A- Homélie du Dimanche .
" Beati immaculati in via qui ambulant in lege
Domini ".
Bienheureux ceux qui sont immaculés et qui marchent ainsi dans
la loi du Seigneur, selon la loi du Seigneur ".
Et cette loi quelle est-elle ? La réponse est immédiate.
C'est la loi de la miséricorde. C'est clairement dit toujours
dans l'Introït : " Fac cum servo tuo secundum misericordiam
tuam ". " Agis avec ton peuple selon ta miséricorde
", ou encore " sois pour ton peuple selon ta miséricorde
". Le verbe " facere " est un verbe au sens riche et
divers. Il peut vouloir aussi bien dire : " agir " - on dira
en ce sens " facere amice ", " agir en ami " - que
" être ", être pour ou contre quelqu'un ou quelque
chose.
Voilà le thème de cette messe du 17e dimanche
après la Pentecôte.
C'est la miséricorde qui est la loi du Seigneur,
la grande loi, son mode d'être à lui, sa manière
d'agir. La charité est sa loi, parce qu'elle d'abord son essence.
Elle est sa loi avant que d'être la notre. Aussi est-il heureux
le peuple qui a pour Dieu, un tel Seigneur. " Beati gens cuius
est Dominus Deus ". C'est le chant du Graduel.
Essayons de méditer les uvres de cette
miséricorde qui sont explicitées dans les textes de cette
messe.
Oui ! Bienheureux le peuple que le Seigneur a choisi,
dans sa bonté, pour être son bien, sa propriété,
son héritage. "
quem elegit Dominus in hereditate
sibi ". C'est encore dans le Graduel.
Oui ! Bienheureux ce peuple, parce que Dieu en prend
soin, selon sa miséricorde, parce qu'il agit avec lui en toute
miséricorde. Il le gouverne, le guide, le conduit non point avec
rigidité et rigueur mais bien selon sa miséricorde.
Oui ! Heureux est-il ce peuple parce qu'il est conduit
selon ce mode fait de bonté, de miséricorde, de paternité.
Oui ! Heureux ce peuple parce qu'il est engendré
par cette paternité divine faite d'unité, faite de puissance.
Faite d'unité en raison d'un seul baptême,
animé d'une même et unique foi, d' une même et unique
espérance. C'est l'enseignement de l'Epître.
Oui ! Paternité divine, une. Génération
spirituelle, une. Une vie nouvelle, une, fruit du seul et même
baptême
qui est l'uvre de miséricorde par
excellence, en tant qu'il communique le bien ineffable de Dieu, la participation
à sa propre nature. uvre baptismale, uvre par excellence
de la miséricorde. Ce n'est point selon nos mérites que
nous avons été faits enfants de Dieu, mais par pure miséricorde,
par pur don gratuit. Saint Paul est formel dans cet enseignement. Citons
son Epître aux Ephésiens : " Mais Dieu, qui est riche
en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a
aimés, et alors que nous étions morts par nos offenses,
nous a rendu vivants avec le Christ. C'est par grâce que vous
êtes sauvés ; il nous a ressuscité ensemble et nous
a fait asseoir ensemble dans les cieux en Jésus-Christ, afin
de montrer dans les siècles à venir l'infinie richesse
de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus-Christ.
Car c'est par la grâce que vous êtes sauvés, par
le moyen de la foi ; et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu
; ce n'est point par les uvres, afin que nul ne se glorifie. ".
(Eph 2 4-7)
Heureux ce peuple qui n'a qu'un seul Seigneur, "
unus Dominus ", et un seul Maître et qui vit, ainsi dans
cette unité, unité qui est aussi une uvre de miséricorde.
Rien n'est plus heureux pour un peuple que cette unité de gouvernement,
cette unité de Seigneurie. Ainsi ce Dieu de miséricorde
nous préserve de la division qui est le plus grand des malheurs
et qui est trop souvent la loi des humains. Les humains cultivent, du
reste, toute division. Les régimes politiques conçus par
les humains fomentent même la division, l'engendrent même,
la veulent
Le régime des partis
le régime à
mille têtes
Le régime de la dialectique voulue, suscitée,
comme si le bien, le vrai pouvait sortir de la seule confrontation voulue
pour elle-même. Tout cela engendre la confusion, la discorde,
l'opposition, les oppositions.
Oui ! Heureux le peuple qui n'a qu'un Seigneur et Maître,
unus Dominus, un seul Pasteur.
Heureux ce peuple parce qu'il n'écoute qu'une
voix, sa voix, une seule voix
la
Voix du Bon Pasteur.
Heureux ce peuple parce ce Bon Pasteur marche devant
lui. Il est le chef bien aimé
dont la voix est aimée.
Il est le " Verbum ", la parole, la Révélation
de Dieu, l'unique Révélateur.
Heureux ce peuple parce que ce bon Pasteur est non seulement
le guide, le chef. Il est la porte même : " Je suis la porte
des brebis ", dit-il lui-même, un jour dans cette belle parabole
du Bon Pasteur.
Il est la porte du salut, uvre éminente de miséricorde
: " Je suis la porte. Qui entrera par moi, sera sauvé ".
Heureux ce peuple qui " en Lui " trouve sa
pâture. " Il entrera et sortira et trouvera sa pâture
".
Heureux ce peuple qui, par Lui, est libre. " Il
entrera et sortira " : cela exprime la liberté des enfants
de Dieu. Liberté des enfants de Dieu qui est encore une uvre
de miséricorde.
Heureux ce peuple qui a un tel pasteur. Quelle miséricorde
de le lui avoir donné ! " Moi, je suis venu pour que les
brebis aient la vie et l'aient en abondance " (Jn 10 10)
Heureux ce peuple qui a un tel pasteur qui a su donner
sa vie pour ses brebis. " Le Bon Pasteur donne sa vie pour ses
brebis ". Don de sa vie, Oeuvre de miséricorde.
Heureux ce peuple qui a un tel Pasteur. Il est sous
bonne garde, une garde fidèle, courageuse, déterminée,
vaillante, constante, forte. Il n'est pas comme le " berger à
gages ".. " Le berger à gages qui n'est pas le pasteur
et à qui n'appartiennent pas les brebis, voit-il venir le loup,
il laisse là les brebis et il se sauve et le loup les emporte
et les disperse ".
Le Bon Pasteur, lui, n'agit pas comme cela, car les brebis lui appartiennent.
Il les a payé assez cher, du reste
de son propre sang, de
son sang versé, un soir, sur le Golgotha
Et durant sa vie,
le Bon Pasteur, il le dit lui-même, " a veillé sur
chacune " : " J'ai veillé sur eux et aucun d'eux ne
s'est perdu sauf le fils de perdition pour que l'Ecriture s'accomplisse
".
Heureux ce peuple avec un tel Pasteur, avec un seul
Pasteur. " Il y aura un seul troupeau et un seul Pasteur ",
un seul troupeau parce qu'un seul pasteur, un seul troupeau qui écoute
la voix du seul Pasteur. " Les brebis écoutent sa voix ".
Les brebis, à lui, il les appelle une à une et les fait
sortir
parce qu'elles connaissent sa voix " Il a le souci
des brebis parce qu'il est miséricordieux. Il est bon. Elles
sont son bien, son héritage.
Heureux les " gens " qui ont pour Dieu le
Seigneur ".
Heureux le peuple que le Seigneur a choisi pour son
héritage, " in hereditatem sibi ".
Oui !Heureux ce peuple avec un tel Pasteur, bon et miséricordieux.
Mais tout également puissant et divin, tout à
la fois.
De sa parole, il a établi le firmament, nous
fait chanter le Graduel. " Verbo Domini caeli firmati sunt ".
Par sa parole, il fit le ciel et la terre et par le souffle de sa bouche,
toutes les puissances célestes. " Spiritu oris eius, omnis
virtus eorum ", " par le souffle de sa bouche toutes les puissances
célestes ". Il est le Tout Puissant. Et c'est ainsi qu'Il
est " super omnes ", nous dit Saint Paul dans l'épître
de ce dimanche. Il est au dessus de tout. Il est " per omnia ",
à travers tous et Il est " in omnibus nobis ", "
Il est en nous tous ".
Heureux ce peuple qui vit sous une telle puissance.
Il est bon miséricordieux . Il est tout puissant. La miséricorde,
du reste, est un signe de puissance. La rudesse, un signe de faiblesse.
Il est aussi divin. C'est ce que l'Evangile veut nous
apprendre dans ce dialogue fameux entre Notre Seigneur et les pharisiens.
" Quelle est votre avis sur le Messie. De qui est-il le fils "
? Ils lui répondirent : " de David ". Il leur dit :
" Comment se fait-il donc que David, sous l'inspiration, l'appelle
Seigneur quand il dit : " le Seigneur a dit à mon Seigneur
: Siège à ma droite jusqu'à ce que j'aie placé
tes ennemis comme un escabeau sous tes pieds ". Si David l'appelle
Seigneur, comment donc est-il son fils ? "
La seule explication est l'affirmation de la double nature du Messie,
il est à la fois Dieu et Homme.
Ainsi parce que ce seul Seigneur est tel : bon, miséricordieux,
puissant parce que divin, je chanterai, comme Saint Paul nous y invite
encore en ce dimanche, sa bénédiction : " Qui est
benedictus in saecula saeculorum. Qu'il soit béni à jamais.
Et si cette unité est le fruit de son gouvernement,
de son " pastorat ", " unus Dominus ", elle est
aussi le fruit de son enseignement que me communique la foi. "
Una fides ". Cet enseignement, son enseignement est un parce qu'il
porte sur Dieu qui est un et sur Jésus-Christ qui n'est pas divisé
non plus. Et qui est l'envoyé du Père, qui est l'unique
Révélateur du Père. Révélation qu'Il
a donné aux seuls Apôtres qui ont tout enseigné
et dans la Tradition orale et dans la Tradition écrite, qui ont
tout transmis. " Ce qui était dès le commencement,
nous dit Saint Jean, l'Apôtre bien aimé, ce que nous avons
entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé,
ce que nos mains ont touché du Verbe de Vie, Car la vie s'est
manifestée, Nous l'avons vue, nous en rendons témoignage
et nous vous annonçons cette vie éternelle qui était
auprès du Père et qui nous est apparue.. Ce que nous avons
vu et entendu, nous vous l'annonçons afin que vous aussi soyez
en communion avec nous. Quant à notre communion, elle est avec
le Père et avec son Fils Jésus-Christ. Tout ceci nous
vous l'annonçons pour que votre joie soit complète ".
Ainsi sous ce gouvernement bon et puissant, à
la lumière de cette révélation toute divine, transmise
fidèlement par les Apôtres, gardée dans l'unité
par l'Eglise, nous ne formons qu'un seul corps, nous n'avons qu'un seul
esprit, nous partageons qu'une même espérance, même
espérance qui a sa source en la même miséricorde.
Ecoutons Saint Pierre dans sa Ier Epître : " Béni
soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus-Christ qui,
dans sa grande miséricorde nous a régénérés
par la Résurrection de Jésus-Christ d'entre les morts
pour une vivante espérance, pour un héritage exempt de
corruption, de souillure, de flétrissure et qui vous est réservé
dans les cieux, à vous qui, par la foi, la puissance de Dieu,
garde pour le salut prêt à se révéler au
dernier moment ".
Dès lors, animés d'une même foi,
d'une même espérance, fondés sur une même
Seigneurie qui est animée d'une telle bonté miséricordieuse,
agissons de même, dans la bonté et la miséricorde.
B- En l'honneur de la fête de l'Exaltation de
la sainte Croix.
Cette très belle méditation de saint Bonaventure
Saint Bonaventure
Ordre des Frères Mineurs, Cardinal-Évêque d'Albano
Louanges en l'Honneur de la Sainte Croix
Souvenez-vous de la Croix sainte, ô vous qui menez
une vie parfaite, trouvez-y en tout temps votre bonheur.
Souvenez-vous de la Croix sainte ; qu'elle soit l'objet de vos méditations
sans jamais vous en lasser.
Demeurez sur la Croix avec Jésus, votre Maître, tant que
vous êtes en cette vie, sans jamais hésiter un instant.
Ne ralentissez point votre course, ne vous laissez point aller à
la tiédeur, mais, au contraire, croissez en l'amour de la Croix,
et que votre coeur s'embrase de son désir.
Aimez la Croix : c'est la lumière du monde, et Jésus-Christ
sera votre guide durant les siècles éternels.
Environnez votre corps de la Croix; unissez-le à la Croix d'une
manière inséparable, et que votre main en imprime partout
la trace.
Que votre coeur soit sur la Croix; que la Croix soit en votre coeur;
qu'elle le trouve sans aucune tache et qu'elle y fasse régner
la paix.
Que votre langue devienne une croix ; qu'elle enseigne et célèbre
la Croix sans jamais se fatiguer.
Que la Croix soit en votre coeur, qu'elle soit en votre bouche ; qu'elle
vous fasse goûter sa douceur et vous pénètre de
sa suavité.
Que la Croix règne sur vos membres, et qu'en vous l'homme ne
possède rien où son empire ne soit établi.
Que la Croix absorbe tout votre coeur; qu'il soit ravi en elle par un
incendie d'amour.
Que les combats de la chair disparaissent ; que votre âme soit
crucifiée tout entière dans les délices de l'esprit.
Portez un amour spécial, rendez un hommage singulier à
la Croix d'où vous vient le salut. Efforcez-vous de l'aimer de
toute l'ardeur de votre âme, de toute la puissance de vos forces.
Que cette Croix glorieuse soit l'objet de vos études ; faites-en
le lieu de votre demeure avec une joie sans limites.
Avec Jésus, soyez attaché à la Croix, afin que
vous puissiez ainsi parvenir avec lui dans les Cieux.
Cherchez la Croix, cherchez les clous, cherchez les mains et les pieds
qu'ils ont transpercés, cherchez l'ouverture du côté
de Jésus.
Et là, réjouissez-vous; là, faites entendre sans
réserve et autant qu'il sera en vous les accents d'une allégresse
et d'une louange suprêmes.
Voici une alliance qui doit être inébranlable : que la
Croix précède chacun de vos actes, et ils vous seront
toujours profitables.
La Croix est un remède excellent contre les traits de démon,
un remède vraiment salutaire.
Soyez tout en la Croix de Jésus, avec un dévouement sans
limites, avec des accents de bonheur.
La Croix défend le serviteur de Dieu; elle le prend par la main
et lui montre la voie qui conduit à la vie.
Lorsque la tentation et les chagrins viendront fondre sur vous ; lorsque
vous serez abandonné, presque vaincu, et en proie à toutes
les angoisses, oh ! alors, empressez-vous, hâtez-vous avec un
soin pieux de fortifier votre front du signe de la croix.
Durant votre repos, au milieu du travail, dans l'allégresse et
dans les larmes, dans la douleur et dans la joie; que vous alliez ,
que vous veniez; dans les consolations et les peines, que la Croix soit
en votre coeur.
Au milieu des tribulations de tout genre, dans l'affliction et les calamités,
la Croix est un remède souverain.
Dans les peines et les tourments , la Croix est la douceur qui récrée
l'âme pieuse ; elle est son refuge assuré.
La Croix est la porte du ciel. Les saints ont mis en elle leur confiance,
et ils ont été partout vainqueurs.
La Croix est la médecine du monde ; c'est par elle que la bonté
divine a opéré des merveilles.
La Croix est le salut des âmes; elle est la lumière véritable
et brillante, le baume qui réjouit les coeurs.
La Croix est la vie des bienheureux ; elle est le trésor des
parfaits ; elle est leur gloire et leur félicité.
La Croix est le miroir de la vertu; elle est le guide glorieux du salut
et toute l'espérance des fidèles.
La Croix est l'étendard d'honneur des élus ; elle est
leur consolation et tout leur désir.
La Croix est un vaisseau; elle est un port; elle est un jardin de délices,
où tout fleurit avec éclat.
La Croix est une armure impénétrable ; elle est un rempart
assuré contre lequel le démon voit se briser ses efforts.
La Croix est un arbre magnifique, arrosé par le sang de Jésus-Christ,
et abondant en fruits de toute espèce.
C'est par là que l'âme s'arrache de l'abîme, qu'elle
se nourrit des célestes aliments dont jouissent les habitants
de la patrie.
Oh! quel sera votre bonheur si, dès maintenant et durant votre
vie mortelle, vous dirigez toutes vos pensées vers la Croix !
Oui ! vous serez heureux sans fin, vous qui courez à la recherche
de la Croix sainte, si la persévérance couronne vos efforts.
Cherchez donc la Croix; portez la Croix; contemplez la Croix de Jésus-Christ
jusqu'à languir d'amour.
Regardez la Croix avec une foi profonde; mettez en elle une confiance
sans limites, tant que vous demeurerez en cette vie.
Faites de la Croix l'occupation de vos pensées ; efforcez-vous
de lui plaire en votre âme et de la porter en votre coeur.
C'est un travail salutaire de consacrer à la Croix son coeur,
sa bouche et ses oeuvres.
Sept fois, durant le jour, souvenez-vous, mon frère bien-aimé,
de la Passion du Seigneur.
C'est par elle que nous avons été délivrés
; par elle que la vie éternelle nous est donnée, et que
nous jouissons de la céleste lumière.
Si vous l'aimez, si vous la vénérez, offrez-lui vos hommages
avec un soin empressé à des moments déterminés.
Célébrez-la au milieu de la nuit, au lever du soleil,
à la troisième, à la sixième et à
la neuvième heure du jour ; célébrez-la le soir
et avant votre sommeil.
Célébrez-la assis, debout, couché, dans le silence
et dans vos entretiens, et lorsque, fatigué, vous goûtez
les douceurs du repos.
Cherchez Jésus en qui se trouve votre espérance ; portez-le,
crucifié en votre coeur, en quelque lieu que vous soyez. Reposez
avec empressement votre esprit sur Jésus-Christ souffrant, et
compatissez à ses douleurs.
O chrétien! pleurez la mort de Jésus ; pleurez-la le soir
et le matin, et que votre bonheur réside en vos larmes.
Combien le Roi des cieux s'est humilié ! Combien il s'est abaissé
afin de sauver le monde !
Il a enduré et la soif et la faim ; il a vécu dans la
misère et dans les privations, et il est mort. sur un gibet.
Souvenez-vous de sa pauvreté, de ses abaissements profonds et
de son effroyable supplice.
Si vous voulez faire usage de votre raison, rappelez-vous ce supplice,
rappelez vous et l'absinthe et le fiel.
Lorsque celui qui est infini fut conduit et suspendu à la Croix,
en ce moment ses Disciples prirent la fuite.
On perça ses pieds et ses mains ; on l'abreuva de vinaigre; et
il était le Roi suprême des siècles!
Ses yeux, qui répandent le bonheur, se sont obscurcis sur la
Croix, et son visage s'est couvert d'une pilleur effrayante.
Aucune beauté ne demeura en son corps nu et dépouillé,
et tout éclat disparut.
C'est à cause des péchés des hommes que sa chair
fut déchirée au milieu des horreurs de la flagellation.
Ses membres se roidirent au milieu de tourments effroyables et des blessures
profondes dont ils furent couverts.
En proie à des douleurs cruelles, sur la Croix il pleura et il
rendit l'esprit.
Pleurons aussi et soupirons ; pleurons du fond de notre coeur, comme
on pleure sur un fils unique.
O vous qui entendez ces choses, gémissez amèrement et
mêlez à ces douleurs les amertumes et la tristesse de votre
âme.
Livrez votre corps aux angoisses, remplissez votre coeur d'affliction
; que votre esprit se brise et que votre main se repose sur les plaies
sacrées de Jésus expirant.
Contemplez l'homme de douleurs; il est le dernier des hommes, et, dans
le supplice, il demeure inébranlable.
Qu'il nous soit doux, qu'il nous soit cher de mourir
avec lui sur la Croix et de partager l'ignominie de ses tourments.
Lorsque vous êtes plongé dans l'affliction, lorsque la
désolation vous assiège et que, vaincu, vous vous sentez
presque défaillir ;
Alors pensez aux douleurs de Jésus ; rappelez-vous ses peines
et ses chagrins cruels, les crachats dont il fut couvert, les injures
dont il fut l'objet.
O bon frère ! quoique vous fassiez, contemplez les blessures
de Jésus crucifié et soyez-lui toujours compatissant.
Qu'en tout temps ces plaies soient pour votre âme comme des mets
délicieux; jouissez-en avec bonheur.
O Jésus crucifié! rendez-moi fort afin que, durant ma
vie entière, je me plaise à pleurer votre mort.
Je veux être avec vous couvert de blessures ; je désire,
dans l'ardeur de mon âme, vous embrasser sur la Croix.
Répandez en moi la douleur, comme la rosée du matin, afin
que je pleure sur vous, ô Jésus mon rédempteur,
afin que vous renaissiez en mon coeur.
Non, vous ne me cacherez pas ces cicatrices bienheureuses, ces cicatrices
qui sont à vous à tant de titres; mais vous me les montrerez
avec amour existantes en vous-même.
Que tout ce que je viens d'exprimer soit à l'honneur de Jésus
crucifié; qu'il soit à sa louange et à sa gloire
;
Afin que ce roi triomphant des cieux daigne m'accorder le pardon des
fautes dont mon coeur est souillé.
Ainsi soit-il
source: http://www.abbaye-saint-benoit.ch/bibliotheque.htm
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