A- Une page de spiritualité…
La Sainte Providence m’a permis de faire la connaissance,
lors de mon exil de la FSSPX, qui dure toujours mais qui prendra peut-être
fin un jour, je ne sais, Dieu le sait…, je reste très ouvert…de
faire la connaissance, dis-je, d’un père, appelé
en religion, le père Jean du Sacré Cœur. Il était
prêtre du diocèse de Dijon. Polytechnicien, il a fait ses
études à Saint Sulpice, dans les années 1840 1845.
Dès son ordination, il fut pris par son évêque de
Dijon pour lui servir de secrétaire. Il lui rendit de grands
services. Son évêque lui était très attaché.
Il n’entendait pas le perdre. Mais la Providence en a décidé
autrement…Et après de nombreuses années de services,
peut-être bien une dizained’année, il dut le laisser
partir, à contre cœur. Il voulait rejoindre une jeune communauté
de religieuses qui venait de se créer à Marseille. C’était
du temps de Mgr de Mazenod. Là aussi, il rendit de grand service
à la jeune fondatrice et la communauté débutante.
Il en fut l’aumônier toute sa vie. Il en rédigea
les règles, leurs coutumiers avec grande sagesse. Il leur laissa
toute une spiritualité. Elles possèdent de lui tous ses
écrits, ses sermons, ses commentaires de l’Ecriture Sainte,
de la Somme de Saint Thomas. Il était, de fait, très thomiste.
Tous ces écrits constituent un vrai trésor que la communauté
garde jalousement. Les religieuses, aujourd’hui encore, en font
pieuse lecture… ce qui les gardent dans une belle unité
de cœur, d’idéal, animées d’une belle
spiritualité toute centrée sur la dévotion au Sacré
Cœur de Jésus. Il n’est pas étonnant qu’elles
aient gardé la messe traditionnelle… Je ne dois pas donner
plus de précision…La mère prieure n’aime pas
la « publicité ». Il est vrai que le bien ne fait
pas de bruit, comme le bruit ne fait pas de bien.
La mère prieure, toutefois, à ma demande,
m’a adressé quelques petites « bribes » de
l’enseignement de ce bon père Jean, mort comme un saint…C’est
qu’il a vécu, toute sa vie, comme un saint, dans un esprit
de pénitence étonnant, admirable. J’ai visité
sa cellule de « moine », ses instruments de pénitence…Mon
Dieu ! Il y a, en ce monde, de saintes âmes cachées, inconnues…
qui vivent à la seule gloire de Dieu. Et parmi ses petites «
bribes », ces petites miettes de pain tombées de la table
des religieuses, j’ai gardé un petit livré intitulé
: « Petit Manuel des associés des Victimes du Sacré
Cœur ». Il fait quelques trente deux pages. C’est peu
! Et encore dans un format étonnamment petit, 6 cm sur 10cm…
Vraiment rien… Mais si le livre est petit, la sagesse qu’il
exprime est grande. Je la pratique mal mais elle a gagné toutefois
mon cœur et mon intelligence. J’y vois exprimé un
très bel idéal sacerdotal. Tout proche de celui que nous
enseignait Mgr Lefebvre.
C’est cette sagesse, aujourd’hui, que je
voudrais vous proposer, pour le bien de votre âme. Si cette spiritualité
vous plait, je pourrais vous en dire plus… avec le consentement
de la mère prieure.
Je vous donnerai ce « trésor » en
deux fois…pour ne pas trop allonger.
Voici les treize premières pages.
Je les ferai suivre d’une interview intéressante
du prieur de l’ « Opus Dei ».
Je rêve tous les jours de notre « normalisation
» dans l’Eglise. Vous imaginez l’autorité que
pourrait avoir notre petit institut au cœur de l’Eglise…
Mais on va se faire « avoir »… ?
Il suffit de prendre les précautions nécessaires, celles
que Mgr Lefebvre lui-même avait prévues dans le règlement
qu’il avait remis dans les mains du cardinal Gagnon, lors de sa
visite canonique, règlement daté du 21 novembre 1988.
Je me permets de vous y renvoyer. Voyez la rubrique : les Nouvelles
de Chrétienté du 15 septembre 2005 sur le site d’Item.
Mais à quoi serviraient nos évêques
?
Ils serviraient à protéger la tradition et toutes ses
composantes.
La situation de l’Eglise, quant à son clergé,
du moins en Europe, « exige » cette normalisation. Et si
nous apprenions aussi à avoir un peu pitié de la situation
de l’Eglise. Au lieu de vouloir sans cesse la « morigéner
», si nous nous penchions un peu sur le « patient »
laissé à demi-mort sur le bord de la route… pour
lui porter quelques soulagements… Ne serions-nous pas plus utiles…Je
me laisse aller… Mais là ou est ton trésor, là
aussi est ton cœur…
Revenons à mon bon père Jean et à son texte…
« Notre Seigneur Jésus-Christ, bien qu’ayant
satisfait avec surabondance à la justice divine par la consommation
de son sacrifice, veut cependant le perpétuer dans son Eglise.
Son immolation se continue donc et se renouvelle d’une façon
non sanglante sur l’autel. Mais en outre, à son exemple
et en son union, les fidèles qui sont ses membres s’immolent
par la donation d’eux-mêmes, par la mortification du vieil
homme, par la souffrance, par une vie surnaturelle et transformée,
et perpétuent ainsi sa vie et sa passion. C’est là
ce qu’à un degré plus ou moins étendu, ce
divin Maître exige de tous ceux qui prétendent profiter
de son sacrifice : ils doivent participer à sa croix, s’ils
veulent participer à sa gloire ; et le mystère de son
crucifiement doit s’accomplir dans son corps et dans ses membres
mystiques comme il s’est accompli dans son corps et dans ses membres
naturels.
Saint Paul exprimait cette doctrine, lorsqu’il
disait : « J’accomplis en ma chair ce qui manque, non à
l’efficacité, mais à la plénitude des souffrances
de Jésus-Christ et à leur extension dans ses membres ».
Ainsi se donner à Jésus-Christ pour perpétuer son
sacrifice, pour être avec lui une victime immolée à
la gloire de Dieu et au salut des âmes, ce n’est point une
prétention étrange, mais une dévotion qui a ses
racines mêmes dans les entrailles du christianisme.
Aussi l’apôtre suppliait-il ses frères,
par la miséricorde de Dieu, d’offrir leur corps comme une
hostie vivante, sainte, agréable à Dieu ; et saint Pierre,
s’adressant également aux fidèles chrétiens,
les appelait un sacerdoce saint, offrant des hosties spirituelles que
Dieu agrée par Jésus-Christ. Tout âme chrétienne
est donc, à raison de son union avec NSJC, appelée à
être victime avec lui. Mais ce qui distingue les personnes dévouées
sous ce titre, c’est que leur attrait spécial est de suivre
Jésus-Christ victime, comme il est d’autres âmes
attirées à l’imiter plus particulièrement
dans son état d’enfance, dans sa pénitence et sa
solitude au désert, dans sa vie apostolique et ses souffrances
; et qu’en second lieu, ne se bornant pas à remplir à
cet égard le strict devoir de la vie chrétienne, elles
s’offrent, en vertu de la communion des saints, à être
victimes, d’une manière plus généreuse et
plus étendue, pour tous les intérêts de Dieu et
des âmes auxquelles il plaira à Notre Seigneur de les faire
servir. Ainsi Saint Paul, souffrant en sa chair la continuation de la
passion de Notre Seigneur Jésus-Christ, endurait les tribulations
dans l’intérêt et au nom de l’Eglise, comme
il le dit au passage que nous avons déjà rapporté.
Elles s’offrent donc à notre Seigneur pour
être victimes par lui, avec lui et en lui, car il est la victime
par excellence, l’unique vraie victime, et nul ne peut prendre
ce titre que par participation, ni s’appuyer sur la vertu d’un
autre sacrifice que celui de ce divin Réparateur. A cet effet,
ces âmes dévouées entrent dans tous les sentiments
de Jésus victime : adoration, actions de grâces, expiations,
demandes, non pas seulement pour elles, mais au nom de tous les hommes.
Elles dilatent leur cœur, à l’exemple de celui de
leur époux ; elles se perdent en lui ; elles s’oublient
elles-mêmes et confondent leurs propres intérêts
avec les siens. Leur but, en embrassant cette vie de dévouement
et en se chargeant du poids des péchés d’autrui,
pour en faire pénitence, est de consoler le divin et tout aimable
cœur de Jésus, que ces iniquités remplissent d’amertume.
Elles veulent lui tenir compagnie dans son délaissement,
partager ses joies et ses peines, alléger le poids accablant
des péchés qui pèsent sur lui, et le dédommager
de l’ingratitude et de la froideur dont il est trop souvent l’objet.
Elles s’offrent à lui pour contribuer à arrêter
la perte des âmes, pour être à son usage particulier,
sa propriété, son petit trésor et comme son épargne.
Leur ambition serait de faire un rempart d’elles-mêmes,
de recevoir à sa place les traits cruels qui le blessent, de
prendre pour elles le venin de ses blessures, ou du moins, puisqu’il
veut être atteint lui-même, de verser quelque baume dans
ses plaies saignantes et irritées. C’est par amour pour
ce cœur, c’est par correspondance aux mouvements de cet aimable
objet de leur tendresse, de cette vie de leur vie, de cette âme
de leur âme, de ce centre de tout leur être, qu’elles
sont pressées de s’immoler. Le nom qui leur convient et
qu’elles osent prendre dans leur petitesse, est donc celui des
victimes du Sacré-Cœur de Jésus.
De telles âmes, ayant bien l’esprit de leur
vocation, sont aujourd’hui comme nécessaire dans l’Eglise.
La diffusion du blasphème, la violation du dimanche, l’impiété
orgueilleuse, le libertinage, l’horreur de la croix, le désir
d’un paradis sur le terre, l’abus sacrilège du nom
et des paroles de Notre Seigneur lui-même, pour établir
les mauvaises doctrines : voilà le siècle. Tous ces crimes
irritent la colère de Dieu et produisent, comme en fruit naturel,
le désordre dans la société, la persécution
contre l’Eglise, et, par dessus tout, la ruine des âmes
qui tombent, comme la feuille, dans l’enfer.
Il faut que des âmes crucifiées portent
avec Jésus-Christ le poids de cette incrédulité
et de ces désordres, et parlent à Dieu pour obtenir pardon
et miséricorde, par une plus grande effusion des mérites
adorables et du sang précieux de Jésus-Christ. Il faut
que, dans la mesure de leurs forces, elles paient la dette du monde,
en consolant le cœur méconnu, méprisé et outragé
de ce doux Sauveur, indignement repoussé dans son amour.
Les victimes du Sacré Cœur de Jésus
ont pour vocation de suivre ce généreux Maître dans
la voie de son sacrifice.
Cet état comprend l’oblation, l’immolation,
la transformation et la communion.
L’oblation de soi-même à Dieu a été
le premier pas de Notre Seigneur dans la voie de son sacrifice. Mon
Père, a-t-il dit en entrant dans le monde, vous n’avez
point voulu d’hosties ni d’offrandes, mais vous m’avez
donné des oreilles pour entendre vos commandements et un corps
pour l’immoler comme une victime ; vous n’avez point demandé
des holocaustes et des sacrifices pour le péché, alors
j’ai dit : voici que je viens ; il est écrit de moi, dans
le livre des Ecritures, que je ferai votre volonté. Oui, mon
Dieu, je l’ai voulu, et j’ai placé, au milieu de
mon cœur, la loi que vous m’avez donnée pour me substituer
aux victimes anciennes, impuissantes à détruire le péché.
Dès ce moment, Jésus-Christ se considèrera
comme une victime destinée au sacrifice et vouée au seul
usage de Dieu. Ainsi, dans l’ancienne loi, la brebis offerte était
retirée de l’usage profane, ne recevait plus de nourriture
qu’en vue de l’immolation et vivait sous le couteau qui
devait l’égorger.
Tel est aussi le premier pas que doivent faire les heureuses
âmes, appelées par Jésus tout bon à le suivre
dans son sacrifice. Il faut qu’elles fassent un entier abandon
et une pleine donation d’elles-mêmes entre les mains de
Dieu ; qu’elles se regardent comme ne s’appartenant plus
à elles-mêmes ; qu’elles se détachent des
affections humaines et de tout ce qui est profane ; qu’elles se
séparent de l’esprit du monde ; qu’elles cessent
de vivre d’une vie naturelle ; qu’elles se purifient pour
être des victimes sans tache et dignes d’expier les péchés
de leurs frères ; qu’elles se donnent franchement à
la volonté divine et à la conduite de l’Esprit Saint,
sans restriction, sans réserve, sans retour, sans partage ; qu’elles
se considèrent enfin, comme destinées au sacrifice et
dédiées aux seuls usages de Dieu, en Jésus-Christ,
Notre Seigneur.
Dans l’accomplissement de cette démarche, elles prennent
les mêmes vues et intentions qui animaient le cœur sacré
du divin Epoux, et qui étaient de réparer la gloire de
Dieu et de procurer le salut des âmes.
En conséquence, elles se donnent à Dieu
pour le dédommager des outrages qu’il reçoit, et,
dans cette vue, elles opposent le bien au mal qui s’opère
dans le monde : la pénitence au péché, la vertu
au vice, l’humilité à l’orgueil, la mortification
et la chasteté au libertinage, l’adoration au blasphème,
la reconnaissance à l’ingratitude, la prière à
l’indévotion, l’amour le plus tendre à l’indifférence,
à la tiédeur, à la haine. Elles s’offrent
pour tous les pécheurs, hérétiques, schismatiques,
juifs, païens, incrédules, se mettant en leur lieu et place
pour faire pénitence de leurs péchés, selon que
Dieu voudra. Tout ce qu’elles font, tout ce qu’elles sont,
tout ce qu’elles ont, est mis au trésor commun. Elles renoncent
au droit de disposer de rien ; elles abandonnent tous leurs biens spirituels,
pour que tout soit appliqué aux intérêts de Jésus,
suivant son unique bon plaisir.
Leur oblation n’a point de limites : elles se
donnent au doux et aimable cœur de l’Epoux, afin qu’il
fasse d’elles sans réserve ce qu’il voudra, pour
sa consolation et sa gloire. Pauvreté, abjections, persécutions,
aridités spirituelles : elles ne choisissent rien, ni ne désirent
rien, mais aussi elles ne refusent rien et acceptent tout, jusqu’aux
supplices et aux échafauds, ne souhaitant que ce que Jésus
veut choisir pour elles, mais l’appelant de toute leur âme,
bien qu’inconnu. Cette offrande est perpétuellement unie
et confondue avec celle de Jésus, s’offrant à l’heure
de son incarnation, s’immolant sur la croix, perpétuant
son sacrifice sur l’autel et dans les cieux, offrant et immolant
à jamais, dans ce même holocauste, son Eglise, ses justes
et ses saints »
Nous verrons la semaine prochaine les trois autres dispositions
du cœur des « Victimes du Sacré Cœur »
: l’immolation, la transformation et la communion.
B- Interview du prélat
de l'Opus Dei, au cours du synode sur l'Eucharistie
Voici l’interview que Mgr Xavier Echevarria, prélat
de l’Opus Dei, a accordée au journal « La Gaceta
de los Negocios » en Espagne à l’occasion du Synode
sur l’Eucharistie
18 Octobre 2005
(Interview réalisée par Fernando Rayon)
Le siège central de l’Opus Dei se trouve
au 75 via Bruno Buozzi, à Rome. La façade d’un immeuble
à plusieurs étages. À l’intérieur,
il abrite une série de bâtiments très différents
allant de l’ancienne ambassade de la Hongrie près le Saint-Siège,
très tape-à-l’œil, aux édifices aux
styles variés et plus ou moins beaux. Tout un pâté
de maisons clairsemé petits patios intérieurs, aux fontaines
qui rafraîchissent un peu l’ensemble.
C’est dans l’une de ses cours que j’ai rencontré
le prélat de l’Opus Dei. Je lui avais envoyé un
questionnaire préalable qu’il me remet dès qu’il
me voit, mais notre entretien se prolongera un bon moment, pendant que
le photographe fait son travail. Il parle vite, sans élever la
voix, avec un accent italien. Il a un regard intense. Mes premières
questions portent évidemment sur le synode des évêques
qui va commencer le lendemain et auquel il va participer en répondant
à l’appel explicite du pape Benoît XVI.
Monseigneur, d’aucuns pensent que l’immobilisme
va être la caractéristique de ce synode.
Et bien ils se trompent lourdement. Le Saint-Père
tient à écouter tous les évêques du monde,
les théologiens et les spécialistes qu’il a invités.
Je suis sûr que l’on va y analyser des questions pouvant
tous nous aider à mieux nous approcher du sacrement de l’Eucharistie
et que les décisions que l’on prendra seront d’un
grand secours pour l’Église universelle.
Les entretiens de Benoît XVI avec Bernard Fellay,
chef de file des lefébvristes et avec Hans Kung nous ont renvoyé
une image insolite du nouveau pape. Comment interpréter ces audiences
?
Nous n’avons pas beaucoup de données sur
leur contenu, cependant il est clair que l’Église est toujours
ouverte à tous. Le pape donne beaucoup de facilités pour
que les gens s’approchent de Dieu, pour récupérer
toutes les âmes pour Dieu. Ceux qui cherchent la vérité
vont pouvoir le trouver.
Monseigneur, il y a quelques jours Benoît XVI
a béni une statue du fondateur de l’Opus Dei au Vatican.
Les relations de l’Œuvre avec ce pape vont-elles être
aussi bonnes qu’avec son prédécesseur.
Il y a 150 statues à la Basilique Saint-Pierre
de saints de tous les temps. Je pense que le fait que les papes bénissent
ces sculptures a une grande valeur symbolique. Cela met devant nos yeux
que les saints ont contribué aussi à édifier l’Église
qu’ils ornent de leurs vertus. En même temps, cela veut
dire que l’Église présente aux catholiques l’exemple
attrayant de ces enfants fidèles.
Et pour l’Opus Dei, qu’est-ce que cela suppose
?
Pour ce qui est concrètement de saint Josémaria,
sa présence en la Basilique nous montre bien que la Prélature
est aussi au service de l’Église et que cet engagement-là
est au cœur de tous ses fidèles.
Et le pape a béni la statue…
La bénédiction impartie par Benoît
XVI m’est allée droit au cœur. En même temps,
pendant cette cérémonie je me suis mis à penser
que saint Josémaria se serait dit : nous devons prendre soin
des affaires courantes, des petites choses, de ce qui est caché
aux les yeux du grand nombre, et ce, tous les jours, y compris les extraordinaires.
Depuis le décès du fondateur en 1975,
qu’y-a-t-il de changé dans la Prélature ?
En ces 30 ans, il y a eu naturellement du mouvement
: le nombre de personnes, de pays, des nouvelles tâches apostoliques
s’est accru. Le contexte de l’Église et du monde
a changé, lui aussi : il suffit de penser ce que le pontificat
de Jean-Paul II a supposé dans tout cela. L’aspect essentiel
de l’Opus Dei n’a pas bougé : l’esprit de son
fondateur, les implications de l’appel à la sainteté
et à l’apostolat dans la vie quotidienne, au travail professionnel,
à l’exercice des devoirs communs à tous les chrétiens.
Mais, quels ont été les changements les
plus importants ?
Pour me servir de votre expression, je pense que les
changements les plus importants tiennent à deux événements
d’une grande portée, qui se sont produits après
1975 : la configuration de l’Opus Dei en une Prélature,
ce que saint Josémaria avait prévu depuis le début
et la canonisation de ce saint prêtre. Ces deux jalons ont eu
des conséquences incalculables dans un certain sens. Entre autres,
ils ont confirmé de façon solennelle la finalité
spirituelle de l’Opus Dei au sein de l’Église.
Et la canonisation, qu’a-t-elle supposé
pour les membres de l’Œuvre ?
À mon avis, la canonisation a encouragé
les fidèles de la Prélature à accroître leur
sens des responsabilités, à raffermir leur engagement
évangélisateur. Les mois qui ont précédé
cet événement, et pour ce qui me concerne, je me disais
que la canonisation me demandait une nouvelle résolution de conversion,
de recherche de Dieu.
Cette conversion, a-t-elle quelque chose à voir
avec les nouveaux apostolats dans lesquels l’Œuvre est actuellement
impliquée ?
Les apostolats dépendent des besoins de l’environnement
: les travaux apostoliques vont au devant des nouveaux besoins sociaux
ou des âmes. Concrètement, ces dernières années
nous voyons surgir de nouvelles initiatives, très variées,
dans le domaine de la famille. J’ai le bonheur de recevoir de
nombreuses personnes qui me parlent de leurs projets innovants : des
activités de formation spirituelle pour hommes et femmes mariés,
des séances d’études sur l’amour conjugal
ou sur l’éducation des enfants, etc.
On a l’impression que les apostolats de l’Opus
Dei misent sur la famille
Et c’est bien logique puisque la famille est une
source de vie et de bonheur, elle l’a toujours été.
L’on perçoit de plus en plus nettement qu’il faut
cultiver la dimension familiale de notre existence parce qu’elle
crée ce climat indispensable d’affection et qu’elle
renforce ainsi le tissu de la société civile.
Cet apostolat de la famille, est-il spécifique
à l’Opus Dei ?
À l’Opus Dei, l’apostolat se fait
one to one, de personne a personne, d’ami à ami. L’efficacité
de l’évangélisation ne dépend pas seulement
des structures, ou des organisations. La clé réside en
ce que les catholiques doivent rendre le Christ présent, aider
les autres à découvrir la beauté et la vérité
de sa Parole, traiter charitablement tous ceux qui nous entourent.
C’est aussi le travail évangélisateur
de tous les chrétiens.
« Pour servir, servir », pour être
utile, il faut se mettre au service des autres, disait fréquemment
saint Josémaria. Cela peut être appliqué au travail
évangélisateur de l’Église, je n’en
ai aucun doute: si nous sommes au service des autres, nous serons utiles
à l’Église en tant que porte-parole de l’Évangile.
C’est ainsi que tout chrétien peut devenir crédible.
Votre Institution a deux cardinaux et actuellement deux
évêques en Espagne, à Burgos et à Tarragone,
cela vous affecte-t-il et comment ?
Avant de vous répondre, je tiens à préciser
les termes de votre question, car la Prélature « n’a
» ni cardinaux ni d’évêques. Le travail des
cardinaux et des évêques dépend du Pape. Et pour
en rajouter, au risque de paraître un peu exagéré
: le verbe « avoir » est aussi inapproprié quant
aux autres fidèles de la Prélature. Certes, l’on
peut dire qu’une personne « appartient » à
l’Opus Dei, ou qu’un diocèse « a » tant
et tant de prêtres ou de fidèles. Mais, il est évident
que cette appartenance n’a rien à voir avec une possession,
elle n’est qu’une forme de relation.
J’accepte votre précision
Excusez-moi. J’ai tenu à préciser
cela parce qu’il me semble que très souvent on parle à
tort de l’Église comme d’une institution qui peut
« manipuler » ses fidèles, alors qu’en réalité
l’Église est un foyer où l’on circule en toute
liberté. Et, dans l’Opus Dei, le premier défenseur
de la liberté personnelle et de celle des autres ce fut toujours
saint Josémaria.
Mais avouez que ces nominations touchent l’Œuvre
quand même ?
Le fait que quelques prêtres de la Prélature
soient nommés cardinaux ou évêques est une perte
de bras pour les apostolats spécifiques de l’Opus Dei que
nous acceptons de grand cœur parce que, ce faisant, nous servons
encore une fois l’Église universelle.
À propos de liberté. La société
espagnole n’est plus chrétienne, c’est un fait. Ni
par ses lois, ni dans ses mœurs. Comment voyez-vous l’avenir
de notre pays ?
Je mets en doute que l’on puisse assurer si formellement
une chose pareille. Je pense qu’une grande partie de la société
espagnole est chrétienne et que, en de nombreux secteurs, presque
toute la société espagnole l’est : il suffit de
penser, par exemple, aux nombreuses traditions, très enracinées
et très populaires, ayant un sens éminemment religieux.
Il faut aussi préciser qu’en réalité le christianisme
ne tient qu’aux personnes et non à la société.
Il se peut qu’en Espagne des gens qui se disent
chrétiens ne le soient pas tellement, ou ne pratiquent pas leur
religion
Pour ce qui est de la foi, elle a un bel avenir devant
elle. D’un côté, les catholiques nous comptons avant
tout sur la grâce et sur la miséricorde de Dieu, non pas
sur notre capacité humaine de persuasion. De l’autre, comme
la foi est transmise par l’apostolat, le futur est entre nos mains
: si nous catholiques nous nous serrons les coudes pour être cohérents,
joyeux, serviables, humbles, intègres, travailleurs, si nous
participons à la vie publique du pays, en y exerçant nos
devoirs et nos droits de citoyens, alors l’avenir de l’Église
en Espagne est plus que prometteur.
Avouez cependant que l’ambiance n’est guère
chrétienne.
L’ambiance extérieure a certes son influence,
mais le futur de la foi dépend surtout de la fidélité
des chrétiens.
C’est sans doute bien différent de ce que
vous venez de voir au rassemblement des jeunes à Cologne.
Ceux qui ont participé à cette rencontre
à Cologne ont pris note que des centaines de milliers de jeunes
éprouvent de vifs désirs de trouver Dieu, tout comme les
personnes moins jeunes qui ont été bouleversées
par cette mobilisation de tous les continents.
Mais, mis à part Cologne, avouez que le monde
s’éloigne de Dieu.
En tout cas, la réponse au mal ne justifie pas
les plaintes, les lamentations, elle tient à la décision
humble et joyeuse d’apporter notre petit grain de sable à
la construction collective du bien. J’ai encore à l’esprit
une phrase chère à saint Josémaria : « semeurs
de paix et de joie ». Voila la façon de procéder
des chrétiens.
À propos de cette action, en Espagne d’aucuns
continuent de se méfier de la présence de l’Opus
Dei dans la vie publique, de sa force, de sa puissance
L’attitude de ces personnes dont vous parlez —
moins nombreux que ce que l’on pourrait croire — reflète
le problème dont je vous ai parlé tout à l’heure
: l’approche qui consiste à voir les catholiques en général
ou les fidèles de l’Opus Dei en particulier, comme des
rouages d’un engrenage, des pions d’une organisation qui
obéissent aveuglément à des ordres d’en haut
et agissent en bloc dans le domaine de la politique. Rien n’est
plus loin de la réalité. Les millions de personnes qui
ont connu, de très près, l’Opus Dei en Espagne,
en ses presque 80 ans d’existence, témoignent unanimement
de la liberté qu’ils y ont trouvée.
Rejettent-ils alors la présence des membres de
la Prélature dans les milieux politiques ?
À mon avis, dès que la liberté
des catholiques dans la vie publique et politique sera mieux comprise,
dès qu’on dépassera des schémas idéologiques
qui appartiennent au passé ou qui sont le fait d’esprits
peu ouverts, l’on comprendra mieux que les fidèles de l’Opus
Dei jouissent de la même liberté que les autres citoyens,
ni plus ni moins.
Croyez-vous donc que les institutions de l’Église
vont jouer un rôle important dans la société ?
L’un des symptômes les plus clairs du progrès
dans nos sociétés est que les droits des citoyens, de
l’individu, sont de plus en plus appréciés. Les
communautés humaines se forment grâce au libre exercice
du vote, au paiement des impôts, au travail professionnel de plus
en plus qualifié, etc. Ce sont les citoyens eux-mêmes qui
prennent les décisions qui façonnent la société.
Et pensez-vous que cet individu peut s’intéresser
à ce que la religion lui propose ?
Bien évidemment. Rien de plus logique ni de plus
naturel que l’Église s’attache à proclamer
l’Évangile parmi les laïcs, puisque c’est à
eux qu’il revient, dans l’exercice de leur liberté
et de leur responsabilité, d’apporter la lumière
de la foi au cœur des activités humaines, de dignifier toutes
les tâches nobles, de construire une société à
la mesure de l’admirable dignité de la personne, créée
à l’image et à la ressemblance de Dieu.
Mais il se pourrait que l’individu ne tienne pas
à ce que la religion peut lui apporter.
La destinée de l’Église et la destinée
du monde ne sont pas opposées, ils n’empruntent pas des
voies divergentes. L’une et l’autre dépendent de
la responsabilité des citoyens, des catholiques, et tout spécialement
des laïcs.
Je vous vois très optimiste
C’est que, par-dessus tous les avatars de l’histoire,
la promesse du Seigneur assure une base solide à notre espérance
: « Je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la
fin du monde. » Ces paroles me remplissent d’un profond
optimisme parce la vérité a toujours le dessus, malgré
toutes les souffrances et contradictions à dépasser.
C- Intervention du cardinal Pujats
: du nécessaire recours au sacrement de pénitence
Ce rappel me paraît très heureux pour les
fidèles de la paroisse saint Michel.
ROME, Lundi 17 octobre 2005 (ZENIT.org) – «
Si nous voulons vraiment renouveler la vie spirituelle du peuple, il
ne nous est permis de quitter le confessionnal qu’après
que le dernier pénitent ait reçu le pardon », a
fait observer le cardinal Janis Pujats, archevêque de Riga, en
Lettonie, dans son intervention au synode.
« En général, insistait le cardinal
Pujats, il faut éliminer l’abus consistant à accéder
à la Communion sans le Sacrement de la Pénitence ».
« Avant la Communion, il appartient aux prêtres
d’inviter les fidèles à la confession individuelle
des péchés, rappelait le cardinal Letton. Le meilleur
endroit pour la confession des fidèles est le confessionnal,
placé dans l’église et doté d’une grille
fixe entre le confesseur et le pénitent. Dans la mesure du possible,
les prêtres doivent créer les conditions pour que les fidèles
accèdent au sacrement de Pénitence. En effet, si les hommes
vivent et meurent dans le péché, tout autre effort pastoral
est vain ».
Chaque jour un temps pour les confessions
Il recommandait que les prêtres consacrent du temps chaque jour
pour écouter les confessions. « Il convient, disait-il,
de réserver chaque jour un temps à la confession, selon
un horaire préétabli, en particulier avant la Messe. Si
nous voulons vraiment renouveler la vie spirituelle du peuple, il ne
nous est permis de quitter le confessionnal qu’après que
le dernier pénitent a reçu le pardon ».
Pour ce qui est du rythme des confessions, il précisait:
« Aux prêtres et aux laïcs qui participent généralement
à la Table du Seigneur chaque jour, il faut conseiller la confession
individuelle une fois par mois environ. Pour les autres, la confession
est nécessaire au moins chaque fois qu’ils accèdent
à la Communion ».
La communion doit demeurer individuelle
« En général, insistait le cardinal Pujats, il faut
éliminer l’abus consistant à accéder à
la Communion sans le Sacrement de la Pénitence. Par le passé,
on avait l’habitude, pendant la Messe, d’aller en procession
à la Communion. Mais, progressivement, cette pratique a été
justement supprimée pour des raisons pastorales. Comme nous le
savons, à l’église, le peuple a un comportement
collectif. Tous répondent aux paroles du prêtre, tous,
assis, écoutent les lectures de la Sainte Écriture, tous
se mettent debout pour l’Évangile, tous s’agenouillent
au moment de la Consécration et - ce que nous déplorons!
- tous se lèvent pour participer à la Communion en procession
- et parmi eux le pharisien comme le publicain, le pénitent tout
comme le non-pénitent. Les fidèles ont peur de rester
en dehors de cette procession, car de cette façon ils s’exposent
publiquement comme indignes. Telle est la raison pour laquelle cet abus
s’est si vite affirmé. Que faire? Il faut retrouver l’habitude
d’accéder individuellement à la Communion, afin
de préserver la liberté de conscience. La Messe est une
action commune, mais la Communion doit demeurer individuelle ».
Ils viennent pour prier, pas pour bavarder
Pour ce qui est de la présence eucharistique, le cardinal Pujats
apportait ces remarques: « Dans les églises paroissiales,
le lieu particulièrement adapté (in presbyterio) pour
le Très Saint Sacrement est le maître-autel qui abrite
le tabernacle. Dans ce cas, le maître-autel, avec son retable,
est vraiment le trône du Christ-Roi et attire à lui les
regards de tous ceux qui sont dans l’église. La présence
du Saint Sacrement à l’endroit principal de l’église
donne aux fidèles l’occasion d’adorer Dieu même
en dehors du sacrifice de la Messe (par exemple dans l’intervalle
de temps entre les différents offices divins). Ils viennent en
effet à l’église pour prier, et non pas pour bavarder
».
|