Les Annonces de la semaine.
Je veux commencer aujourd’hui
cette « paroisse saint Michel » par les « annonces
de la semaine » . Je ne voudrais pas les oublier comme je le
fais bien souvent et puis parce qu’elles me paraissent importantes.
A - Pèlerinage jubilaire du Puy
Je rappelle le pèlerinage jubilaire
du Puy, les 9 et 10 juillet 2005. Ne tardez pas à vous inscrire
pour m’en faciliter l’organisation. Voyez sur le site
ITEM, les formules d’inscription.
B – « L’affaire Laguérie-Héry
».
Je recommande particulièrement
la lecture attentive de l’étude de Me Turot et de Me
Jérôme Triomphe concernant les abbés Philippe
Laguerie et Christophe Hery. Vous la trouverez, entre autres lieux,
sur le dernier « flash-info » du site ITEM , au 2 février
2005.
La vérité va bientôt
éclater. . Elle sera fulgurante. Et les autorités en
place de la FSSPX seront confondues pour « abus de pouvoir ».
- Ce ne sera pas faute de les avoir aimablement averties, et de leur
avoir conseillées de s’asseoir à une table pour
trouver, entre les intéressés, la solution de paix -
Il sera dit – bientôt - que les autorités «
ont violé manifestement la loi par un usage arbitraire du pouvoir
». Lorsqu’on fait libre recours à la justice, il
faut s’attendre à de tels jugements…à de
tels arrêts. Ce n’est pas faute, là aussi, de les
avoir averties. En conséquence, elles ne pourront plus conduire
la « politique » de la FSSPX. Elles se seront disqualifiées
elle-mêmes. Dès lors, un « Chapitre Général
Extraordinaire » devra être nécessairement convoqué.
Avec la nécessaire participation des anciens qui furent, au
fil du temps, injustement renvoyés, éloignés.
Il sera électif. Ce Chapitre Général Extraordinaire
en profitera pour rappeler la vraie nature de notre société
sacerdotale, une société nullement « religieuse
», mais bien « sacerdotale » et « missionnaire
» faisant de la messe le tout de son élan apostolique
et de sa dévotion.
Saint Ignace d’Antioche.
Evêque d’Antioche et martyr.
Je célèbre la fête
de Saint Ignace, chaque année, le 1 février, avec beaucoup
d ‘émotion. Il me rappelle mes années de séminaire
à Santa Chiara, à Rome. C’est là que j’
ai lu, pour la première fois, ses lettres : les lettres de
saint Ignace. Elles m’ont particulièrement marqué.
Je fus sensible à « l’enthousiasme » de sa
foi. Cet élan extraordinaire pour le martyre - être ainsi
avec le Christ définitivement - m’impressionna. Cette
foi profonde, manifestée dans cet élan, fut pour moi
un modèle, un stimulant, un exemple. Que notre foi est faible
en comparaison de la foi de ces premiers chrétiens, à
celle de ces martyrs, à celle de saint Ignace. Ainsi le souvenir
de la lecture de ses lettres reste vivant en mon cœur.
N’ayant pas eu le temps de préparer
la « méditation de nos mystères » - nous
aurions dû méditer le « mystère de Notre
Dame » - ce sera pour la semaine prochaine -, j’ai pensé
bon de vous faire lire une lettre de saint Ignace : celle qu’il
écrivait aux Chrétiens de Rome. Vous goûterez,
vous aussi, j’en suis sûr, son enthousiasme, son élan
dans l’amour pour Notre Seigneur Jésus-Christ.
Nous savons très peu de chose
de saint Ignace, sinon qu’il fut le deuxième successeur
de Saint Pierre sur le siège de Antioche et qu’il fut
martyr sous Trajan à Rome, au Colisée. C’est une
page d’Eusèbe de Césarée, de son «
Histoire Ecclésiastique » qui nous l’indique. La
voici :
Le témoignage d’Eusèbe.
« Vers cette époque ( sous
Trajan, 98-117), florissait…Ignace, maintenant encore si connu.
Il avait été élu évêque d’Antioche
et était le second successeur de Pierre. On dit qu’il
avait été envoyé de Syrie à Rome pour
y être dévoré par les bêtes, à cause
du témoignage pour le Christ. Il fit ce voyage à travers
l’Asie sous la plus exacte surveillance de ses gardes, et, dans
les villes où il passait, il fortifiait les communautés
par ses entretiens et ses exhortations ; il les encourageait avant
tout à se garder contre les hérésies qui justement
alors commençaient à se répandre, et il les exhortait
à s’attacher fermement à la tradition des apôtres
; pour plus de sûreté, il jugea nécessaire de
la fixer par écrit :déjà il rendait témoignage.
C’est ainsi qu’étant à Smyrne où
se trouvait Polycarpe, il écrivit à l’Eglise d’Ephèse
une lettre où il fait mention de son pasteur Onésime,
une autre à l’Eglise de Magnésie sur le Méandre,
où il fait aussi mention de l’évêque de
Damas, une autre à celle de Tralles, dont il rapporte que Polybois
était alors évêque. En outre, il écrivit
à L’Eglise de Rome pour exhorter avec insistance qu’en
cherchant à le sauver du martyre on ne le prive pas de l’objet
de son désir et de son espérance…
Ayant déjà dépassé Smyrne, de Troas, il
adressa encore une lettre à l’Eglise de Philadelphie
et à celle de Smyrne, et en particulier à Polycarpe
son évêque. Il le connaissait pour un homme tout à
fait apostolique, et il lui confia comme un vrai et bon pasteur son
troupeau d’Antioche, estimant qu’il en aurait un soin
diligent….
Irénée connut lui aussi le martyre d’Ignace et
il fait mention de ses lettres. Polycarpe lui aussi mentionne les
mêmes choses dans la lettre aux Philippiens qui nous est conservée
de lui…
Cette page d’Eusèbe (Hist.
Eccl., III, 36) résume à peu près tout ce que
nous savons de saint Ignace d’Antioche.
Voilà maintenant la lettre de
saint Ignace d’Antioche aux Romains.
Ignace aux Romains
Salutation : « Ignace, dit aussi
Théophore, à l’Eglise qui a reçu miséricorde
par la magnificence du Père très haut et de Jésus-Christ,
son Fils unique, l’Eglise bien aimée et illuminée
par la volonté de celui qui a voulu tout ce qui existe, selon
la foi et l’amour pour Jésus-Christ, notre Dieu ; l’Eglise
qui préside dans la région des Romains, digne de Dieu,
digne d’honneur, digne d’être appelée bienheureuse
digne de louange, digne de succès, digne de pureté,
qui préside à la charité, qui porte la loi du
Christ, qui porte le nom du Père ; je la salue au nom de Jésus-Christ,
le fils du Père ; aux frères qui de chair et d’esprit
sont unis à tous ses commandements, remplis inébranlablement
de la grâce de Dieu, purifiés de toute coloration étrangère,
je leur souhaite en Jésus-Christ notre Dieu toute joie irréprochable.
Il espère les voir bientôt
et aller jusqu’à Dieu.
Par mes prières j’ai obtenu
de Dieu de voir vos saints visages, car j’avais demandé
avec instance de recevoir cette faveur ; car enchaîné
dans le Christ Jésus j’espère vous saluer, si
du moins c’est la volonté de Dieu que je sois trouvé
digne d’aller jusqu’au terme. Car le commencement est
facile ; si du moins j’obtiens la grâce de recevoir sans
empêchement la part qui m’est réservée.
Mais je crains que votre charité ne me fasse tort. Car à
vous il est facile de faire ce que vous voulez ; mais à moi
il est difficile d’atteindre Dieu, si vous ne m’épargnez
pas.
Qu’ils ne l’arrachent
pas au martyre
Car je ne veux pas que vous plaisiez
aux hommes, mais que vous plaisiez à Dieu, comme en fait vous
lui plaisez. Pour moi, jamais je n’aurai une telle occasion
d’atteindre Dieu, et vous, si vous gardez le silence, vous ne
pouvez souscrire à une œuvre meilleure. Si vous gardez
le silence à mon sujet, je serai à Dieu ; mais si vous
aimez ma chair, il me faudra de nouveau courir. Ne me procurez rien
de plus que d’être offert en libation à Dieu (cf
Phil 2 17 ; 2 Tim. 4 6), tandis que l’autel est encore prêt,
afin que réunis en chœur dans la charité, vous
chantiez au Père dans le Christ Jésus, par ce que Dieu
a daigné faire que l’évêque de Syrie fut
trouvé en lui, l’ayant fait venir du levant au couchant.
Il est bon de se coucher loin du monde vers Dieu, pour se lever en
lui.
Mais qu’ils prient pour
qu’il soit un vrai chrétien.
Jamais vous n’avez jalousé
personne, vous avez enseigné les autres. Je veux, moi, que
ce que vous commandez aux autres par vos leçons garde sa force.
Ne demandez pour moi que la force intérieure et extérieure,
pour que non seulement je parle, mais que je veuille, pour que non
seulement on me dise chrétien, mais que je le sois trouvé
de fait, vrai croyant, quand je ne serai plus visible au monde. Rien
de ce qui est visible n’est bon. Car notre Dieu, Jésus-Christ,
étant en son Père, se fait voir davantage. Car ce n’est
pas une œuvre de persuasion que le christianisme, mais une œuvre
de puissance, quand il est haï par le monde.
Il veut être la pâture
des bêtes, le froment de Dieu.
Moi, j’écris à toutes
les Eglises, et je mande à tous que moi c’est de bon
cœur que je vais mourir pour Dieu, si du moins vous, vous ne
m’empêchez pas. Je vous en supplie, n’ayez pas pour
moi une bienveillance inopportune. Laissez-moi être la pâture
des bêtes, par lesquelles il me sera possible de trouver Dieu.
Je suis le froment de Dieu, et je suis moulu par les dents des bêtes,
pour être trouvé un pur pain du Christ. Flattez plutôt
les bêtes, pour qu’elles soient mon tombeau, et qu’elles
ne laissent rien de mon corps, pour que dans mon dernier sommeil,
je ne sois à charge à personne. C’est alors que
je serai vraiment disciple de Jésus-Christ, quand le monde
ne verra même plus mon corps. Implorez le Christ pour moi, pour
que par l’instrument des bêtes, je sois une victime offerte
à Dieu. Je ne vous donne pas des ordres comme Pierre et Paul
: eux, ils étaient des apôtres, moi, un condamné
; eux, ils étaient libres et moi jusqu’à présent
esclave (1 Cor 9 1). Mais si je souffre, je serai un affranchi de
Jésus-Christ (1 Cor 7 22) et je renaîtrai en lui, libre.
Maintenant enchaîné j’apprends à ne rien
désirer.
Depuis la Syrie jusqu’à Rome, je combats contre les bêtes
(1 Cor 15 32), sur terre et sur mer, nuit et jour, enchaîné
à dix léopards, c’est-à-dire à un
détachement de soldats ; quand on leur fait du bien, ils en
deviennent pires. Mais par leurs mauvais traitements, je deviens davantage
un disciple, mais « je n’en suis pas pour autant justifié
» (1Co 4 4)
Puissé-je jouir des bêtes qui me sont préparées.
Je souhaite qu’elles soient promptes pour moi. Et je les flatterai,
pour qu’elles me dévorent promptement, non comme certains
dont elles ont eu peur, et qu’elles n’ont pas touché.
Et si par mauvaise volonté elles refusent, moi, je les forcerai.
Pardonnez-moi ; ce qu’il me faut, je le sais moi. C’est
maintenant que je commence à être un disciple. Que rien,
des êtres visibles et invisibles, ne m’empêche par
jalousie de trouver le Christ. Feu et croix, troupeau de bêtes,
lacérations, écartèlements, dislocation des os,
mutilation des membres, mouture de tout le corps, que les pires fléaux
du diable tombent sur moi, pourvu seulement que je trouve Jésus-Christ.
Laissez moi imiter la passion
de mon Dieu.
Rien ne me servira des charmes du monde
ni des royaumes de ce siècle. Il et bon pour moi de mourir
(1Cor 9 15), pour m’unir au Christ Jésus, plus que de
régner sur les extrémités de la terre. C’est
lui que je cherche, qui est mort pour nous ; lui que je veux, qui
est ressuscité pour nous. Mon enfantement approche. Pardonnez-moi,
frères ne m’empêchez pas de vivre, ne veuillez
pas que je meure. Celui qui veut être à Dieu, ne le livrez
pas au monde, ne le séduisez pas par la matière. Laissez-moi
recevoir la pure lumière ; quand je serai arrivé là,
je serai un homme. Permettez-moi d’être un imitateur de
la passion de mon Dieu. Si quelqu’un a Dieu en lui, qu’il
comprenne ce que je veux, et qu’il ait compassion de moi, connaissant
ce qui m’étreint (Phil 1 23)
Le prince de ce monde veut m’arracher et corrompre les sentiments
que j’ai pour Dieu. Que personne donc parmi vous qui êtes
là ne lui porte secours ; plutôt soyez pour moi, c’est-à-dire
pour Dieu. N’allez pas parler de Jésus-Christ, et désirer
le monde. Que la jalousie n’habite pas en vous. Et si quand
je serai près de vous, je vous implore, ne me croyez pas. Croyez
plutôt à ce que je vous écris. C’est bien
vivant que je vous écris, désirant de mourir. Mon désir
terrestre a été crucifié, et il n’y a plus
en moi de feu pour aimer la matière mais en moi une eau vive
(Jn 4 10 ;7 38) qui murmure et qui dit au dedans de moi : «
Viens vers le Père » (Jn 14 12). Je ne me plais plus
à une nourriture de corruption ni aux plaisirs de cette vie
; c’est le pain de Dieu que je veux, qui est la chair de Jésus-Christ,
de la race de David, et pour boisson je veux son sang, qui est l’amour
incorruptible.
Laissez-moi mourir
Je ne veux plus vivre selon les hommes.
Cela sera, si vous le voulez. Veuillez-le, pour que vous aussi vous
obteniez le bon vouloir de Dieu. Je vous le demande en un peu de mots
: croyez-moi, Jésus-Christ vous fera voir que je dis vrai,
il est la bouche sans mensonge par laquelle le Père a parlé
en vérité. Demandez pour moi que je l’obtienne.
Ce n’est pas selon la chair que je vous écris, mais selon
la pensée de Dieu. Si je souffre, vous m’aurez montré
de la bienveillance ; si je suis écarté, de la haine
Recommandations et prières
Souvenez-vous dans votre prière
de l’Eglise de Syrie, qui, en ma place, a Dieu pour pasteur.
Seul Jésus-Christ sera son évêque, et de votre
charité. Pour moi, je rougis d’être compté
parmi eux, car je n’en suis pas digne, étant le dernier
d’entre eux, et un avorton (1 Cor 14 8-9). Mais j’ai reçu
la miséricorde d’être quelqu’un, si j’obtiens
Dieu. Mon esprit vous salue, et la charité des Eglises qui
m’ont reçu au nom de Jésus-Christ, non comme un
simple passant. Et celles-là mêmes qui n’étaient
pas sur ma route selon la chair, allaient au devant de moi de ville
en ville.
Je vous écris ceci de Smyrne par l’intermédiaire
d’Ephésiens dignes d’être appelés
bienheureux. Il y a aussi avec moi, en même temps que beaucoup
d’autres, Crocus, dont le nom m’est si cher. Quant à
ceux qui m’ont précédé de Syrie jusqu’à
Rome pour la gloire de Dieu, je crois que vous les connaissez maintenant
: faites-leur savoir que je suis proche. Tous sont dignes de Dieu
et de vous, et il convient que vous les soulagiez en toutes choses.
Je vous écris le neuf d’avant les calendes de septembre.
Portez-vous bien jusqu’à la fin dans l’attente
de Jésus-Christ. »
du sacrement de l’Eucharistie
(suite)
Dans la « question » précédente,
( Question 75), nous avons montré la nécessité
de la transsubstantiation étant donné le dogme de la
présence réelle. Nous en avons montré la possibilité
et en même temps la nature. Nous pouvons dire que par la consécration
eucharistique, il se produit ceci, que toute la substance du pain
et toute la substance du vin est changée instantanément
au corps et au sang du Christ, de telle sorte qu’il ne demeure
plus là, sur l’autel, que les accidents de la substance
du pain et du vin, avec lesquels le corps et le sang du Christ ont
désormais ce « rapport », absolument nouveau et
d’ordre transcendant qu’ils s’y trouvent contenus
véritablement dans la réalité de leur substance.
Mais il nous reste à considérer
ce « rapport » : autrement dit, quel est l’état
du corps et du sang du Christ sous ces accidents. On va donc étudier
la manière dont le Christ est présent dans ce sacrement.
On parle de présence sacramentelle ou par mode de substance.
Saint Thomas d’Aquin traite du
mode de cette présence dans la question 76 de la Somme.
Il se pose huit questions :
-1° Si tout le Christ est sous ce
sacrement ?
-2° Si tout le Christ est sous chacune des deux espèces
du sacrement ?
-3° Si tout le Christ est sous chaque partie des espèces
?
-4° Si les dimensions du Christ sont toutes dans ce sacrement
?
-5° Si le corps du Christ est dans ce sacrement d’une façon
locale ?
-6° Si le corps du Christ est mû au mouvement de l’hostie
ou du calice après la consécration ?
-7° Si le corps du Christ, sous ce sacrement, peutêtre vu
par un œil quelqconque ?
-8° Si le vrai corps du Christ demeure dans ce sacrement, quand,
d’une façon miraculeuse, il apparaît sous l’espèce
d’un enfant ou de la chair ?
Dans cette leçon, nous étudierons
les trois premiers articles.
Voyons tout de suite l’article
I : « Si tout le Christ est contenu sous ce sacrement ?
Saint Thomas affirme dans le corps de
son article, qu’il « est tout à fait nécessaire
de confesser, selon la foi catholique, que tout le Christ est dans
ce sacrement : «Omnino necesse est confiteri secundum fidem
catholicam quod totus Christus sit in hoc sacramento ».
Saint Thomas ne donne pas la preuve de
cette affirmation, tant il la suppose évidente pour tous. Dire
que « le Christ est tout entier contenu dans ce sacrement »,
c’est dire que « l’Eucharistie ne contient pas seulement
le Corps de Jésus-Christ avec tout ce qui constitue un corps
véritable, comme les os et les nerfs, mais encore Jésus-Christ
tout entier. Il faut enseigner que Jésus-Christ, c’est
le nom d’un Dieu, et d’un homme tout à la fois,
c’est-à-dire d’une personne dans laquelle la nature
divine et la nature humaine sont réunies ; Jésus-Christ
possède les deux substances et ce qui les caractérise,
la divinité d’abord, puis la nature humaine toute entière
avec l’âme, les parties du corps et le sang qui la composent.
Nous devons donc croire que toutes ces choses se trouvent dans l’Eucharistie.
Car de même qu’au Ciel l’humanité de Jésus-Christ
est unie à la divinité dans une seule personne, de même
ce serait un crime de supposer que le Corps présent dans l’Eucharistie,
y est séparé de la divinité » (Cat. de
Trente p222)
Toutefois, poursuit notre Maître,
il faut affirmer que toutes ces choses ne sont point contenues de
la même manière et pour la même raison dans ce
Sacrement.
Saint Thomas est très clair :
« Sciendum tamen quod aliquid Christi est in hoc sacramento
dupliciter : uno modo quasi ex vi sacramenti ; alio modo, ex naturali
concomitantia ». ce qui veut dire : « que quelque chose
du Christ est dans ce sacrement d’une double manière
:ou comme par la vertu du sacrement ( c’est-à-dire par
la vertu de la consécration) ou par concomitance naturelle
».( c’est-à-dire par l’union qu’une
chose a avec une autres)
- Par la vertu du sacrement : est sous
les espèces de ce sacrement ce en quoi directement est convertie
la substance du pain et du vin qui préexistait, selon que le
signifient les paroles de la forme, qui ont raison de cause efficiente
dans ce sacrement comme aussi dans les autres (i.e. Ils produisent
ce qu’ils signifient), quand il est dit : ceci est mon corps
; ceci est mon sang ». Il n’ y a donc, dans ce sacrement
par la vertu du sacrement ou l’efficacité de sa forme,
que le corps et le sang du Christ et rien de plus ».
- « Mais par concomitance naturelle
: est dans ce sacrement ce qui est réellement joint à
ce à quoi la conversion dont il s’agit se termine. Et
en effet, si deux choses sont réellement » unies ou «
conjointes, partout où l’une d’elles se trouve
réellement, il faut que l’autre y soit aussi ; car ce
n’est que par une opération de l’âme que
sont discernées » ou considérées séparément
« les choses qui se trouvent jointes dans la réalité
». Et précisément, au corps et au sang du Christ
se trouve joint dans la réalité depuis la résurrection,
tout ce qui, à un titre quelconque, fait partie de la Personne
du Christ. Il faut donc que partout où le corps et le sang
du Christ se trouvent, tout cela se trouve aussi ».
Ainsi donc, « il faut dire que
« la conversion du pain et du vin ne se terminant pas à
la divinité ou à l’âme du Christ, mais au
seul corps et sang du Christ, (Ce ci est mon corps ; ceci est mon
sang) il s’ensuit que la divinité ou l’âme
du Christ ne sont point dans ce sacrement par la vertu du sacrement.
Mais elles s’y trouvent par concomitance naturelle ».
« La divinité, en effet,
n’a jamais laissé le corps pris » par le Verbe
de Dieu dans le mystère de l’incarnation, non pas même
durant les trois jours de la mort du Christ. « Et donc partout
où est le corps du Christ, il est nécessaire que sa
divinité soit aussi ». « Par conséquent,
dans ce sacrement il est nécessaire que se trouve la divinité
du Christ accompagnant son corps » auquel elle est unie en vertu
de l’union hypostatique des deux natures dans l’unique
Personne du Fils de Dieu
Voilà donc pour la divinité
du Christ présent dans ce sacrement par concomitance naturelle,
en raison du corps qu’elle n’a jamais laissé depuis
l’Incarnation et qui – lui – est présent
dans ce sacrement par la vertu du sacrement : « Ceci est mon
corps ; ceci est mon sang ».
Mais l’âme du Christ a quitté
le corps au moins pendant les trois jours dans le sépulcre.
Alors qu’en est-il de l’âme ?
Saint Thomas répond : «
Pour ce qui est de l’âme, elle fut réellement séparée
du corps durant les trois jours de la mort du Christ. « Il suit
de là que si pendant ces trois jours de la mort ce sacrement
avait été célébré, l’âme
ne s’y serait point trouvée, ni par la vertu du sacrement,
ni par concomitance réelle. Mais parce que le Christ ressuscité
des morts ne meurt plus, comme il est dit aux Romains (ch. 6 9), désormais
son âme est toujours réellement unie à son corps
et c’est pourquoi, dans ce sacrement, le corps du Christ se
trouve par la vertu du sacrement ; et l’âme, par concomitance
réelle ».
Enfin comment dire que le corps tout
entier du Christ se trouve dans la sainte Eucharistie puis que «
la mesure du pain et le vin consacré est bien moindre que la
propre mesure du corps du Christ ».
C’est la troisième objection
que se présente Saint Thomas.
Sa réponse est importante : il
ne faut pas oublier que le Christ est là par « mode de
substance ». Nous le verrons mieux encore dans l’article
5 et 6. C’est le mystère de la Transsubstantiation. Une
fois faite la consécration, la substance du pain se change
en la substance du corps du Christ et le vin en son sang, demeurent
cependant les accidents du pain et du vin. Les dimensions du pain
et du vin ( les accidents) ne se sont pas convertie aux dimensions
du corps du Christ, mais la substance à la substance. Il suit
de là que la substance du corps ou du sang du Christ est dans
ce sacrement par la vertu du sacrement (ex vi sacramenti), mais non
les dimensions du corps et du sang du Christ ( la forme sacramentelle
se termine à la substance du corps ou du sang du Christ mais
pas à ses propres dimensions du corps ou du sang du Christ.)
Et l’on voit, par là, que le corps du Christ est dans
ce sacrement par mode de substance et non par mode de quantité.
Or la totalité propre de la substance est contenue indifféremment
dans une petite ou dans une grande quantité. C’est ainsi
que toute la nature de l’air est contenue dans une grande ou
dans une petite quantité d’air ; et toute la nature de
l’homme, dans un homme grand ou dans un homme petit. Par conséquent
toute la substance du corps du Christ et de son sang est contenue,
dans ce sacrement, après la consécration, comme avant
la consécration, était contenue là la substance
du pain et du vin ».
Donc il faut bien comprendre qu’il
n’y a dans ce sacrement à être directement en cause
que des substances : d’un côté, la substance du
pain et la substance du vin ; de l’autre, la substance du corps
et la substance du sang du Christ. Tout doit s’expliquer par
là. Les accidents qui demeurent sont toujours les accidents
du pain et du vin qui étaient là avant la consécration.
Mais leur substance ayant été changé en la substance
du corps et du sang du Christ sous ces accidents, nous aurons maintenant
cela même à quoi s’est changé leur substance,
c’est-à-dire, la substance du corps et du sang du Christ.
Et en vertu du sacrement, ex vi sacramenti, nous n’aurons que
cela. Mais parce que qu’on ne peut pas avoir réellement
une chose sans avoir tout ce qui lui est réellement et indissolublement
uni, il s ‘ensuit, qu’en raison de cette union réelle
et indissoluble ou par concomitance, ex naturali concomitantia, nous
aurons tout ce qui est inséparablement uni à la substance
du corps et du sang du Christ. Seulement et parce que tout cela ne
s’y trouve que par voie de conséquence, tout cela s’y
trouvera, non pas selon ses propres conditions à soi, telles,
par exemple, les conditions des dimensions quantitatives, mais selon
les conditions de la substance : per modum substantiae, nous dit saint
Thomas. Et ce mot ne va plus nous quitter désormais : il sera
la clé de toute la question de la présence réelle
du Christ dans l’Eucharistie.
Conclusion : Le Christ
tout entier avec son corps, son âme, sa divinité se trouve
sous les espèces sacramentelles ; bien que le tout du Christ
ne s’y trouve pas au même titre. Retenez : Il s’y
trouve tout entier : - soit par la force du sacrement : ex vi sacramenti,
les paroles agissant de la manière d’une cause efficiente
;
- soit par concomitance, en raison de l’union que les parties
ont entre elles, en raison de l’union hypostatique.
Cette conclusion est parfaitement
confirmée dans le Concile de Trente.
On peut lire, en effet, au chapitre 3
de la session 13, les explications suivantes :
« Dans l’Eglise de
Dieu, on a toujours cru qu’aussitôt après la consécration
le véritable corps de notre Seigneur et son véritable
sang existent, conjointement avec son âme et sa divinité,
sous les espèces du pain et du vin. Le corps est sous l’espèce
du pain et le sang sous l’espèce du vin en vertu des
paroles, mais le corps est sous l’espèce du vin et le
sang sous l’espèce du pain et l’âme sous
les deux espèces en vertu de cette connexion naturelle et de
cette concomitance qui unissent toutes les parties du Seigneur Jésus-Christ
« déjà ressuscité des morts et qui ne mourra
plus » (Rm 6 9). La divinité l’est, à cause
de son admirable union hypostatique avec son corps et son âme.
».
Et le chapitre 3 se poursuit ainsi :
« C’est pourquoi
il est tout à fait vrai que l’une ou l’autre espèce
contient autant que les deux espèces ensemble. Le Christ est,
en effet, tout entier sous l’espèce du pain et sous la
moindre parcelle de cette espèce, tout entier sous l’espèce
du vin et sous toutes ses parties »
Dans ce dernier paragraphe du Concile
de Trente, se trouvent les deux nouvelles affirmation que Saint Thomas
explique dans les articles 2 et 3 de notre question.
Nous allons les voir dans la foulée.
Article 2 : si, sous
l’une et l’autre espèce de ce sacrement, tout le
Christ se trouve contenu ?
Saint Thomas, s’appuyant sur l’explication
précédente, répond qu’il « faut tenir
de la façon la plus certaine, en raison de ce qui a été
dit plus haut, que sous l’une et l’autre espèce
du sacrement, tout le Christ se trouve. Mais autrement et autrement
» ; « Aliter tamen et aliter. »
On va retrouver, vous dis-je l’application
du principe utilisé dans l’article précédent
pour prouver que tout le Christ est contenu dans le sacrement de l’Eucharistie,
à savoir : «ex vi sacramenti » et « ex naturali
concomitantia »
Voyez !
« Sous les espèces du pain, le corps du Christ se trouve
par la vertu du sacrement ; et le sang, par concomitance réelle
ainsi que de l’âme et de la divinité, comme il
a été expliqué à l’article précédent.
Sous les espèces du vin, au contraire, le sang du Christ se
trouve par la vertu du sacrement ; et le corps, par concomitance réelle,
comme l’âme et la divinité, en raison de ce que,
maintenant », depuis la résurrection, « le sang
du Christ n’est point séparé de son corps ; comme
il le fut au temps de la Passion et de la mort. Il suit de là
que si alors », pendant le temps de la mort du Christ, «
ce sacrement avait été célébré,
sous les espèces du pain eût été le corps
du Christ sans le sang ; et sous les espèces du vin, le sang,
sans le corps ; comme il était dans la réalité
ou dans « la vérité de la chose : sicut erat in
rei veritate ».
Cette dernière remarque est capitale.
Il faut bien comprendre que la présence réelle de notre
Seigneur dans ce sacrement est en fonction directe du corps du Christ
selon qu’il est en lui-même. Il n’y a pas deux corps
du Christ. Il n’y en a qu’un : celui qui est dans la réalité
de sa vérité. C’est celui-là même,
et non un autre, que nous avons ici dans ce sacrement. . Par conséquent
il est ici, de toute nécessité, selon qu’il est
en lui-même : « sicut est in rei veritate ».
Si donc le Christ est présent
totalement sous chacune des espèces, sous l’une et l’autre
espèce, pourquoi les deux espèces ?
Saiunt Thomas répond à
cette objection dans le « ad primum ». Il faut retenir
la réponse.
Saint Thomas nous dit que cela est loin
d’être inutile. Pourquoi ? Il donne trois réponses.
Je retiendrai la première : « parce que cela vaut pour
représenter la Passion du Christ, dans laquelle le sang se
trouve séparément du corps. Et aussi bien, dans la forme
de la consécration du sang, il est fait mention de son effusion
».
Notons cette déclaration expresse
de saint Thomas que, pour représenter la Passion du Christ,
il fallait, dans ce sacrement, les deux espèces séparées
: l’une pour le corps, l’autre pour le sang. C’est
donc dans la consécration séparée des deux espèces
que consistera, dans ce sacrement, la raison de sacrifice représentant
le sacrifice même de la Croix, où, en effet, le corps
et le sang du Christ furent réellement séparés.
Cette même raison, justifiant la
double consécration, va nous être de nouveau marqué
à l’ad secundum ».
Là, Saint Thomas nous fait remarquer
que « dans la Passion du Christ dont ce sacrement est le mémorial,
les autres parties du corps ne furent point séparées
les unes des autres, comme le sang, mais le corps demeura dans son
intégrité, conformément aux Ecritures : «
Vous ne briserez aucun de ses os » (Ex 12 46 ; Jn 19 36). Et
c’est pourquoi dans ce sacrement, le sang est consacré
séparément du corps, mais non les autres parties l’une
de l’autre ».
Le mémorial de la Passion, qu’est le sacrement de l’Eucharistie,
sous la raison de sacrifice, doit reproduire l’immolation du
Christ sur la Croix, qui est son vrai sacrifice, selon qu’en
effet cette immolation a eu lieu. Or, cette immolation n’a pas
consisté en ce que le corps du Christ ait été
divisé ou mis en pièces. Elle a consisté en ce
que le sang a été séparé du corps. Elle
a consisté dans l’effusion du sang du Christ. Et voilà
pourquoi le sacrifice de la Croix, dont il est le sacrement, devait
consister dans la consécration, sous deux espèces séparées,
du corps et du sang du Christ, représentés ainsi dans
leur état de séparation tels qu’ils furent sur
le Calvaire. Rien de plus net que cette notion du sacrifice eucharistique,
dans la pensée de saint Thomas.
Conséquence :
le Christ est donc tout entier, non pas seulement sous les deux espèces
du sacrement prises ensemble, mais encore sous chacune d’elles
prises séparément.
Cette vérité qui est absolument
indubitable et de foi (cf le texte du Concile de Trente cité
plus haut), nous permet de justifier les prescriptions de l’Eglise
relativement à la communion des fidèles, sous la seule
espèce du pain. Dès là, en effet, que le Christ
tout entier est contenu sous chaque espèce, les fidèles
n’éprouvent aucun dommage, même s’ils ne
reçoivent pas les deux espèces de sacrement : sous la
seule espèce du pain, ils reçoivent le Christ tout entier.
C’est de foi divine catholique
définie : le Chapitre 3 de la 21 session du Concile de Trente
affirme :
« Bien que notre Rédempteur
ait, à la dernière Cène, institué et distribué
à ses Apôtres ce sacrement sous les deux espèces,
il faut néanmoins reconnaître que, même sous une
seule espèce, le Christ est reçu dans sa totalité
et son intégrité et le sacrement en sa vérité
et que, dès lors, pour ce qui concerne le fruit, ceux qui reçoivent
une seule espèce ne sont privés d’aucune grâce
nécessaire au salut ».
Mais s’il est vrai de dire que le Christ est contenu tout entier
sous chacune des espèces, l’est-il sous chaque partie
de chacune des espèces. Nous connaissons déjà
la réponse de l’Eglise. Nous avons donné, plus
haut, la déclaration formelle du Concile de Trente.
Mais comment Saint Thomas explique-t-il
la chose ?
C’est l’objet de son article
3 ;
Article 3 : Si tout le Christ
est sous chaque partie des espèces du pain et du vin ?
Autrement dit : est-il sous chaque parcelle
?
On répondra brièvement
mais véridiquement : le Christ est présent dans chaque
parcelle, puisque sa présence est une présence par mode
de substance et que la nature de la substance d’une chose se
trouve dans sa totalité quelque soit la dimension de la chose.
: c’est ainsi que sous chaque partie de l’air est toute
la nature de l’air ; et sous chaque partie du pain toute la
nature du pain. Et cela indifféremment que les dimensions soient
actuellement ou non divisées. Il suit de là manifestement
que tout le Christ est sous chaque partie des espèces, même
quand l’hostie est dans son intégrité ; et non
pas seulement quand elle est brisée.
D’où la conséquence
: l’Eglise a toujours manifesté, dans son rite, une très
grande attention aux parcelles de l’hostie consacrée
en ordonnant la purification des doigts de prêtre célébrant.
C’est la raison essentielle pour laquelle ne peut être
recommandé la pratique de donner la communion dans la main
des fidèles. Non point parce que les mains des fidèles
sont moins saintes que celles du prêtre, encore que le jour
de son ordination sacerdotale, les mains du prêtre sont l’objet
d’une attention particulière par l’onction des
saintes huiles, ce que ne connaît pas le fidèle baptisé.
Mais le risque de profanation de la divine présence est trop
grand.