« La pratique de la perfection chrétienne »
A
– Commentaire du chapitre IV
L’ idée développée dans
ce chapitre IV est la suivante :
plus les « choses » de Dieu sont goûtées et connues, plus
elles sont aimés et désirées. Elles ne lassent jamais l’âme. Bien au contraire. Elles sont d’une autre
« nature » que les plaisirs de la terre qui souvent déçoivent dès qu’ils sont possédés. Jamais les « choses » de
Dieu ne pourront lasser ceux qui les
possèdent, comme jamais dans le ciel les élus, qui possèdent Dieu, ne sont lassés de chanter sa gloire. La
preuve en est, nous dit le Père Rodriguez, que le cantique qu’ils chantent au
ciel est dit toujours « nouveau », au témoignage même de Saint Jean
dans son Apocalypse.
Cela me semble être l’idées développée par le Père
Rodriguez, dans ce chapitre.
Comme toujours il fonde
d’abord son affirmation sur le témoignage de l’Ecriture Sainte. Il cite le
texte de l’Ecclésiaste : « « Ceux qui me mangent auront
encore faim et ceux qui me boivent auront encore soif ». Il cite
surtout le dialogue de Notre Seigneur avec
C’est qu’il y a dans le
cœur humain, la soif d’un bonheur infini que seul Dieu peut combler.
« L’eau des contentements et des joies de la terre ne peut apaiser la soif
de bonheur qui est en nous, dit le Père Rodriguez . C’est dire,
d’une manière équivalente, que
l’objet de nos facultés spirituelles, l’intelligence et la volonté, a pour objet, l’absolu. Dès lors, rien de fini et de limité, ne peut satisfaire
cet soif d’infini qui est au cœur de tout être spirituel. On vérifie ici la
phrase de Saint Augustin : « Tu nous as fait pour toi Seigneur
et notre cœur est sans repos tant qu’il
ne demeure pas en toi ».
B « Pratique de la Perfection Chrétienne »
par le RP Alphonso Rodrigues
Première Partie
Premier traité
De l’estime et de l’affection que mérite de notre
part tout ce qui se rapporte à notre avancement spirituel et des différents
moyens qui peuvent nous aider à y travailler avec fruit.
Que plus on s’applique
aux choses spirituelles, plus on s’y affectionne et on les désire.
« Ceux qui me mangent
auront encore faim et ceux qui me boivent auront encore soif » (Eccl 24 29) dit le
Saint-Esprit parlant de la sagesse divine. On lit aussi dans saint
Grégoire : qu’il y a entre les
biens et les plaisirs du corps et les
biens et les plaisirs de l’âme, cette différence, que les premiers, tant
que nous ne les posséderons pas, excitent en nous un vif désir et un grand
appétit, mais qu’aussitôt que nous les avons obtenus, ils n’ont plus de prix à
nos yeux, tandis que, pour les choses spirituelles, c’est le contraire qui
arrive : tant qu’elles nous sont étrangères, elles ne nous inspirent que
dégoût et aversion, mais à peine les avons
nous connues et goûtées que nous éprouvons pour elles les sentiments
opposés, et plus nous les connaissons, plus nous les goûtons, plus aussi
nous les aimons et les désirons.
Saint Grégoire donne la raison de cette
différence ; il dit qu’une fois que nous possédons les biens temporels et
les jouissances matérielles, nous en voyons plus clairement l’insuffisance et
l’imperfection, et, comme elles ne satisfont ni ne rassasient le désir qu’elles
nous avaient inspiré, comme elles ne nous donnent pas le bonheur que nous
pensions en recevoir, nous comptons pour rien ce que nous en avons obtenu, et
nous restons avec la faim et la soif d’un plaisir nouveau et moins trompeur.
Erreur nouvelle ! Cette espérance sera déçue comme la première, comme
toutes celles, de même nature, qui la suivront.
Rien en ce monde ne
pourra désaltérer et rassasier notre cœur, « Quiconque boit de cette eau »,
dit le Sauveur à la Samaritaine, « aura encore soif ». (Jn 4 15)
L’eau des contentements et des joies de la terre ne peut apaiser la soif de
bonheur qui est en nous.
Mais qu’il en est
autrement des biens et des plaisirs spirituels !
Quand on les possède,
on les aime et on les désire, parce qu’on en connaît mieux le prix et la
valeur ; et plus la possession de ces biens et de ces plaisirs est
complète, plus l’amour qu’ils inspirent acquiert de force et d’ardeur.
Il est naturel que ceux
qui n’ont jamais goûté aux choses spirituelles ne sentent aucune affection pour
elles. « Qui peut aimer ce qu’il ne connaît pas ? » dit Saint
Grégoire ; et l’apôtre saint
Pierre : « Si toutefois vous avez goûté combien le Seigneur est
bon »(1 Pet 2 3). Le prophète dit
aussi : » Goûtez et voyez combien le Seigneur est doux ». (Ps 33
9)
Oui, si vous commencez
une fois à vous nourrir de Dieu et des choses spirituelles, vous trouverez dans
cet aliment céleste tant de douceur et de suavité que vous en ferez vos délices.
Ces paroles du sage : « Ceux qui me mangent auront encore faim et
ceux qui me boivent auront encore soif » doivent donc se traduire
ainsi : « Plus vous aimerez Dieu et les biens spirituels, plus vous
voudrez les aimer ».
Mais dira-t-on comment
concilier ces paroles avec ce que Jésus-Christ dit à la Samaritaine :
« Celui qui boira de l’eau que je lui donnerai ne connaîtra jamais la
soif » (Jn 4 13) La contradiction semble flagrante.
Les saints Pères la
font disparaître en disant que les paroles adressées par le Sauveur à la
Samaritaine signifient que celui qui aura bu de l’eau vive qu’il promet n’aura
jamais plus soif des plaisirs des sens et du monde, parce que ces plaisirs lui
paraîtront fades et insipides auprès de la douceur infinie des joies spirituelles
et ces délectations divines. « De même qu’après avoir goûté du miel, dit
saint Grégoire, nous trouvons tout insipide ; ainsi toute chair nous
paraît fade, après avoir goûté l’Esprit ».
Quant à ces
paroles : « Celui qui me mange aura encore faim », elles
s’appliquent au contraire, aux choses spirituelles, et signifient que, plus on
goûtera Dieu dans la pratique des vertus dont il est le la source, plus on aura
faim et soif de lui, parce que la suavité toujours plus grande que notre âme
trouvera dans cette nourriture excitera en elle un désir toujours plus vif de
s’en rassasier.
Il paraît plus
difficile d’accorder ces mêmes paroles avec cet autre passage de
l’Evangile : « Heureux ceux qui ont
faim et soif de la justice, parce qu’ils seront rassasiés » (Mt 5
6) Ici, ceux qui ont faim et soif de la justice
seront rassasié, et cependant, d’après la maxime du Sage, ceux qui
auront mangé et bu auront encore faim et soif. Or avoir faim et être rassasié,
avoir soif et être désaltéré, sont choses incompatibles. Il y a, néanmoins, une
excellente réponse à faire à cette difficulté. Le privilège insigne des biens
spirituels, c’est d’exciter la faim en rassasiant et d’allumer la soif en
désaltérant. L’effet qu’ils produisent dans notre cœur est un rassasiement affamé,
une faim rassasiée…c’est là le merveilleux : ces biens satisfont et
rassasient notre âme, mais telle est leur dignité et leur grandeur, qu’à un
désir satisfait succède toujours un autre désir plus vif que le premier, et que
cette appétence continuelle va sans cesse croissant. Mais le besoin que nous
éprouvons de cet aliment divin, au lieu de nous causer une peine, nous donne du
contentement, et, bien loin de nous affaiblir, nous fortifie et comble notre
cœur de joie et sainte volupté.
Il est de foi que dans
le ciel Dieu se donnera à nous dans toute la plénitude de nos facultés, suivant
cette parole du prophète : « Je serai rassasié lorsque apparaîtra
votre gloire (Ps 16 15) « Ils seront enivrés de l’abondance de votre
maison » (Ps 35 9). « Cependant, dit Saint Bernard, le bonheur que
nous sentirons de la vue de Dieu, bien aussi complet qu’il puisse l’être,
n’assouvira jamais le désir que nous aurons, parce que ce bonheur ne nous
causera jamais de satiété, et que nous éprouverons un désir toujours renaissant
de voir Dieu et d’en jouir, comme au premier jour et à la première heure de
cette immense félicité ». Les bienheureux que Saint Jean vit debout devant
le trône de l’Agneau, chantaient, dit
l’Evangéliste, « un cantique nouveau » (Apoc 14 3) En effet, ce
cantique céleste sera toujours « nouveau » pour les saints, puisqu’il
leur donnera une joie toujours nouvelle, un enthousiasme toujours renaissant,
qui les fera s’écrier, comme les enfants d’Israël à la vue de la manne :
« Qu’est-ce que cela ? (Exod.
16 15) Eh bien, il en est à peu près de
même, ici des choses
spirituelles, parce qu’elles sont une émanation de celles du ciel, qui
rassasient, satisfont et remplissent le cœur, et y allument en même temps un
désir si grand de leur possession, qu’il en a comme faim et soif, et que, plus
il les goûte et en jouit, plus il a besoin de les goûter et d’en jouir encore.
Mais ce besoin est lui-même une joie et une dilection.
Tout ce que nous venons
de dire des biens et des dons spirituels doit nous en faire concevoir une
opinion si haute et nous inspirer un si brûlant désir de les posséder,
qu’oubliant toutes les choses du monde, nous nous écriions avec l’apôtre saint
Pierre : « Seigneur, il nous est bon d’être ici » (Mt 17 4)
Jean
Paul II nous invite à la célébration
d’ une « année eucharistique »
Dans sa Lettre Apostolique « Mane nobiscum
Domine » rendue publique le 10 octobre 2004, le Pape Jean-Paul II nous
invite à célébrer « une année eucharistique ».
Elle ira d’octobre 2004 à octobre 2005.
Votre paroisse saint Michel y participera. Je
vous dirai comment la semaine prochaine.
Trois
événements la marqueront plus particulièrement au niveau de l’Eglise universelle. Tout d’abord le
Congrès eucharistique international qui se tient actuellement jusqu’au 17 octobre
2004 au Mexique, à Gaudalajara. Ensuite l’assemblée ordinaire du
Synode des évêques qui aura lieu à Rome du 2 au 29 octobre 2005 ayant pour thème : « l’Eucharistie ;
source et sommet de la vie et de la mission de l’Eglise ». Il y aura enfin la Journée mondiale de la
jeunesse qui aura lieu cette même année
à Cologne du 16 au 21 août 2005.
Dans cette Lettre Apostolique, le pape précise le
but de cette année. C’est un appel pressant du pape pour que les communautés
chrétiennes « approfondissent, assimilent », en un mot « réfléchissent
» sur le sacrement de
l’Eucharistie. Mais aussi pour qu’elles
s’adonnent plus particulièrement à des actes d’adoration de la sainte
Eucharistie.
Une initiative
en parfaite continuité avec tous les
écrits et les actes du Pontife.
Le pape situe cette « année eucharistique»
dans une parfaite continuité avec tout
son enseignement antérieure, et avec tous
les grands actes qu’il posa et qui ont comme « scander » tout son
apostolat pétrinien. Je dois reconnaître que sa démonstration me
« dépasse », n’ayant pas assez pénétré l’enseignement des documents
que le Pontife cite pour justifier la
« continuité » de son action pontificale. (n° 6). J’en prends
seulement acte me faisant le simple
« écho » de sa pensée. Il affirme que cette « année
eucharistique » est en parfaite
continuité avec sa Lettre Apostolique « Tertio mellennio adviente »
du 10 novembre 1994 et de l’annonce du Jubile de l’an 2000. Qu’elle se situe
aussi dans la continuité de son encyclique « Redemptor hominis ».
Déjà dans sa Lettre Apostolique « Dei Domini » ne mettait-il pas
l’accent sur le « Dimanche »,
et donc sur la célébration eucharistique qui en est comme le cœur (n° 7).
Dans « Novo millennio
ineunte », le pape mettait aussi l’accent
sur « un engagement pastoral fondé sur la contemplation du visage
du Christ » (n°8). Comment ne pas voir déjà le mystère eucharistique se
dessiner en filigrane ?
Puis vint l’ « année du
Rosaire » et sa Lettre Apostolique « Rosarium Virginis Mariae ».
Là aussi le saint Père insista particulièrement « sur le thème de la
contemplation du visage du Christ »(n° 9). Et c’est pourquoi, dit-il, au cœur même de l’année du Rosaire, j’ai publié l’ encyclique « Ecclesia de
Eucaharistia vivit ». Là, il voulut
« illustrer le mystère de l’Eucharistie dans son rapport unique et vital
avec l’Eglise » (n° 10) et nous montrer Notre Dame « comme le modèle
de la femme eucharistique » (n° 10), nous donnant un très bel exposé de
théologie spirituelle.
Et c’est ainsi que cette année « eucharistique »
s’inscrit « heureusement,
dit-il, sur une toile de fond qui s’est enrichie
d’année en année, tout en restant toujours parfaitement centrée sur le thème du
Christ et de la contemplation de son visage » (n°10), « comme une année de synthèse,
une sorte de sommet de tout le chemin parcouru »( n°10).
Et puisqu’il
en est ainsi, ne pourrait-on pas dire que le pape nous donne en cette
Lettre Apostolique, comme en son encyclique « Ecclesia de
Eucharistia » qui fait corps, comme
« son testament ? Quoiqu’il en soit, c’est pour lui « une grande
grâce …de pouvoir inviter toute l’Eglise à contempler, à louer, à adorer de
façon toutes spéciales cet ineffable Sacrement ». (n° 29).
Les idées développées. Le plan de la Lettre
S’inspirant, comme il le fait souvent, d’un
récit évangélique, ici, de la scène
des disciples d’Emmaüs telle que rapportée par Saint Luc, le pape développe
quelques idées qui font la structure même de la Lettre :
a- l’Eucharistie comme
« enseignement »,
b- l’Eucharistie
comme « sacrifice », le
sacrifice du Christ,
c- l’Eucharistie comme « mystère » de la présence réelle
de NSJC,
d-
l’Eucharistie comme
« communion »
e-
l’Eucharistie comme « unité »
f- l’Eucharistie comme
« évangélisation ».
g- l’Eucharistie comme
« service ».
l’Eucharistie comme « enseignement »
Ainsi le pape
contemple-t-il
l’Eucharistie « comme « Mystère lumineux ». Là, il
s’inspire de la phrase « Il leur expliqua, dans toute l’Ecriture, ce
qui le concernait » (Lc 24 27). Il dit que Notre Seigneur éclaire
l’intelligence des disciples sur le sens des Ecritures : « dans
ce récit des disciples d’Emmaüs, le Christ lui-même intervient pour montrer, en
partant de Moïse et de tous les prophètes » que « toute
l’Ecriture » conduit au mystère de sa personne ». Il éclaire aussi
leur cœur « les soustrait à l’obscurité de la tristesse et du
désespoir et suscitent en eux le désir de demeurer avec Lui : « Reste
avec nous, Seigneur ». (n° 11 et 12)
Le pape en profite pour parler de l’attention
qu’il faut porter dans la liturgie eucharistie à l’enseignement biblique. « Quarante ans après le Concile,
l’Année de l’Eucharistie peut être une occasion importante pour les communautés
chrétiennes de vérifier où elles en sont sur ce point. Il ne suffit pas en
effet que les passages bibliques soient proclamés dans une langue compréhensible
si la proclamation n’est pas faite avec le soin, la préparation préalable,
l’écoute recueillie, le silence méditatif, qui sont nécessaires pour que la
Parole de Dieu touche la vie et l’éclaire » (n° 13).
L’Eucharistie
comme « sacrifice », le sacrifice du Christ.
Puis s’inspirant de la phrase : « Ils
le reconnurent à la fraction du pain » (Lc 24 35) ; le pape
rappelle bien naturellement que si,
l’Eucharistie est « sans aucun doute un repas » (n° 15) elle
est aussi « sacrifice ». Il faut bien retenir sa
formulation : « La dimension la plus évidente de
l’Eucharistie est sans aucun doute celle du repas…On ne peut
toutefois oublier que le repas eucharistique a aussi, et c’est primordial, un
sens profondément et avant tout sacrificiel. »
Le pape insiste aussi sur l’aspect
eschatologique de l’Eucharistie si bien mit en évidence dans la liturgie
romaine, celle de saint Pie V. Nous aurions aimé trouvé cette précision.
Malheureusement, le pape ne parle encore que du seul « missel
romain », celui de Paul VI. Il faudrait bien qu’on précise un jour ce
point. Ne pourrait-on pas le faire à
l’occasion du Synode ordinaire des évêques. Il serait heureux , du moins,
qu’on en prenne occasion….
Alors qu’il commente la phrase qu’il
prend, cette fois, en Saint Mathieu « Je suis avec vous tous
les jours », le Pape parle aussi de la « présence réelle »
de NSJC dans la sainte Eucharistie ». Ce sera l’objet du numéro 16.
Là , il rappelle l’enseignement très fort de Paul VI dans son encyclique
« Mysterium fidei ». Il écrit : « . Avec
toute la tradition de l’Église, nous croyons que, sous les espèces
eucharistiques, Jésus est réellement présent. Il s’agit d’une présence qui -
comme l’a si bien expliqué le Pape Paul VI - est dite «réelle» non par
exclusion, comme si les autres formes de présence n’étaient pas réelles, mais
par antonomase, car, en vertu de cette présence, le Christ tout entier se
rend substantiellement présent dans la réalité de son corps et de son sang.
C’est pourquoi la foi nous demande de nous tenir devant l’Eucharistie avec la
conscience que nous sommes devant le Christ lui-même. C’est sa présence même
qui donne à toutes les autres dimensions - repas, mémorial de la Pâque,
anticipation eschatologique - une signification qui va bien au-delà d’un pur
symbolisme. L’Eucharistie est mystère de présence, par lequel se réalise de
manière éminente la promesse de Jésus de rester avec nous jusqu’à la fin du
monde ».
Il est amené, ensuite, tout naturellement, à rappeler que la célébration eucharistie
doit être « digne ». C’est le thème si souvent abordé de son
encyclique « Ecclesia de Eucharistia ».
Il suggère, au n° 17, comme le faisait du reste Mgr Le Gall, lors
de la publication de l’encyclique « Ecclesia de Eucharistia » que les
« communautés paroissiale étudient « de manière approfondie la Présentation
générale du Missel romain » (n° 17) .
C’est l’étude de ce texte, entre autres, qui
fit conclure au cardoinal Ottaviani que la nouvelle messe s’éloignait, d’une
façon impressionnante dans l’ensemble comme dans le détail, de la doctrine
catholique définie à tout jamais par le Concile de Trente.
C’est l’analyse de ce texte qui faisait
conclure au cardinal Stickler, le 20 mai 1995 : « Pour résumer nos
réflexions, nous pouvons dire que les bienfaits théologiques de la messe
tridentine correspondent aux déficiences théologiques de la messe issue de
Vatican II. Pour cette raison, les « fidèles du Christ » de la
tradition théologique doivent continuer à faire part, dans un esprit
d’obéissance aux supérieurs légitimes, de leur désir fondé et de leur
préférence pastorale pour la messe tridentine » ( Témoignage d’un expert
au Concile » p.
Fort de ce conseil, nous poursuivons notre
« requête ». puisqu’il le faut encore…
Le pape parle du « missel romain ».
Il n’y en aurait donc qu’un : celui « reformé » par le
« Concilium ». Mais je croyais que la cardinal Castrillon Hoyos avait
déclaré, le 24 mai 2003, à la Basilique Sainte Marie Majeure que la
« messe saint Pie V avait « droit de cité » dans l’Eglise. Il
est donc aussi « missel
romain ». Il débute, en ces premières pages, par la Bulle « Quo Primum Tempore »
du Pape saint Pie V. Elle a été particulièrement étudiée dans les milieux de la
« tradition ». Je la ferai encore connaître à mes « paroissiens de saint
Michel ».
Nous arrivons enfin au magnifique n° 18 où le pape nous encourage à l’adoration du
« Très Saint Sacrement » en réparation des « outrages que
Notre Seigneur doit subir dans de nombreuses parties du monde »(n° 18). Il est à lire en son entier.
L’Eucharistie
comme « communion ».
Profitant de la phrase « Demeurez en moi
comme moi en vous » qu’il prend en l’Evangile de saint Jean, (Jn 15
4), le pape parle de l’Eucharistie comme
« communion ». Il utilise cette très belle expression : l’Eucharistie
est « source et épiphanie de communion ». C’est le paragraphe 19 qu’il faut citer dans
son entier : « Aux
disciples d’Emmaüs qui demandaient à Jésus de rester «avec» eux, ce dernier
répondit par un don beaucoup plus grand: il trouva le moyen de demeurer «en»
eux par le sacrement de l’Eucharistie. Recevoir l’Eucharistie, c’est entrer en
communion profonde avec Jésus. «Demeurez en moi, comme moi en vous» (Jn 15, 4).
Cette relation d’union intime et mutuelle nous permet d’anticiper, en quelque
manière, le ciel sur la terre. N’est-ce pas là le plus grand désir de l’homme ?
N’est-ce pas cela que Dieu s’est proposé en réalisant dans l’histoire son
dessein de salut ? Il a mis dans le cœur de l’homme la «faim» de sa Parole (cf.
Am 8, 11), une faim qui sera assouvie uniquement dans l’union totale avec Lui.
La communion eucharistique nous est donnée pour «nous rassasier» de Dieu sur
cette terre, dans l’attente que cette faim soit totalement comblée au
ciel. » (n°19)
Mais
l’Eucharistie n’est pas seulement « source et épiphanie de communion », elle est aussi « union », Elle est aussi
« unité », « source d’unité ecclésiale ». Et si elle en est la source, elle est aussi
la « manifestation » de cette unité ecclésiale. Le Pape, dans quatre numéros (n° 20 à 23) parlera de cette « unité » avec la
hiérarchie, tellement manifestée « par les mentions du Pape et de
l’évêque diocésain », mais
aussi par la « messe chrismale » qu’il appelle ici « messe
stationale » qu’il encourage particulièrement. « Là,
dit-il, réside la principale manifestation de l’Eglise ». C’est
bien juste !
C’est aussi l’occasion pour le pape de rappeler
l’importance du « Dimanche, comme Jour du Seigneur ». Il
insiste : le dimanche est l’occasion de favoriser l’unité d’une paroisse.
« Durant cette année de grâce,dit le pape, les prêtres, dans leur engagement pastoral,
auront une attention encore plus grande pour la Messe dominicale, en tant que
célébration au cours de laquelle la communauté paroissiale se retrouve d’un
seul cœur, y voyant aussi la participation habituelle des divers groupes,
mouvements, associations, qui y sont présents. »(n° 23)
L’Eucharistie comme évangélisation
« A l’instant même, ils se levèrent »
poursuit saint Luc dans son récit sur les disciples d’Emmaüs. Le pape en profite pour considérer alors l’Eucharistie « comme
principe et projet de mission ».
a- Comme « principe » de mission ». L’Eucharistie nourrit
en effet la nécessité de « communiquer », d’annoncer la Bonne
Nouvelle. Il fonde cela sur la phrase de Saint Paul aux Corinthiens :
« Chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez à cette coupe, vous
proclamez ma mort du seigneur jusqu’à ce qu’il vienne » (1 Cor 11,
26,) Mais aussi sur « l’envoi à la fin de la messe ». Cette
« envoi constitue une consigne qui pousse le chrétien à s’engager pour
la diffusion de l’Evangile et pour l’animation chrétienne de la société ».
(n° 24)
b- Comme « projet » de mission. Ce terme est finalement très heureux. Celui
qui médite l’Eucharistie en comprendra, chaque jour davantage, l’ensemble des
« valeurs ». Et ces valeurs pourront donner un sens à la
« mission ». Voilà ce que veut dire le pape lorsqu’il parle de
l’Eucharistie comme « projet » de mission. Et parmi ces valeurs de
l’Eucharistie, le pape va insister sur « l’action de grâce ».
Il va dire aux fidèles : « n’oubliez pas de parler autour de vous,
dans votre apostolat, de la nécessaire « action de grâce ». Le monde
ne sait plus rendre « grâce à Dieu ».
C’est un terrible manque qu’il faut combler. Citons ce beau paragraphe
de cette Lettre : « Un élément fondamental de ce projet provient de la
signification même du mot « eucharistie »: action de grâce…L’Église est invitée
à rappeler cette grande vérité aux hommes. Il est urgent que cela soit réalisé
surtout dans notre culture sécularisée, qui est imprégnée de l’oubli de Dieu et
qui favorise la vaine autosuffisance de l’homme. Incarner le projet
eucharistique dans la vie quotidienne, dans les milieux de travail et de vie -
en famille, à l’école, à l’usine, dans les conditions de vie les plus diverses
- signifie, entre autre chose, témoigner que la réalité humaine ne se justifie
pas sans la référence au Créateur: « La créature sans son Créateur s’évanouit
». Cette référence transcendante, qui nous engage à un « merci »permanent, à
une attitude eucharistique précisément, pour ce que nous avons et pour ce que
nous sommes, ne porte pas préjudice à la légitime autonomie des réalités
terrestres, mais elle la fonde au sens le plus authentique, en lui assignant,
dans le même temps, ses justes limites.
En cette Année de l’Eucharistie, puissent les chrétiens s’engager avec plus de
force pour témoigner de la présence de Dieu dans le monde ! N’ayons pas peur de
parler de Dieu et de porter la tête haute les signes de la foi. La « culture de
l’Eucharistie » promeut une culture du dialogue et donne à cette dernière force
et nourriture. On se trompe lorsqu’on pense que la référence publique à la foi
peut porter atteinte à la juste autonomie de l’État et des Institutions
civiles, ou bien que cela peut même encourager des attitudes d’intolérance. Si
historiquement des erreurs en la matière n’ont pas manqué, même chez les
croyants, comme j’ai eu l’occasion de le reconnaître lors du Jubilé, cela ne
doit pas être porté au compte des «racines chrétiennes», mais de l’incohérence
des chrétiens en ce qui a trait à leurs racines. Celui qui apprend à dire
«merci» à la manière du Christ crucifié pourra être un martyr, mais il ne sera
jamais un bourreau ».
Ce dernier paragraphe pourrait bien être une belle réponse à la nouvelle loi sur la
laïcité issue du rapport Stasi !
L’Eucharistie comme service
Le pape termine sa « méditation » sur
l’Eucharistie en la considérant comme
« service », service au prochain, service du plus petit, du faible et
du pauvre. Ne fut-elle pas en effet, dit
le pape, institué par le Christ Seigneur après le plus bel acte d’humilité et
de service, le Christ s’étant levé pour « laver » les pieds de ses
disciples. Là, dit le pape, « le
Christ explique sans équivoque le sens de l’Eucharistie ».
Conclusion
Dans sa conclusion, le pape lance un appel à tous et à chacun pour que cette année
eucharistique soit vraiment une réussite : « une année de
grâces ». Il s’adresse avec un amour senti et aux évêques,
et aux prêtres, aux diacres, aux séminaristes, aux religieux et religieuses,
aux fidèles et plus particulièrement aux jeunes. Il lance ce vœu pour
tous : « Puisse l’Année de l’Eucharistie être pour tous une
précieuse occasion pour devenir toujours plus conscients du trésor incomparable
que le Christ a confié à son Église. Qu’elle soit un stimulant pour que la
célébration de l’Eucharistie soit plus vivante et plus fervente, d’où naîtra
une existence chrétienne transformée par l’amour ».
Oui ! « Cette « Année de
l’Eucharistie » naît de l’émerveillement de l’Eglise face à ce grand
Mystère ». « Je ressens,
conclut le pape, comme une grande grâce
…de pouvoir maintenant inviter toute l’Eglise à contempler, à louer, à adorer
de façon toute spéciale cet ineffable Sacrement »(n° 29)
Vraiment ! Ne serait-ce pas son
testament ?
Lettre apostolique "Mane nobiscum,
Domine"
chroniques_romaines111004.htm