Paroisse catholique Saint Michel

Dirigée par

 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

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Du 3 au 9 avril 2006

Dimanche des Rameaux.

 

 

A- Un beau texte de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus.

Le dimanche des Rameaux, en raison du chant de la Passion, le prêtre n’assure pas de prédication. Il laisse les fidèles dans la pieuse méditation du récit des souffrances atroces supportées par Notre Seigneur en sa Passion.
Aussi ai-je pensé à vous donner à lire ce très beau récit de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus de Lisieux, tiré de son livre autobiographique : la vie d’une âme.

« Me souvenant de la prière d’Elisée à son Père Elie, lorsqu’il osa lui demander SON DOUBLE ESPRIT, (NHA 925) je me suis présentée devant les Anges et les Saints, et je leur ai dit : " Je suis la plus petite des créatures, je connais ma misère et ma faiblesse, mais je sais aussi combien les coeurs nobles et généreux aiment à faire du bien, je vous supplie donc, ô Bienheureux habitants du Ciel, je vous supplie de M’ADOPTER POUR ENFANT, à vous seuls sera la gloire que vous me ferez acquérir mais daignez exaucer ma prière, elle est téméraire, je le sais, cependant j’ose vous demander de m’obtenir : VOTRE DOUBLE AMOUR. " (2R 2,9 Ap 8,3) Jésus, je ne puis approfondir ma demande, je craindrais de me trouver accablée sous le poids de mes désirs audacieux... Mon excuse, c’est que je suis une enfant, les enfants ne réfléchissent pas à la portée de leurs paroles, cependant leurs parents, lorsqu’ils sont placés sur le trône, qu’ils possèdent d’immenses trésors, n’hésitent pas à contenter les désirs des petits êtres qu’ils chérissent autant qu’eux-mêmes ; pour leur faire plaisir, ils font des folies, ils vont jusqu’à la faiblesse... Eh bien ! moi je suis l’Enfant de l’Eglise, et l’Eglise est Reine puisqu’elle est ton épouse, ô Divin Roi des Rois... Ce ne sont pas les richesses et la Gloire, (même la Gloire du Ciel) que réclame le coeur du petit enfant... La gloire, il comprend qu’elle appartient de droit à ses Frères, les Anges et les Saints... Sa gloire à lui sera le reflet de celle qui jaillira du front de sa Mère. Ce qu’il demande c’est l’Amour... Il ne sait plus qu’une chose, t’aimer, ô Jésus... Les oeuvres éclatantes lui sont interdites, il ne peut prêcher l’Evangile, verser son sang... mais qu’importe, ses frères travaillent à sa place, et lui, petit enfant, il se tient tout près du trône (Ap 14,3) du Roi et de la Reine, il aime pour ses frères qui combattent... Mais comment témoignera-t-il son Amour, puisque l’Amour se prouve par les oeuvres ? Eh bien, le petit enfant jettera des fleurs, il embaumera de ses parfums le trône royal, il chantera de sa voix argentine le cantique de l’Amour... Oui mon Bien-Aimé, voilà comment se consumera ma vie... Je n’ai d’autre moyen de te prouver mon amour, que de jeter des fleurs, c’est-à-dire de ne laisser échapper aucun petit sacrifice, aucun regard, aucune parole, de profiter de toutes les plus petites choses et de les faire par amour... Je veux souffrir par amour et même jouir par amour, ainsi je jetterai des fleurs devant ton trône ; je n’en rencontrerai pas une sans l’effeuiller pour toi... puis en jetant mes fleurs, je chanterai, (pourrait-on pleurer en faisant une aussi joyeuse action ?) je chanterai, même lorsqu’il me faudra cueillir mes fleurs au milieu des épines et mon chant sera d’autant plus mélodieux que les épines seront longues et piquantes. Jésus, à quoi te serviront mes fleurs et mes chants ?... Ah ! je le sais bien, cette pluie embaumée, ces pétales fragiles et sans aucune valeur, ces chants d’amour du plus petit des coeurs te charmeront, oui, ces riens te feront plaisir, ils feront sourire l’Eglise Triomphante, elle recueillera mes fleurs effeuillées par amour et les faisant passer par tes Divines Mains, ô Jésus, cette Eglise du Ciel, voulant jouer avec son petit enfant, jettera, elle aussi, ces fleurs ayant acquis par ton attouchement divin une valeur infinie, elle les jettera sur l’Eglise souffrante afin d’en éteindre les flammes, elle les jettera sur l’Eglise combattante afin de lui faire remporter la victoire !... O mon Jésus ! je t’aime, j’aime l’Eglise ma Mère, je me souviens que : " Le plus petit mouvement de PUR AMOUR lui est plus utile que toutes les autres oeuvres réunies ensemble " (NHA 926) mais le PUR AMOUR est-il bien dans mon coeur... Mes immenses désirs ne sont-ils pas un rêve, une folie ?... Ah ! s’il en est ainsi, Jésus, éclaire-moi, tu le sais, je cherche la vérité... si mes désirs sont téméraires, fais-les disparaître car ces désirs sont pour moi le plus grand des martyres... Cependant je le sais, ô Jésus, après avoir aspiré vers les régions les plus élevées de l’Amour, s’il me faut ne pas les atteindre un jour j’aurai goûté plus de douceur dans mon martyre, dans ma folie, que je n’en goûterai au sein des joies de la patrie, à moins que par un miracle tu ne m’enlèves le souvenir de mes espérances terrestres. Alors laisse-moi jouir pendant mon exil des délices de l’amour... Laisse-moi savourer les douces amertumes de mon martyre... Jésus, Jésus, s’il est si délicieux le désir de t’Aimer qu’est-ce donc de posséder, de jouir de l’Amour ?... Comment une âme aussi imparfaite que la mienne peut-elle aspirer à posséder la plénitude de l’Amour ?... 0 Jésus ! mon premier, mon seul Ami, toi que j’aime UNIQUEMENT, dis-moi quel est ce mystère ?. .. Pourquoi ne réserves-tu pas ces immenses aspirations aux grandes âmes, aux Aigles qui planent dans les hauteurs ?... Moi je me considère comme un faible petit oiseau couvert seulement d’un léger duvet, je ne suis pas un aigle j’en ai simplement les yeux et le coeur car malgré ma petitesse extrême j’ose fixer le Soleil Divin, le Soleil de l’Amour et mon coeur sent en lui toutes les aspirations de l’Aigle... Le petit oiseau voudrait voler vers ce brillant Soleil qui charme ses yeux, il voudrait imiter les Aigles ses frères qu’il voit s’élever jusqu’au foyer Divin de la Trinité Sainte... hélas ! tout ce qu’il peut faire, c’est de soulever ses petites ailes, mais s’envoler, cela n’est pas en son petit pouvoir ! Que va-t-il devenir ? mourir de chagrin se voyant aussi impuissant ?... Oh non ! le petit oiseau ne va pas même s’affliger. Avec un audacieux abandon, il veut rester à fixer son Divin Soleil ; rien ne saurait l’effrayer, ni le vent ni la pluie, et si de sombres nuages viennent à cacher l’Astre d’Amour, le petit oiseau ne change pas de place, il sait que par delà les nuages son Soleil brille toujours, que son éclat ne saurait s’éclipser un seul instant. Parfois il est vrai, le coeur du petit oiseau se trouve assailli par la tempête, il lui semble ne pas croire qu’il existe autre chose que les nuages qui l’enveloppent ; c’est alors le moment de la joie parfaite pour le pauvre petit être faible. Quel bonheur pour lui de rester là quand même, de fixer l’invisible lumière qui se dérobe à sa foi !... Jésus, jusqu’à présent, je comprends ton amour pour le petit oiseau, puisqu’il ne s’éloigne pas de toi... mais je le sais et tu le sais aussi, souvent, l’imparfaite petite créature tout en restant à sa place (c’est-à-dire sous les rayons du Soleil,) (Lc 10,41-42) se laisse un peu distraire de son unique occupation, elle prend une petite graine à droite et à gauche, court après un petit ver... puis rencontrant une petite flaque d’eau elle mouille ses plumes à peine formées, elle voit une fleur qui lui plaît, alors son petit esprit s’occupe de cette fleur... enfin ne pouvant planer comme les aigles, le pauvre petit oiseau s’occupe encore des bagatelles de la terre. Cependant après tous ses méfaits, au lieu d’aller se cacher dans un coin pour pleurer sa misère et mourir de repentir, le petit oiseau se tourne vers son Bien-Aimé Soleil, il présente à ses rayons bienfaisants ses petites ailes mouillées, il gémit comme l’hirondelle (Is 38,14) et dans son doux chant il confie, il raconte en détail ses infidélités pensant dans son téméraire abandon acquérir ainsi plus d’empire, attirer plus pleinement l’amour de Celui qui n’est pas venu appeler les justes mais les pécheurs... (NHA 927) (Mt 9,13) Si l’Astre Adoré demeure sourd aux gazouillements plaintifs de sa petite créature, s’il reste voilé... eh bien ! la petite créature reste mouillée, elle accepte d’être transie de froid et se réjouit encore de cette souffrance qu’elle a cependant méritée... O Jésus ! que ton petit oiseau est heureux d’être faible et petit, que deviendrait-il s’il était grand ?... " Jamais il n’aurait l’audace de paraître en ta présence, de sommeiller devant toi... Oui, c’est là encore une faiblesse du petit oiseau lorsqu’il veut fixer le Divin Soleil et que les nuages l’empêchent de voir un seul rayon, malgré lui ses petits yeux se ferment, sa petite tête se cache sous la petite aile et le pauvre petit être s’endort, croyant toujours fixer son Astre Chéri. A son réveil, il ne se désole pas, son petit coeur reste en paix, il recommence son office d’amour, il invoque les anges et les Saints qui s’élèvent comme des Aigles vers le Foyer dévorant, objet de son envie et les Aigles prenant en pitié leur petit frère, le protègent, le défendent et mettent en fuite les vautours qui voudraient le dévorer. Les vautours, images des démons, le petit oiseau ne les craint pas, il n’est point destiné à devenir leur proie, mais celle de l’Aigle qu’il contemple au centre du Soleil d’Amour. 0 Verbe Divin, (Jn 1,1-3) c’est toi l’Aigle adoré que J’aime et qui m’attire ! c’est toi qui t’élançant vers la terre d’exil as voulu souffrir et mourir afin d’attirer les âmes jusqu’au sein de l’éternel Foyer de la Trinité Bienheureuse, c’est toi qui remontant vers l’inaccessible Lumière (Mc 16,19) qui sera désormais ton séjour, c’est toi qui restes encore dans la vallée des larmes, (Ps 84,7) caché sous l’apparence d’une blanche hostie... Aigle Eternel tu veux me nourrir de ta divine substance, moi, pauvre petit être, qui rentrerais dans le néant si ton divin regard ne me donnait la vie à chaque instant... 0 Jésus ! laisse-moi dans l’excès de ma reconnaissance, laisse-moi te dire que ton amour va jusqu’à la folie.. . Comment veux-tu devant cette Folie que mon coeur ne s’élance pas vers toi ? Comment ma confiance aurait-elle des bornes ?... Ah ! pour toi, Je le sais, les Saints ont fait aussi des folies, ils ont fait de grandes choses puisqu’ils étaient des aigles... Jésus, je suis trop petite pour faire de grandes choses... et ma folie à moi, c’est d’espérer que ton Amour m’accepte comme victime... Ma folie consiste à supplier les Aigles mes frères, de m’obtenir la faveur de voler vers le Soleil de l’Amour avec les propres ailes de l’Aigle Divin... (Dt 32,10-11) (NHA 928) Aussi longtemps que tu le voudras, ô mon Bien Aimé, ton petit oiseau restera sans forces et sans ailes, toujours il demeurera les yeux fixés sur toi, il veut être fasciné par ton regard divin, il veut devenir la proie de ton Amour... Un jour, j’en ai l’espoir, Aigle Adoré, tu viendras chercher ton petit oiseau, (Dt 32,11) et remontant avec lui au Foyer de l’Amour, tu le plongeras pour l’éternité dans le brûlant Abîme de Cet Amour auquel il s’est offert en victime... O Jésus ! que ne puis-je dire à toutes les petites âmes combien ta condescendance est ineffable... je sens que si par impossible tu trouvais une âme plus faible, plus petite que la mienne, tu te plairais à la combler de faveurs plus grandes encore, si elle s’abandonnait avec une entière confiance à ta miséricorde infinie. (Lc 10,21) Mais pourquoi désirer communiquer tes secrets d’amour, ô Jésus, n’est-ce pas toi seul qui me les as enseignés et ne peux-tu pas les révéler à d’autres ?... Oui je le sais, et je te conjure de le faire, je te supplie d’abaisser ton regard divin sur un grand nombre de petites âmes... Je te supplie de choisir une légion de petites âmes dignes de ton AMOUR !... La toute petite Soeur Thérèse de l’Enfant Jésus de la Sainte Face rel. carm. ind. (NHA 929)

B- Homélie de Benoît XVI à l’occasion du premier anniversaire de la mort de Jean-Paul II.

Nous publions ci-dessous le texte intégral de l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de la messe célébrée ce lundi 3 avril dans l’après-midi, place Saint-Pierre, en mémoire de Jean-Paul II.
Chers frères et sœurs !

En ces jours est particulièrement vivante dans l'Eglise et dans le monde la mémoire du Serviteur de Dieu Jean-Paul II, à l'occasion du premier anniversaire de sa mort. Avec la veillée mariale d'hier, nous avons revécu le moment précis où, il y a un an, a eu lieu son pieux départ, tandis que nous nous retrouvons sur cette même Place Saint-Pierre pour offrir le sacrifice eucharistique en mémoire de son âme élue. Je salue avec affection, avec les cardinaux, les évêques, les prêtres et les religieux, les nombreux pèlerins venus de tant d'endroits, en particulier de Pologne, pour lui témoigner leur estime, leur affection et leur profonde reconnaissance. Nous voulons prier pour ce bien-aimé Pontife, en nous laissant illuminer par la Parole de Dieu que nous venons d'écouter.

Dans la première lecture, tirée du Livre de la Sagesse, il nous a été rappelé quel est le destin final des justes : un destin de bonheur surabondant, qui récompense sans limite pour les souffrances et les épreuves affrontées au cours de la vie. « Dieu les a mis à l'épreuve — affirme l'auteur sacré — et il les a trouvés dignes de lui ; comme l'or au creuset, il les a éprouvés, comme un parfait holocauste, il les a agréés » (3, 5-6). Le terme d'« holocauste » fait référence au sacrifice au cours duquel la victime était entièrement brûlée, consumée par le feu ; il s'agissait donc d'un signe de don total à Dieu. Cette expression biblique nous fait penser à la mission de Jean-Paul II, qui a fait don à Dieu et à l'Eglise de son existence et a vécu la dimension sacrificielle de son sacerdoce en particulier dans la célébration de l'Eucharistie. Parmi les invocations qui lui étaient chères, en figure une, tirée des « Litanies de Jésus Christ Prêtre et Victime », qu'il voulut placer au terme du livre Don et Mystère, publié à l'occasion du 50e anniversaire de son sacerdoce (cf. pp. 113-116). Voici ce que dit cette invocation : « Iesu, Pontifex qui traddisti temetipsum Deo oblationem et hostiam - Jésus, Pontife qui t'offris toi-même à Dieu comme don et victime, prends pitié de nous ». Combien de fois a-t-il répété cette invocation ! Celle-ci exprime bien le caractère profondément sacerdotal de toute sa vie. Il n’a jamais fait mystère de son désir de devenir toujours plus une seule chose avec le Christ Prêtre, à travers le sacrifice eucharistique, source d'inlassable dévouement apostolique.

A la base de ce don total de soi figurait naturellement la foi. Dans la deuxième Lecture, que nous venons d'écouter, saint Pierre utilise lui aussi l'image de l'or éprouvé par le feu et l'applique à la foi (1 P 1, 7). En effet, dans les difficultés de la vie, c'est surtout la qualité de la foi de chacun qui est éprouvée et vérifiée : sa solidité, sa pureté, sa cohérence avec la vie. Eh bien, le regretté Pontife, que Dieu avait doté de multiples dons humains et spirituels, en passant à travers le creuset des difficultés apostoliques et de la maladie, est apparu toujours plus comme un « roc » dans la foi. Ceux qui ont eu l'occasion de le fréquenter de près ont pu presque toucher du doigt sa foi honnête et solide qui, si elle a impressionné le cercle de ses collaborateurs, n'a pas manqué de diffuser, au cours de son long pontificat, son influence bénéfique sur toute l'Eglise, dans un crescendo qui a atteint son point culminant au cours des derniers mois et jours de sa vie. Une foi convaincue, forte et authentique, libre des peurs et des compromis, qui a contaminé le cœur de tant de personne, grâce également aux nombreux pèlerinages apostoliques dans tant de parties du monde, et en particulier grâce à ce dernier « voyage » qu'a été son agonie et sa mort.

La page de l'Evangile qui a été proclamée nous aide à comprendre un autre aspect de sa personnalité humaine et religieuse. Nous pourrions dire que, en tant que successeur de Pierre, il a imité de façon particulière, parmi les Apôtres, Jean, le « disciple bien-aimé » qui demeura sous la croix auprès de Marie, à l'heure de l'abandon et de la mort du Rédempteur. Les voyant près de la croix — raconte l'évangéliste — Jésus les confia l'un à l'autre : « Femme, voici ton Fils !... Voici ta mère » (Jn 19, 26-27). Ces paroles du Seigneur mourant étaient particulièrement chères à Jean-Paul II. Comme l'apôtre évangéliste, lui aussi a voulu prendre Marie chez lui : « et ex illa hora accepit eam discipulus in sua, dit l’évangéliste — Dès cette heure là, le disciple l'accueillit chez lui » (Jn 19, 27). L'expression accepit eam in sua est particulièrement riche de sens : elle indique la décision de Jean de faire participer Marie à sa vie afin de faire l'expérience que celui qui ouvre son cœur à Marie, est en réalité accueilli par Elle et devient à elle. La devise inscrite sur le blason du pontificat du pape Jean-Paul II, Totus tuus, résume bien cette expérience spirituelle et mystique, dans une vie totalement tournée vers le Christ à travers Marie: ad Iesum per Mariam.

Chers frères et sœurs, ce soir, notre pensée retourne avec émotion vers le moment de la mort du bien-aimé Pontife, mais dans le même temps, notre cœur est comme poussé à se tourner vers l'avenir. Nous sentons résonner dans notre âme ses invitations répétées à avancer sans avoir peur sur le chemin de la fidélité à l'Evangile pour être les messagers et les témoins du Christ au cours du troisième millénaire. Ses exhortations incessantes à coopérer généreusement à la réalisation d'une humanité plus juste et plus solidaire, à être des artisans de paix et des bâtisseurs d'espérance nous reviennent à l'esprit. Notre regard reste toujours fixé sur le Christ qui est « le même hier, aujourd'hui et à jamais » (He 13, 8), qui guide solidement son Eglise. Nous avons cru à son amour et c'est la rencontre avec Lui « qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive » (Deus caritas est, n. 1). Que la force de l'Esprit de Jésus soit pour tous, chers frères et sœurs, comme elle le fut pour le pape Jean-Paul II, une source de paix et de joie. Et que la Vierge Marie, Mère de l'Eglise, nous aide à être en toute circonstance, comme lui, des apôtres inlassables de son divin Fils et des prophètes de son amour miséricordieux. Amen!


C- Discours du Pape lors de l’audience générale du mercredi 5 avril 2006.

Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse que le pape a prononcée ce mercredi, 5 avril, en italien.
Chers frères et sœurs,

Dans la nouvelle série de catéchèses, commencée il y a quelques semaines, nous voulons considérer les origines de l’Eglise, pour comprendre le dessein originel de Jésus, et comprendre ainsi ce qui est essentiel à l’Eglise, ce qui subsiste au fil des temps qui changent. Nous voulons ainsi comprendre également pourquoi nous sommes dans l’Eglise et comment nous devons nous engager à vivre cela au début d’un nouveau millénaire chrétien.

Considérant l’Eglise naissante, nous pouvons en découvrir deux aspects : un premier aspect est fortement mis en lumière par saint Irénée de Lyon, martyr et grand théologien à la fin du IIe siècle, le premier à avoir donné une théologie en quelque sorte systématique. Saint Irénée écrit : « Là où se trouve l'Eglise, il y a aussi l'Esprit de Dieu ; et là où se trouve l'Esprit de Dieu, il y a l'Eglise, ainsi que toute grâce ; car l'Esprit est vérité » (Adversus haereses, III, 24, 1: PG VII, 966). Il existe donc un lien profond entre l’Esprit Saint et l’Eglise. L’Esprit Saint construit l’Eglise et lui donne la vérité, répand l’amour – comme le dit saint Paul – dans les cœurs des croyants (cf. Rm 5, 5). Puis il y a un deuxième aspect.

Ce profond lien avec l’Esprit n’efface pas notre humanité avec toute sa faiblesse, et ainsi, la communauté des disciples connaît dès le début non seulement la joie de l’Esprit Saint, la grâce de la vérité et de l’amour, mais également l’épreuve, constituée surtout par les oppositions aux vérités de foi, avec les atteintes à la communion qui s’ensuivent. De même que la communion dans l'amour existe depuis les origines et existera jusqu’à la fin (cf. 1 Jn 1, 1sq), ainsi, malheureusement dès le début surgit aussi la division. Nous ne devons pas nous étonner que celle-ci existe également aujourd’hui : « Ils sont sortis de chez nous – dit la Première Lettre de Jean – mais ils n'étaient pas des nôtres ; s'ils avaient été des nôtres, ils seraient restés avec nous. Mais pas un d'entre eux n'est des nôtres, et cela devait être manifesté » (1 Jn 2, 19). Il existe donc toujours le risque, dans la vie du monde et également dans les faiblesses de l’Eglise, de perdre la foi, et ainsi de perdre aussi l’amour et la fraternité. Celui qui croit à l’Eglise de l’amour et veut vivre dans cette Eglise a donc le devoir précis de reconnaître également ce danger et d’accepter que la communion avec celui qui s’est éloigné de la doctrine du salut n’est pas possible (cf. 2 Jn 9-11).

La première Lettre de Jean montre clairement que l'Eglise naissante fut bien consciente de ces tensions possibles dans l'expérience de la communion : il n'y a pas de voix dans le Nouveau Testament qui ne s'élève avec plus de force pour souligner la réalité et le devoir de l'amour fraternel entre les chrétiens ; mais cette même voix s'adresse avec une grande sévérité aux adversaires, qui ont été membres de la communauté et qui, à présent, ne le sont plus. L'Eglise de l'amour est aussi l'Eglise de la vérité, entendue d'abord comme fidélité à l'Evangile qui a été confié par le Seigneur Jésus aux siens. La fraternité chrétienne naît du fait d'avoir été constitués enfants du même Père par l'Esprit de vérité : « En effet, tous ceux qui se laissent conduire par l'Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu » (Rm 8, 14). Mais la famille des fils de Dieu, pour vivre dans l'unité et dans la paix, a besoin d'être gardée dans la vérité et guidée avec un sage discernement faisant autorité: c'est ce qu’est appelé à faire le ministère des Apôtres. Et ici nous arrivons à un point important. L’Eglise est entièrement de l’Esprit, mais elle possède une structure, la succession apostolique, dont la responsabilité est de garantir le fait que l’Eglise demeure dans la vérité donnée par le Christ, de laquelle vient également la capacité d’aimer.

Le premier sommaire des Actes exprime avec une grande efficacité la convergence de ces valeurs dans la vie de l'Eglise naissante : « Ils étaient fidèles à écouter l'enseignement des Apôtres et à vivre en communion fraternelle (koinonìa), à rompre le pain et à participer aux prières » (Ac 2, 42). La communion naît de la foi suscitée par la prédication apostolique, se nourrit de la fraction du pain et de la prière, et s'exprime dans la charité fraternelle et dans le service. Nous nous trouvons face à la description de la communion de l'Eglise naissante dans la richesse de ses dynamiques internes et de ses expressions visibles : le don de la communion est conservé et favorisé en particulier par le ministère apostolique, qui est à son tour un don pour toute la communauté.

Les Apôtres et leurs successeurs sont donc les gardiens et les témoins autorisés du dépôt de la vérité remis à l'Eglise, de même qu'ils sont également les ministres de la charité : deux aspects qui vont ensemble. Ils doivent toujours penser au caractère inséparable de ce double service, qui est en réalité un seul : vérité et charité, révélées et données par le Seigneur Jésus. Dans ce sens, leur service est tout d'abord un service d'amour : et la charité qu'ils vivent et promeuvent est inséparable de la vérité qu'ils gardent et transmettent. La vérité et l'amour sont deux visages du même don qui vient de Dieu et qui, grâce au ministère apostolique, est conservé dans l'Eglise et nous parvient jusqu'à aujourd'hui ! A travers le service des Apôtres et de leurs successeurs également, l'amour de Dieu Trinité nous rejoint pour nous communiquer la vérité qui nous rend libres (cf. Jn 8, 32) ! Tout ce que nous voyons dans l’Eglise naissante nous encourage à prier pour les successeurs des Apôtres, pour tous les évêques et pour les successeurs de Pierre, afin qu’ils soient vraiment ensemble gardiens de la vérité et de la charité ; afin qu’ils soient, en ce sens, vraiment des apôtres du Christ, pour que sa lumière, la lumière de la vérité et de la charité, ne s’éteigne jamais dans l’Eglise et dans le monde.