Paroisse catholique Saint Michel

Dirigée par

 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

06 80 71 71 01

 

Du 8 au 14 mai 2005

Dimanche aprés l'Ascension

 

Sommaire

 N'oubliez pas de vous
inscrire sans tarder au pèlerinage jubilaire du Puy, pour m'en faciliter
l'organisation. N'attendez pas le dernier jour, comme on le fait d'habitude.
Des noms me sont déjà parvenus. Je les en remercie.

 

A- Le Mystère d’Incarnation.
Méditation V


Dans les deux précédentes « paroisses saint Michel », nous avons médité, avec Saint Thomas, sur la « raison » de l’Incarnation, pour conclure comme nous y invite notre Credo : qu’Il s’est incarné en raison du péché, « propter nostram salutem ».

Si Dieu s’est incarné, s’Il s’est porté à cet excès de bonté, dans le don ou la communication de Lui-même à sa créature, c’est en raison de notre misère qu’Il l’a fait, en raison de notre nature pécheresse. Cette nature était ruinée, perdue non seulement dans l’une ou l’autre de ses personnes, mais en elle-même, dans sa totalité. Dieu n’a pu se résoudre à la laisser dans cet état. Et pour la relever, pour la rétablir, non seulement dans son premier état où Il l’avait constituée si parfaite et si belle, mais dans un état qui le dépasserait en quelque sorte à l’infini, Il se l’est unie dans sa propre Personne. Lui, Dieu, s’est fait homme, pour sauver l’homme, qui, en se séparant de Lui par sa désobéissance et son péché, avait consommé sa perte. Voilà le divin motif de l’Incarnation.
Mais s’il en est ainsi, ne fallait-il pas que Dieu s’incarnât, dès le commencement de l’histoire douloureuse du genre humain, c’est-à-dire aussitôt après sa chute ? Telle est la question qui se pose, en raison même de la doctrine que nous venons d’établir et que saint Thomas va résoudre à l’article qui suit.

Article 5 « S’il eût été convenable que Dieu s’incarnât dès le commencement du genre humain ? »

Saint Thomas d’Aquin, dans cet article, fait d’abord remarquer que « l’œuvre de l’Incarnation étant ordonné principalement à la réparation de la nature humaine par l’abolition du péché, - opus incarnationis principaliter ordinetur ad reparationem naturae humanae per peccati abolitionem -, il est manifeste qu’il ne fût pas convenable que Dieu s’incarnât dès le commencement du genre humain, avant le péché ; car le remède ne se donne qu’à ceux qui sont déjà infirmes. Aussi bien le Seigneur Lui-même dit, en Saint Mathieu : « Il n’est pas besoin de médecin pour ceux qui se portent bien, mais pour ceux qui vont mal : je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs » (Mt 9 12-13)
Remarquons cette première conclusion de saint Thomas. Elle confirme tout ce que nous avons vu au sujet du motif de l’Incarnation. Si, en effet, ce n’est point premièrement pour réparer le genre humain que le Fils de Dieu s’est incarné ; si c’est plutôt pour le couronnement de l’œuvre de Dieu comme telle, à titre de modèle, d’archétype, de perfectionnement suprême de cette œuvre, pourquoi n’est-ce pas tout au commencement que Dieu a réalisé cette Incarnation de son Fils ? Il le fallait d’autant plus que, dans ce sentiment, le Fils de Dieu incarné devait être la cause exemplaire et efficiente de la perfection de tout le reste dans l’œuvre divine, sans en excepter les anges. Et, par suite, les anges ne pouvaient subir leur épreuve et recevoir la récompense de leur fidélité, qu’en dépendance du Fils de Dieu incarné ; comme, dans l’ordre de la restauration, ce n’est que par le Verbe fait chair ou en raison de ses mérites que les êtres humains recouvrent la grâce, et nul n’est entré au ciel qu’après Lui. Or, la foi nous enseigne que les anges furent admis dans le ciel dès le commencement. Et, même pour l’homme, dans son premier état, s’il fût resté fidèle, il eût été admis dans le ciel de la gloire sans aucun rapport à l’Incarnation. Tout cela ne prouve-t-il pas manifestement que l’Incarnation n’était pas dans le premier plan divin ; et qu’elle n’a été introduite par Dieu que pour réparer son œuvre que le péché de l’homme, à l’instigation de Satan, avait en quelque sorte compromise ou ruinée. Dès lors, tout s’harmonise ; et l’on comprend que l’Incarnation n’avait pas à être réalisée avant le péché de l’homme comme vient de le faire observer saint Thomas.

« Mais, poursuit Saint Thomas, il n’était pas non plus convenable que Dieu s’incarnât tout de suite après le péché - Sed non etiam statim post peccatum conveniens fuit Deum incarnari »

Et cela pour plusieurs raisons du plus haut intérêt.

« Premièrement, à cause de la condition du péché de l’homme, qui était venu de l’orgueil ; d’où il suit que l’homme devait être délivré en un tel mode qu’humilié il reconnût qu’il avait besoin d’un libérateur. Aussi bien, sur cette parole de l’Epître aux Galates « ordonnée par les anges, à l’aide d’un médiateur »(Gal 3 19), la glose dit : « C’est par un grand conseil qu’il a été fait qu’après la chute de l’homme le Fils de Dieu ne fût pas envoyé tout de suite. Dieu, en effet, laissa l’homme d’abord à son libre arbitre, dans la loi de nature, afin qu’ainsi il fît la preuve des forces de sa nature. Où s’étant trouvé en défaut, il reçut la Loi, laquelle une fois donnée, le mal s’aggrava, non par la faute de la Loi, mais par la faute de la nature. Et c’est alors que connaissant sa faiblesse, l’homme dut en appeler à son médecin et chercher le secours de la grâce.

Ainsi c’est parce qu’il fallait que le genre humain prît conscience de sa misère que l’Incarnation n’eut lieu qu’à la « plénitude des temps », comme le dit saint Paul. Comme le dit encore Saint Thomas dans le « ad primum » : « Le seigneur n’apporta, tout de suite, le remède de l’Incarnation au genre humain déchu « de peur qu’il ne le méprisât dans son orgueil, si auparavant il n’avait expérimenté sa faiblesse ». « Et ideo Dominus non statim incarnationis remedium humano generi exhibuit, ne illud contemeneret ex superbia, si prius suam infirmitatem non cognosceret »

« Secondement, en raison de l’ordre de la promotion au bien, - Secundo, propter ordinem promotionis in bonum - selon lequel on va de l’imparfait au parfait. Aussi bien l’Apôtre dit : « Ce n’est pas ce qui est spirituel qui vient d’abord, mais ce qui est animal, et, après ce qui est spirituel. Le premier homme, venu de la terre, est terrestre, le second, venu du ciel, est céleste » (1 Cor 15 46-47).

« Troisièmement, en raison de la dignité du Verbe incarné Lui-même. Et en effet, sur cette parole de l’Epître aux Galates : « Dès que vint la plénitude du temps, la glose dit : « Plus était grand le Juge qui venait, plus devait être longue la série des hérauts qui le précéderaient ».

« Quatrièmement, de peur que la ferveur de la foi ne s’attiédît par la prolixité du temps. Car, vers la fin du monde, la charité d’un grand nombre se refroidira (Mt 24 12) ; et en Saint Luc, il est dit : « Quand le Fils de l’homme viendra, pensez-vous qu’Il trouvera la foi sur la terre ? » (Lc 18 8)

Ainsi pour des raisons très sages et en parfaite harmonie soit avec les besoins de la nature humaine soit avec la dignité du Verbe fait chair, il n’était pas bon que l’Incarnation se fît tout de suite après la chute du premier homme. Il fallait, en effet, que le genre humain prît conscience de sa misère et du besoin qu’il avait d’un Dieu-Sauveur, et, aussi, que ce Dieu-Sauveur pût être précédé d’une longue série de prophètes, annonçant et préparant sa venue. Et voilà pourquoi, saint Paul aux Hébreux écrit : « Après avoir, à plusieurs reprises et en diverses manières, parlé autrefois à nos pères par les prophètes, Dieu, dans ces derniers temps, nous a parlé par le Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses, et par lequel il a aussi créé le monde. » (Hb 1 1)


Mais devons-nous conclure de là que l’Incarnation aurait dû être différée jusqu’à la fin du monde : puisqu’il était bon d’attendre, n’eût-il pas été bon d’attendre jusqu’à la fin ? Saint Thomas va nous répondre à l’article qui suit :

Article 6 : « Si l’œuvre de l’Incarnation aurait dû être différée jusqu’à la fin du monde ? »

Saint Thomas répond que « comme il n’était pas à propos que Dieu s’incarnât dès le commencement du monde ; pareillement, il n’était pas bon que l’Incarnation fût différée jusqu’à la fin.

« Ceci apparaît, d’abord, de l’union de la nature divine et de la nature humaine. Car, d’une certaine manière, ce qui est parfait précède dans le temps ce qui est imparfait ; mais d’une autre manière, ce qui est imparfait précède ce qui est parfait. En ce qui, en effet, d’imparfait devient parfait, l’imparfait précède dans le temps le parfait ; mais en ce qui est la cause efficiente de la perfection, le parfait précède dans le temps l’imparfait. Or dans l’œuvre de l’Incarnation, l’un et l’autre se rencontrent. C’est qu’en effet, la nature humaine, dans l’Incarnation elle-même, a été portée au sommet de la perfection ; il s’ensuit qu’il ne convenait pas que l’Incarnation se fît au commencement du genre humain. Mais le Verbe incarné Lui-même est la cause efficiente de la perfection dans le genre humain ; selon cette parole de saint Jean : « de sa plénitude nous avons tout reçu ». (Jn 1 16) Il ne fallait donc pas que l’œuvre de l’Incarnation soit différée jusqu’à la fin du monde. Toutefois, la perfection de la gloire, à laquelle la nature humaine doit être conduite par le Verbe incarné, aura lieu à la fin du monde »

Une seconde raison se tire de la réalisation du salut des hommes. En effet, la situation de l’homme, allant avec le temps, se dégradant et dans sa connaissance de Dieu et dans ses mœurs, ni l’élection d’Abraham ni le don de la Loi ne portant le remède de la misère, il ne fallait pas que l’Incarnation fût reculée à la fin du monde. « Si ce remède de la nature humaine qu’est l’Incarnation eût été différée jusqu’à la fin du monde, la connaissance et le respect de Dieu et l’honnêteté des mœurs eussent entièrement disparu de cette terre » - « Si autem hoc remedium differretur usque in finem mundi, totaliter Dei notitia et reverentia et morum honestas abolita fuisset in terra ».

« Troisièmement, on voit aussi que ce n’eût pas été convenable pour la manifestation de la vertu divine, laquelle a sauvé les hommes en plusieurs manières, non seulement par la foi du Rédempteur à venir, mais encore par la foi au Sauveur présent et déjà venu ».

Si le bien du genre humain demandait que l’Incarnation n’eût pas lieu tout de suite au lendemain de la chute du premier homme, il demandait aussi qu’elle ne fût pas renvoyée jusqu’à la fin du monde. Aussi bien Dieu l’a-t-il réalisée au milieu du temps, selon qu’il convenait le mieux à sa sagesse et à sa miséricorde. Cette grande vérité, que saint Thomas vient d’établir dans ces deux articles, a été mise en lumière de façon éblouissante dans la seconde partie du Discours sur l’histoire universelle de Bossuet.

Ce que nous verrons la semaine prochaine.

B – Sainte Jeanne d’Arc
Sa « geste » victorieuse dans la lumière de l’Ascension du Seigneur. .


On ne peut pas laisser passer ce 8 mai, fête de sainte Jeanne d’Arc, sans l’évoquer ici particulièrement, en cette paroisse saint Michel ».

Et puisque cette fête est solennisée, cette année, juste en ce dimanche après l’Ascension, j’ai pensé que l’on pouvait méditer sur cette chevauchée victorieuse d’Orléans à Reims, Jeanne y conduisant le Dauphin pour qu’il y reçût son sacre, dans la lumière du mystère de l’Ascension.

Voilà l’homélie que je prononçais ce dimanche lors de la messe chantée dans la chapelle du Centre Saint Paul.

« Vous me permettrez, je pense, de vous présenter - ou d’essayer de vous faire un parallèle entre la chevauchée victorieuse de Sainte Jeanne d’Arc conduisant le Dauphin à Reims pour y recevoir son sacre et le mystère de l’Ascension du Seigneur que nous fêtions jeudi dernier.

Y-a-t-il un possible parallèle ?
Y a-t-il une analogie entre ces deux faits historiques ? Une analogie de proportionnalité ?
Pourrait-on affirmer que Reims et sa Cathédrale est au Dauphin ce que le Ciel est au Christ-Seigneur ?
Oui, je le pense.

Pourrait-on affirmer que la chevauchée vers Reims et ce qu’elle implique de foi et de courage, est une image analogique de notre pérégrination de baptisés vers le Ciel ?
Oui, je le pense.

Pourrait-on dire que les « voies » de Sainte Jeanne d’Arc sont à la Sainte ce que la foi est à chacun d’entre nous dans cette pérégrination ?
Oui, je le pense.

Ainsi sous bien des rapports, on peut, ce me semble, illustrer notre pèlerinage terrestre, tout surnaturel, de la chevauchée johannique. Elle pourrait être notre modèle. La chevauchée de Jeanne avec sa bannière et le Dauphin pourrait être parfaitement le modèle de notre pèlerinage vers le Ciel, notre ascension baptismale.

Permettez-moi alors quelques développements.

Et commençons par réfléchir sur la finalité des ces deux actes.
Oui, considérons la finalité de la chevauchée de Jeanne et la finalité de l’Ascension du Seigneur.

L’une et l’autre ont pour finalité de faire éclater la grandeur, la noblesse. De confirmer pour le Christ, sa divinité, d’affirmer pour le Dauphin, sa noblesse royale.
C’est cela l’essentiel de la mission de Jeanne d’Arc : dire, faire dire, faire reconnaître que le Dauphin est de race royale. Il est de famille royale. Il est de sang royal. Il n’est pas un « bâtard » comme on le suggérait, comme cela se disait dans le Royaume de France, comme il le craignait lui-même. Et son sacre à Reims avait cette raison d’être, cette finalité. Il fallait que cesse toute suspicion…toute inquiétude. Le sacre était l’acte sublime qui confirmait l’origine royale du Dauphin. Il allait de défaites en défaites. Il n’était plus que le « petit » roi de Bourges. Il n’avait plus de crédit…Son sacre le confirma dans sa dignité de prince de sang, ce qui était contesté par ce honteux traité de Troyes.

Ainsi, de même que l’exaltation, la glorification de Notre Seigneur, à la « Droite du Père », confirma, aux yeux des disciples, sa divinité, de même, mutatis mutandis, le sacre du Dauphin consacra ses origines royales.

Tout pareillement, au Dauphin, dans sa cathédrale de Reims, la sublimité des honneurs. A lui, la majesté du triomphe…Dans son sacre reçu à la Cathédrale de Reims, lieu des sacres des Rois très chrétiens…depuis le baptême de Clovis… Là, son sanctuaire. Reims est à Charles VII, ce que le Ciel est au Christ, son lieu, son droit, son triomphe. Son droit reconnu, confessé, ici, par l’Eglise, là, par Dieu le Père.

Et je contemple des yeux de la foi même solennité.
Je vois le Christ, « assis » à la droite du Père entrer pour toujours en possession de ce repos éternel que lui ont mérité de glorieux combats, les combats de sa Passion.
Et je vois le Dauphin entrer dans son sanctuaire après la chevauchée victorieuse et souffrante de Jeanne. Elle est là, toute à la joie, sa bannière étendue, à l’honneur. Il fut à la peine, dira-t-elle, il est bien légitime qu’il soit à l’honneur, à la gloire.

Et là, dans son sanctuaire, comme le Christ au sien, le Ciel, il est déclaré au-dessus de toutes principautés, de toute autorité, de toute domination, de toute dignité, de tout nom.
Comme le Christ, il est pour son peuple, le chef Souverain, reconnu, confessé par le peuple…comme le Christ l’est pour et par son Eglise triomphante. « A Lui, tout honneur et toute gloire ».

Désormais nous dit Saint Paul : du Christ « son nom est devenu grand, resplendissant, glorieux…si glorieux que « tout genou fléchira devant lui, au Ciel, sur la terre, aux enfers…Toute langue publiera que Jésus vit et règne à jamais dans la gloire de Dieu le Père ».

Mais ne puis-je pas dire cela du Dauphin, en son sacre de Reims ? Son nom est devenu grand : Charles. Resplendissante, sa personne. Glorieuse, sa filiation…Si glorieuse que tout genou fléchira devant lui, de Jeanne, la première…Ce qu’elle fit, du reste, déjà, grâce à ses voix à Chinon, devant le Prince qu’elle reconnut entre cent…A Reims et après elle, de tout le peuple.

Et de même qu’au Ciel, avons-nous dit, en la fête de l’Ascension, la multitude innombrable des élus de la Jérusalem céleste dont l’Agneau immolé est l’éternelle lumière, jettent leurs couronnes à ses pieds, se prosternent eux-mêmes devant Lui et proclament, en un chœur puissant comme le bruit de la mer, qu’il est digne de tout honneur, de toute gloire, parce que leur salut et leur béatitude trouvent en Lui leur principe et leur fin ».
De même à Reims. C’est le même chant en la Cathédrale devant le Dauphin confirmé en sa royauté.
Oui, il n’est pas faux de dire, analogiquement, que l’Ascension est au Christ, ce que le Sacre est au Dauphin, la consécration de la Royauté, comme pour le Christ, sa divinité.
Au Seigneur, je chante, dans mon « Gloria », « tu solus Altissimus, tu solus Dominus, tu solus sanctus. »
A Reims, Jeanne fit acclamer le Dauphin. Tu solus Rex Galliae. Tu solus Princeps. A Toi seul, et non à l’anglais ni au Duc de Bedford, le trône de France, la terre de France.

Le Christ est le propre Fils de Dieu. Cela éclate dans la Résurrection et l’Ascension.
Le Dauphin est le seul Roi de France, cela éclate aussi dans la cathédrale de Reims.

En sa qualité de Fils de Dieu, le Christ jouit du droit de prétendre à la gloire divine dans les splendeurs éternelles.En sa qualité de Roi, vrai Roi, le Dauphin jouit, tout particulièrement du droit de recevoir son Sacre dans les splendeurs de la Cathédrale de Reims, au milieu de la liesse populaire, comme le Christ-Seigneur au milieu des élus et des anges.

Au Christ, à sa divinité, il lui fallait les hauteurs du Ciel d’où sa gloire et sa puissance pouvaient désormais rayonner pleinement sur la société entière des élus et des rachetés.
Au Dauphin, à sa Royauté, il fallait, tout également et analogiquement, Reims et sa grandeur. C’est en effet du sacre accompli que la gloire et la puissance du Dauphin, enfin reconnue put rayonner pleinement sur le cœur de ses sujets, des sujets de son royaume.
Le sacre confirme et consacre la royauté du Dauphin Charles, comme l’Ascension, analogiquement, confirme et consacre la divinité du Christ.

Oui, je peux dire que l’Ascension est au Christ ce que le sacre est au Dauphin.
Par l’Ascension, le Père a glorifié son Fils. « Deux exaltavit illum ».
Par le sacre, l’Eglise glorifie le Dauphin lui donnant l’onction royale afin qu’il règne sur sa terre.
Voilà la finalité de la « geste » johannique. Sa raison d’être. Sa noblesse.

Voilà la lumière que Jeanne nous donne du sacre et de sa raison d’être.

Aussi, il me semble que l’on peut dire également que la foi est au mystère chrétien, au mystère de l’Ascension ce que Jeanne est à la grandeur royale, à la grandeur de la monarchie.

La foi me permet de contempler la divinité de NSJC. Il est vrai Fils de Dieu.
Jeanne est une lumière sur la royauté. Non seulement elle confirme la royauté du Dauphin. Mais surtout, elle nous permet de comprendre également le caractère divin du pouvoir politique. Elle permet que nous comprenions le sens divin du pouvoir politique. « Omnis potestas a Deo ». « Tout pouvoir vient de Dieu.

C’est, sous ce rapport, la raison d’être de Jeanne. Sa mission. Faire éclater non seulement la race royale du Dauphin. Mais surtout confesser l’origine divine du pouvoir. Quel que soit son mode d’élection ou de nomination. Le pouvoir est de Dieu, vient de Dieu et, par conséquent, doit s’exercer selon Dieu et sa Loi naturelle et surnaturelle.
Ainsi, de même que la foi est une lumière sur les choses de Dieu. Jeanne est une lumière sur la chose politique. Dès lors, de même que la foi est précieuse à notre intelligence pour comprendre le surnaturel, de même Jeanne est précieuse à notre intelligence pour comprendre l’ordre temporel.

Et tout au début, je me suis posé la question du rapport entre la cathédrale de Reims pour le roi, et le ciel pour le baptisé. Je me demandais si je pouvais dire que Reims est au Dauphin-Roi ce que le Ciel est au baptisé. Je pense que c’est, de fait, une analogie tout à fait soutenable. J’ai dit qu’en la cathédrale de Reims, son sacre fait éclater la filiation royale du Dauphin. Elle le confirme. Dès lors il est vrai de dire que le ciel est au baptisé ce que la cathédrale est au Dauphin. La cathédrale est le « lieu » du roi. La « maison » du roi, son lieu. Il y a plein droit parce qu’il est le vrai Roi. De même le ciel est nôtre, notre lieu, notre maison, parce que, régénérés par le Baptême, nous y avons plein droit. « Ex Deo nati sunt ». Si donc nous sommes « nés de Dieu », nous sommes « fils de Dieu ». Si donc nous sommes fils, nous sommes héritiers. « Si filii et haeredes…Coheredes Christi » partageant, par conséquent, son propre héritage éternel. Nous rendant enfants de Dieu, le baptême nous rend aussi membres vivants du corps mystique dont le Christ est la tête. Or les membres participent à la gloire de la tête et la joie d’une personne rejaillit sur tout le corps ; c’est pourquoi nous participons à tous les trésors que le Christ possède. Ses joies, ses gloires, sa béatitude deviennent nôtres.
Saint Paul est formel : « Dieu est riche en miséricorde à cause de l’amour immense qu’il nous a porté, alors que nous étions morts par le péché, il nous a rendus vivants avec le Christ (car c’est par sa grâce que vous êtes sauvés), il nous a ressuscités avec Lui, et il nous a fait asseoir tous avec lui dans les cieux, afin de manifester par là aux siècles à venir, l’infinie richesse de sa grâce, par la bonté qu’Il nous témoigne en Jésus-Christ ». (Ep 2 4-7)
Dès lors, oui vraiment, on peut dire que le baptême est au chrétien ce que le sacre est au Dauphin. Le baptême est un titre de gloire, un titre de possession du Ciel, comme le sacre est un titre de gloire, un titre de possession légitime et de la couronne et du royaume.

Oh ! Bienheureuse Sainte Jeanne d’Arc qui nous donne tant de lumière, par son recours au sacre, sur les choses de ce monde.