Paroisse catholique Saint Michel

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 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

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Du 3 au 9 juillet

Septième Dimanche après la Pentecôte

 

Sommaire

A - " Le Dieu de vérité" par le Cardinal Ratzinger

Nous voilà tous en vacances. Disons que c’est la période des vacances

La paroisse Saint Michel se doit aussi d’adapter son contenu à cette période unique. C’est une période de grande détente…mais tout autant de réflexion. L’homélie que je vais vous donner pourra vous aider à réfléchir sur le mystère de Dieu.

C’est une courte homélie du cardinal Joseph Ratzinger, celle qu’il donnait à Bayeux, en la Cathédrale, le 6 juin 2004, à l’occasion des cérémonies de la Libération de la France des forces hitlériennes. Il l’a reprise et publiée dans son ultime livre en tant que cardinal Ratzinger : « L’Europe, ses fondements aujourd’hui et demain » que je suis en train de lire et d’étudier.

C’était le jour de la fête de la Sainte Trinité.

Il nous fait réfléchir sur Dieu.

« La fête de la Très Sainte Trinité est différente de toutes les autres fêtes de l’année liturgique comme Noël, l’Epiphanie, Pâques, la Pentecôte, où nous célébrons les merveilles de Dieu accomplies dans l’Histoire : l’Incarnation, la Résurrection, l’effusion de l’Esprit Saint et, par conséquent, la naissance de l’Eglise. Aujourd’hui, nous ne célébrons pas un événement où « quelque chose » de Dieu se rend visible, mais nous célébrons le mystère même de Dieu.

Nous nous réjouissons de Dieu, du fait qu’il soit tel qu’il est, nous lui rendons grâce d’exister, nous sommes reconnaissants de ce qu’il soit ce qu’il est, de ce que nous puissions le connaître et l’aimer, et de ce qu’il nous connaisse, nous aime et se manifeste à nous.

Mais l’existence de Dieu, son être, le fait qu’il nous connaisse, est-ce là vraiment un motif de joie ? Sans doute, ce n’est pas chose facile à comprendre et à expérimenter.

Les divinités païennes.

Beaucoup de divinités des différentes religions des peuples dans le monde sont effrayantes, cruelles, égoïstes, un insondable mélange de bien et de mal. Le monde antique était marqué par la peur des dieux, et par la crainte de leur mystérieuse puissance : il s’agissait de se rendre les dieux propices, d’échapper à leurs caprices ou à leur mauvaise humeur.

La mission du christianisme : faire connaître le vrai Dieu, vrai renversement libérateur

La mission du christianisme comprenait une force libératrice, qui a pu chasser tout un monde d’idoles, de divinités, considérées comme néant et illusoires apparences. En même temps, il a annoncé ce Dieu qui, en Jésus, s’est fait homme, le Dieu qui est amour et raison. Ce Dieu est plus fort que toutes les puissances obscures que le monde peut contenir : « Nous savons qu’il n’y a aucune idole dans le monde et qu’il n’y a d’autre dieu que le Dieu unique. Car, bien qu’il y ait de prétendus dieux au ciel ou sur la terre - et il y a de fait plusieurs dieux et plusieurs seigneurs -, il n’y a pour nous qu’un seul Dieu, le Père, de qui tout vient et vers qui nous allons… » (1 Cor 8 4-6).

Le vrai Dieu, vrai libérateur des fausses craintes aux fausses divinités

Aujourd’hui encore, ce message constitue un renversement libérateur par rapport à toutes les anciennes religions traditionnelles : il n’y a plus lieu de craindre les esprits qui nous entourent de tous côtés, allant et venant sans cesse, dont on s’efforce vainement des se libérer. Quiconque se tient « sous l’abri du Très-Haut et repose à l’ombre du Puissant » (Ps 90, 1), sait qu’il se trouve en sécurité, tendrement gardé par celui qui lui offre un refuge accueillant. Qui connaît le Dieu de Jésus-Christ sait qu’ont disparu aussi toutes les autres formes de peur devant Dieu, que sont dépassées toutes les formes de déchirante angoisse existentielle, répandues à travers le monde, de manière toujours renouvelée.

L’existence de Dieu et la liberté humaine.

Face à toutes les horreurs du monde, la même question ne cesse de revenir : Dieu existe-t-il ? S’il existe, est-il vraiment bon ? Ne serait-il pas plutôt une réalité mystérieuse et dangereuse ?

Aux temps modernes, cette question se présente différemment : l’existence de Dieu semble être une limite à notre liberté. Il est ressenti comme une sorte de surveillant qui nous poursuit de son regard. La révolte contre Dieu prend, à l’époque moderne, les traits d’une terreur devant le regard omniprésent de Dieu. Regard qui nous apparaît comme une menace ; nous préférons, en effet, ne pas être vus, nous voulons purement et simplement être nous-mêmes, rien d’autre. L’homme se sent libre, il ne se sent vraiment lui-même que lorsque Dieu est mis de côté. L’histoire d’Adam le dit déjà, il voit Dieu comme un concurrent : Adam veut mener sa vie, tout seul, il cherche à se cacher de Dieu « parmi les arbres du jardin » (Gen 3 8). Sartre a aussi affirmé qu’il faut nier Dieu, même s’il devait exister, car le concept de Dieu s’oppose à la liberté et à la grandeur de l’homme.

Dieu, contrainte à ma liberté. Illusion

Mais ainsi le monde serait-il devenu plus rayonnant, plus libre, plus heureux, après avoir mis Dieu de côté ? L’homme ne se serait-il pas dépouillé de sa propre dignité, voué à une vaine liberté qui fait des choix cruels, impitoyables, de toute sorte ?

Dieu est amour, raison de ma liberté.

Le regard de Dieu ne nous épouvante que si nous le concevons comme nous réduisant à une sorte de servitude, d’esclavage ; mais si nous y lisons l’expression de son amour, nous découvrons alors qu’il est la condition fondamentale de notre être, qu’il est ce qui nous fait vivre. « Philippe, qui m’a vu a vu le Père », dit Jésus à Philippe et à vous tous (Jn 14 9). Le visage de Jésus est le visage même de Dieu. Pour nous, Jésus a souffert et, par sa mort, il nous donne la paix, il nous révèle qui est Dieu. Son regard, loin d’être une menace, est un regard qui nous sauve.

Dieu, sa présence.

Oui, nous pouvons nous réjouir de ce que Dieu existe, qu’il se soit révélé aux hommes et qu’il ne nous laisse pas seuls. Combien il est consolant de savoir le numéro de téléphone d’un ami, de connaître des personnes de bien qui nous aiment, qui sont toujours disponibles, ne se montrent jamais distantes : à tout instant, nous pouvons les appeler et elles peuvent nous

appeler. Dieu a inscrit nos noms sur son annuaire téléphonique ! Il est toujours à l’écoute : nous n’avons besoin ni d’argent ni de technique pour l’appeler. Grâce au Baptême et à la Confirmation, il nous est donné de faire partie de sa famille. Il est toujours prêt à nous accueillir : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à l fin des temps » (Mt 28 20)

Le « Paraclet »

Mais l’Evangile de ce jour ajoute une affirmation particulièrement importante : Jésus promet l’Esprit Saint (Jn 16 13) qu’il appelle, à diverses reprises, le « Paraclet ». Qu’est-ce que cela signifie ? En latin, ce mot est traduit « consolateur », le Consolateur. Librement traduit, ce mot latin veut dire : Celui qui se tient auprès de nous lorsque nous nous sentons seuls. Ainsi, notre solitude cesse d’être une solitude. Pour l’homme, celle-ci est souvent le lieu de la tristesse : il a besoin d’amour, dont l’absence est mise en évidence, précisément, par la solitude ; elle signifie un manque d’amour ; elle est quelque chose qui menace, au plus profond, notre qualité de vie. Le fait de ne pas être aimé est le noyau central de la souffrance humaine, de la tristesse d’une personne. Le mot « Consolator » nous dit justement que nous ne sommes pas seuls, que jamais nous ne pouvons nous sentir privés d’amour. Par le don de l’Esprit Saint, Dieu est entré dans notre solitude, il l’a brisée. Il s’agit en vérité d’une authentique consolation ; elle ne consiste pas en paroles, elle a la force d’une réalité agissante et efficace. C’est de cette définition de l’Esprit Consolateur que découla, au Moyen-âge, le devoir, pour les hommes, de pénétrer dans la souffrance de quiconque souffre. Les premiers hospices et hôpitaux furent d’abord dédiés à l’Esprit Saint : ainsi les hommes se chargeaient-ils de la mission de poursuivre l’œuvre de l’Esprit ; ils s’employaient à être des « consolateurs », à pénétrer dans la solitude des souffrants, des personnes âgées, pour y dispenser de la lumière.

Et pour nous, aujourd’hui encore, en notre époque, c’est un grave devoir.

Dieu, l’ « avocat ».

De plus, le mot grec « paracletos » peut encore se traduire autrement, il signifie aussi : « avocat ». Un texte du Livre de l’Apocalypse peut nous aider à mieux comprendre : « Et j’entendis une voix forte qui, dans le ciel, disait : Voici le temps du salut, de la puissance et du règne de notre Dieu, et de l’autorité de son Christ ; car il a été précipité l’accusateur de nos frères, celui qui les accusait devant notre Dieu, jour et nuit » (Ap. 12, 10) Qui n’aime pas Dieu de tout son cœur, n’aime pas non plus l’homme. Ceux qui nient Dieu deviennent rapidement des personnes qui détruisent la nature et mettent l’homme en accusation, car accuser les autres hommes et la nature leur permet de mieux justifier leur opposition à Dieu ; un Dieu qui a fait cela ne peut être bon ! Telle est leur logique. L’Esprit Saint, l’Esprit de Dieu n’est pas accusateur, il est avocat de la défense de l’homme et de la création. Dieu lui-même se tient du côté de l’homme et des créatures. Dans la création, c’est en prenant notre défense que Dieu s’affirme et se défend. Dieu est pour nous, cela nous le voyons clairement tout au long du cheminement de Jésus : lui seul se tient de notre côté, ne fait qu’un avec nous jusque, et y compris, dans la mort.

Si Dieu est pour moi, que craindrai-je ?

Le découvrir a provoqué, chez saint Paul, une explosion de joie : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? (…) Qui accusera les élus de Dieu ? Qui condamnera ? Jéus-Christ est mort, bien plus, il est réssuscité, lui qui est à la droite de Dieu et qui intércède pour nous ! (…) Oui, j’en ai l’assurance : ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les dominations, ni le présent, ni l’avenir, ni les puissances, ni ls forces des hauteurs, nik celles des profondeurs, ni aucune créatures, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jéasus-Christ notre Seigneur » (Rm 8 31-39)

Ce Dieu est pour nous un motif de joie, et nous voulons le célébrer.

Les implications politiques de la connaissance de Dieu

Le connaître et le reconnaître a, pour notre époque, une importance capitale. Nous sommes en train de nous remémorer les terribles jours de la Seconde Guerre mondiale, heureux de ce que le dictateur Hitler ait disparu, avec toutes ses atrocités, et de ce que l’Europe ait pu retrouver la liberté. Mais nous ne pouvons pas oublier le fait que, aujourd’hui encore, le monde souffre de menaces et d’autres cruautés. Dévoyer, instrumentaliser l’image de Dieu, négation qui s’est exprimée dans les idéologies du XXe siècle, et dans les régimes totalitaires issus d’elles, transformant le monde en un désert aride, au-dehors et au-dedans, jusque dans les profondeurs de l’âme. En ce moment historique, précisément, l’Europe et le monde ont besoin de la présence de Dieu qui s’est révélée en Jésus ; ils ont besoin que Dieu reste près de hommes par le truchement de l’Esprit Saint. Il est de notre responsabilité de chrétiens que ce Dieu demeure dans notre monde, qu’il lui soit présent comme l’unique puissance capable de préserver l’homme d’une autodestruction.

Dieu est aussi « un et trine ». L’icône de Roublev.

Dieu est un et trine : il n’est pas une solitude éternelle, mais il est amour éternel, amour que fonde la réciprocité des Personnes, et est cause première, fondement originaire de la totalité de l’être, ainsi que de toute forme de vie. L’unité engendrée par l’amour, l’unité trinitaire, est une unité infiniment plus profonde que l’unité - indivisible d’un point de vue matérielle - d’une pierre de construction.
Cette unité suprême n’est pas rigidement statique, elle est amour. La plus belle représentation figurative de ce mystère, Andreï Roublev nous en fait le cadeau au XVe siècle : c’est la si célèbre icône de la Trinité. Sans doute, elle ne représente pas le mystère éternel de Dieu en lui-même : qui se risquerait à le faire ? Mais elle tente plutôt de représenter ce mystère en le reflétant à travers le don de soi dans l’Histoire, ainsi que l’évoquent les trois hommes rendant visite à Abraham, près des chênes de Manbré (Gen 18 1-33). Abraham perçut aussitôt qu’il ne s’agissait pas d’hommes comme les autres, mais qu’à travers eux, Dieu lui-même venait à lui. Dans l’icône de Roublev, le mystère de cet événement est rendu visible, présenté comme un événement admirable en ses multiples dimensions : ainsi le mystère, en tant que tel, est respecté. La richesse artistique de cette icône me permet de souligner une autre caractéristique : il s’agit de l’atmosphère naturelle de cet événement, qui exprime le mystère des Personnes. Nous sommes prés du chêne de Mambré, que Roublev stylise en un arbre représentant l’arbre de la vie ; et cet arbre de la vie n’est rien d’autre que l’amour trinitaire qui a créé le monde, le soutient, le sauve, et est source de toute vie. Nous voyons encore la tente, la demeure d’Abraham, qui nous renvoie au Prologue de Jean : « Et le Verbe s’est fait chair et il a planté sa tente parmi nous. » (Jn 1 14) Le corps du Verbe de Dieu fait homme est devenu lui-même la tente, la demeure où Dieu habite : Dieu devient notre refuge et notre demeurer. Enfin, ce que présente Abraham, « un veau tendre et gras », est remplacé, dans l’icône, par la coupe, signe de l’Eucharistie, signe du don où Dieu se livre lui-même : « l’amour, le sacrifice, l’immolation précèdent l’acte de la création du monde, tous à sa source ». L’arbre, la tente, la coupe : ces éléments nous désignent le mystère de Dieu, nous incitent à plonger notre regard en son intimité, en son amour trinitaire.

Voilà le Dieu que nous célébrons. Voilà le Dieu qui fait notre joie. Il est la véritable espérance de notre monde. Amen.

Andreï Roublev a fait ses études iconographiques en Bulgarie. Moine, il a vécu entre le 14 et le 15 siècle. Il devint chef de file de l’école de Moscou, influencé par la tradition iconographique byzantine.

Andreï¨Roublev ( vers 1360 et 1430) : la plupart des peintres d’icônes restaient anonymes, mais lui a laissé sa griffe sur les icônes les plus précieuses, les plus poétiques. Après le déclin de Constantinople, Moscou seule peut prétendre à une suprématie artistique dans le domaine de l’icône. La cité possède des maîtres qui dirigent le travail en atelier et le marquent de leur personnalité. Andreï Roublev devient chef de file de l’école de Moscou, influencé par la tradition iconographique byzantine.

En 1405, il travaille avec Théophane le Grec à la décoration de la cathédrale de l’Annonciation du Kremlin, où il peint dans l’iconostase l’ensemble des fêtes : de l’Annonciation à l’entrée du Christ à Jérusalem. En 1408, il est invité à peindre dans la cathédrale de la Dormition à Vladimir avec l’iconographe Daniel Tchiorny.

La Trinité (début du 15, galerie Tretiakov) l’une des œuvres maîtresses de Roublev, par sa composition sage et simple à la fois, offre les caractéristiques essentielles d’un chef-d’œuvre.

Peintre de génie, Roublev a élevé son art au plus haut niveau. Les icônes n’en finiront pas de nous émerveiller.
Son chef-d’œuvre, la Trinité et bien d’autres de ses créations sont exposées à la galerie Tretiakov de Moscou.

La Trinité de St Andreï Roublev

L’icône originale est très grande : elle mesure 141 cm x 112 cm. Elle faisait partie initialement de l’iconostase de la cathédrale de la Trinité de la célèbre laure (monastère) de la Trinité à Zagorsk (actuellement Serguiev Possad), à 60 km au nord-est de Moscou.

Lecture descriptive

Les trois personnages ont des ailes, des auréoles, des bâtons. Leurs visages se ressemblent : ils sont habillés de la même façon, mêmes tuniques et manteaux, mais dans des couleurs différentes. Ils ont en commun une couleur bleue. Ils sont assis autour d’une table.

L’ange du milieu et l’ange de droite ont un même mouvement de tête vers l’ange de gauche, qui renvoie ce mouvement à l’ange de droite. Celui-ci, par le regard et par la main, prolonge le mouvement vers la coupe et la petite ouverture rectangulaire qui se trouve sur le devant de la table.

L’ange central est légèrement surélevé, il porte les couleurs impériales pourpre et bleue ; l’ange de gauche a un manteau aux couleurs chatoyantes et l’ange de droite un manteau vert, tous deux ont une même tunique bleue.

La coupe sur la table occupe une place importante : elle est au centre des trois personnes ; leurs mains droites sont orientées vers elle ; la table forme elle-même une coupe.

Les trois personnages s’inscrivent dans un cercle formé par le mouvement de leurs corps et de leurs têtes ; ils s’inscrivent aussi dans un cercle plus vaste qui englobe le rocher - quelque peu effacé -, l’arbre et la maison, au-dessus de la tête de chacun des trois personnages.

Un axe central vertical réunit l’arbre, le personnage central, la coupe et la confessio, c’est-à-dire l’ouverture rectangulaire devant la table : c’est l’ouverture que l’on trouve dans les autels romains pour laisser aux fidèles la possibilité de voir le tombeau des martyrs sous l’autel.

Lecture Biblique et théologique

L’origine de la scène se situe dans la vie d’Abraham (Genèse, chapitre 18).

Abraham reçoit, avec de grandes marques d’attention, trois voyageurs mystérieux qui lui annoncent que, malgré son grand âge, Sarah, sa femme, enfantera l’enfant que Dieu lui a promis. En raison de cette origine, l’icône porte le nom de l’hospitalité d’Abraham.

La scène biblique est devenue rapidement pour les chrétiens une scène de la révélation de la Sainte-Trinité, si bien que l’icône porte aussi le nom de Colloque divin ou Conseil éternel.

L’icône a ainsi deux dimensions inséparables. Elle représente une scène de la vie d’Abraham et évoque en même temps les plus grands mystères chrétiens.

Les trois pèlerins deviennent les trois personnes divines, les bâtons leur sceptre de puissance. La table avec une unique coupe est l’autel. Le rocher est tout à la fois l’évocation de la montagne du sacrifice d’Isaac et de la montagne du Golgotha. L’arbre, c’est le chêne de Mambré, mais aussi l’arbre de vie des origines, relié à l’eucharistie par l’axe central de l’image. La maison, c’est l’évocation de la tente d’Abraham et du temple qu’est l’Eglise.

Croire au Dieu Trinité, c’est changer l’image qu’on se fait de Dieu. C’est aussi changer l’image qu’on se fait de l’homme. Croire au Dieu Trinité, c’est en même temps croire en l’homme. Si la vie de Dieu est vie de relation, l’homme, créé à son image, se réalise en devenant un être de relation. Oui, vraiment, tout homme est une histoire sacrée !

 

« Collaborateur de la vérité »

Sa naissance

Le Cardinal Joseph Ratzinger, le Pape Benoît XVI, est né à Marktl am Inn, dans le diocèse de Passau (Allemagne), le 16 avril 1927 (Samedi saint); il a été baptisé le jour même. Son père, officier de gendarmerie, était issu d’une vieille famille d’agriculteurs de Bavière du Sud, aux conditions économiques très modestes. Sa mère était fille d’artisans de Rimsting, au bord du lac Chiem. Avant son mariage, elle travailla comme cuisinière dans divers hôtels.

Son enfance et son adolescence

Son enfance et son adolescence se sont déroulées dans la petite ville de Traunstein, près de la frontière autrichienne, à trente kilomètres de Salzbourg. Dans ce cadre qu’il a lui-même qualifié de « mozartien », il reçut sa formation chrétienne, humaine et culturelle.

La période de sa jeunesse ne fut pas facile. La foi et l’éducation reçue dans sa famille l’avaient préparé à affronter la dure expérience des temps où le régime nazi entretenait un climat de forte hostilité contre l’Église catholique. Le jeune Joseph vit ainsi les nazis frapper de coups le curé de sa paroisse peu avant la célébration de la Messe

C’est dans cette situation complexe qu’il découvrit la beauté et la vérité de la foi au Christ ; l’attitude de sa famille fut pour lui fondamentale, car elle donna un témoignage lumineux de bonté et d’espérance, enracinée qu’elle était dans une vive conscience de son appartenance à l’Église.

Durant les derniers mois de la deuxième guerre mondiale, il fut enrôlé dans les services auxiliaires de défense antiaérienne.

De 1946 à 1951, il étudie la philosophie et la théologie à l’Institut supérieur de Freising et à l’Université de Munich.

Il est ordonné prêtre le 29 juin 1951.

Ses études. Son enseignement.

L’année suivante, il commence à enseigner à l’Institut supérieur de Freising.

En 1953, il obtient son doctorat en théologie avec une thèse intitulée : « Peuple et maison de Dieu dans la doctrine de l’Église chez saint Augustin ».

Quatre ans plus tard, sous la direction du renommé Professeur de théologie fondamentale Gottlieb Söhngen, il obtient son habilitation à l’enseignement avec une dissertation sur « La théologie de l’histoire chez saint Bonaventure ».

Tout en exerçant ses charges de professeur de théologie dogmatique et fondamentale à l’Institut supérieur de philosophie et de théologie de Freising, il poursuit son activité d’enseignement à Bonn, de 1959 à 1963 ; à Münster, de 1963 à 1966 ; et à Tübingen, de 1966 à 1969. Au cours de cette dernière année, il obtient la chaire de dogmatique et d’histoire du dogme à l’Université de Ratisbone, où il exerce également la charge de vice-président de l’Université.

De 1962 à 1965, il contribue de façon remarquable au Concile Vatican II en tant qu’expert ; il assiste le Cardinal Joseph Frings, Archevêque de Cologne, comme Conseiller théologique.

Son intense activité scientifique l’amène à assumer d’importantes charges au sein de la Conférence épiscopale allemande et de la Commission théologique internationale.

En 1972, avec Hans Urs von Balthasar, Henri de Lubac et d’autres grands théologiens, il lance la revue théologique « Communio ».

Le 25 mars 1977, le Pape Paul VI le nomme Archevêque de Munich et Freising

Le 25 mars 1977, le Pape Paul VI le nomme Archevêque de Munich et Freising. Il reçoit l’ordination épiscopale le 28 mai suivant. Il était le premier prêtre diocésain à assumer la charge pastorale de ce grand diocèse bavarois depuis quatre-vingt ans. Sa devise épiscopale est : « Collaborateur de la vérité ». À cette occasion, il expliqua lui-même : « Il me semblait, d’une part, que cela soulignait le lien entre mon travail de professeur et ma nouvelle mission. Si les activités étaient différentes, il n’en demeurait pas moins que ce qui était en jeu c’était toujours suivre la vérité et être à son service. D’autre part, j’ai choisi cette devise parce que, dans le monde qui est le nôtre aujourd’hui, on oublie presque complètement le thème de la vérité, tant cela paraît trop élevé pour l’homme, et pourtant, si la vérité vient à manquer, tout s’écroule ».

Cardinal, le 27 juin 1977

Paul VI le créa cardinal au Consistoire du 27 juin 1977 avec le titre de « Santa Maria Consolatrice al Tiburtino ».

En 1978, il prend part au Conclave qui se tient du 25 au 26 août et qui élit Jean-Paul Ier. Celui-ci le nomme son Envoyé spécial au IIIe Congrès mariologique international célébré à Guayaquil (Équateur), du 16 au 24 septembre. Au mois d’octobre de cette même année, il participe au Conclave qui élit Jean-Paul II.

Il est rapporteur à la Ve Assemblée générale ordinaire du Synode des Évêques, célébrée en 1980, sur le thème : « La mission de la famille chrétienne dans le monde contemporain ». Il est Président délégué à la VIe Assemblée générale ordinaire, célébrée en 1983, sur « La réconciliation et la pénitence dans la mission de l’Église ».

Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi

Nommé par Jean-Paul II, le 25 novembre 1981, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi et Président de la Commission biblique pontificale ainsi que de la Commission théologique internationale, il renonce au gouvernement pastoral de l’archidiocèse de Munich et Freising le 15 février 1982. Le 5 avril 1993, le Pape l’élève au rang de Cardinal-Évêque en lui confiant le siège suburbicaire de Velletri-Segni.

Il fut Président de la commission qui a préparé le Catéchisme de l’Église catholique et qui, après six années de travaux (1986-1992), présenta au Saint-Père le nouveau Catéchisme.

Le 6 novembre 1998, le Saint-Père approuva l’élection du Cardinal Ratzinger comme Vice-Doyen du Collège des Cardinaux, élection qui avait été faite par les Cardinaux de l’ordre des évêques. Le 30 novembre 2002, il approuva son élection comme Doyen ; lui conférant en plus, avec cette charge, le titre suburbicaire d’Ostie.

En 1999, il est Envoyé spécial du Pape aux célébrations qui, le 3 janvier, marquent le XIIe centenaire de la création du diocèse de Paderborn, en Allemagne.

Le 13 novembre 2000, il est devenu Académicien honoraire de l’Académie pontificale des Sciences.

Dans la Curie Romaine, il fut membre du Conseil de Cardinaux et Évêques de la Secrétairerie d’État, Section pour les Relations avec les États ; membre des Congrégations suivantes : pour les Églises orientales, pour le Culte divin et la discipline des Sacrements, pour les Évêques, pour l’Évangélisation des Peuples, pour l’Éducation catholique, pour le Clergé et pour les Causes des Saints. Il fut membre du Conseil pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens et membre du Conseil pontifical pour la Culture ; membre du Tribunal de la Signature apostolique ; et aussi des Commissions pontificales pour l’Amérique latine, « Ecclesia Dei », pour l’Interprétation authentique du Code de Droit canonique, et pour la Révision du Code des Canons des Églises orientales.

Ecrivain

Parmi ses nombreuses publications, le livre « Introduction au christianisme » occupe une place particulière, il y reprend les cours universitaires publiés en 1968 sur la profession de foi apostolique ; il faut mentionner également « Dogme et révélation » qui est une anthologie d’essais, de prédications et de réflexions sur la pastorale.

Le discours qu’il prononça devant l’Académie catholique de Bavière, sur le thème « Pourquoi est-ce que je continue à vivre malgré tout dans l’Église ? », reçut un large écho : il y affirmait avec son habituelle clarté que « c’est dans l’Église seulement que l’on peut être chrétien et non pas à côté d’elle ».

Au fil des années ses publications abondantes n’ont cessé d’apporter à ceux qui voulaient approfondir la théologie un point de référence sûr. En 1985, il publia le livre-entretien « Rapport sur la foi » et, en 1996, « Le sel de la terre ». Pour son soixante-dixième anniversaire, le livre « À l’école de la vérité » recueillait les réflexions de divers auteurs qui mettaient en lumière les différents aspects de sa personnalité et de son œuvre.

Il a reçu de très nombreux doctorats « honoris causa »: de la part de l’Université Saint-Thomas, à Saint-Paul (Minnesota, USA), en 1984 ; de l’Université catholique de Eichstätt (Allemagne), en 1987 ; de l’Université catholique de Lima (Pérou), en 1986 ; de l’Université catholique de Lublin (Pologne), en 1988 ; de l’Université de Navarre (Pampelune, Espagne), en 1998 ; de l’Université libre Santissima Maria Assunta (LUMSA, Rome), en 1999 ; de la Faculté de théologie de l’Université de Wroclaw (Pologne), en 2000.