Paroisse catholique Saint Michel

Dirigée par

 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

Membre de la FSSPX

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Semaine du 28 mars 2004 au 3 avril 2004

Premier Dimanche de la Passion

 

 

 

 

Sommaire

 

Homélie du 1° Dimanche de la Passion

« Frères, quand le Christ est venu comme grand prêtre des biens à venir, c’est par une tente plus grande et plus parfaite, une tente qui n’est pas l’œuvre des hommes, - c’est-à-dire qui n’appartient pas à cette création, - et ce n’est point par le sang des boucs et des taureaux, mais par son propre sang, qu’il est entré une fois pour toutes dans le sanctuaire, ayant acquis une rédemption éternelle…Voilà pourquoi il est le médiateur d’une alliance nouvelle, afin que, sa mort étant intervenue pour racheter les fautes commises sous la première alliance, ceux qui sont appelés, reçoivent l’héritage éternel, objet de la promesse, dans le Christ Jésus notre Seigneur ». (Hb 9 11-15).

La Passion est le cri d’amour de Dieu, de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Le cri d’amour du Dieu des miséricordes.
Tout est là. Tout est dit.
C’est tout l’Evangile. C’est toute la Passion.
Je vous ai aimé depuis la crèche jusqu’à la Croix. « Et ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’au bout, usque ad finem ». Je vous ai aimé, nous dit NSJC, sans aucun mérite de votre part, malgré même tous vos démérites… malgré vos misères, à cause de vos misères.
Je vous ai aimé d’un amour de miséricorde, d’un amour de préférence. Oui. J’ai laissé, en quelque sorte, mon Père, le Ciel, les anges pour venir parmi vous. J’ai dédaigné tous les trésors de la terre. Je suis venu dans une étable et dans ce dénuement, je vous ai aimé bien plus même que ma vie. Car ma vie, en cette Passion, je l’ai donné pour vous. Mon Père me fera justice, mais j’ai voulu être victime pour vous. Je suis donc blessé à cause de vous, blessé à mort –voyez ma Passion – pour amour pour vous.
Je vous ai aimé plus que ma majesté, plus que ma gloire, plus que ma dignité. Voyez à quels outrages je l’ai livrée pour vous….Les soufflets, les épines, les crachats, la robe de fous, les fouets, la Croix. J’ai subi les opprobres afin de vous couvrir un jour de ma gloire, afin de conclure une alliance éternelle entre Dieu et vous. Je vous aime plus que ma gloire puisque cette gloire, je l’ai voilée d’un suaire au calvaire afin de détruire le péché et vous redonner la gloire des fils de Dieu et avec cela, l’héritage éternel.

L’amour, vous dis-je, est toute la Passion. C’est tout l’Evangile. C’est Jésus-Christ, hier, présenté entre les bras de sa Mère, aujourd’hui proposé à notre contemplation, sur les bras de la Croix.

L’amour de Jésus sur le bois de la Croix, nous « enveloppe », nous provoque, nous fait violence. Et le ministère du Prêtre, qu’est-il ? sinon de montrer aux âmes, le cœur divin blessé d’amour sur la Croix, dans le sacrement de Pénitence, dans la célébration de la messe. Le prêtre, finalement, n’est rien d’autre que le « vicaire » de l’amour de Jésus-Christ. Oui ! Car il est avant tout le dispensateur de la miséricorde divine par les sacrements.

Lisez l’Evangile ! Lisez-le en le méditant ! Ouvrez-le à n’importe quelle page et vous trouverez, même dans les anathèmes et l’indignation de Jésus, les palpitations de son cœur tout d’amour.

Ne changeons ni le texte ni le sens de sa Passion. Il est venu pour sauver et pour donner ici bas la paix, pour pardonner et offrir le Ciel, même et surtout, dirais-je, à ceux là qui lui prépareront un gibet : « Père, pardonnez leur, ils ne savent ce qu’ils font ».
Et pour cela, il s’est anéanti, prenant la forme d’esclave (Phil 2 7) se revêtant de nos faiblesses, de nos misères.
Il a pris sur lui-même nos langueurs. Il a pris sur lui-même nos infirmités. Il s’est fait « homme de douleurs » sachant ce que c’est que souffrir (Is 53)

Alors on peut s’arrêter quelques instants et méditer cette réflexion : « l’abîme appelle l’abîme ».

L’ « abîme » de notre misère, de notre corruption, de nos maux a attiré l’abîme de sa miséricorde, de sa bonté, de son amour.
Et avec quelle ardeur, il nous sollicite, avec quelle passion, il nous commande de l’aimer en retour.

C’est bien là sur la Croix, en cette Passion que je sens qu’il m’a aimé passionnément, aimé jusqu’à la folie.

Là, devant la Croix plus que partout ailleurs, je comprends -O combien ! – je goûte cette parole étonnante : « Je ne veux pas la mort du pécheur mais qu’il se convertisse et qu’il vive »

Ou encore, cette autre parole : « Je suis venu pour chercher et sauver ce qui était perdu ».

L’amour qu’il nous porte, à nous indignes misérables pécheurs, est fait d’une condescendance infinie. Et en quoi, l’avons-nous mérité ?
Au contraire, nous l’avons offensé, ce Dieu infiniment bon, outragé, mis à mort. Et c’est lui qui vient à nous, nous offrant son pardon, plus que son pardon, son amour, tout son cœur. Et c’est une réalité permanente que cette Passion du cœur de NSJC.

Et devant cette Passion qu’aujourd’hui, l’Eglise nous demande de méditer, nous devons, à notre tour, aimer. Aimer NSJC, l’aimer en retour.

C’est la loi de l’Evangile. On le comprend. : « Tu aimeras ton Seigneur de tout ton cœur, de toute ton âme ». Oui ! La perfection de la Loi, c’est l’amour de charité.

O mystère insondable d’une charité infinie…se peut-il qu’il m’oblige à l’aimer en retour…comme s’il craignait de me perdre, comme si ma perte laissait un vide en celui qui, étant Dieu, possède toutes choses, la plénitude d’être et de perfections ?

Il en est ainsi. Le premier et le plus grand de ses droits est celui d’être aimé. Ce droit divin a créé en lui, je dirais presque, la nécessité de se sentir à nous et nous à lui, par amour. Il en devient le mendiant, lui qui pourtant a mérité notre amour. « J’ai soif » dira-t-il sur le bois de la Croix. De quoi avait-il soif, s’exclame Sainte Thérèse dans son manuscrit autobiographique, sinon de notre amour.
Resterons-nous insensibles à cet appel, à ce cri lancé dans sa Passion ! Sous prétexte d’éviter tout sentimentalisme ou mièvrerie, resterons-nous loin, en ce temps de la Passion, de la Croix, de la Charité même ? Croira-t-on être sage de garder nos distances vis-à-vis du Crucifié ?
Accepterons-nous enfin, en ces deux semaines du temps de la Passion, de vivre un peu d’amour de Charité ?
Accepterons-nous enfin de suivre un peu Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de dire avec elle, comme elle, du moins de méditer quelques instants avec elle son bel « acte d’offrande….à l’amour miséricordieux du Bon Dieu :

« O mon Dieu, Trinité Bienheureuse, je désire vous aimer et vous faire aimer, travailler à la glorification de la Sainte Eglise, en sauvant les âmes qui sont sur la terre et en délivrant celles qui souffrent dans le Purgatoire. Je désire accomplir parfaitement votre volonté et arriver au degré de gloire que vous m’avez préparé dans votre royaume ; en un mot, je désire être sainte, mais je sens mon impuissance et je vous demande, ô mon Dieu, d’être vous-même ma sainteté.
Puisque vous m’avez aimé jusqu’à me donner votre Fils unique pour être mon Sauveur et mon Epoux, les trésors infinis de ses mérites sont à moi ; je vous les offre avec bonheur, vous suppliant de ne me regarder qu’à travers la Face de Jésus et dans son Cœur brûlant d’amour.
Je vous offre tous les mérites des saints qui sont au ciel et sur la terre, leurs actes d’amour et ceux des saints Anges ; enfin, je vous offre, ô bienheureuse Trinité, l’amour et les mérites de la Sainte Vierge, ma Mère chérie ; c’est à elle que j’abandonne mon offrande la priant de vous la présenter.
Son divin Fils, mon Epoux bien-aimé, aux jours de sa vie mortelle, nous a dit : « Tout ce vous demanderez à mon Père en mon nom, Il vous le donnera ». (Jn 16 23). Je suis donc certaine que vous exaucerez mes désirs…Je le sais, ô mon Dieu, plus vous voulez donner, plus vous faites désirer.
Je sens en mon cœur des désirs immenses et c’est avec confiance que je vous demande de venir prendre possession de mon âme. Ah ! je ne puis recevoir la sainte communion aussi souvent que je le désire ; mais, Seigneur, n’êtes-vous pas Tout-Puissant ? Restez en moi comme au Tabernacle, ne vous éloignez jamais de votre petite hostie.
Je voudrais vous consoler de l’ingratitude des méchants, et je vous supplie de m’ôter la liberté de vous déplaire ! Si par faiblesse je viens à tomber, qu’aussitôt votre divin regard purifie mon âme, consumant toutes mes imperfections, comme le feu qui transforme toute chose en lui-même.
Je vous remercie, ô mon Dieu de toutes les grâces que vous m’avez accordées : en particulier de m’avoir fait passer par le creuset de la souffrance. C’est avec joie que je vous contemplerais au dernier jour, portant le sceptre de la Croix ; puisque vous avez daigné me donner en partage cette croix si précieuse, j’espère au ciel vous ressembler, et voir briller sur mon corps glorifié les sacrés stigmates de votre Passion.
Après l’exil de la terre, j’espère aller jouir de vous dans la patrie ; mais je ne veux pas amasser de mérites pour le ciel, je veux travailler pour votre seul amour, dans l’unique but de vous faire plaisir, de consoler votre Cœur sacré, et de sauver des âmes qui vous aimerons éternellement.
Au soir de cette vie, je paraîtrai devant vous les mains vides ; car je nous demande pas, Seigneur, de compter mes œuvres. Toutes nos justices ont des taches à vos yeux ! Je veux donc me revêtir de votre propre justice, et recevoir de votre amour la possession éternelle de vous-même. Je ne veux point d’autre trône et d’autre couronne que vous, ô mon Dieu-Aimé !
A vos yeux le temps n’est rien ; « un seul soir est comme mille ans ». Vous pouvez donc en un instant me préparer à paraître devant Vous ;
Afin de vivre dans un acte de parfait amour, je m’offre comme victime d’holocauste à votre amour miséricordieux, vous suppliant de me consumer sans cesse, laissant déborder en mon âme les flots de tendresse infinie qui sont renfermés en vous, et qu’ainsi je devienne martyre de votre amour, ô mon Dieu !

Que ce martyre, après m’avoir préparée à paraître devant vous, me fasse enfin mourir, et que mon âme s’élance sans retard dans l’éternel embrassement de votre miséricordieux amour !
Je veux, ô mon Dieu, vous renouveler cette offrande un nombre infini de fois, jusqu’à ce que, les ombres s’étant évanouies, je puisse vous redire mon amour dans un face à face éternel ! »

La primauté de l’amour » dans la spiritualité de sainte Thérèse de l’enfant Jésus.


Pour bien vivre cette nouvelle « Semaine Sainte » qui approche, j’ai pensé utile de vous rappeler la belle doctrine spirituelle de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, toute centrée sur l’amour de Dieu.


Les saints de tous les temps ont senti d’instinct que la doctrine de l’amour constitue l’essence même de la religion chrétienne. « Ecoute Israël ! Tu aimeras ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces. Voilà le premier et le plus grand de tous les commandements. En lui se résument la loi et les prophètes » (Mt 22 37-40)
Toute la spiritualité chrétienne s’inspirera de ce précepte suprême de Jésus et la vie de l’Eglise n’est pas autre chose que cette loi de charité mise en action. L’histoire des saints de l’Eglise peut bien se résumer en cette parole de Saint Jean « Credidemus caritati », devise épiscopale de Mgr Lefebvre.

Je voudrais l’illustrer en citant Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus.

En lisant les saintes Ecritures, Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus a su découvrir à travers les paroles divines, le grand message d’amour de Dieu à son peuple.

Voyez ce que dit Saint Thérèse dans le chapitre 11 p 210 : « Je n’ai nul besoin des boucs de vos troupeaux, parce que toutes les bêtes des forêts m’appartiennent et les milliers d’animaux qui paissent sur le collines ; je connais tous les oiseaux des montagnes. Si j’avais faim, ce n’est pas à vous que je le dirais ; car la terre et tout ce qu’elle contient est à moi. Est-ce que je dois manger la chair des taureaux et boire le sang des boucs ?
Immolez à Dieu des sacrifices de louanges et d’actions de grâces. » (Ps 49 9-14)

« Voilà donc tout ce que Jésus réclame de nous », commente Sainte Thérèse.

« Il n’a pas besoin de nos œuvres, mais uniquement de notre amour. Ce même Dieu, qui déclare n’avoir nul besoin de nous dire s’il a faim, n’a pas craint de mendier un peu d’eau à la Samaritaine…Il avait soif !!! Mais en disant : « donne moi à boire » c’était l’amour de sa pauvre créature que le Créateur de l’univers réclamait. Il avait soif d’amour !
Oui, plus que jamais Jésus est altéré. Il ne rencontre que des ingrats et des indifférents parmi les disciples du monde ; et parmi ses disciples à lui, il trouve, hélas ! bien peu de cœurs qui se livrent sans aucune réserve à la tendresse de son Amour infini ».

Sainte Thérèse a merveilleusement compris le commandement suprême de son divin Epoux et elle chantera son idéal dans son beau cantique : « Vivre d’Amour ».

Il faut le lire en ce temps de la Passion. C’est certainement un des plus beaux textes de théologie mystique que possède aujourd’hui l’Eglise. Grâce à Sainte Thérèse.

« Etre votre épouse, ô Jésus ! être carmélite, être, par mon union avec vous, la mère des âmes, tout cela devrait me suffire. Cependant je sens en moi d’autres vocations : je me sens la vocation de guerrier, de prêtre, d’apôtre, de docteur, de martyr…Je voudrais accomplir toutes les œuvres les plus héroïques, je me sens le courage d’un croisé, je voudrais mourir sur un champ de bataille pour la défense de l’Eglise.
La vocation de prêtre ! Avec quel amour, ô Jésus, je vous porterais dans mes mains lorsque ma voix vous ferait descendre du ciel avec quel amour je vous donnerais aux âmes ! Mais hélas !tout en désirant être prêtre, j’admire et j’envie l’humilité de saint François d’Assise, et je me sens la vocation de l’imiter en refusant la sublime dignité du sacerdoce. Comment donc allier ces contrastes ?
Je voudrais éclairer les âmes comme les prophètes, les docteurs. Je voudrais parcourir la terre, prêcher votre Nom et planter sur le sol infidèle votre croix glorieuse, ô mon bien aimé ! Mais une seule mission ne me suffirait pas : je voudrais en même temps annoncer l’Evangile dans toutes les parties du monde, et jusque dans les îles les plus reculées. Je voudrais être missionnaire, non seulement pendant quelques années, mais je voudrais l’avoir été depuis la création du monde, et continuer de l’être jusqu’à la consommation des siècles.

Comme vous, mon époux adoré, je voudrais être flagellée, crucifiée…Je voudrais mourir dépouillée comme saint Barthélemy. Je désire, comme saint Ignace d’Antioche, être broyée par les dents des bêtes, afin de devenir un pain digne de Dieu….
A toutes mes folies, qu’allez-vous répondre ? Y a-t-il sur terre une âme plus petite, plus impuissante que la mienne ? …
Ces aspirations devenant un véritable martyre, j’ouvris un jour les épîtres de Saint Paul, afin de chercher quelque remède à mon tourment. Les chapitres 12 et 13 de la première épître aux Corinthiens me tombèrent sous les yeux. J’y lus que tous ne peuvent être à la fois apôtres, prophètes et docteurs, que l’Eglise est composée de différents membres, et que l’œil ne saurait être en même temps la main. La réponse était claire, mais ne comblait pas mes vœux et ne me donnait pas la paix. « M’abaissant alors jusque dans les profondeurs de mon néant, je m’élevais si haut que je pus atteindre mon but » (St Jean de la Croix). Sans me décourager, je continuais ma lecture et ce conseil me soulagea : « Recherchez avec ardeur les dons les plus parfaits ; mais je vais encore vous montrer une voie plus excellente. » (1 Cor 12 31)
Et l’Apôtre explique comment tous les dons les plus parfaits ne sont rien sans l’Amour, que la charité est la voie la plus excellente pour aller sûrement à Dieu. Enfin j’avais trouvé le repos !
Considérant le corps mystique de la sainte Eglise, je ne m’étais reconnue dans aucun des membres décrits par Saint Paul, ou plutôt je voulais me reconnaître en tous. La Charité me donna la clef de ma vocation. Je compris que, si l’Eglise avait un corps composé de différents membres, le plus nécessaire, le plus noble de tous les organes ne lui manquait pas ; je compris qu’elle avait un cœur, et que ce cœur était brûlant d’amour ; je compris que l’amour seul faisait agir ses membres, que, si l’amour venait à s’éteindre, les apôtres n’annonceraient plus l’Evangile, les martyrs refuseraient de verser leur sang. Je compris que l’amour renfermait toutes les vocations, que l’amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les lieux, parce qu’il est éternel !
Alors dans l’excès de ma joie délirante, je me suis écriée : « O Jésus, mon amour ! Ma vocation, enfin, je l’ai trouvée ! Ma vocation c’est l’amour ! Oui j’ai trouvé ma place au sein de l’Eglise, et cette place, ô mon Dieu, c’est vous qui me l’avez donnée : dans le cœur de l’Eglise, ma mère, je serai l’amour !...Ainsi je serai tout ; ainsi mon rêve sera réalisé ! ».

Dans la spiritualité thérésienne comme dans l’Evangile : l’amour est tout.

Les innombrables témoignages du procès prouvent cette vie d’amour.
« L’amour du Bon Dieu animait véritablement toutes ses actions. Elle ne pensait qu’à lui, ne respirait que pour lui ».
« Cet amour de Dieu fut vraiment la « note » dominante de sa doctrine et de sa vie, la « caractéristique » de sa sainteté.
Sainte Thérèse aurait voulu « aimer le Bon Dieu comme jamais il ne l’a été ». « Elle adopta l’amour comme centre de sa vie spirituelle » et trouva dans la charité la clef de sa vocation. Sainte Thérèse fut par excellence la sainte du pur amour. « Il n’y a qu’une seule chose à faire ici-bas : aimer Jésus de toutes les forces de notre cœur et lui sauver des âmes pour qu’il soit aimé. Ne lui refusons rien : il a tant besoin d’amour » (Lettre à Céline le 14 juillet 1889).

Sur la cloison de sa chambre, Sainte Thérèse avait écrit : « Jésus est mon unique amour ».

Toutes ses occupations, même les plus banales, Saint Thérèse les transformait en un continuel exercice d’amour : « Qu’importe les œuvres ? L’amour peut suppléer à une longue vie. Jésus ne regarde pas au temps puisqu’il est éternel. Il ne regarde qu’à l’amour. Jésus ! Je voudrais tant l’aimer. L’aimer comme jamais il n’a été aimé. A tout prix je veux cueillir la palme d’Agnès, si ce n’est par le sang, il faut que ce soit par l’amour » (lettre à Mère Agnès de Jésus sept. 1890)
« Avec l’amour, disait Sainte Thérèse, non seulement j’avance mais je vole »(Hist. d’une âme).
Et dans ses armes de carmélite, elle avait inscrit, comme devise, cette maxime de Saint Jean de la Croix : « l’amour ne se paie que par l’amour ».

Le message de Sainte Thérèse sera d’avoir rappelé au monde que toute la vie spirituelle consiste à aimer Dieu avec un cœur d’enfant. Voilà les deux pôles de sa spiritualité.

« Je suis la plus petite créature, je connais ma misère. Mon excuse c’est mon titre d’enfant : les enfants ne réfléchissent pas à la portée de leurs paroles…Ce que je demande c’est l’amour. Je ne sais plus qu’une chose : vous aimez, ô Jésus ! Les œuvres éclatantes me sont interdites. Je ne puis prêcher l’Evangile, verser mon sang. Qu’importe ! Mes frères travaillent à ma place et moi, petite enfant, je me tiens tout près du trône royal : j’aime pour ceux qui combattent ». (Hist d’une âme 11, 218).

Ce que Sainte Thérèse désire par-dessus tout : c’est d’aimer le Bon Dieu pour lui-même sans retour égoïste sur soi. Il s’agit pour elle de nourrir un amour désintéressé.
« Un jour la voyant jeter des fleurs au Calvaire, je lui demandais : est-ce pour obtenir quelques grâces ? Non, me répondit-elle, c’est pour lui faire plaisir. Je ne veux pas donner pour recevoir. Je ne suis pas égoïste. C’est le Bon Dieu que j’aime. Ce n’est pas moi ». (à Mère Agnès de Jésus)

Ainsi, pour Sainte Thérèse, tout l’effort vers la sainteté consiste à aimer. « Notre Seigneur ne regarde pas tant à la grandeur de nos actions, ni même à leur difficulté qu’à l’amour avec lequel nous les accomplissons » (Lettre à Céline 20 oct. 1888)

Il n’est donc pas besoin de recourir aux choses extraordinaires mais simplement de tout faire par amour. Sainte Thérèse transformait toutes ses actions, même les plus indifférentes, en actes d’amour.
On raconte : « Le 29 juillet 1894, la communauté tira au sort quelques pieuses sentences. Le billet qui lui échut fut celui-ci : si à chaque instant on vous demandait : « que faites vous ? Votre réponse devrait être : j’aime. Au réfectoire ? J’aime. Au travail, j’aime… Ce billet qu’elle garda jusqu’à sa mort lui causa un plaisir extrême. Elle me dit : « il est l’écho de mon âme. Depuis longtemps c’est ainsi que j’entends l’amour et que je m’exerce à le pratiquer ». (Procès apostolique. Sainte Marie de la Trinité).

 


La Passion du Christ

Il nous faut poursuivre le bel exposé de Louis Chardon.
Ce nouveau chapitre – le chapitre VIII - illustre merveilleusement la disposition de l’âme de Notre Seigneur Jésus-Christ. Jésus met sa grandeur dans les tourments de sa passion, et l’amour qu’il a pour la Croix ne peut permettre à aucune autre pensée d’altérer l’attrait que la grâce lui donne de mourir entre ses bras. C’est ainsi que l’on peut admirer l’amour que Jésus nous porte


«Par l’inclination qu’il a vers la croix, Jésus préfère la pensée de la mort à celle de sa gloire comme Fils de Dieu ».

« Jamais, dit le grand Apôtre, Jésus n’a pris aucune complaisance en lui-même tandis qu’il était voyageur sur la terre. (Rm 15 3 : Etenim Christus non sibi placuit ») Cette proposition est si générale qu’elle comprend l’intelligence, le jugement, la mémoire et les riches trésors de la science de Jésus. Il ne permettait pas que la plénitude de sa grâce fit aucune impression de joie en la partie de son âme qu’habitait la tristesse ; et lorsque le sentiment de sa gloire lui était présenté avec l’allégresse inénarrable qui en découle, il la refusait ; il donnait la préférence à la pensée de la confusion de la Croix. (Hb 12 2). Cette pensée douloureuse s’emparait d’une partie de son esprit, lorsque l’autre était en possession de la Béatitude ; et tandis que la perfection de sa vie et ses œuvres miraculeuses ravissaient d’admiration ceux qui en étaient les témoins, elles ne produisaient aucune impression de joie dans son cœur.
Cette vérité que Jésus n’a point pris de satisfaction en lui-même, selon le langage du grand Apôtre, comprend aussi la complaisance qu’il pouvait éprouver de l’union ineffable de son âme sainte avec une personne divine. Certes, nous n’avons pas besoin d’un grand effort pour croire qu’il n’y avait point de pensée plus capable de transporter de bonheur toutes les facultés de l’humanité sainte de Jésus que celle de l’honneur qu’elle possédait par la filiation naturelle et divine. Et, néanmoins, ce vif penchant à la mort qui occupe sans cesse son cœur, ne respecte point cette pensée ; il ne lui permet point d’être cause de joie innocente qui naît de la présence du souverain Bien.

Nous trouvons de cette même vérité des preuves bien frappantes en un grand nombre d’exemples tirés des Evangiles.

Toutes les fois qu’on lui parle de sa dignité de Fils de Dieu, il rejette cette pensée pour ne considérer que l’avilissement où sa mort et sa passion le devaient réduire. S’il n’en avait été ainsi qu’une seule fois, nous pourrions présumer qu’il obéissait peut-être à un autre dessein, mais puisqu’il en a toujours été de la sorte, disons qu’en lui s’est vérifiée toujours la parole de Saint Paul : Jésus ne s’est pas complu en lui-même ; et qu’il a réalisé ce que le Psalmiste avait écrit : « Les blasphèmes de ceux qui vous outrageaient, sont tombés sur moi ». (Rm 15 3 ; Lc 9 ; Mc 9 ; Mt 17)

Sur le Thabor, la voix du Père s’écrie du haut des cieux : Vous êtes mon Fils ! Jésus semble ne pas vouloir l’entendre pour s’entretenir du Calvaire. Il oublie sa glorieuse transfiguration pour ne songer qu’aux horreurs ténébreuses de sa mort ; et la splendeur des clartés qui l’entourent ne l’empêche point d’évoquer, devant ses yeux, les plaies sanglantes dont son corps sera couvert. Voici les trois croix du Calvaire, sur l’une desquelles il se voit attaché ; et il oppose ce spectacle aux trois tentes que Saint Pierre eût voulu dresser au Thabor. Les deux voleurs qui partagent sont supplice font pâlir l’appareil éclatant avec lequel Moïse et Elie viennent lui rendre leurs hommages. Les insultes, les mépris et les blasphèmes sont plus précieux à son âme que le sublime témoignage qu’on rend à sa grandeur ; et, de peur qu’on ne publie sa gloire avant sa passion, il commande aux trois Disciples le silence sur ce qu’ils ont vu et entendu, durant leur ravissement sur cette heureuse Montagne (Mt 17 9).
Aussitôt qu’il en est descendu avec eux, comme pour faire disparaître de leur esprit le souvenir de ces choses glorieuses, il leur présente des perspectives capables d’abattre leur courage, tout à l’heure relevé dans l’extase. Il commence à leur parler de Saint Jean-Baptiste, sous le nom d’Elie. « Elie, leur dit-il, est déjà venu, sans qu’on l’ait connu ; et on l’a accablé de mauvais traitements. « Enfin, il conclut que le Fils de l’homme doit souffrir les tourments les plus cruels que la malice puisse inspirer aux hommes (Mt 17 10-12)

Nous voyons la même chose, lors de son entrée à Jérusalem.

Sur le bruit bientôt répandu du miracle de la résurrection de Lazare, le peuple s’était porté an foule à sa rencontre. Tout à coup, devant ce peuple assemblé, on entendit une voix venant du ciel, éclatante comme le tonnerre, qui disait : « Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore » ; et Jésus, à qui le Père vivant rendait ce témoignage, répond à cette voix d’une manière éloignée du sens qu’elle semblait exprimer. (Jn 12 31-33) : « Quand je serai élevé de la terre, dit-il, j’attirerai tout à moi » donnant à entendre par là, ainsi que le dit Saint Jean, quel devait être le genre de sa mort. Remarquons comme s’exprime cet Evangéliste ! Jésus répond, sans doute, à la voix du Père qui lui parle de gloire et d’une gloire égale à celle de son principe ; mais, lui, il parle de l’ignominie de la Croix. Il répond ainsi, non à la parole de l’Eternité, mais à l’inclination de son propre esprit, à la pente de son âme et à la pensée de son cœur.

Job, guidé par le saint Esprit, voulant faire entendre, en peu de mots, que la médiation de la mort était le principal objet de sa pensée, dit qu’il est sorti tout nu du sein de sa mère et qu’il retournera là tout nu (Job 1 21). Il signifie par ce mot là le sépulcre et non point le sein de sa mère. Car (bien que semblât en penser, un instant, Nicodème parlant au Fils de Dieu), les hommes ne retournent plus au sein de leur mère (Jn 3 4). Par ce terme là, Job fait voir seulement quelle place la pensée de la mort occupait dans son esprit. Nous ne nommons point, en effet, mais nous montrons les choses qui nous sont présentes ; or, le sépulcre étant le lieu où nous devons aller et que le saint homme Job avait toujours présent en souvenir, il lui suffit de le montrer comme du doigt sans l’appeler par son nom.
Ainsi Madeleine, parlant à celui qu’elle prenait pour le jardinier du lieu où l’on avait mis le corps de son cher Maître, lui dit : « Si vous l’avez enlevé »(Jn 20 15), sans dire quoi ni qui. Le sentiment qui lui faisait chercher avec tant de larmes et de sollicitude celui dont l’amour la possédait souverainement absorbe tellement son esprit et ses sens qu’il lui semble que tous les autres doivent sentir et penser comme elle. Aussi ne songe-t-elle à dire ni le nom, ni l’état, ni les conditions de ce qu’elle demande.

Ces exemples nous font comprendre le mystère de la réponse du Fils de Dieu à la parole glorieuse du Père. Jésus met sa grandeur dans les tourments de sa passion et l’amour qu’il pour la Croix ne peut permettre à aucune autre pensée d’altérer l’attrait que la grâce lui donne de mourir entre ses bras. C’est pourquoi il incline son souvenir vers sa condition d’homme mortel, et se plaît à exposer les circonstances qui doivent le faire paraître en proie à la honte, aux opprobres et à la souffrance. Il supprime ainsi, autant qu’il le peut, les conditions qui le rendent adorable et le montrent plein de la gloire qui lui est due. De cette gloire, il ne parle que sobrement et le moins possible, si ce n’est lorsqu’il se souvient que sa qualité de Fils de Dieu doit être cause de sa mort. Sans cesse et en tout lieu, il s’appelle le Fils de l’Homme, parce qu’il veut prendre de sa nature mortelle le devoir de souffrir et le motif d’éloigner de sa pensée tout ce qui peut le réjouir.

De cette hauteur, je ne m’étonne plus si Jésus ne semble point faire beaucoup d’estime des services que Marthe lui rend avec autant d’amour que de respect. Ces services lui étaient nécessaires, afin que, selon l’ordre de Dieu, il put entretenir sa vie humaine jusqu’à l’heure marquée dans l’éternité ; néanmoins, ce qui lui plaît davantage, c’est la tendre attention de Madeleine.
Pour lui montrer toute l’ardeur de son amour, elle se tient à ses pieds ; elle y répand, avec une étonnante prodigalité, les parfums les plus précieux. (Lc 10 38 et seq). Les Apôtres murmurent, disant qu’on aurait pu vendre ce parfum bien cher et en donner le prix aux pauvres. Cette réflexion avait l’apparence d’être d’accord avec la justice et une charité ordonnée (Mt 16 3).
Jésus blâme, cependant, cette préoccupation et ces murmures. Il en condamne les auteurs, et il entreprend la défense de cette femme. Il la protège à tel point qu’il veut que sa piété soit prêchée par tout le monde (Mc 14 9 ; Mt 26 13).
Ce genre de service doit non seulement rappeler sa mort, mais encore préparer sa sépulture.
Il est au milieu d’un grand banquet ; toute la maison est embaumée de l’odeur des parfums de Madeleine (Jn 12 3). Dans une admirable protestation de foi à la divinité de son Maître, elle a versé ses parfums sur ses pieds adorables, -superfluité qui, pourrait être blâmable dans d’autres circonstances et vis-à-vis de toute autre personne (Mt 26 12). Mais, là encore, il détourne de sa fin l’intention de cette admirable pénitence. Sous l’empire de l’inclination qui disposait incessamment son esprit à la mort, il bannit de son souvenir la pensée de sa filiation divine, pour ne songer qu’au tombeau où il sera bientôt enseveli. Ne vos scandalisez point, dit-il à ceux qui étaient présents ; car c’est en vue de ma sépulture que cette femme a agi de la sorte (Mc 14 8)
Jésus a plus d’inclination à mourir qu’à vivre ; et c’est ce qui explique sa conduite si différente à l’égard des deux sœurs. Au service qu’on lui rend pour le soulagement de sa vie, il préfère ceux qui présagent sa mort et annoncent sa sépulture. A vrai dire, la vie lui est à charge tant qu’il ne la donne point pour le salut des hommes. C’est pourquoi il loue Marie, et paraît blâmer Marthe. Il console celle-là et l’approuve publiquement de sa piété, tandis qu’il manifeste ne goûter que peu les actives sollicitudes de sa sœur aînée, si généreuse, pourtant, et si pleine de foi. On dirait que ce qui ne porte pas le caractère de sa mort lui est pénible ; au lieu que ce qui en révèle les moindres traces est pour son esprit un sujet de joie.
Continuons à le voir sans quitter Marthe. Celle-ci, pleine de confiance en lui, sûre qu’il ressusciterait son frère Lazare, lui dit, dans l’ardeur de sa foi : « Je crois, Seigneur, que vous êtes le Fils du Dieu vivant qui êtes venu en ce monde. » (Jn 11 27)
Jésus la quitte aussitôt, et s’en va vers le lieu où on avait déposé le mort. Là, saisi de douleur, il commence à se troubler en son esprit : ses sens s’émeuvent ; il soupire, il sanglote, il verse des larmes abondantes sur son ami. Ah ! il est bien fidèle à sa volonté de résister à tout ce qui pouvait lui causer de la joie (Jn 11 33).

Le chapitre suivant nous montrera ce qui arriva, pour le même motif, à Saint Pierre.

Je conclus celui-ci par une remarque de Saint Luc. Lors du baptême de Jésus, nous dit cet évangéliste : aussitôt que le Père céleste eut reconnu et proclamé, comme, depuis, sur le Thabor, que Jésus était son Fils, le Saint Esprit, source de grâce en son âme, le conduisit au désert pour y demeurer pendant quarante jours, et s’y livrer au jeûne (Lc 3 1). Saint Marc nous signale la même coïncidence en ces termes : « une voix vint du ciel disant : « Tu es mon Fils bien aimé ! « et aussitôt l’esprit l’entraîna dans le désert ». Quel rapport entre le désert et les cieux que Jésus voit ouverts ? Entre la toute-puissante attestation du Père, la complaisance qu’il manifeste trouver en son Fils unique, et l’austérité, la rigueur de la pénitence qu’on lui impose ? Quelle liaison entre l’honneur que Jésus reçoit du Saint-Esprit descendant visiblement sur lui et un changement si subit et si méprisable ? Saint Marc ne dit point que le saint-Esprit lui commande, qu’il le presse, qu’il l’inspire ; mais qu’il l’entraîne au désert (Mc 1 10 ; Jn 12 31). En cela, il s’accommode bien à la disposition de l’âme de Jésus, puisque, quand on entendit cette voix du tonnerre qui disait : « Je l’ai glorifié et le glorifierai encore, « il se cacha, après avoir répondu par la parole de sa Croix. Proclamé, par la bouche même de Dieu, l’Image de sa gloire, il semble ne plus oser paraître en la présence des hommes ».

« Exit » la mixité de l’ école.

Il y a longtemps que la Tradition catholique a renoncé à la mixité. Ou plutôt, elle n’a jamais voulu créer d’ établissements secondaires mixtes. Les pressions se sont pourtant quelquefois exercées. En Amérique principalement. A l’école Saint Michel. La direction tînt bon. Les jeunes filles et les jeunes garçons disposent de structures différentes, de classes différentes, de lieux de récréations différents, d’encadrements différents. Les élèves, garçons et filles, sont bien dans un même lieu géographique, mais ils constituent cependant deux établissements différents.
Fidèles à toute une tradition faite d’expériences et de bon sens, la FSSPX, ni en Europe ni aux USA, n’a donc constitué d’établissements secondaires mixtes. On n’éduque pas un garçon comme un jeune fille. Physiologiquement, psychologiquement, les garçons sont différents des jeunes filles. Il faut des structures différentes, un encadrement différent… C’est évident. On ne va pas éternellement contre la nature.

L’Eglise, en France, en acceptant la loi de Michel Debré, la loi de 1958, a subi les pressions, a suivi le mouvement. Elle a du accepter la mixité. La chute des vocations sacerdotales s’en est suivie. Tout se tient. Il faut être logique. Et savoir ce que l’on veut. Je mets à défit n’importe quel évêque de France de redresser la situation des vocations sacerdotales dans son diocèse, en maintenant la mixité dans les établissements scolaires encore sous son autorité. Je me permettais de le dire à quelques prélats rencontrés ces derniers temps. Ils ont du mal à envisager d’aller à contre courant.

Mais il ne faut pas se décourager. Un mouvement contre la « mixité » est en train de se constituer de l’autre côté de l’Atlantique : aux USA.

C’est ce qu’explique d’une manière très pertinente et avec humour, Christian Daisug, dans un article paru dans « Présent » le 13 mars 2004. Il a pour titre : « Démocratie, mixité…et réalités. »
Ces idées, bien développées, pourraient emporter les hésitations de l’épiscopat français…Je le publie à leur attention.

Démocratie, mixité…et réalités.


« La statue du conformisme commence à se lézarder sérieusement : les apparatchiks des droits civiques ne prêchent désormais que des convaincus professionnels, les féministes radicales ne recrutent plus que dans le snobisme new-yorkais ou à la rigueur washingtonien et les plus optimistes annoncent près de 110 millions d’abstentionnistes raisonnés lors du duel Bush-Kerry en novembre prochain.

On le voit : les valeurs de la démocratie libérale américaine donnent l’impression de partir en lambeaux.

Plus grave : les lézardes qui s’obstinent à attaquer ce conformisme hautement statufié, ont même entamé une des parties essentielles de l’œuvre en péril – l’éducation.

Et à l’intérieur de cette éducation méritant à elle seule un monument, ces mêmes lézardes sont en train de tarauder un principe qui paraissait jusqu’ici coulé dans le granit : la mixité.

Plus inquiétant le pourvoyeur de gravats n’entre ni dans la catégorie des extrémistes de droite ni dans celle des excités de gauche. C’est Bush lui-même.

L’imprévisible président avait donné, voilà deux ans, un premier coup de pioche. En janvier 2002, il signait en effet une loi intitulée No Child Left Behind (Aucun enfant à la traîne) qui autorisait les districts (circonscriptions administratives ou électorales) à utiliser annuellement 450 millions de dollars de subventions fédérales afin de promouvoir un enseignement à deux voies : une pour les garçons, l’autre pour les filles.

Bush passa alors pour un incorruptible passéiste ?

Vingt-six mois plus tard, il donnait un second coup de pioche. C’était au début de cette semaine.( NDRL :Donc la deuxième semaine de mars).

N’hésitant pas cette fois-ci à passer pour un provocateur suicidaire, il confirma la fameuse loi en l’entourant d’une série de dispositions qui devraient permettre aux chefs d’établissements d’éviter d’éventuels procès pour discrimination.

A la vue, sous les préaux, du retour officiel de la frontière du sexe, la statue du conformisme, jusqu’à présent interloquée, ne put que blêmir avant de se fendre sous le choc comme une solive qui a trop servi.


A une époque persuadée qu’il suffirait d’élever les garçons avec des chiffons et les filles avec des tanks pour créer une égalité parfaite entre les sexes - les femmes deviendraient spationautes et les hommes puéricultrices -, le geste de Bush prit les allures d’une véritable révolution. D’autant que dans les esprits comme dans les mœurs, la mixité a été depuis longtemps élevée à la hauteur d’un dogme intangible et les différences sexuelles abaissées au niveau d’une invention humaine.

Deux trajectoires qui, dans les textes, se croisèrent exactement le 23 juin 1972.

Ce jour là, Richard Nixon décide de créer une diversion au scandale du Watergate, qui l’entraînera plus tard vers sa perte, en ratifiant une loi susceptible de combler les rêves les plus fous des plus exigeants suppôts du politiquement correct.

Cette loi, comme sous le nom énigmatique de Title IX, s’inscrit dans la mouvance des droits civiques acquis en 1964 et précise qu’aucune structure d’enseignement public n’a le droit de dispenser des cours distincts aux garçons et aux filles.

La lutte contre la ségrégation raciale était ainsi rejointe par la lutte contre la ségrégation sexuelle. Les garçons allaient pouvoir tirer des nattes et les filles taper dans un ballon.

Les féministes, les libéraux et les gauchistes sentirent le souffle d’une victoire qui renforçait leurs certitudes : si garçons et filles n’ont de distinct sur le plan biologique que de futiles apparences, pourquoi diable les séparer artificiellement devant un tableau noir ? Si leurs façons d’apprendre s’avèrent en tous points semblables parce que leurs cerveaux fonctionnent à l’unisson, la mixité ne s’impose-t-elle pas comme une évidence ?

C’est ainsi que fut construit un tabou sur lequel, depuis trente ans, fonctionnent 95000 écoles et lycées publics où les deux sexes présents témoignent, pour beaucoup, d’une fulgurante avancée sur le terrain de l’égalitarisme.


Douce illusion qui invita Bush à donner plus de flexibilité à ce carcan idéologique, autrement dit à faire voler en éclats la funeste initiative de Nixon. Sur ces décombres législatifs fleurirent, entre janvier 2002 et aujourd’hui, 46 établissements d’enseignement où garçons et filles ne se voient que de loin et ne se parlent qu’au téléphone.

Moins de 50 écoles et lycées qui séparent les sexes contre près de 95000 qui les mélangent : une goutte de ségrégation dans un océan de mixité.

Mais c’est une goutte qui pourrait devenir bientôt un ruisseau, un torrent, une rivière.

Pour deux raisons.
L’une s’appuie sur le chaos pédagogique régnant dans le monde de l’éducation, qui depuis deux générations, connaît en même temps une pléthore de diplômes usurpés et une dramatique baisse de niveau.
L’autre se développe sur l’imposture de l’égalitarisme sexuel qui, en gommant les distinctions et les décalages entre filles et garçons, a troublé les premiers et pénalisé les seconds.

Les deux raisons se complètent pour entrer ensemble dans un vieux débat d’où les partisans de la mixité, jusqu’à un passé très récent, sont toujours sortis à leur avantage en avançant quatre arguments :
- la mixité est partout - dans la famille, la société, les métiers -, pourquoi pas à l’école ?
- la mixité des classes sert d’amorce à l’habillage du concept démocratique ;
- la mixité constitue le détonateur d’une saine émulation entre garçons et filles ;
- enfin la mixité, générant une proximité, entraîne une compréhension, puis le respect, de l’autre sexe.

Les adversaires de cette solution globalisante, qui a l’avantage de simplifier les problèmes en mettant tout le monde dans le même sac, n’eurent aucun mal à enfoncer les rangs de ses défenseurs.

Ils se sont contentés de laisser parler les faits.

Leur entêtement a alimenté une riposte qui s’articule autour de deux pôles :
- les résultats contrastés des garçons et des filles prouvent que la mixité ne peut être un facteur d’égalité ;
- les innombrables agressions sexuelles montrent que la mixité ne peut être, non plus , le ciment d’une compréhension mutuelle.

Alors ?

La mixité n’est pas une vertu démocratique, encore moins une panacée, mais une solution possible - à condition de l’utiliser avec d’infinies précautions. Or, tous ses utilisateurs, presque sans exception, s’en sont servi pour obéir à des principes et couper dans les dépenses. En faisant semblant d’oublier l’essentiel.

L’essentiel, c’est la nature qui nous le rappelle, en toute simplicité mais avec force : les garçons et les filles sont différents.

Les premiers sont « mécaniques », plus mobiles, plus inventifs et réclament des structures, exigent des mentors qui les encadrent, leur lancent des défis, les stimulent dans une constante compétition intellectuelle.

Les secondes sont plus verbales, plus aptes à s’intégrer au système, plus souples face au règlement, plus conscientes des enjeux. Elles brillent dans l’expression, la communication, défendent leur indépendance et s’obstinent à considérer le diplôme comme un but à atteindre.
Les filles réussissent parce qu’elles s’adaptent, s’accrochent, se battent.

Les chiffres sont éloquents : 34% des garçons - mais seulement 26% des filles - se trouvent dans une classe dont le niveau est inférieur à celui qui correspond à leur âge ; parmi les élèves qui ont de grosses lacunes en lecture, 76% sont des garçons ; de 1967 à 2000, la proportion des lycéennes qui ont franchi le seuil de l’université est passé de 25% à 46% alors que, dans le même temps, celle des lycéens tombait de 45% à 41%.

Les garçons sont largués. La mixité en a fait des élèves de seconde catégorie.

Et les structures enseignantes n’ont rien entrepris pour les aider.

Sexisme ?

Pas exactement. Pour aider quelqu’un, ou un groupe, il faut d’abord être conscient d’un besoin d’assistance. Or, du haut en bas de la hiérarchie éducative, on a toujours nié l’existence de problèmes liés à la condition d’élève mâle. Le politiquement correct, entraîné par les féministes, a tellement insisté sur l’injustice à l’égard des filles, que personne ne se rendit compte qu’elles étaient en train de rafler tous les trophées en ravalant les garçons au rang de victimes désignées.

Echappée prévisible. Sous le microscope, le cerveau d’une fille de quatre ans ressemble à celui d’un garçon de six ans ; celui d’une fille de onze ans est comparable à celui d’un garçon de dix-sept ans. Les hommes ne rattrapent les femmes, selon des observations scientifiques récentes, qu’à l’approchent de la trentaine.

Les garçons s’engluent dans un univers traumatisant.

La mixité n’est pas pour eux. »

Christian Daisug

Quelques nouvelles de la semaine


A : J’encourage vivement les fidèles de « la Paroisse virtuelle Saint Michel » a suivre les actualités religieuses que, très régulièrement, je mets sur le site ITEM. Voici son adresse : http://item.snoozland.com

Je vous encourage à aller cette semaine voir la « petite chronique romaine » du mois de mars. J’y analyse trois documents importants du Pape Jean-Paul II, deux sur la liturgie, un sur le rôle des « medias » et leur influence dans la formation morale des jeunes.

B : Je remercie très sincèrement Yves Chiron d’avoir consacré une grande partie de son « Aletheia » du 21 mars 2004 (16, rue du Berry F 36250 Niherne) à faire connaître non seulement le site Item et sa « Paroisse virtuelle Saint Michel » ( qui compte aujourd’hui plus de 1150 « fidèles » inscrits) mais également la « Déclaration » que j’ai appelée « déclaration d’honneur ou profession de foi ». Il cite le témoignage que je donne concernant le rôle du RP Marie-Dominique Philippe dans la fondation de la FSSPX, rôle historique puisqu’il en fut au principe et la raison de son éloignement ne voyant pas toute l’importance, pour la vie ecclésiale, de la « messe » célébrée dans le rite catholique tridentin.
Yves Chiron cite également un long passage de cette « déclaration d’honneur » qu’il me plait de rappeler ici encore :

« Redonnez la Messe à l’Eglise, vous lui redonnez son âme, sa vie.
Redonnez la Messe à l’Eglise, vous lui redonnez sa doctrine. Vous verrez alors de nouveau : « s’étendre le règne de Notre Seigneur Jésus-Christ en ce monde » (lettre de Mgr Lefebvre à Paul VI, le 17 juillet 1976).

« Redonnez la liberté à la Messe catholique
et vous rendez –ipso facto- leurs justes conceptions aux idées falsifiées devenues les idoles de l’homme moderne : la liberté, l’égalité, la fraternité, la démocratie. Pourquoi ? Parce que la messe est hiérarchique. Parce que la messe est le mode sublime de l’adoration que tout cœur humain doit à Dieu.

« Vous comprenez pourquoi nous sommes attachés à cette messe, pourquoi nous voulons vivre de cette messe et chercherons toujours à la mieux comprendre.
Et c’est ainsi que l’on peut dire que la liberté de la messe dite de Saint Pie V dans l’Eglise est en proportion de la pureté de la doctrine librement exprimée par la hiérarchie catholique.Elle est totale dans le cœur de Mgr Lefebvre. Il s’en fait le juste défenseur.
Elle est totale dans le cœur de Mgr de Castro Mayer. Il s’en fait le juste Héraut ;
Elle est maintenant totale dans le cœur de Mgr Lazo, des Philippines. Il en redevient son libre apologiste
Qui potest capere capiat ».
Et c’est pourquoi tout effort, quel qu’il soit, d’où qu’il vienne, pour rendre à la Messe catholique dite de saint Pie V sa place dans l’Eglise, est digne d’intérêt, de joie et d’attention, de reconnaissance La prudence, bien sur, s’impose après trente ans d’efforts pour la faire disparaître.

« Et ne pas voir ces efforts et cette évidente évolution dans l’Eglise aujourd’hui tient de la cécité.
Et l’on connaît les dangers de suivre un aveugle…

« Aussi me suis-je réjoui profondément à la lecture des conférences du cardinal Stickler publiées par le CIEL.
« Aussi me suis-je réjoui à la publication des livres récents du cardinal Ratzinger dans lesquels il prend la défense du rite tridentin et dans lesquelles il dit que doit cesser ce conflit contre la « messe tridentine » :
« Pour la formation de la conscience dans le domaine de la liturgie, il est important aussi de cesser de bannir la forme de la liturgie en vigueur jusqu ‘en 1970. Celui qui, à l’heure actuelle, intervient pour la validité de cette liturgie ou qui la pratique, est traité comme un lépreux : c’est la fin de toute tolérance. Elle est telle qu’on n’en a pas connue durant toute l’histoire de l’Eglise. On méprise par là tout le passé de l’Eglise. Comment pourrait-on avoir confiance en elle au présent s’il en est ainsi. J’avoue aussi que je ne comprends pas pourquoi beaucoup de mes confrères évêques se soumettent à cette loi d’intolérance qui s’oppose aux réconciliations nécessaires dans l’Eglise sans raison valable. » (Card. Ratzinger Voici quel est notre Dieu. p. 291)
« Aussi me suis-je réjoui profondément quand je me suis aperçu que ce désir exprimé par la hiérarchie s’intensifiait pour devenir même une résolution ferme, constante et répétée. C’est encore le cardinal
Ratzinger qui affirme dans son livre « Le sel de la terre » :
« Je suis certes d’avis que l’on devrait accorder beaucoup plus généreusement à tous ceux qui le souhaitent le droit de conserver l’ancien rite. On ne voit d’ailleurs pas ce que cela aurait de dangereux ou d’inacceptable. Une communauté qui déclare soudain strictement interdit ce qui était jusqu’alors pour elle tout ce qu’il y avait de plus sacré et de plus haut, et à qui l’on présente comme inconvenant le regret qu’elle en a, se met elle-même en question. Comment la croirait-on encore ? Ne va-t-elle pas interdire demain ce qu’elle prescrit aujourd’hui ?...Malheureusement la tolérance envers des fantaisies aventureuses est chez nous presque illimitée, mais elle est pratiquement inexistante envers l’ancienne liturgie . On est sûrement ainsi sur le mauvais chemin. » (le sel de la terre p. 172- 173)
« Aussi n’est-il pas étonnant d’avoir vu, enfin, un cardinal, le Cardinal Catrillon Hoyos célébrer à Rome, sur un autel papal, à sainte Marie Majeure, la messe tridentine, le 24 mai 2003. Je m’en suis réjoui.
Car je voyais en cet acte la confirmation du bon droit pour la
Messe catholique tridentine de retrouver toute sa place et sa liberté dans l’ Eglise.
Et ne fut-ce l’interdiction de mon supérieur, j’aurais été en bonne place en cette basilique pour exprimer ma joie et ma reconnaissance, ainsi que mon soutien à cette effort vrai de la hiérarchie catholique , lui proposant main « cordiale », humble et déférente pour l’aider dans cet effort de restauration liturgique.
Telles sont mes résolutions clairement exprimées »


C : Allez voir aussi sur le site ITEM la réaction de ce cher abbé Sulmont, curé de Donqueur, suite à son procès et aux difficultés qu’il rencontre du côté de son nouvel évêque. Voilà un curé courageux ! Qu’il doit souffrir !