieu. Fortifiez les mains défaillantes, affermissez les genous qui chancellent. Dites aux timides : « Courage, ne craignez point, voici votre Dieu ! La vengeance arrive, la revanche de Dieu ; il vient lui-même vous sauver. Alors se dessilleront les yeux des aveugles et les oreilles de sourds s’ouvriront, alors le boiteux bondira comme un cerf et la langue du muet poussera des cris d’allégresse ; car des sources vives jailliront au désert et des ruisseaux dans la steppe ; le sol embrasé se changera en nappe d’eau et le pays de la soif en fontaines, dit le Seigneur tout-puissant ».

….
Troisième lecture tiré d’Is 40 9-11

Voici ce que dit le Seigneur : « Monte sur une haute montagne, Sion, messagère de joie ; élève la voix avec force, Jérusalem, messagère de joie ; élève-la sans crainte, dis aux villes de Juda : « Voici votre Dieu ! Voici le Seigneur Dieu ! » Il vient avec puissance et son bras lui soumet tout, le prix de sa victoire l’accompagne et ses trophées le précèdent. Tel un berger, il fait paître son troupeau, recueille les agneaux dans ses bras, les porte dans son sein, lui, le Seigneur Notre Dieu


Cinquième lecture, tirée du prophète Daniel 3 47-51

En ces jours-là, l’ange du Seigneur descendit dans la fournaise auprès d’Azarias et de ses compagnons ; de la fournaise, il écarta la flamme ardente et fit souffler en son milieu comme une brise matinale. La flamme jaillissait à quarante-neuf coudées au dessus- de la fournaise. Dans son élan, elle brûla les Chaldéens au service du roi, qu’elle trouva près de la fournaise occupés à l’activer. Mais le feu ne toucha aucunement les trois jeunes gens et ne leur causa ni mal ni douleur. Tous trois alors n’eurent qu’une voix pour louer, glorifier et bénir Dieu dans la fournaise :

Hymne (Daniel 3 52-56)

Tu es béni, Seigneur Dieu de nos pères, digne de louange et de gloire à jamais.
Béni est ton nom, glorieux, saint, digne de louange et de gloire à jamais
Tu es béni dans le temple saint de ta gloire, digne de louange et de gloire à jamais
….
Tu es béni, toi qui trônes sur les chérubins et qui scrutes les abîmes, digne de louange et de gloire à jamais… »


II - Homélie.

 

Nous méditerons aujourd’hui les beaux textes de cette messe des quatre-temps de l’Avent.

Et surtout : préparons notre cœur à la venue du Seigneur. Que nos instants, que notre temps, que nos pensées, que nos réflexions se portent vers le Seigneur. Que nos cœurs se préparent à accueillir Celui qui vient : le Messie. Celui que Dieu, dans sa bonté, a préparé pour opérer notre salut, réparer le péché originel d’Adam, réconcilier le genre humain, établir la paix, rétablir la paix entre Dieu et les hommes.

Oui, élevons nos cœurs vers la sagesse de Dieu, et goûtons, en ce dimanche, les beaux textes
Liturgiques que l’Eglise nous fait entendre dans cette messe des quatre-temps.
Et tout d’abord écoutons l’introït. C’est une supplique. C’est un cri. C’est un appel fervent qui sort du cœur du fidèle qui sait sa misère ey qui confesse la grandeur de celui qui seul peut nous sauver. « veni et ostende nobis faciem tuam ». « Viens et montre nous ton visage ».
Vous le voyez ! L’appel du cœur aimant est fort, impératif. Il s’appuie sur sa propre misère pour supplier la venue du Sauveur. « Veni ». « Viens et montre nous ton visage fait de miséricorde. Sans toi, nous sommes à jamais perdu, exclu du Ciel, du bonheur éternel. Veni et ostende miséricordiam tuam.
L’âme est ardente dans son appel parce qu’elle sait sa profonde misère. Elle n’oublie pas cependant la nature de celui qui doit venir, sa gloire, sa transcendance. « Il est celui qui règne sur les Chérubins ». Il est le Seigneur, le Maître, « Domine ». Il est la puissance. En lui mon espérance. En lui le salut parce qu’il est Dieu.

Veni et salvi erimus ». « Viens et nous serons sauvés »

Tel est l’appel pressant de l’Eglise, en ce temps de l’Avent.

Veni et ostende faciem tuam. Toi qui commande aux Chérubins, viens opérer notre salut !

Et le premier texte d’Isaïe explicite ce cri, cet appel, ce « veni ».

« Ils criront vers le Seigneur dans leurs tribulations ».

En latin nous avons le verbe « Clamabunt ad Dominum ». Ce n’est pas un simple appel. Mais c’est un cri. C’est « pousser un cri ». C’est appeler en criant. Telle est la disposition de l’âme chrétienne.

« a facie tribulantis ». Le verbe latin « tribulare », veut dire : « tourmenter, faire souffris, affliger, persécuter ». Plus la misère est grande, plus le cri est grand. Le cri est proportionné à la misère.

Et Dieu est attentif à ce cri, à cette supllique. Et Dieu leur enverra un Sauveur. « Et mittet eis salvatorem et propugnatorem“. Un « propugnator ». C’est celui qui défend une place assiégée. C’est le défenseur. Le combattant . Telle est la description du Sauveur. Il est un combattant, un soldat. Celui qui délivre l’assiégé.
Le verbe latin : « propugnare » veut dire : « se battre, combattre pour défendre, être le champion de ».
Ainsi Isaïe nous fait connaître le messie, nous donne un de ses traits : « Il sera un battant, un lutteur.
Et il ajoute : « Et il se fera connaître à l’Egypte » « Et cognoscent Egyptii Dominum in die illa » ?

A ces mots, mon esprit se souvient de la libération d’Israël des mains du Pharaon, par l’ange exterminateur, le serviteur de Yahweh. Souvenez-vous du récit d ‘Exode 12. Voilà la description de l’agneau pascal. Voilà son sang mis sur les deux montants et sur le linteau de la porte dans les maisons d’Israël captif. Voilà le sang libérateur. Voilà ce sang protecteur :
« Et je passerai cette nuit là par le pays d’Egypte et je frapperai de mort tous les premiers nés du pays d’Egypte depuis les hommes jusqu’aux animaux…Je suis Yahweh. Le sang sera un signe en votre faveur sur les maisons où vous êtes : je verrai le sang et je passerai par dessus-vous, il n’y aura point pour vous de plaie meurtrière quand je frapperai le pays d’Egypte ».

Oh mystère étrange et inexplicable ! L’immolation de l’Agneau se trouve être le salut d’Israël, la mort de l’Agneau devint la vie du peuple. Et le sang intimida l’ange exterminateur.

Voilà comment Dieu s’est révélé et fait connaître à l’Egypte et par le sang de l’Agneau, son holocauste et par le bras vengeur de Yahweh. L’ange combat au bénéfice d’Israël. Le « sang de l’Agneau est une figure très précise du Messie. « Ecce Agnus Dei ».

Dès lors, notre appel, notre action de grâce, nos offrandes nos sacrifices en l’honneur de l’Agneau de Dieu », du Messie, nos acclamations sont dues à l’Agneau parcequ’il est notre sauveur, notre protecteur.

« Dis-moi, ô Ange, ce qui t’a intimidé, l’immolation de l’Agneau ou la vie du sauveur, la mort de l’Agneau ou la préfiguration du Seigneur. Il est clair que tu as été intimidé parce que tu as vu le mystère du Seigneur s’accomplissant dans l’Agneau pascal…C’est pourquoi tu ne frappas pas Israël, mais tu privas l’Egypte seule de ses enfants. Quel est ce mystère inattendu : l’Egypte frappée pour sa perte ; Israël protégé pour son salut »

Alors, sachons regarder vers l’Agneau qui fut immolé en Egypte, c’est celui qui frappa l’Egypte et qui sauva Israël par le sang. « Et le Seigneur se fera connaître à l’Egypte et l’Egypte connaîtra le Seigneur en ce jour là »…Et le Seigneur frappera l’Egypte… et délivrera Israël…

A ce mystère révélé, annoncé, prédit et réalisé…convertissons nous.

« Et le Seigneur frappera l’Egypte et ils se convertiront au Seigneur et il se laissera fléchir et les guérira ». Tel est celui qui croit au Messie : il est le guérie du saigneur.

« Il se laissera fléchir et les guérira » Il le peut. Car il est le Dieu fort. Le Dieu puissant.

« Il part d’une extrémité du Ciel et sa course le conduit jusqu’à l’autre ». Il est le tout puissant. Tout est à lui. Il est le Maître de toutes choses. « Les cieux proclament sa gloire et le firmament publie l’œuvre de ses mains.

N’oublions jamais que Celui qui doit venir…. Sera peut-être mis dans une crèche, sera peut-être « infans », mais il est celui qui fit le ciel et la terre.

Voilà ce que le Graduel nous rappelle

Et l’Eglise, alors, précise la prière de ses enfants dans cette belle oraison : « Fais, nous t’en supplions, Dieu tout puissant que nous qui sommes courbés sous le joug du péché par suite de notre vieil esclavage, nous soyons délivrés par la nouvelle naissance de ton Fils unique si longtemps attendu… »

Et voilà enfin la très belle deuxième lecture tirée toujours d’Isaïe, le prophète et disons aussi le poète. C’est une lecture de joie et de bonheur. Avec la venue du Messie, le salut nous est donné, alors tout refleurit, tout renait comme en un printemps nouveau. « Alors le désert et la terre aride - nous en raison de nos péchés - désert, terre aride – se réjouiront… ». En latin, nous avons le verbe « laetabitur ». Qui se traduit par « se réjouir », « se livrer à la joie ». « Laetitia » veut exprimer « une joie vive, un allégresse ; le comble de la joie. On traduira aussi ce mot par « beauté, comme si la terre de stérile, d’aride, devenait belle en se parant des ses nouvelles végétations.Et de fait « laetitia » veut dire aussi : « végétation vigoureuse. Telle sera la terre fécondée par le sang de l’Agneau, la grâce divine.

« Que la terre aride donne sa parure, une végétation luxuriante !

« Et la lande exultera » « Exultabit solitudo » « et fleurira comme le lys ».
« Le verbe « exultare » veut dire non seulement sauter, mais bondir, se réjouir vivement.
« Germinans germinabit » : « elle fleurira ». cela me fait penser à la Genèse, au récit de la création. « La semence donnera sa semence, tout arbre donnera son fruit.

Et de fait, la venue du Messie est une deuxième naissance, une deuxième création. Il créa toute chose, nouvelle. »Mirabilius reformasti ».

« La lande, la terre fleurira, elle exultera dans la jubilation et les chants de triomphe. « Exultabit laetabunda et laudans ».

« Ils verront la gloire du Seigneur, la magnificence de notre Dieu ».

On retrouve ici tous les expressions et les chants de Zacharie, d’Elisabeth, de Notre Dame. C’est la même joie qu’ils font tous entendre à la venue du Seigneur, lorsqu’ils parlent du Messie.
Ecoutez ! Souvenez-vous ! Méditez : « D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne à moi. Car votre voix, lorsque vous m’avez saluée, n’a pas plus tôt frappé mes oreilles que mon enfant a tressailli de joie dans mon sein ».
Le chant de Notre Dame : « Mon âme glorifie le Seigneur et mon esprit trésaille de joie en Dieu, mon Sauveur » ;

Il y a une parfaite harmonie entre l’Ancien et le Nouveau Testament. C’est la joie que cause la venue du sauveur.

« Dites à ceux qui ont le cœur troublé : courage, point de peur, voici votre Dieu. Il vient lui-même, Il vous sauvera. « Deus ipse venit et salvabit nos ».

Alors Zacharie pourra chanter comme Isaïe le chantera déjà dans son style fleuri et bucolique :
« Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël
parce qu’il a visité et racheté son peuple
Et qu’il a suscité une force pour nous sauver…pour nous sauver de nos ennemis et du pouvoir de tous ceux qui nous haïssent afin d’exercer sa miséricorde envers nos pères » »
Et je me souviens encore du beau chant du prophète Siméon : « Maintenant, Ô Maître vous laissez partir votre serviteur en paix selon votre promesse, Puisque mes yeux ont vu votre salut que vous avez préparé à la face de tous les peuples, Lumière qui doit dissiper les ténèbres des Nations et gloire d’Israël, votre peuple ».

Aussi la tristesse n’est pas de mise. L’Eglise veut que notre cœur soit dans l’allégresse à la venue du Messie ; Alors l’Eglise fait monter sa prière : « Seigneur réjouis-nous par le lavement de ton Fils unique… »

Enfin la troisième lecture va insister sur la bonne nouvelle de la nuit de Noël et va utiliser Isaïe au chapitre 40. Bonne nouvelle qui sera proclamée par les anges célestes, la nuit de Noël. Mais Isaïe l’avait déjà annoncé dans ce passage : « Montez sur une haute montagne vous qui portez à Sion la bonne Nouvelle. Elevez la voix avec force » « Exalta in fortitudine vocem tuam ». Le Messie est annoncé avec force et puissance.
Les anges seront tels la nuit de Noël : « Ne craignez point car je vous annonce une nouvelle qui sera pour tout le peuple une grande joie. Il vous est né aujourd’hui dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur »

Et c’est alors la venue de la milice céleste louant Dieu avec force acclamation : « Gloria in Exselsis Deo ».
Oui ! Elevez la voix avec force, vous qui portez à Jérusalem la bonne Nouvelle. Elevez la voix. Ne craignez rien. Dites aux villes de Juda : « Voici votre Dieu. Voici que le seigneur vient avec puissance, son bras lui soumet tout. Voici avec lui, le prix de sa victoire, le fruit de sa conquête marche devant lui. Comme un berger, il fera paître son troupeau, de son bras il le rassemblera. Il portera les agneaux sur son sein, lui le Seigneur Notre Dieu ».

Voilà la Bonne Nouvelle : la tendresse du Berger exprimée par cette belle expression : « les agneaux sur son sein ». Le prix de sa victoire sera son propre sang. Sa conquête marche devant lui : nos âmes soumises.

Enfin c’est le très beau texte de la cinquième lecture :

« En ces jours-là, l’ange du Seigneur descendit dans la fournaise auprès d’Azarias et de ses compagnons ; de la fournaise, il écarta la flamme ardente et fit souffler en son milieu comme une brise matinale. La flamme jaillissait à quarante-neuf coudées au dessus de la fournaise. Dans son élan, elle brûla les Chaldéens au service du roi, qu’elle trouva près de la fournaise occupés à l’activer. Mais le feu ne toucha aucunement les trois jeunes gens et ne leur causa ni mal ni douleur »

Tout cela est tout simplement extraordinaire et ne peut pas ne pas faire jaillir de notre cœur le même chant que celui des enfants de la fournaise : « Tous trois alors n’eurent qu’une voix pour louer, glorifier et bénir Dieu dans la fournaise » : « Tu es béni, Seigneur Dieu de nos pères, digne de louange et de gloire à jamais.
Béni est ton nom, glorieux, saint, digne de louange et de gloire à jamais
Tu es béni dans le temple saint de ta gloire, digne de louange et de gloire à jamais
….
Tu es béni, toi qui trônes sur les chérubins et qui scrutes les abîmes, digne de louange et de gloire à jamais… ».

 

III – L’année eucharistique.

 

Poursuivons notre étude de saint Thomas sur le sacrement de l’Eucharistie. Nous avons, la semaine dernière, abordé la question 74 consacrée à la matière du sacrement. Nous savons que le pain de froment, matière nécessaire de ce sacrement peut être validement consacré, qu’il soit fermenté ou qu’il soit azyme. Mais pour la licéité, seul le pain fermenté doit être employé dans l’Eglise grecque ; et, seul, le pain azyme, dans l’Eglise latine.

Avec le pain, il y a une autre matière, requise elle aussi pour le sacrement de l’Eucharistie. C’est le vin.
Nous abordons aujourd’hui, cette étude. Saint thomas étudie la chose dans les quatre derniers articles de la question 74, soit les articles 5 à 8. Pour le vin, Saint Thomas examine sa nature. C’est l’article 5. Si la coutume d’y ajouter de l’eau est convenable. C’est l’article 6. Si cela est même de nécessité. C’est l’article 7. Enfin, en quelle quantité ? C’est l’article 8.

Voyons tout cela.
Et d’abord voyons : si la matière propre de ce sacrement est le vin de vigne ?

Saint Thomas se pose la question : si le vin de vigne est vraiment requis pour réaliser le sacrement. Pourquoi ne pas prendre du vin de pommes du vin de grenades, de mûres ou de tous autres fruits. C’est bien avec n’importe quelle sorte d’eau que le baptême peut être donné. Ergo. Le vinaigre ne pourrait-il pas aussi être la matière de ce sacrement ? Et pourquoi aussi ne pas utiliser le « verjus » ou le « moût » de raison. Tout cela est bien le produit de la vigne.

Ce sont les trois objections qu’il propose.

Dans le « sed contra », Saint Thomas fait remarquer que « comme le Seigneur se compare au grain de froment ; de même aussi il se compare à la vigne, quand il dit en Saint Jean : « Je suis la vigne, la vraie » (Jn 151). Or, nous l’avons vu, seul le pain de froment est la matière de ce sacrement. Donc seul le vin de vigne est la matière propre de ce sacrement.

Dans le corps de l’article, Saint Thomas nous donne trois raisons pour justifier la coutume d’user du vin de vigne comme matière de ce sacrement.

C’est tout d’abord ce qui fit Notre Seigneur lui-même. Il institua ce sacrement avec du vin de vigne comme le laisse entendre à l’évidence cette phrase prononcée par Notre Seigneur, lors de la Cène. Il dit à ses disciples : « Je ne boirai plus de ce fruit de la vigne ». (Lc22 18)
Donc « Primo quidem, propter institutionem Christi qui in vino vitis hoc sacramentum instituit ». L’évangile dit clairement la chose.

Deuxièmement : pour la matière de ces sacrements est pris ce qui proprement et communément à cette espèce. Or lorsque l’on parle généralement et communément de « vin », on veut parler du « vin de vigne ». Il est en de même lorsque l’on parle de pain. Si on n’ajoute rien, si on ne spécifie pas, on entend communément le « pain de froment ». Ainsi le vin de pommes ou de grenades ou de mûres ou de tout autre fruit sont plus des liqueurs que du vin même si ce sont des boisons alcoolisées. Elles ne pourraient être appelées « vin » que par « similitude ». « Alii autem liquores vinum dicuntur secundum quandam similitutidinem ad vinum vitis ». Ces liqueurs sont donc inaptes à être matière de ce sacrement. C’est la réponse qu’il donne à la première objection. .

Troisièmement, parce que le vin de vigne convient davantage à l’effet de ce sacrement qui est la joie spirituelle ; car il est écrit : « Le vin réjouit le cœur de l’homme » Ps 103 15). Autrement dit, parce qu’il y a une belle similitude entre l’Eucharistie et le vin de vigne, le vin de vigne est apte à être la matière de l’Eucharistie. C’est une raison symbolique.

Quant au vinaigre : Certes, il vient bien du vin mais le vin ne devient vinaigre que par corruption.. Le vinaigre, qui n’est plus du vin, ne peut être matière de ce sacrement.
Toutefois le vin tournant seulement à l’aigre peut être matière de ce sacrement.

Quant au « verjus » : le « verjus est « in via », il est en voie de génération. Mais il n’est pas encore du vin. Donc il est inapte à être matière de l’Eucharistie.

Quant au moût de raisin : on peut en faire la matière de ce sacrement, parce que le moût a déjà l’espèce de vin. Mais on ne doit mêler à ce sacrement des raisins entiers ; parce que déjà il y aurait là quelque chose en plus du vin. Il est défendu aussi le moût qui vient d’être exprimé du raisin dans le calice ; parce qu’il y a là quelque chose qui ne convient pas, en raison de l’impureté du moût. Toutefois, on pourrait le faire, en cas de nécessité. Et si l’on navait pas d’autre moyen de se procurer du vin nécessaire au sacrifice.

Concluons sur ce point : le vin de vigne est la matière propre du sacrement de l’Eucharistie. Il est, pour la validité de ce sacrement, de nécessité absolue. Retenons-en la raison. Avec les auteurs du catéchisme de Trente disons : « L’Eglise catholique a toujours enseigné que notre Sauveur avait employé du vin dans l’institution de ce Sacrement, puisqu’il dit lui-même : « je ne boirai plus de ce fruit de la vigne jusqu’à cet autre jour… ».( p. 210) Vous remarquerez encore que les auteurs reprennent toujours l’enseignement de Saint Thomas, même à la lettre.

Est-ce que de l’eau doit être mélangée au vin ?

On a coutume dans l’Eglise de mêler au vin du calice de l’eau. Saint Thomas dans les trois derniers articles de cette question s’interroge sur cette coutume.

Et tout d’abord sur le fait lui-même.

L’article 6 est un belle article, riche d’ enseignements.

Saint Thomas nous présente d’abord trois objections qui seraient de nature à condamner cette coutume ecclésiale de mettre de l’eau dans le vin.
Ce n’est pas ce qui est dit dans l’oblation de Melchisédech. En effet dans le récit de la Genèse, on ne voit pas que ce grand prêtre est offert autre chose que du pain et du vin. (cf Gen 16 18). Or le sacrifice du Christ a été figuré par l’oblation de Melchisédech. Donc il semble que dans ce sacrement, il ne faudrait pas ajouter de l’eau. Ou il est la figure stricto sensu ou il ne l’est pas.

De plus il est clair que chaque sacrement a sa propre matière. L’eau est la matière du baptême en tant qu’il est une ablution. Donc il ne peut être la matière de l’Eucharistie.

Enfin pourquoi ajouter de l’eau au vin puisqu’on n’ajoute rien à l’eau.

Dans le « sed contra » saint Thomas en appelle à la théologie positive. C’est ce qu’enseigne le pape Alexandre Ier. On doit offrir en sacrifice le pain et le vin mêlé d’eau ».

Saint Thomas justifie la coutume de l’Eglise : « Vino quod offertur in hoc sacramento debet aqua, misceri ». Il le démontre par quatre arguments.

Mais avant cela, vous remarquerez la phrase de saint Thomas : « Vino quod offertur in hoc sacramento… » ici encore et toujours, on remarquera l’identité, pour Saint Thomas, du sacrement et du sacrifice, ou plutôt la réalité du sacrifice désignée par lui du nom même de sacrement. C’est très important.

Premier argument : il le prend toujours de l’institution par Notre Sauveur de la sainte Eucharistie On croit en effet et ceci avec toute probabilité, que notre Sauveur institua l’eucharistie de cette manière : avec du vin mêlé d’eau. C’était la coutume dans ce pays de Palestine comme le laisse entendre les Proverbes (9 5) : Bibite vinum quod miscui vobis ». Buvez le vin mêle que je vous ai préparé ».

Deuxième argument : cette coutume est parfaite car elle explicite très bien le fait que ce sacrement est la représentation de la passion du Christ. Or dans la Passion du Christ, on sait que du côté du Christ coula « et du sang et de l’eau ».

Vous remarquerez également ici l’ expression de saint Thomas. Il dit bien que ce sacrement de l’Eucharistie « représente la Passion du Seigneur » : « Hoc convenit repraesentationi Dominicae passionis » qui se fait dans la célébration de ce sacrement et qui constitue ce que nous appelons du nom de « sacrifice ».

Troisième argument : cette coutume est parfaite , elle permet de signifier au mieux un des effets de ce sacrement qui est l’union du peuple chrétien au Christ. L’eau dans l’Apocalypse, représentant le peuple de Dieu.
Remarquez, au passage, cette belle définition de l’effet de l’Eucharistie : « unio populi Christiani ad Christum ».

Quatrième argument : cela convient également à l’effet dernier de ce sacrement qui est l’entrée dans la vie éternelle »

Vous allez voir combien les auteurs du catéchisme du Concile de Trente reprennent à merveille ces quatre arguments : « cependant l’usage a toujours été dans l’Eglise de mêler un peu d’eau au vin. D’abord parce que l’autorité des Conciles et le témoignage de saint Cyprien nous apprennent que Notre Seigneur le fit lui-même ; ensuite parce que ce mélange nous rappelle le sang et l’eau qui coulèrent du côté de Jésus-Christ. Enfin l’eau, comme nous le voyons dans l’Apocalypse, représente le peuple. L’eau mêlée au vin exprime très bien l’union du peuple fidèle avec Jésus-Christ, son chef. (p. 211)

On ne peut pas être plus fidèle à la pensée de saint Thomas.

Mais, au fait, ce mélange de l’eau au vin est-il de nécessité pour ce sacrement ?
C’est l’article 7. saint Thomas répond : « le mélange d’eau au vin, bien que souverainement convenable et absolument de précepte , n’est pourtant pas de nécessité pour le sacrement de l’Eucharistie. L’argument de Saint thomas est intéressant. Il rappelle que l’eau dans le calice ne signifie que la participation des fidèles au Christ. Or cette participation des fidèles au Christ, n’est pas de l’essence de ce sacrement de l’Eucharistie. Ce sacrement de l’Eucharistie est parfait i.e. se réalise, dans son essence, par la seule consécration de la matière au corps et au sang de notre Seigneur. Donc l’eau n’est pas de nécessité absolue pour sa perfection : « Il s’ensuit, dit Saint thomas, que l’apposition de l’eau n’est pas de nécessité pour le sacrement ».
Donc l’apposition de l’eau est requise dans ce sacrement eu égard à son symbolisme, non quant à l’essence de ce sacrement.


Enfin qu’elle est la quantité d’eau requise ? C’est l’article 8. Saint Thomas répond qu’il faut une petite quantité d’eau pour qu’elle puisse se changer au vin.

Résumons l’enseignement de Saint Thomas sur cette question de la matière du sacrement de l’Eucharistie :
La matière du sacrement de l’Eucharistie, à la prendre en elle-même, doit être du pain et du vin. Le pain doit être du pain de froment que l’on prend dans l’Eglise latine, à l’état de pain azyme ; dans l’Eglise grecque, on emploie le pain fermenté. Le vin doit être de vigne ; on y mêle de l’eau, sans que pour autant ce soit de nécessité pour le sacrement, ; et cette eau qu’on y mêle ne doit y être mêlée qu’en petite quantité ;
Ainsi du pain de froment azyme et du vin de vigne mélangé d’un peu d’eau, voilà quelle doit être la matière du sacrement de l’Eucharistie.

 


IV – La vie spirituelle : « Pratique de la perfection chrétienne » du Père Rodiguez.

 

A- Résumé de la pensée du chapitre VIII

Nous reprenons notre lecture du livre du Père Rodriguez que nous avions abandonnée ces deux dernières semaines en raison de l’actualité. Mais ne nous laissons pas trop distraire par le « monde ». Notre âme a aussi ces droits. Et la perfection de notre âme doit être notre grand souci en cette vie pour gagner la vie éternelle, notre grand et ultime bien éternellement possédé.

Dans ce chapitre VIII, le Père Rodriguez nous donne une très important conseil. Je pourrais le résumer ainsi. « O mon âme, ne crains pas de mettre la barre très haute ». « Ne cherches pas une vie « commune ». Au contraire, cherche à imiter la vie des saints. Tu ne le peux ! Peut-être… Si tu le constates, cela t’humiliera et tu garderas ainsi ton âme tendue vers la perfection » .Voilà un bon conseil. Il le précise en ces mots : « pour qu’(une âme) puisse atteindre à un certain degré de vertu, il faut que elle aspire à un degré plus élevé ». Et il donne un bel exemple de l’arc tendu : « si l’on veut que la flèche arrive au but, il faut qu’elle soit bien tendue ».

Voilà l’objet de ce nouveau chapitre.
Il fonde ce conseil sur l’Ecriture Sainte et plus particulièrement sur Saint Paul en sa première Epître aux Corinthiens :« Désirez les dons les plus parfaits, et je vais vous montrer encore une voie plus excellente » (1 Cor., 12, 31).
Il compare l’âme peu soucieuse de cette « tension » spirituelle, aux « vierges folles » de l’Evangile ou à « l’homme à un seul talent ».On connaît leur destinée : la perte éternelle.
Parmi les vertus qu’il faut surtout désirer, il insiste sur l’humilité, la soumission à la volonté de Dieu quelque en soit le prix, la pratique de la charité.

Aussi pour garder en son âme ce saint zèle, il recommande surtout l’imitation de Jésus-Christ et l’imitation des saints.

B – le texte du chapitre VIII


CHAPITRE VIII.


Qu’un moyen très efficace, pour parvenir à la perfection, c’est de tendre,
dans tous ses actes, à ce qu’il y a de plus élevé.

Il est encore un moyen qui peut aider puissamment l’essor de notre âme vers les pures sphères de la perfection ; ce moyen consiste à avoir toujours le regard fixé sur le point culminant de la sainteté, ainsi que saint Paul en donne le conseil aux Corinthiens : « Désirez les dons les plus parfaits, et je vais vous montrer encore une voie plus excellente (1 Cor., 12, 31). Si nous voulons que nos œuvres ne demeurent pas en deçà du commandement obligatoire, il est indispensable que nos intentions et nos désirs aillent au-delà. Une simple comparaison va nous rendre palpable cette importante vérité : un arc dont la corde est mollement tendue n’enverra pas le trait au milieu du but, si on ne vise un peu au-dessus. L’homme peut se comparer à cet arc ; le péché l’a rendu si misérable et a tellement détendu toutes ses facultés, que, pour qu’il puisse atteindre à un certain degré de vertu, il faut que son âme aspire à un degré beaucoup plus élevé.
Mais, direz-vous peut-être, tous mes désirs, toutes mes prétentions, se bornent à éviter le péché mortel.

Hélas ! mon frère, que je crains pour vous que vous n’arriviez pas même à ce résultat ! votre arc est bien lâche ! en ajustant plus haut, vous pourriez peut-être atteindre votre but ; mais, en bornant là votre visée, j’ai bien peur que vous ne restiez au-dessous, et je vous vois en grand danger de tomber dans l’inimitié de Dieu.

Le religieux qui se propose d’observer non seulement les préceptes, mais encore les conseils, et qui veut éviter avec autant de soin que le péché mortel les fautes vénielles et les imperfections, celui-là prend le bon chemin pour ne pas pécher mortellement, et, dût-il, à raison de sa fragilité naturelle, ne pas atteindre son but et demeurer un peu en deçà, comme il n’aurait failli qu’en matière de simple conseil ou de règle secondaire, il tomberait seulement dans une imperfection, ou, tout au plus, dans une faute vénielle.

Celui, au contraire, qui ne vise qu’à éviter le péché mortel, pour peu que la corde de l’arc soit détendue, tombera certainement dans l’abîme auquel il pensait échapper : et voilà pourquoi nous voyons les gens du monde faire tant de chutes mortelles, tandis que les bons religieux, grâce à l’infinie bonté du Seigneur, en sont préservés. Félicitons-nous de cet avantage, un des plus précieux parmi ceux que nous offre la vie monastique, et pour lequel nous devons d’éternelles actions de grâces à Dieu, qui nous a appelés à ce saint état. Fût-il le seul, que nous ne saurions encore trop remercier la Providence de nous avoir donné une vocation qui doit être considérée comme une de ses plus insignes faveurs. J’espère, en effet, de la bonté divine, que vous passerez toute votre vie sans péché mortel, tandis qu’en restant dans le monde, à peine, peut-être, fussiez-vous demeurés un an, un mois, une semaine, sans avoir ce malheur.
Mais plus cette faveur est grande, et plus il faut craindre d’en abuser. Malheur au religieux tiède et relâché, qui s’inquiète peu de transgresser les règles et n’a nul souci de la perfection !

Voulez-vous sincèrement devenir parfait ?
- Proposez-vous, avant tout, une humilité sans bornes, qui vous fasse accepter avec joie les injures et les mépris, et Dieu veuille que vous parveniez à les supporter avec patience ! -
- Proposez-vous une soumission complète, absolue, de votre volonté et de votre intelligence à la volonté de vos supérieurs, et si vous avez le bonheur, dans les nombreux devoirs qu’impose l’obéissance, de ne pas faillir gravement, remerciez-en le Seigneur tous les jours de votre vie.
- Appliquez-vous à porter la résignations et le calme de l’âme dans les épreuves difficiles et exceptionnelles, et estimez-vous bienheureux si vous pouvez réussir à conserver ce calme et cette résignation dans les luttes moins périlleuses que vous avez tous les jours à soutenir contre vos ennemis du dedans et du dehors.
- C’est par un admirable effet de sa sagesse, dit saint Augustin (Lib. de perf. Just. Ratiocin., t. 7.), que Dieu a mis en tête de ses commandements le plus élevé et le plus parfait de tous : « Vous aimerez Dieu de tout votre cœur, de toute votre volonté, de toute votre âme et de toutes vos forces » (Luc., 10, 27.). « C’est là le premier et le plus grand des commandements » (Matth., 22, 38), « et la fin de tous. » (1 Tim., 1, 5.).

L’excellence de ce précepte, disent les saints et les théologiens, est tellement supérieure, qu’il n’est pas donné à l’homme d’y satisfaire complètement dans sa vie mortelle ; sa perfection suprême n’est que dans le ciel, parce qu’il n’appartient qu’à l’état de béatitude de s’occuper de Dieu exclusivement, de remplir entièrement de son amour notre cœur, notre volonté, notre entendement et toutes nos facultés. Nous ne pouvons, sur la terre, nous élever si haut dans la sphère spirituelle, parce que nous sommes enchaînés par les besoins du corps, et pourtant ce précepte si sublime, le Seigneur le place le premier sur les tables de sa loi, afin que nous comprenions jusqu’à quel degré de l’amour divin nous devons nous efforcer d’atteindre, et que nous dirigions vers ce but tous nos désirs et tous nos efforts. « Pourquoi, dit saint Augustin, nous est-il commandé d’aimer Dieu de tout notre cœur, bien que ce précepte ne puisse être accompli dans cette vie ? parce qu’on ne court pas bien, si on ne sait où il faut courir » (Aug.,ubi supra.). Si Dieu a mis devant nos yeux un commandement surhumain, c’est qu’il a voulu qu’en fixant nos regards sur un but si élevé, nous fissions tous nos efforts pour en approcher le plus possible.

Saint Jérôme, commentant ces paroles du Psalmiste : « Heureux l’homme qui a mis en vous son appui et qui a placé dans son cœur les degrés par lesquels il s’élève jusqu’à vous » (Psal. 83, 6), s’exprime ainsi : « L’homme qui est juste et saint s’efforce sans cesse de grandir en vertu et en perfection ; c’est là l’intime et constante préoccupation de son esprit, le centre vers lequel convergent toutes les aspirations de son cœur, selon cette parole du Sage : « Cogitationes justi semper in abundantia » (Prov., 11, 6) ; mais le pécheur et le serviteur imparfait ne s’inquiètent pas de cela ; ils se contentent d’une vertu commune, ils ne visent qu’à une perfection médiocre, et quand le relâchement arrive, ce qui ne manque jamais, ils descendent encore d’un degré et se trouvent au-dessous du résultat qu’ils s’étaient proposé : « Sanctus ponit ascensiones in corde suo, peccator descentiones. » (Hier. Sup. sup. Ps. 83).
« Une vie commune me suffit ; tout ce que je désire, c’est d’être sauvé avec les plus obscurs des élus, je ne prétends pas à la sainteté et à la gloire des apôtres ; je ne dirige pas mon vol si haut, je me borne à marcher sur la terre et dans une voie unie et facile ». Ce langage, dit Gerson (Gers., 3, p. Tract. de Myst.), à qui nous empruntons ce passage, est celui d’un grand nombre de personnes, ou plutôt du plus grand nombre ; car c’est ainsi que parlent les chrétiens imparfaits, qui forment la foule, tandis que les parfaits sont le petit nombre. « Il y en a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus » (Matth., 20, 16), dit le Sauveur. « Large est la porte, spacieuse est la voie qui conduit à la perdition, et beaucoup la suivent ; mais qu’elle est étroite, la voie qui conduit à la vie, et combien peu savent la trouver ! (Matth., 7, 13 et 14.).

Ces hommes, amis de la voie large, saint Augustin (In illud. Ps. 8, 8. Pecora campi.) les compare à « ces animaux des champs » dont parle le Psalmiste. Comme ces animaux, ils ne se plaisent que dans les endroits vastes où ils peuvent errer en liberté, et ne veulent se plier à aucune règle, à aucune discipline. Ceux qui disent : Une vertu moyenne me suffit ; pourvu que je me sauve, je suis content ; je ne vise pas à une perfection plus haute ; ceux-là, dit encore Gerson, témoignent par cela seul de leur état d’imperfection, puisqu’en parlant ainsi ils refusent d’entrer par la porte étroite. Or, ajoute-t-il, ces âmes tièdes, qui pensent que c’est assez pour elles de se sauver avec le commun des élus, sont grandement menacées de partager le sort des vierges folles (Matth., 5, 12 et 31), qui s’endormirent insouciantes de la venue de l’époux, et du serviteur paresseux qui se contenta de garder soigneusement et d’ensevelir dans la terre le talent qu’on lui avait confié, au lieu de le négocier et de le faire valoir par son industrie. Qu’arriva-t-il à ce serviteur négligent ? son talent lui fut enlevé, et lui-même jeté dans les ténèbres extérieures. L’Evangile n’assigne pas d’autre cause à sa condamnation que le tort de n’avoir pas fait fructifier le talent qu’il avait reçu de son maître.

Pour rendre plus sensibles l’horreur et la honte d’un semblable état, Gerson se sert d’une parabole : Représentez-vous, dit-il, un homme de race illustre, très puissant et très riche, et père de plusieurs fils, doués tous de qualités capables d’augmenter encore l’importance de son patrimoine et l’éclat de son nom. Tous répondent aux espérances qu’ils avaient données ; un seul, oubliant ce qu’il doit à son origine, passe sa vie dans les plaisirs et l’oisiveté et ne veut rien faire pour se rendre digne des talents que le ciel lui a départis et de la noblesse de son père. Il pourrait s’élever et se tenir au niveau de ses frères, mais il dit qu’une condition médiocre lui suffit, qu’il n’aspire pas à un degré plus élevé de considération et de fortune, et ne veut se donner aucune peine pour y arriver. Son père l’appelle auprès de lui, l’exhorte, le conjure de revenir à des sentiments plus nobles, lui parle des riches facultés dont il est doué, de l’illustration de sa race, de l’exemple de ses ancêtres et de ses frères. Si toutes ces représentations sont inutiles, si ce fils dénaturé refuse de sortir de sa vie ignominieuse et de travailler à devenir meilleur, quelle douleur pour son père ! Eh bien, continue Gerson, cette histoire est la nôtre : nous sommes les enfants de Dieu et les frères de Jésus-Christ. Notre Père céleste nous adresse de touchantes exhortations pour nous exciter à la perfection. Mes fils, nous dit-il, ne vous contentez pas d’une vertu commune, « mais soyez parfaits comme votre père céleste est parfait » (Matth., 5, 48.). Considérez la perfection de votre Père, et conduisez-vous d’une manière digne de votre origine. Montrez que vous êtes les enfants de votre Père qui est dans les cieux : « Ut sitis filii Patris vestri, qui in coelis est. » (Matth., 5, 45.).

Inspirez-vous aussi de l’exemple de vos frères. Au-dessus de vous, voyez votre frère aîné Jésus-Christ ; c’est lui qui est l’honneur de toute notre race, et qui, pour lui rendre sa première splendeur, n’a pas hésité à donner son sang et sa vie, sans croire les mettre à un trop bas prix. Mais, si la sublimité d’un tel modèle décourage votre faiblesse, abaissez vos regards sur vos autres frères, faibles comme vous, nés comme vous dans la fange du péché, comme vous pleins de passions, de tentations et d’inclinations perverses.

C’est pour compatir à notre indigence morale que L’Église, notre mère, place constamment devant nos yeux l’exemple des saints et célèbre leur fête.

Mais, si vous voulez choisir vos modèles plus près de vous, regardez les exemples de vos frères en religion, des membres de notre compagnie ; d’un saint Ignace, d’un saint François Xavier, d’un saint François de Borgia, d’un Édmond Campian, et de tant d’autres dont vous connaissez les noms et les vertus. Si, à la suite de tels maîtres, vous ne vous sentez pas saisi de la sainte ambition des grandes choses, des actes de haute vertu et de perfection, et si vous vous contentez encore d’une vie commune et d’une piété ordinaire, je vous le dis, vous contristez le cœur de Dieu, notre Père, vous scandalisez vos frères, et vous méritez que votre Père céleste ne vous reconnaisse pas pour son fils, que vos frères vous disent : Tu n’es pas notre frère !

C’est pour vous sauver de ce péril que nous vous exhortons à ouvrir votre cœur à des pensées hautes et généreuses, à élever vos yeux et votre âme vers les sommets de la perfection, afin que si, par l’effet de l’humaine faiblesse, vous n’atteignez pas à cette hauteur, du moins vous ne restiez pas trop bas, et trop au-dessous du but. Faites comme les commerçants qui commencent toujours par demander un prix exagéré de leurs marchandises, pour les vendre au moins à leur juste valeur, d’après ce proverbe : « Demander trop pour avoir assez. » « Iniquum petas, ut justum feras. »

On doit comprendre maintenant combien il importe que dans nos exhortations réciproques, dans nos entretiens spirituels, nous portions toute notre attention sur des actes de vertu éminente ; nous excitant, par exemple, à pratiquer l’humilité jusqu’au mépris de soi-même, la mortification jusqu’à l’anéantissement des passions et de tout appétit déréglé, la soumission envers Dieu jusqu’à n’avoir d’autre volonté que la sienne, à nous y résigner complètement, avec joie, avec bonheur ; enfin, en nous élevant toujours dans la méditation des autres vertus chrétiennes jusqu’au degré le plus sublime, jusqu’à l’héroïsme de la sainteté.

Quelqu’un pourra me dire : « Pourquoi proposer un but si élevé à des hommes faibles ou novices dans le service de Dieu ? Si vous mesuriez vos conseils à notre débilité spirituelle, si vous nous traciez une voie unie et facile, peut-être alors pourrions-nous vous suivre ; mais ces perfections extraordinaires qui emportent l’âme jusqu’au troisième ciel, ce n’est pas à nous qu’elles s’adressent, mais à un Paul et à d’autres saints d’une vertu aussi sublime. »

Vous vous trompez ; c’est bien à vous que ces perfections s’adressent, c’est bien à vous que nous proposons d’en tenter la conquête, et la raison que vous alléguez pour décliner un pareil effort de vertu est précisément celle qui nous détermine à l’exiger de vous. Vous dites que nous ne devons pas vous demander beaucoup, parce que vous pouvez peu de chose. Eh bien, je vous dis, moi, tout le contraire, et je vous montre un but très-élevé, afin qu’en y fixant vos regards, s’il vous arrive de ne pas y atteindre, vous arriviez au moins à franchir la limite inférieure des devoirs obligatoires, et ne demeuriez pas en deçà des bornes posées aux conditions du salut.

Vous retirerez encore un grand avantage, en vue du même résultat, de la lecture de la Vie des Saints et de la méditation de leurs éminentes et héroïques vertus. C’est dans ce but que L’Église nous met tous les jours un de ces grands modèles sous les yeux, afin que si nous ne pouvons atteindre au même degré de perfection, nous fassions au moins tous nos efforts pour vaincre notre apathie et notre tiédeur.

Cette pratique pieuse, en nous montrant toute la distance qui nous sépare de la sainteté de ces saints modèles, aura encore pour nous un autre effet salutaire, celui de nous humilier profondément et de nous inspirer un vif sentiment de notre indignité. Saint Grégoire (Lib.14 Mar., c. 9), commentant ces paroles : « Il regardera les hommes, et dira : J’ai péché : » »Respicit homines, et dicit : Peccavit »(Job ., 33, 27), dit qu’il en est de l’âme, lorsqu’elle contemple les exemples illustres et la vie mémorable des saints, comme des pauvres , qui, devant les splendeurs de la richesse et de la puissance, sentent plus douloureusement leur misère ; elle s’humilie davantage et connaît mieux son indigence.

On lit dans saint Jérôme (in vita Pauli, primi eremiti) que saint Antoine, étant allé visiter saint Paul, le premier ermite, fut tellement ému par le spectacle surhumain de sa sainteté, que, lorsqu’à son retour ses disciples, accourus à sa rencontre, lui demandèrent : « Père, d’où venez vous ?—Ah ! malheureux pêcheur que je suis, répondit-il en pleurant ! que je suis indigne de porter le nom de religieux ! J’ai vu Élie, j’ai vu Jean-Baptiste dans le désert ! »

On raconte quelque chose de semblable du grand Macaire. Ayant passé quelque temps dans un monastère et admiré la haute vertu, l’angélique dévotion des religieux qui l’habitaient, quand il fut revenu parmi ses disciples, il se mit à pleurer avec eux en s’écriant : « Malheureux que je suis ! c’est bien à tort que je porte le nom de solitaire ! J’ai vu des solitaires ; mais moi je ne suis pas digne de ce nom : » « Vidimonachos, non sum ego monachus »(Machar.) Et il continua à se lamenter ainsi tous les jours de sa vie.

Ce reproche, que de grands saints s’adressaient dans l’excès de leur humilité, nous pouvons nous le faire avec plus de justice. Ayons donc constamment présents à nos yeux les exemples des saints et leurs vertus héroïques. Si, par cette contemplation, nous n’arrivons pas à imiter en tout ces glorieux modèles, au moins nous essayerons de suppléer aux mérites qui nous manquent par l’humilité. Nous aurons ainsi trouvé, de toute manière, un puissant secours dans ce moyen de perfection ».


V – Le livre de Jacques Duquesne et la notre du président de la « commission doctrinale » de l’Episcopat français : Mgr Bruguès, évêque d’Angers.

 

Dans la chronique de mon dernier « Regards sur le monde », celui du 12 décembre 2004, j’ai longuement parlé et présenté le livre de Jacques Duquesne : « Marie ». Ce livre fut publié alors que le Souverain Pontife était à Lourdes, le 15 août 2004. Il fut recommandé par tous les « médias ». Ce fut en conséquence un vrai succès de librairie.

Le malheur c’est que ce livre sur « Notre Dame » est un livre plein d’hérésies. La page qui se veut de synthèse, la page 169, permet de le dire sans risque de se tromper. On a même pu présenter ce livre et son auteur, Jacques Duquesne, comme animés d’une volonté claire de « déconstruire » la dogmatique mariale.

Le malheur veut aussi que ce « journaliste vulgarisateur », Jacques Duquesne, qui s’était déjà fait connaître, voici dix ans, par un livre intitulé « Jésus », a pris quasi l’ensemble de sa documentation et ses idées chez un théologien, dominicain, le RP Cerbelaud, professeur à l’université catholique de Lyon. Ce dernier, il y a un an, en 2003, publiait aux éditions du Cerf, un livre intitulé « Marie, un parcours dogmatique ». Dans cet ouvrage « articulé en douze thèses, l’auteur tend à montrer que toute la dogmatique mariale repose sur l’affirmation de la conception virginale et que c’est « l’article qui fait tenir ou tomber toute la mariologie » (p293). (Ce qui n’est pas juste, c’est le dogme de la « Maternité Divine » de Marie qui est la « colonne vertébrale » de tout le traité de Mariologie. Mais peu importe ici).

Ainsi s’il est prouvé que Notre Dame ne fut pas « toujours Vierge », tout l’édifice doctrinal sur la Vierge Marie, toute la foi mariale de l’Eglise seraient, de cette façon, remis en cause. Et Jacques Duquesne reprend en trois chapitres de son livre cette argumentation. Il intitule le troisième chapitre sur la question, c’est son sixième chapitre : « Marie, Mère de famille nombreuse » et ne craint de conclure : « Qui croit que Jésus, vrai Dieu, était en même temps vrai Homme, ne doit pas craindre d’admettre qu’il ait vécu dans une vraie famille, où le père et la mère avaient de vraies relations, et dont les enfants étaient nombreux, comme c’était alors la règle » (p98) Il fonde, entre autre, cette affirmation sur l’expression « les frères de Jésus »que l’on trouve dans l’Evangile. Cette expression, pour lui, est claire. Marie eut des relations avec Joseph. Ergo.

Yves Chiron, dans Alethéia du 3 octobre 2004, a pu conclure sa note de présentation du livre « Marie » en ces termes : « Entre le R.P. Cerbelaud et Jacques Duquesne, il y a la différence entre un théologien érudit et un journaliste vulgarisateur, mais il y a une identité dans la volonté de « déconstruire » la dogmatique mariale ». (p3)

« Déconstruire » la dogmatique mariale.

Ce n’est pas rien.

Cela a ému plus d’un chrétien, plus d’un laïc, plus d’un prêtre et en dernière date le Père Daniel-Ange. Dans un article pathétique publié dans le Journal « L’Homme Nouveau », du 5 décembre, ce dernier se permet même, avec respect, d’interpeller l’Episcopat français. Un silence plus longtemps entretenu sur un tel livre de la part de « ceux qui sont gardien de la foi » finira par poser un problème ! Aussi se tournait-il, avec passion, vers les évêques.

Mgr Jean-Louis Bruguès, président de la commission doctrinale de l’épiscopat français annonçait, enfin, dans le journal « La Vie », la prochaine publication de la « note » de l’épiscopat.

Jean Madiran nous l’annonça dans Présent du 8 décembre sous un titre « meurtrier », « Le blasphémateur ». Il écrit : « L’hebdomadaire « La Vie » a recueilli dans son numéro daté du 25 novembre les « explications » de Mgr Jean-Louis Bruguès, président des commissaires doctrinaux de l’épiscopat français, à propos du misérable livre de Jacques Duquesne intitulé Marie.
Voici le texte de cette annonce : « Ce livre important, publié dans une collection réputés pour son sérieux, contient des affirmations qui méritent discussion. L’auteur se trompe sur quelques points. Mais nous ne sommes pas Rome et le Saint-office. La note que nous préparons n’est pas une condamnation. C’est une réflexion critique. Pas plus pas moins ». .

Jean Madiran nous dit que ce texte date du 23 novembre 2004.

Ce texte de l’ annonce de la « note doctrinal » en étonna plus d’un.

J’en relevais moi-même les termes. Je le rappelle ici. Ce livre est dit « livre important », sans plus ample explication…Cela doit être même un livre sérieux étant donné le des éditions qui ont accepté de le diffuser : le Cerf. Certaines affirmations méritent seulement « quelques discussions ». Pas plus ! Et de toute façon « aucune condamnation » de ce livre ne sera prononcée.

Il y avait de quoi se « fâcher ». Je comprenais assez bien le titre « fracassant » de Jean Madiran dans Présent : « le blasphémateur ».

D’autant que cet évêque d’Angers préside une commission doctrinale qui jusqu’ à ce jour a publié trois communiqués tout à fait « scandaleux » que Jean Madiran analyse, avec quelle finesse et quelle foi, dans son récent petit livre qu’il faut lire : « la trahison des commissaires » aux éditions « Consep ».

Cette annonce de la publication de la « note doctrinale » du « président-commissaire », Mgr Bruguès, nous laissait vraiment dans l’inquiétude, dans la crainte.

Et puis quelques jours après le 8 décembre, exactement le 13 décembre, cette « note » de la commission doctrinale de l’épiscopat français est publiée in extenso sur le site de l’épiscopat. C’est une « bonne » note. Contrairement à ce qui était annoncé, elle est une vraie condamnation du livre. Elle en donne la raison. Avec grande simplicité et foi, elle rappelle les dogmes mariaux et les rattachent très heureusement aux dates des fêtes mariales connues du peuple.

Voici cette « note doctrinale ».

Et d’abord sa présentation telle que je l’ai lue sur le site de l’épiscopat français :
« Marie, Mère de Dieu ».
« Durant l’assemblée plénière des évêques de France, à Lourdes, Mgr Jean Louis Bruguès, évêque d’Angers et président de la Commission doctrinale, a fait une mise au point concernant deux ouvrages sur Marie, récemment parus qui remettent en cause les dogmes mariaux » (Samedi 20 novembre)

Voici maintenant la note proprement dite :

« L’année du rosaire s’est terminée en octobre 2003. Les catholiques de France viennent de recevoir la visite du Saint-Père, venu en pèlerinage à Lourdes. Nous nous apprêtons à célébrer le 8 décembre prochain l’anniversaire de la proclamation du dogme de l’Immaculée Conception (1854)

De nombreux livres et articles ont été publiés dans ces occasions, souvent d’une belle venue : ils auront nourri le peuple de Dieu. En revanche, deux d’entre eux manquent gravement à la foi catholique : le livre de M Jacques Duquesne, « Marie » (Paris 2004) et celui du Père Dominique Cerbelaud ; « Marie, un parcours dogmatique » (Patis 2003). Le premier, par sa diffusion et la coïncidence de sa sortie avec la visite du pape à Lourdes, le 15 août, a même constitué aux yeux de beaucoup, une véritable provocation.

Dans le style de la théologie scientifique, le livre du Père Cerbelaud ne fait, en réalité, que fournir le gros des arguments de la thèse de M Duquesne : les dogmes sur Marie seraient des inventions, nées dans l’Eglise pour des motifs repérables de psychologie collective. Ces deux auteurs ne parviennent plus à reconnaître dans le témoignage des Ecritures, les fondements révélés des aspects mariaux de la foi catholique. La Tradition vivante qui conserve et interprète la foi de l’Eglise, le Magistère qui le propose, n’ont pas à leur jugement de valeur probante.

Depuis toujours, l’Eglise a honoré la Vierge Marie d’un culte spécial. La raison en est rappelée par le Concile de Vatican II : « Marie a été élevée par la grâce de Dieu, au dessous de son Fils, au dessus de tous les anges et de tous les hommes comme la Mère très sainte de Dieu, présente aux mystères du Christ ». (Lumen Gentium n°66)

1) Marie est vraiment « Mère de Dieu », puisque le Fils éternel de Dieu, a reçu en elle son humanité. L’Eglise célèbre ce mystère à Noël, le 25 décembre et le 1er janvier.
2) Elle est « toujours vierge », puisque Dieu avait choisi son cœur et son corps pour l’Incarnation de son Fils, l’Unique du Père. L’Eglise le rappelle en la fête de l’Annonciation, le 25 mars.
3) On parle de son « Immaculée Conception », puisque par la croix de son Fils, elle fut préservée de cette fêlure originelle qui fait dissoner le cœur des hommes. Tel est le sens de la prochaine fête du 8 décembre.
4) On parle enfin de son « Assomption » parce qu’elle fut enlevée en son âme et en son corps dans la gloire de Dieu, à l’issue de son existence terrestre. Marie, selon la liturgie du 15 août, brille déjà comme un signe d’espérance assurée « pour le peuple de Dieu en pèlerinage. Elle est devenue l’image de l’Eglise à venir ».
Signé Mgr Jean-Louis Bruguès, évêque d’Angers
Président de la commission doctrinale.

Ce texte est parfait et me comble de joie et apaise mon cœur.

Je regrette cependant qu’il ait fallu attendre quatre mois pour une telle publication et mise en garde.
Pourquoi ?
Des milliers d’exemplaire en ont été vendus et vont « empoisonner » la foi d’autant de fidèles. Il serait même en main de plusieurs dames catéchistes…

Je suis surpris des dates.
Ce texte officiel de la commission doctrinale de l’épiscopat français a été mis sur le site dans la rubrique « archives » le lundi 13 décembre.
Dans la note de présentation, il est dit que les évêque de France réunis à Lourdes, en ont eu connaissance lors de leur assemblée. Or leur assemblée s’est tenue dans les premiers jours de novembre du 4 au 8 novembre.

Il fallut attendre encore plus d’un mois pour sa diffusion officielle

Le 23 novembre, une annonce de ce texte était communiquée dans «La Vie ».

Ce texte est radicalement différent de la « note doctrinale » effectivement publiée. Sous ce rapport, je m’en réjouis .

Mais cela me pose toutefois une question. Soit le texte de « La Vie » est un faux, soit il est vrai. S’il est faux, il serait bon que Mgr Bruguès le dise. S’il est vrai, pourquoi cette différence si grande entre l’annonce de la note et la note elle-même. La note est contradictoire au texte de l’annonce. La note, tout en étant courtoise, est tout de même une « condamnation » du livre et de tout le livre de Jacques Duquesne et du livre « inspirateur » du RP Cerbelaud O.P. Il ne s’agit pas seulement de « quelques points » contestés, mais ce sont les deux livres qui « manquent gravement à la foi catholique » et qui oblige l’évêque d’Angers à cet acte que le site de l’épiscopat ne craint pas d’appeler une « mise en garde ».

Pourquoi cette différence si grande ?

Il faut remarquer que le livre de Jean Madiran « La trahison des commissaires », qui prend à parti si fortement et d’une manière tellement à propos Mgr Bruguès, est sorti de l’imprimeur fin novembre. Jean Madiran me l’a dédicacé même le 23 novembre 2004 en ces termes dont je le remercie : « A monsieur l’abbé Paul Aulagnier, en communion d’espérance et communauté de combat, Avec ma respectueuse et entière sympathie ». Ce livre n’a pas pu ne pas être lu par l’épiscopat et par son président de la commission doctrinale, Mgr Bruguès. IL a du être lu dans les mêmes jours, mettons vers les 25-26 novembre. Ce livre a du émouvoir l’épiscopat et son « président-commissaire ». Cela n’expliquerait-il pas cette si « bonne, récente et nouvelle « note doctrinale » ?

Je répondrais volontiers positivement.

Cette note va vraiment et contre l’esprit et contre la lettre des trois notes précédemment connues et publiées de cette même « commission doctrinale ».

Jugez-en vous-même en lisant le livre de Jean Madiran « la trahison des commissaires ».