A- Homélie du dimanche.
« Un jour vaut mieux dans vos parvis
que mille jours ailleurs ».
« Un jour vaut mieux dans vos parvis que mille jours ailleurs
».
Cet Introït explique parfaitement
le choix de l’Epître et de l’Evangile de cette messe
ainsi que le chant du Graduel et de l’Alléluia.
En effet l’Introït exprime l’idée
qu’il est doux et suave d’habiter dans les demeures du Seigneur
; qu’il est doux et suave de servir le Seigneur ; qu’il
est bon de marcher dans les voies du Seigneur, dans les vertus chrétiennes.
N’est-ce pas le sens que veut exprimer
cette phrase de l’Introït : « Un jour vaut mieux dans
vos parvis que mille jours ailleurs » ?
Le monde sans Dieu exerce sa « tyrannie
» sur les âmes…alors que Dieu, au contraire est source
de joie, de liberté, de noblesse. Le monde est « tyrannique
» alors que Dieu communique liberté, maîtrise de
soi-même, générosité, don de soi….
Le monde sans Dieu et sans loi engendre
les œuvres de la chair….Et Saint Paul les énumère
dans cette Epître : « c’est la formication, c’est
l’impureté, l’impudicité, la débauche,
l’idolâtrie, les maléfices, les haines, les discordes,
l’envie, les emportements, les divisions, les factions, cabales,
les jalousies, les meurtres, l’ivrognerie, les orgies et choses
semblables ».
Et ceux qui pratiquent de telles œuvres
sont esclaves de la chair, sombres…tristes, parce que sans espérance…Sans
espérance de la Vie Eternelle : « Ceux qui font des choses
pareilles n’hériteront pas du royaume de Dieu »,
nous dit Saint Paul. Rien n’est plus triste que d’être
sans espérance eschatologique…
Subjectivement, psychologiquement, objectivement…ceux qui pratiquent
de telles œuvres sont dans la tristesse, la morosité, la
nuit, se détruisent eux-mêmes, détruisent leur conscience,
leur nature, leur dignité, la dignité de la nature humaine,
de leur état.
Benoît XVI vient de le dire avec
force au clergé de la vallée d’Aoste en Italie,
lors des vacances d’été…Il disait aux prêtres
: « Sans le Dieu concret, le Dieu au visage du Christ (i.e. le
Dieu de miséricorde) le monde s’autodétruit. S’il
n’y a pas la mesure du vrai Dieu, l’homme s’autodétruit.
Nous le voyons sous nos yeux…Il est la Vérité et
ce n’est qu’en marchant sur ses traces que nous allons dans
la juste direction… » (O.R. du 2 août 2005)
Juste direction. Bonne direction. Car cette
direction, - c’est-à-dire suivre le Seigneur, lui être
attaché et soumis…- engendre nécessairement en une
âme, ce que Saint Paul appelle « les fruits de l’Esprit
» qui sont « la charité » et son cortège
: la joie, la paix, la patience, l’affabilité, la bonté,
la longanimité, la douceur, la confiance, la modestie, la continence,
la chasteté… »
Et toutes ses vertus pratiquées donnent à une âme
le bonheur intime, profond. Toutes ses vertus engendrent en une âme
la joie. Il suffit de les pratiquer un peu pour en faire l’expérience,
pour faire l’expérience des doux effets de ces vertus de
l’esprit sur une âme. Déjà, le philosophe
Aristote le disait dans son Ethique à Nicomaque : « Le
bonheur, c’est l’agir vertueux ».
Dès lors il est juste et vrai de
dire comme l’Introït nous le fait chanter : « Un jours
vaut mieux dans vos parvis que mille jours ailleurs…Quelles sont
aimables vos demeures… « Quam dilecta tabernacula tua ».
Quelles sont délectables les vertus « pratiquées
». Elles exercent un attrait sur nos âmes. Nos âmes
désirent ardemment, brûlent même de les pratiquer
pour en vivre et en connaître les délices. Oui l’âme
qui pratique la charité est joyeuse. L’amour de Dieu pratiqué
est la paix d’une âme, sa joie…
Le chant du Magnificat de Notre Dame l’exprime
au mieux. Croyons-le. Pratiquons-le : « Magnificat anima mea Dominum
et exultabit spiritus meus in Deo salutari meo ». « Elle
exulte de joie en Dieu mon Sauveur ».
Et ce fut aussi la même jubilation
en sa Cousine Elizabeth, pleine de la joie de la salutation de la Vierge
: « Ecce enim ut facta est vox salutationis tuae in auribus meis,
exultavit in gaudio infans in utéro meo ».
C’est la même idée que
nous exprime l’Introït de cette messe : « Quelles sont
aimables vos demeures, Seigneur…Mon âme a soupiré
jusqu’à défaillir…i.e. jusqu’à
l’extrême, après les parvis du Seigneur ».
« In atria Domini », « dans les demeures du Seigneur
». L’atrium est la salle principale de la maison romaine.
Oui vraiment « un jour vaut mieux
dans vos parvis, Seigneur, que mille jours ailleurs ».
C’est, du reste, tout le sens de
l’Evangile. Comment en effet ne pas croire à la vérité
de cette exclamation : « Un jour vaut mieux dans les parvis du
Seigneur que mille jours ailleurs… » quand on voit le soin
que prend le maître de maison de ceux qui savent se confier en
Lui, s’abandonner à Lui.
Ceux qui servent le monde, l’argent,
« Mammon » et cela exclusivement…ceux qui mettent
tout leur idéal dans l’argent, ne cessent d’être
préoccupés, inquiets, tourmentés de son produit,
de leur gain, de la fluctuation de la monnaie….L’exemple
d’Harpagon de l’Avare de Molière est, suffisant pour
nous faire connaître l’inquiétude de l’âme
de celui qui met tout son coeur en ce bien. On connaît assez la
scène 7 de l’Acte 4 de l’Avare pour se persuader
facilement de l’inquiétude que ressent et exprime une telle
âme. Souvenez-vous :
HARPAGON. (Il crie au voleur dès
le jardin, et vient sans chapeau.)
Au voleur ! Au voleur ! À l'assassin ! Au meurtrier ! Justice,
juste ciel ! Je suis perdu, je suis assassiné ! On m'a coupé
la gorge, on m'a dérobé mon argent ! Qui peut-ce être
? Qu'est-il devenu ? Où est-il ? Où se cache-t-il ? Que
ferai-je pour le trouver ? Où courir ? Où ne pas
Courir ? N'est-il point là ? N’est-il point ici ? Qui est-ce
? Arrête ! (il se prend lui-même le bras.) Rends-moi mon
argent, coquin !... Ah !c'est moi. Mon esprit est troublé, et
j'ignore où je suis, qui je suis, et ce que je fais. Hélas
! Mon pauvre argent, mon pauvre argent, mon cher ami, on m'a privé
de toi ! Et, puisque tu m'es enlevé, j'ai perdu mon support,
ma consolation, ma joie ; tout est fini pour moi, et je n'ai plus que
faire au monde ! Sans toi, il m'est impossible de vivre. C'en est fait,
je n'en puis plus, je me meurs, je suis mort, je suis enterré
! N'y a-t-il personne qui veuille me ressusciter me rendant mon cher
argent, ou en m'apprenant qui l'a pris ? Euh ! Que dites-vous ? Ce n'est
personne. Il faut, qui que ce soit qui ait fait le coup, qu'avec beaucoup
de soin on ait épié l'heure ; et l'on a choisi justement
le temps que je parlais à mon traître de fils. Sortons.
Je veux aller quérir la justice et faire donner la question à
toute ma maison : à servantes, à valets, à fils,
à fille, et à moi aussi. Que de gens assemblés
! Je ne jette mes regards sur personne qui ne me donne des soupçons,
et tout me semble mon voleur. Eh ! De quoi est-ce qu'on parle là
? De celui qui m'a dérobé ? Quel bruit fait-on là-haut
? Est-ce mon voleur qui y est ? De grâce, si l'on sait des nouvelles
de mon voleur,
je supplie que l'on m'en dise. N'est-il point caché là
parmi vous ? Ils me regardent tous et se mettent à rire. Vous
verrez qu'ils ont part, sans doute, au vol que l'on m'a fait. Allons,
vite, des commissaires, des archers, des prévôts, des juges,
des gênes, des potences et des bourreaux ! Je veux faire pendre
tout le monde ; et, si je ne retrouve mon argent, je me pendrai moi-même
après ! »
Que d’inquiétudes ! Que d’angoisses
! Que de soupçons ! Comment mieux exprimer les passions de celui
qui n’a de vie, de cœur, d’amour que pour le monde
et l’argent…
Alors que…Alors que l’Evangile
exprime, par contre, merveilleusement, la liberté, l’aisance,
la paix de celui qui met en Dieu son espérance.
« Oui je vous dis : « Ne soyez
pas inquiets pour votre vie, de ce que vous mangerez ; ni pour votre
corps de ce qui vous vêtira…La vie n’est-elle pas
plus que la nourriture et le corps plus que le vêtement…Regardez
les oiseaux du ciel…Il ne sèment ni ne moissonnent et ils
n’amassent pas dans les greniers et votre père céleste
les nourrit…. »
Oui vraiment « un jour vaut mieux
dans vos parvis que mille ans ailleurs »…Dans vos parvis…dans
votre demeure, dans votre maison, sous votre protection.
Et le reste du récit évangélique
donne même enseignement : « Ne valez-vous pas beaucoup plus
qu’eux ? Qui d’entre vous, n avec toute son intelligence,
peut ajouter une coudée à sa taille ? Et du vêtement
pourquoi vous inquiéter ? Considérez les lis des champs,
comme ils croissent. Ils ne travaillent pas et ne filent pas. Je vous
dis cependant que Salomon lui-même, dans toute sa gloire, ne fut
vêtu comme l’un d’eux. Si donc l’herbe des champs,
qui est aujourd’hui et que demain on jettera au feu, est ainsi
vêtue par Dieu, combien plus vous-mêmes ; hommes de peu
de foi ! Ne vous inquiétez donc pas en disant : qu’allons
nous manger ou qu’allons nous boire, ou de quoi nous vêtirons-nous
? Car c’est là tout ce que les païens recherchent.
Mais votre Père sait que vous avez besoin de tout cela. Cherchez
tout d’abord le Royaume de Dieu et sa justice et tout cela vous
sera donné par surcroît ».
Oui vraiment : « Un jour vaut mieux
dans vos parvis que mille jours ailleurs ».
Alors je comprends que l’Introït
puisse dire, tout au début : « Voyez, Regardez la face
de votre oint… », Vous êtes notre seul « protecteur
». « Aspice » : regardez, soyez tourné vers,
prenez en compte, considérez avec attention votre oint ».
« Respice » : regardez, retournez vous, arrêtez vos
regards, regardez favorablement votre « oint ». Ou encore
protégez, veillez sur…regardez…
Oui je comprends que mon âme puisse aspirer, soupirer même
à une telle protection dans les parvis du Seigneur.
Oui je comprends alors que l’Ecriture Sainte me fasse dire dans
le Graduel de cette messe : « Mieux vaut se confier dans le Seigneur
que se confier dans les hommes ». « Mieux vaut mettre son
espoir dans le Seigneur que de mettre son espoir dans les princes ».
Oui ! Il est v rai ce chant de l’Alleluia
: « Venez chantons joyeusement le Seigneur. « Venite Exultemus
Domino ». Acclamons Dieu, notre Sauveur ». « Jubilemus
Deo salutari nostro ».
« Videte quoniam suavis est Dominus ». « Voyez comme
est suave, bon le Seigneur ». C’est le chant de l’Offeroire.
B- Le centenaire de la naissance de Mgr Lefebvre.
En l’honneur de l’anniversaire
de la naissance de Mgr Lefebvre, son centième anniversaire, et
pour attirer votre attention et bien préparer le prochain rendez-vous
du 20 novembre 2005, à la Mutualité, nous vous donnons
à méditer cette lettre de Mgr Lefebvre de Noël 1977.
Cette lettre est particulièrement belle.
« A la veille de la fête de
la Nativité de NSJC
Bien chers membres de la Fraternité, Prêtres, Frères,
Sœurs, Oblates,
C’est tous les jours que je voudrais vous écrire pour vous
encourager à persévérer et à croître
dans votre sainte vocation. Car vous avez été appelés,
choisis par Notre Seigneur pour L’aimer, Le servir, Le faire connaître
autour de vous, répandre ses grâces de rédemption
par vos sacrifices, par vos prières, par le saint sacrifice de
la Messe, par l’accomplissement continuel de la sainte volonté
de Notre Seigneur.
Quel consolation, quel soutien dans notre vie d’ici-bas de reconnaître
et d’étendre la Royauté de notre bien aimé
Sauveur. Tandis que cette Royauté est aujourd’hui plus
que jamais diminuée, réduite, méconnue, méprisée
même par ceux qui ont pour charge de la proclamer, c’est
une grâce insigne que d’être, en ce monde pervers,
l’écho de la voix de l’Archange, des Anges, des Apôtres,
des Martyrs, des Confesseurs : « genuit puerpera Regem cui nomen
aeternum », une Vierge « a enfanté le Roi dont le
nom est éternel ».
Toute notre Fraternité est au service de ce Roi, elle n’en
connaît pas d’autre, elle n’a de pensée, d’amour,
d’activité que pour Lui, pour son Règne, sa gloire
et l’achèvement de son œuvre rédemptrice sur
la terre.
C’est aussi ce qui fonde son attitude au milieu des événements
qui ébranlent l’Eglise, depuis vingt ans spécialement.
Née dans cette période de confusion, de destruction des
réalités les plus sacrées, elle ne pouvait qu’être
persécutée par les démolisseurs de l’Eglise
; tout ce qui a été entrepris contre elle a eu pour motif
son refus d’accepter la diminution de la Royauté de Notre
Seigneur Jésus Christ. Cette Royauté s’exprime avec
splendeur dans la liturgie traditionnelle, elle s’affirme dans
la Théologie et dans toutes les sciences sacrées, dans
le Droit public de l’Eglise.
Mais elle offusque et gêne les Princes de ce monde, parce qu’elle
met des limites à leur licence, parce qu’elle chasse les
ténèbres des erreurs et force à la loi d’amour
de Dieu et du prochain ; par un mystérieux aveuglement des hommes
d’Eglise occupants les plus hautes fonctions ont eu l’inconcevable
dessein d’accepter le fruit défendu proposé par
l’homme moderne : reduire l’Eglise au droit commun et ainsi
découronner Notre Seigneur Jésus-Christ.
Accepter la suppression de la Fraternité, du Séminaire,
ne plus conférer les ordinations, c’était coopérer
à ce dessein diabolique. C’était accepter de détruire
un rameau de l’Eglise, légitimement inséré
et en pleine vigueur, donnant d’excellents fruits. Nous ne pouvions
que refuser qu’on nous applique les mauvaises réformes
qui ont desséché la plupart des rameaux de l’Eglise
devenus stériles.
Obéir à ces ordres, c’était désobéir
à notre foi dans la royauté de Jésus et de Marie,
c’était désobéir à la foi de l’Eglise,
foi immuable, foi définitive. C’est donc pour demeurer
dans l’obéissance qu’il nous fallait rejeter ces
ordres arbitraires et inspirés par le mauvais esprit.
Certes, ce n’est pas sans stupéfaction
ni douleur que nous constatons ces faits, mais pour demeurer dans la
foi, pour sauver l’honneur de notre seul Seigneur et Roi Jésus-Christ,
fils de Dieu, Dieu éternel, nous ne pouvons pas nous préoccuper
de nos sentiments ; nous n’en avons plus qu’un, celui de
la loyauté et de la fidélité, quoi qu’il
arrive, quoi qu’il advienne.
C’est la seule voie qui nous assure les bénédictions
de notre Sauveur et de sa sainte Mère. C’est parce que
nous sommes des zélateurs du Règne de notre Roi que nous
gardons fidèlement tout ce qui a été suscité
par l’Esprit-Saint dans l’Eglise pour exprimer et réaliser
ce Règne. Comment ce que l’Eglise a exprimé et fait
au cours de vingt siècles pourrait n’être plus vrai
ni efficace aujourd’hui, quand il s’agit de réalités
éternelles ?
Voilà ce qui donne à l’œuvre de la Fraternité
une assise immuable. Cette solidité elle la puise dans l’Eglise,
qui la trouve elle-même dans le seul fondement qui soit éternel
: NSJC.
Chers membres de la Fraternité, ne cherchez pas autre chose dans
la Fraternité et dans sa ligne de conduite. Toutes les critiques,
de quelque côté qu’elles viennent ne peuvent que
se briser contre ce fondement qui a toujours été celui
de l’Eglise.
Ces quelques considérations vous étaient sans doute déjà
connues, mais, hélas, les difficultés qui s’élèvent
dans les milieux traditionalistes m’invitaient à réaffirmer
nos principes clairement.
Les principes répondent implicitement aux questions oiseuses
qui sont souvent posées dans ces milieux : que penser de la messe
nouvelle ? que pensez du Pape ?
La messe nouvelle ne répondant pas plus d’une manière
évidente à la divinité et à la royauté
de Notre Seigneur, adoptant une atmosphère empestée par
les principes protestants, il faut tout faire pour s’en abstenir
et favoriser la vraie messe catholique pour le rite latin. Mais cela
n’implique pas que cette messe soit intrinsèquement hérétique
et invalide. L’assistance à cette messe ne devrait être
qu’exceptionnelle et sans participation active. S’exposer
à diminuer sa foi et même à la perdre en assistant
fréquemment ou régulièrement à cette messe
ne peut se faire sans faute.
Il est certain que le pape est imbu des principes libéraux. C’est
la cardinal Daniélou lui-même qui l’affirme, et son
autre ami et confident Jean Guitton. Et il semble bien que cette déplorable
influence suffit à expliquer les malheureuses incohérences
et contradictions du pape et de son entourage. Si ce fait certain nous
interdit de le suivre quand il agit ou parle en conformité avec
ces erreurs, cela ne doit pas nous conduire à l’irrespect
et au mépris, ne serait-ce qu’en considération du
Siège de Pierre qu’il occupe. Nous devons prier pour lui
afin qu’il affirme uniquement la Vérité et qu’il
travaille exclusivement à l’établissement du Règne
de Notre Seigneur.
Evitons les prises de position extrêmes qui ne correspondent plus
à la réalité mais à des a priori, qui troublent
inutilement les consciences sans les éclairer. Evitons le zèle
amer que condamne sain t Pie X dans sa première encyclique :
« Pour que ce zèle à enseigner produise les fruits
qu'on en espère et serve à former en tous le Christ, rien
n'est plus efficace que la charité; gravons cela fortement dans
notre mémoire, ô Vénérables Frères,
"car le Seigneur n'est pas dans la commotion" (36). En vain
espérerait-on attirer les âmes à Dieu par un zèle
empreint d'amertume; reprocher durement les erreurs et reprendre les
vices avec âpreté cause très souvent plus de dommage
que de profit. Il est vrai que l'Apôtre, exhortant Timothée,
lui disait : "Accuse, supplie, reprends, mais il ajoutait : en
toute patience" (37). Rien de plus conforme aux exemples que Jésus-Christ
nous a laissés. C'est lui qui nous adresse cette invitation :
"Venez à moi, vous tous qui souffrez et qui gémissez
sous le fardeau, et je vous soulagerai" (38). Et, dans sa pensée,
ces infirmes et ces opprimés n'étaient autres que les
esclaves de l'erreur et du péché. Quelle mansuétude,
en effet, dans ce divin Maître ! Quelle tendresse, quelle compassion
envers tous les malheureux ! »
C’est pourquoi il nous est impossible d’approuver l’attitude
de ceux qui n’ont que des paroles amères pour leur prochain,
qui le jugent témérairement et sèment ainsi la
division entre ceux qui soutiennent le même combat. .
Il est également vrai que nous ne pouvons comprendre ceux qui
énervent et dissolvent les énergies morales et spirituelles
en minimisant l’importance de la prière, et de la vraie
dévotion à la Très Sainte Vierge, en étant
faibles dans le combat spirituel, toujours prêts à des
compromis préférant plaire aux hommes plutôt qu’à
Dieu. Ceux-là ne sont pas les héritiers des martyrs, ils
préfèrent sacrifier la vérité et notre Seigneur
lui-même plutôt que de déplaire aux persécuteurs,
surtout si ces persécuteurs sont les dignitaires de l’Eglise.
Combien je souhaite que la Fraternité ne se laisse tenter ni
par la première ni par la seconde tendance. Soyons catholiques,
vrais chrétiens, imitateurs de Notre Seigneur qui a répandu
son sang pour la gloire de son Père et pour le salut de ses frères.
Gardons nos âmes dans la patience, dans la douceur, l’humilité,
et aussi dans la force et la fermeté de la foi.
Nos maisons, nos prieurés et surtout nos séminaires doivent
respirer cette atmosphère de charité et de dévotion
envers notre divin Roi, d’entente fraternelle, d’accueil
loyal et cordial ».
Tels sont les principes qui animent depuis toujours la Fraternité
au milieu des vicissitudes de cette époque douloureuse que traverse
l’Eglise. Et après avoir données encore pour les
prêtres quelques conseils plus particuliers et personnels, il
concluait cette lettre : « Dans la mesure où nous ne serons
que dispensateurs de la doctrine de l’Eglise et de ses mystères
comme l’ont fait pendant vingt siècles tous les évêques
et prêtres fidèles à l’Eglise, dans cette
mesure notre apostolat sera estimé et réclamé par
les âmes droites et pures, et toutes les attaques se briseront
sur cette fidélité, parce qu’elle est la fidélité
de l’Eglise.
Que saint Pie X veille sur notre Fraternité ».
+ Mgr Marcel Lefebvre.
Vous aurez remarqué, je pense, la force de quelques belles expressions,
celles-là, en particulier :
« Accepter la suppression de la Fraternité, du Séminaire,
ne plus conférer les ordinations, c’était coopérer
à ce dessein diabolique. C’était accepter de détruire
un rameau de l’Eglise, légitimement inséré
et en pleine vigueur, donnant d’excellents fruits. Nous ne pouvions
que refuser qu’on nous applique les mauvaises réformes
qui ont desséché la plupart des rameaux de l’Eglise
devenus stériles.
Obéir à ces ordres, c’était désobéir
à notre foi dans la royauté de Jésus et de Marie,
c’était désobéir à la foi de l’Eglise,
foi immuable, foi définitive. C’est donc pour demeurer
dans l’obéissance qu’il nous fallait rejeter ces
ordres arbitraires et inspirés par le mauvais esprit. »
J’aime particulièrement cette pensée.
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