Paroisse catholique Saint Michel

Dirigée par

 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

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Du 6 au 12février

Dimanche de la Septuagésime.

 

 

A-Homélie.


« Oh, Mes bien chers frères, que cette messe de la Septuagésime est belle. Elle est comme un prélude à ce temps de Carême qui vient.

Quel est donc son sens, sa profondeur, sa « mystique » ? Si vous le voulez bien, cherchons-le ensemble.

Et comme à l’accoutumer, partons de l’Introït.

« Les liens de la mort m’enlaçaient, m’environnaient. Les filets du séjour des morts m’emprisonnaient, m’entouraient, me serraient de près ». C’est le même verbe latin qui est utilisé : « Circumdederunt ». Ces deux versets expriment la détresse de la nature humaine, la triste réalité du genre humain…voué à la mort, à l’enfer, à la faiblesse… Mais l’âme chrétienne, loin de sombrer dans la désespérance, s’enfermant en elle-même, raison de sa tristesse, se tourne, au contraire, vers Dieu et l’exprime devant Lui : « Dans ma détresse, j’invoquai le Seigneur » nous dit le psalmiste, « et dans son temple, il entendit ma voix ». Cette faiblesse, elle l’exprime devant Dieu, avec toute la force de l’espérance chrétienne qui se fonde sur « l’appel de Dieu » au Royaume céleste, sur la Rédemption, sur « l’appel à venir à la vigne du Seigneur ». C’est la raison de l’Evangile de ce dimanche : Venez « oeuvrer » à cette vigne…y œuvrer avec énergie. C’est la raison du choix de l’Epître de ce dimanche.

Ainsi, la réalité humaine, en soi, n’est que tristesse et misère. Mais considérée en Dieu, elle n’est pas sans espérance puisque Dieu entend la voix du fidèle qui l’appelle dans sa tristesse. Plus même, Dieu lui-même l’appelle à sa vigne pour y travailler…Que craindrai-je, puisqu’il est mon refuge, mon libérateur, mon rocher « firmamentum meum ». Et puisque Dieu se montre sensible à mon cri, puisqu’il est mon rocher qui me donne assurance, ma reconnaissance est grande et s’exprime en un amour très grand : « Diligam te Domine ». Je t’aime Seigneur, toi qui es ma force « fortitudo », toi qui est mon rocher, mon libérateur

Voilà les idées exprimées dans cette messe. Finalement, les textes de ce dimanche explicite l’attitude fondamentale des sujets du Royaume de Dieu. Ils sont au milieu du mal, dans ce combat du mal, du mauvais dont on nous parlait, dimanche dernier, dans la parabole du semeur qui, au milieu du champ, jette aussi l’ivraie. Devant le mal, devant ma faiblesse, devant mon péché, loin de me décourager, j’invoque le Seigneur. Je le peux. Je le dois. Il est, du reste, lui-même celui qui m’appelle à la vigne ; il est ainsi la raison de mon espérance, de mon combat, de ma lutte : « Je peux tout en celui qui me fortifie », dira un jour Saint Paul.

Aussi sachons apprécier cette idée de la faiblesse humaine qui trouve finalement sa force et son espérance dans la protection divine.

C’est tout le sens du Psaume 17 choisi dans l’Introït, le sens du Psaume 9 choisi pour le Graduel et du psaume 129, pour le chant du Trait.

Détresse humaine, misère humaine qui trouve son salut, son espérance en la particulière attention, faite de délicatesse et de force, de Dieu. La connaissance de cette misère est, du reste, la condition sine qua non pour que ce cri - cette prière à Dieu - soit fervent, zélé, sincère, ardent.

« Dans ma détresse, j’invoquai Dieu », nous dit le psalmiste, « je criai vers mon Dieu et de son Temple, il entendit ma voix et mon cri devant lui parvint à ses oreilles »…
… « Il étendit sa main d’en haut et me saisit… », comme il saisit, un jour, « au point du jour », les « ouvriers pour sa vigne »… au point du jour, mais aussi « à la troisième heure…Allez vous aussi à ma vigne »…Mais aussi « la sixième heure … Il sortit encore et il en trouva d’autres qui étaient là…et il leur dit : Allez vous aussi à ma vigne »

… « Il étendit sa main », continue le psalmiste, « d’en haut et me saisit ». « Il me retira des grandes eaux… », comme un jour il le fit de Noé et de sa famille pour les sauver du milieu des eaux anéantissantes…
… « Il me délivra de mon ennemi puissant… » de Satan…C’est qu’Il est mon libérateur

… « et de ceux qui me haïssaient, alors qu’ils étaient plus forts que moi. Ils m’avaient surpris au jour de mon malheur… », comme le serpent surpris Adam et Eve au jardin de l’Eden…
« Mais Dieu fut mon appui.
« Il m’a mis au large.
« Il m’a sauvé… » « Allez travailler à ma vigne »… « parce qu’il s’est complu en moi »….indépendamment de mes mérites, par pure libéralité, par simple miséricorde.

« Oui, tu fais briller mon flambeau
« Mon Dieu éclaire mes ténèbres.
« Avec Toi, je me précipite sur les bataillons armés.
« Avec Mon Dieu, je franchis les murailles ».

Avec Lui, pour Lui, pour la vigne, sa vigne, pour cette couronne impérissable qu’il me garde au Ciel…je mène le bon combat…je courre pour remporter le prix.

« Ut compréhendatis ».

Comprehendere : c’est un verbe très riche. Il veut dire « unir » : Avec Lui, pour Dieu et jamais sans lui, en sa vigne, pour sa vigne, enivré de ses délices, je travaille, je courre pour m’unir à ce trophée : le ciel.

Comprehendere veut dire aussi « embrasser ». Je courre, avec Lui, pour Lui, « per Ipsum et cum Ipso »…je courre pour l’embrasser, comme un enfant sa mère, comme un vainqueur d’un grand prix saisit fortement et « embrasse » la coupe. Son trophée est pourtant, à lui, périssable…le temps d’un instant…A nous, notre couronne est impérissable…Alors je courre doublement.

Ce verbe veut dire aussi « s’attacher », « saisir » et même « dévorer ». Telle doit être l’attitude du fidèle de ce Royaume des cieux : Il doit travailler à la vigne du Seigneur avec de les dispositions d’un être passionné, d’un être énamouré

« Car tu sauves ton peuple humilié »…par son péché.
« Toujours avec Dieu, Mon Dieu éclaire mes ténèbres
« Avec Toi…avec Toi, jamais sans Toi en raison de ma faiblesse
« Avec Toi, je me précipite sur des bataillons armés
« Avec Mon Dieu, je franchis les murailles
« …Dieu est mon rocher
« Alors il me ceint de force
« Il rend mes pieds semblables à ceux des biches » - forts mais aussi habiles et souples - et me fait tenir debout sur mes hauteurs. Il me forme mes mains au combat et mes bras tendent l’arc d’airain…Il est ma force ». Et seul, il me rend capable de courir pour saisir le trophée, l’espérance du Ciel…
« Tu m’as donné le bouclier de ton salut »….Ce trophée, je le veux, je l’acquiers. Je le gagne…ce prix, ce ciel…Car c’est toi qui le donne : « Venez œuvrer à la Vigne du Seigneur » Ton appel est répété ; incessant…

Aussi puis-je me dire, avec le psalmiste : « Tu m’as donné le bouclier de ton salut et ta droite - c’est-à-dire ta puissance - me soutient »… « e serai vainqueur » …puisqu’il faut vaincre et se battre contre soi-même et sa misère…mais par toi. « Et ta douceur me fait grandir ».
« Tu élargis mes pas au dessous de moi »….Aussi aurais-je certainement ce trophée « et mes pieds ne chancellent pas »…Aussi aurai-je cette couronne…
« Je poursuis mes ennemis et les atteins. Je ne reviens pas sans les avoir anéantis. Je les brise et ils ne se relèvent pas. Ils tombent sous mes pieds »… Comme saint Paul : « Quant à moi, voilà comment je cours : ce n’est pas sans but ; voilà comment je frappe : ce n’est pas en cognant dans le vide. Mais je meurtris mon corps et j’en fais un esclave ».

« Tu me ceints de force pour le combat »…Aussi gagnerai-je le grand prix
« Tu fais plier sous moi mes adversaires »...mes péchés, mes ennemis, mes vrais ennemis.
« Je les broie comme la poussière livrée au vent. Je les balais comme la boue des rues… ». « Je tiens toutes choses, dira lui aussi saint Paul, pour de la balayeur »….

« Vive Dieu et béni soit mon rocher »….Saint Paul nous dit : « Ils buvaient en effet à un rocher spirituel qui les accompagnait, et ce rocher, c’était le Christ… »

« Que le Dieu de mon salut soit exalté
« Dieu qui me délivre de mes ennemis
« Oui tu m’élèves au-dessus de mes adversaires
« Tu me sauves de l’homme de violence »

Tu m’appelles à ta vigne bien fermée, à toute heure du jour
« Tu es ma force et mon salut »
Tu me fais gagner le prix, la victoire
« C’est pourquoi je te louerai parmi les nations »
« Je chanterai à la gloire de ton nom », un poème d’amour : « Diligan te Domine, fortitudo mea, firmamentum meum, refugium meum et liberator meus ».

Mais aussi un poème d’espérance :

« de profundis clamavi ad te Domine
Du fond de l’abîme, je crie vers toi, Seigneur,
Seigneur, écoute ma voix
Que tes oreilles soient attentives à la prière de ton serviteur »… qui est à ta vigne, qui est sur le stade du monde
« Si tu prends garde aux fautes, Seigneur, qui pourra subsister
« Mais le pardon se trouve en toi »…parce que tu es bon. Alors raisonne dans mon cœur cette phrase de l’Evangile, du Maître : « Mon ami, je ne suis pas injuste envers toi. N’avais-tu pas convenu avec moi d’un denier ? prends ton bien et va. Je veux donner à ce dernier autant qu’à toi, n’ai-je pas le droit de faire de mes biens ce que je veux ou bien as-tu l’oeil mauvais parce que je suis bon »

« Si tu prends garde aux fautes Seigneur qui pourra subsister

Mais le pardon se trouve en toi…parce que tu es bon
« Quia apud te propitiation est »
« Et à cause de ta loi, tu me soutiens, Seigneur », « Propter legem », à cause de ta loi qui est pure charité miséricordieuse…Tu me soutiens, tu es mon espérance
Grâce à Toi, seul
Grâce à ton soutien, à ton secours et parce que ta charité est finalement au delà de la simple justice, je terrasserai mes ennemis et gagnerai le trophée…

B- De la richesse du Sacrement de pénitence

Avec le temps liturgique de la Septuagésime, j’ai pensé utile de vous donner cette petite synthèse sur le sacrement de Pénitence, pour vous aider à préparer une bonne confession et vous encourager à la faire dans ce temps qui précède Pâques. Ce texte est tiré de la méditation 30ème du Livre 1er du Vénérable Père Du Pont S.J. C’est très beau.


1-Bienfait de l’Institution de ce sacrement

Je considérerai, en premier lieu, la grâce insigne que Dieu, en instituant le sacrement de Pénitence, a faite à son Eglise et à moi-même, en ma qualité de membre de l’Eglise. Quelques réflexions me découvriront la grandeur de ce bienfait et m’exciteront à en profiter souvent.

Premièrement,

Dieu à qui appartient en propre le pouvoir de pardonner les péchés, a bien voulu remettre ce pouvoir aux mains des prêtres, et nous donner l’assurance qu’il ratifiera dans le Ciel la sentence que ses ministres auront prononcée sur la terre. (Jn 20 22-23). De plus, afin que les prêtres eussent plus de compassion pour les pécheurs, il a appelé à ce ministère des hommes sujets, comme les autres, au péché, et soumis à la nécessité de recourir au même remède. Au reste, le pouvoir qu’il leur a conféré est si étendu, qu’il ne s’est réservé aucun péché, quelque grave qu’il pût être, qu’il n’a limité ni le nombre des péchés ni le nombre des absolutions. Il déclara même formellement à saint Pierre que son intention était qu’il pardonnât non pas sept fois, mais septante fois sept fois (Mat 18 22), c’est-à-dire autant de fois que le pécheur repentant implorera son pardon. Qui n’admirerait ici la bonté de notre grand Dieu et le désir qu’il a de pardonner ? O Père des miséricordes, que les anges du Ciel vous louent soixante-dix- fois sept fois, et des milliers de fois, de la faveur que vous nous avez faite, à nous pauvres pécheurs qui vivons sur le terre ! Autant de fois nous pouvons pécher, autant de fois vous voulez nous pardonner, si nous recourons à votre clémence, parce que votre miséricorde l’emporte infiniment sur notre misère. Je solliciterai donc en toute confiance mon pardon, puisqu’il m’est si libéralement offert par l’offensé lui-même.

Deuxièmement.

Le juge souverain qui doit juger rigoureusement tous les hommes, et au moment de la mort, et à la fin du monde, veut commuer ce jugement sévère en un autre plein d’indulgence qui s’exerce dans ce sacrement. De sorte que, comme l’atteste l’Apôtre, si nous sommes jugés et absous ici-bas, nous ne serons pas jugés et condamnés à notre mort pour les péchés qui nous aurons été remis (1 Cor 11 31) : vérité exprimée dans cet autre texte de l’Ecriture : « Le pécheur ne subira pas pour la même faute un double châtiment » (Nahum 1, 9)

Troisièmement.

Enfin le sacrement de Pénitence, conformément à la prophétie de Zacharie, est une source d’eau vive que Dieu a fait jaillir au milieu du jardin de son Eglise (Zach. 14 8), pour effacer la souillure du péché, guérir nos infirmités et les plaies dont nos vices sont le principe, pour nous rendre la vie de la grâce, la beauté de la charité et l’éclat de la vertu, avec les mérites de nos bonnes œuvres ; en un mot, pour réparer tous les dommages que nous a causés le péché. Cette fontaine est toujours ouverte et elle ne tarit jamais, afin que, si nous contractions quelque souillure, nous allions aussitôt nous y laver. Bénie soit la divine bonté qui, comme une source féconde en miséricorde, répand continuellement sur nous ses eaux salutaires.

O mon âme va puiser aux sources du Sauveur, avec une extrême douleur de tes fautes, mais en même temps avec une joie extrême de pouvoir y recouvrer ta première pureté. (Is 12 8)

II- Excellence des actes que l’on pratique dans la confession.

Je considérerai, en second lieu, pour m’exciter et m’affectionner à la pratique de la confession fréquente, l’excellence des actes que l’on exerce en s’approchant du sacrement de Pénitence.

Je m’attacherai à bien comprendre que NSJC a institué ce sacrement dans son Eglise, afin que les fidèles trouvent dans leurs péchés mêmes une occasion de pratiquer les plus hautes vertus, et un moyen non seulement de regagner ce qu’ils on perdu, mais encore de tirer de leurs pertes les plus précieux avantages. Les principaux de ces actes sont au nombre de sept.

Le premier est un acte de foi. Nous croyons fermement que le pouvoir de pardonner les péchés, pouvoir qui n’appartient en propre qu’à Dieu seul, a été communiqué aux prêtres, et qu’ils ont entre les mains les clefs du Ciel, afin d’en faire descendre les grâces et les dons célestes, qui justifient les pécheurs et les rendent dignes d’entrer dans le royaume promis aux justes (Mat 18 18)

Le deuxième est un acte d’espérance au-dessus de toute espérance humaine. Car, l’aveu qui, devant les tribunaux de la terre, est une cause de condamnation, devient, en ce tribunal du ciel, un titre à l’absolution et au pardon.

Le troisième est un acte de charité. Cette vertu inspire au pécheur un vif regret d’avoir offensé l’infinie bonté de Dieu et d’avoir perdu sa grâce et son amitié. Elle lui fait en même temps concevoir le désir de se réconcilier avec son Seigneur, afin de l’aimer et de le servir désormais parfaitement.

Le quatrième est un acte héroïque d’humilité. Le pécheur s’humilie non seulement devant Dieu, mais aussi devant les hommes. Il révèle à un homme les fautes sécrètes les plus capables de lui causer de la honte et de la confusion ; et cette confusion, il l’accepte pour l’amour de Dieu, content que d’autres le connaissent comme il se connaît lui-même.

Le cinquième est un acte d’obéissance d’autant plus excellente qu’elle elle est plus ardue. En effet le pécheur repentant se soumet au confesseur comme à u n supérieur, disposé à lui obéir en tout ce qu’il ordonnera.

Le sixième est un acte de rigoureuse justice. Le pénitent est à la fois accusateur, accusé, témoin, juge, exécuteur de la sentence ; il se soumet au jugement du ministre de Dieu, non par contrainte, mais spontanément, prêt à venger lui-même par un saint zèle les outrages dont il s’est rendu coupable envers la divine Majesté, et à réparer le dommage qu’il a pu causer au prochain.

Le septième est un acte éclatant de courage qui consiste à se vaincre soi-même, et à surmonter cette inclination qui porte les hommes à cacher leurs fautes, à les défendre, à les excuser, à l’exemple d’Adam, dont nous sommes tous en ce point les héritiers. Aussi celui qui triomphe de ce défaut est-il, selon la parole de Job, plus qu’un homme. (Job. 31 33). Nous voyons en effet qu’il faut quelque fois faire un plus grand effort sur soi-même pour confesser humblement une faute que l’on a commise, que pour résister à la tentation quand elle nous porte à la commettre. C’est de même le sentiment de Saint Grégoire, qu’il est ordinairement nécessaire de déployer plus d’énergie pour maintenir une faute dont on s’est rendu coupable, que de repousser les instigations du démon pour ne point devenir coupable, et que, par conséquent, une humble confession n’est pas moins admirable que la pratique des autres vertus. .

Tels sont le sept actes héroïques qui accompagnent d’ordinaire la confession, et qui la rendent également méritoire devant Dieu, glorieuse devant les anges, et estimable dans l’opinion d’un confesseur. Chacun doit donc s’efforcer de faire ces actes avec une grande ferveur, afin d’obtenir une grâce abondante, et d’appliquer cette parole de l’Ecclésiastique : Donnez et recevez, pour justifier votre âme. (Eccle 14 16). Et puisque Dieu veut bien vous remettre les sept péchés capitaux, et vous communiquer avec sa grâce les sept dons du Saint-Esprit, offrez-lui les sept actes de vertu qui disposent l’âme à recevoir l’infusion de ces précieux dons. Souvenez-vous que l’enfant de la Sunamite, ressuscité par Elisée, ouvrit sept fois la bouche avant d’être rappelé à la vie (IV Reg 4 35), et excitez dans votre cœur les sept affections qui portent le Seigneur à vous accorder une vie nouvelle, spirituelle et parfaite.

III- Les grâces que l’on reçoit dans le sacrement de pénitence.

Je considérerai, en troisième lieu, les grâces que Dieu répand sur ceux qui reçoivent le sacrement de Pénitence avec les dispositions requises. Ces grâces peuvent se réduire à trois, que saint Paul mentionne en disant du royaume des cieux qu’il est la justice, la paix et la joie dans l’Esprit Saint (Rm 14 17). Ce royaume, Dieu le promet à tous ceux qui font sincèrement pénitence.
Premièrement,
Il leur accorde la grâce de la justification par laquelle il les purifie de tous leurs péchés ; il les reçoit au nombre de ses amis, de ses enfants adoptifs et des héritiers de son royaume céleste ; il répand dans leurs cœurs la charité, les vertus infuses, les dons du Saint-Esprit et la vraie beauté de l’âme qui nous est toujours rendue par une humble confession. Si celui qui s’approche du sacrement est juste, il reçoit toujours un accroissement de grâce sanctifiante, et accomplit en lui ce qui est dit dans l’Ecriture : Que celui qui est juste, se justifie encore ; et que celui qui est saint, se sanctifie encore (Apoc 22 11). Et ailleurs : Ne cessez point de vous avancer dans la justice jusqu’à la mort ». (Eccl 18 22)

Deuxièmement.

Dieu leur fait goûter une profonde paix surnaturelle. Non seulement il les réconcilie avec lui, mais il les rend encore victorieux de trois sortes d’ennemis, en récompense de la glorieuse victoire qu’ils ont remportée sur eux-mêmes, en surmontant les difficultés de la confession. De ces ennemis, il détruit les premiers, il met en fuite les seconds, il leur assujettit les derniers. Ceux qu’il détruit, ce sont les péchés ; il les jette au fond de la mer, ainsi que parle un prophète (Mich 7 19). Ceux qu’il met en fuite, ce sont les démons avec leurs tentations ; car rien ne les épouvante autant que les manifestations des plaies de la conscience au médecin qui doit les guérir. Ceux qui les assujettit, ce sont les convoitises de la chair qui commencent à obéir à l’esprit ; car lorsque les voies de l’homme, dit le sage, plaisent au Seigneur, il force ses ennemis à le laisser en paix (Prov 16 7). C’est donc un moyen puissant de vaincre les tentations et les passions, que de les manifester à son confesseur. Aussi longtemps que nous les tenons caches, le démon est en paix, et nous sommes en guerre avec nous-mêmes ; mais aussitôt que nous les découvrons, le démon prend la fuite, et nous demeurons dans une paix que rien ne saurait troubler.

Troisièmement.

Le troisième fruit du sacrement de Pénitence est la joie dans l’Esprit Saint. Ce divin Esprit dissipe les craintes et bannit les tristesses qui naissent d’une mauvaise conscience en même temps qu’il remplit l’âme d’allégresse par l’assurance du pardon. O mon Dieu, disait David pénitent, vous ferez entendre à mon cœur une parole qui le remplira de joie et de conscience et mes os humiliés tressailleront d’allégresse (Ps 50 10). En effet, lorsque nous sommes délivrés du poids du péché qui nous accablait, et de la tristesse qui nous desséchait et nous consumait, nous reprenons une nouvelle vigueur et nous osons relever la tête, enhardis par l’espérance du pardon et par les gages que nous recevons de la vie éternelle.

Ces considérations doivent me déterminer à ne rien omettre de ce qui est nécessaire pour faire une bonne confession, quelque difficile et quelque humiliante qu’elle me paraisse. Car la peine et la honte qui accompagnent cette action sont peu de chose en comparaison des biens infinis que Dieu me promet et des maux éternels dont il me délivre. Si je considère ce que NSJC a fait pour m’obtenir le pardon de mes péchés, et ce qu’il a souffert de douleurs et d’outrages, j’estimerai bien léger ce qu’il demande de moi pour me pardonner. Que ne pourrait-il pas exiger s’il voulait user de rigueur envers moi qui ai mérité des humiliations et des tourments éternels ? Je puis donc m’appliquer les paroles que disaient Naaman, le lépreux quelques-uns de ses serviteurs : « Maître, si le prophète vous avait prescrit une chose difficile, vous devriez l’exécuter pour obtenir votre guérison, combien plus devez-vous lui obéir lorsqu’il vous dit : Lavez-vous sept fois dans le Jourdain et vous serez guéri (IV Reg 5 13).
O mon âme si Dieu, pour te guérir de la lèpre du péché, t’imposait les obligations les plus pénibles, tu devrais même alors t’y soumettre ave empressement : comment donc balances-tu à lui obéir lorsqu’il te dit simplement : Confesse tes péché et tu seras guéri ? Lave toi donc sept fois dans le Jourdain, c’est-à-dire purifie –toi dans le sacrement de Pénitence, par l’exercice des sept vertus que je t’ai marquées, et la lèpre dont tu es couverte disparaîtra au même moment. Glorifie-toi, à l’exemple de Job, de ne point cacher, comme un homme fragile, ton péché, et de ne point renfermer dans ton sein tes iniquités. Sois fidèle à suivre ce conseil du Sage : « A cause de ton âme, ne rougis pas de confesser la vérité ; car il y a une confusion qui amène le péché, et il y a une confusion qui attire l’honneur et la gloire (Eccle 4 2’ 25). Si, vaincue par une mauvaise honte, tu cèles ton péché, tu l’aggraves ; mais si tu te confesses pénétrée d’une juste confusion tu obtiendras une glorieuse couronne, récompense de la victoire que tu auras remportée en découvrant ta faute.


C- L’enseignement spirituel de Benoît XVI

Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de l’audience générale du mercredi 1 février 2006

Lecture: Psaume 144, 1-2.4-5.8-9

1. Je t'exalterai, mon Dieu, mon Roi,
je bénirai ton nom toujours et à jamais !

2. Chaque jour je te bénirai,
je louerai ton nom toujours et à jamais.

3. Il est grand, le Seigneur, hautement loué ;
à sa grandeur, il \'est pas de limite.

4. D\'âge en âge, on vantera tes oeuvres,
on proclamera tes exploits.

5. Je redirai le récit de tes merveilles,
ton éclat, ta gloire et ta splendeur.

6. On dira ta force redoutable ;
je raconterai ta grandeur.

7. On rappellera tes immenses bontés ;
tous acclameront ta justice.

8. Le Seigneur est tendresse et pitié,
lent à la colère et plein d'amour ;

9. la bonté du Seigneur est pour tous,
sa tendresse, pour toutes ses oeuvres.

10. Que tes oeuvres, Seigneur, te rendent grâce
et que tes fidèles te bénissent !

11. Ils diront la gloire de ton règne,
ils parleront de tes exploits,

12. annonçant aux hommes tes exploits,
la gloire et l'éclat de ton règne :

13. ton règne, un règne éternel,
ton empire, pour les âges des âges.
Le Seigneur est vrai en tout ce q\'il dit,
fidèle en tout ce qu'il fait.

Chers frères et sœurs,

1. C'est à présent le Psaume 144 qui est devenu notre prière, une joyeuse louange au Seigneur qui est exalté comme un souverain aimant et plein de tendresse, préoccupé par toutes ses créatures. La liturgie nous propose cet hymne en deux moments distincts, qui correspondent également aux deux mouvements poétiques et spirituels du Psaume lui-même. A présent, nous nous arrêterons sur la première partie, qui correspond aux versets 1-13.

Le Psaume est élevé au Seigneur invoqué et décrit comme le « Roi » (cf. Ps 144, 1), une représentation divine qui domine les autres hymnes des Psaumes (cf. Ps 46; 93; 95-98). Le centre spirituel de notre Psaume est même précisément constitué par une célébration intense et passionnée de la royauté divine. Dans celle-ci, on répète à quatre reprises — comme pour indiquer les quatre points cardinaux de l'être et de l'histoire — la parole hébraïque malkut, « règne » (cf. Ps 144, 11-13).

Nous savons que ce symbolisme royal, qui aura également un caractère central dans la prédication du Christ, est l'expression du projet salvifique de Dieu: il n'est pas indifférent à l'histoire humaine, il a même à son égard le désir de réaliser avec nous et pour nous un dessein d'harmonie et de paix. L'humanité tout entière est également convoquée pour accomplir ce dessein, pour qu\'elle adhère à sa volonté salvifique divine, une volonté qui s'étend à tous les « hommes », à « chaque génération » et « à tous les siècles ». Une action universelle, qui arrache le mal du monde et qui y installe la « gloire » du Seigneur, c'est-à-dire sa présence personnelle efficace et transcendante.

2. C'est vers ce cœur du Psaume, placée précisément au centre de la composition, que va la louange de prière du Psalmiste, qui se fait la voix de tous les fidèles, et qui voudrait être aujourd'hui notre voix à tous. En effet, la prière biblique la plus élevée est la célébration des œuvres de salut qui révèlent l'amour du Seigneur à l'égard de ses créatures. On continue, dans ce Psaume, à exalter « le nom » divin, c'est-à-dire sa personne (cf. vv. 1-2), qui se manifeste dans son action historique: on parle précisément d'« œuvres », de « merveilles », d'« exploits », de « puissance », de « grandeur », de « justice », de « patience », de « miséricorde », de « grâce » de « bonté » et de « tendresse ».

C\'est une sorte de prière litanique qui proclame l'entrée de Dieu dans les événements humains pour conduire toute la réalité créée à une plénitude salvifique. Nous ne sommes pas en proie à des forces obscures, ni solitaires face à notre liberté, mais nous sommes confiés à l'action du Seigneur puissant et aimant, qui a un « dessein » à notre égard, un « règne » à instaurer (cf. v. 11).

3. Ce « règne » n'est pas fait de puissance et de domination, de triomphe et d'oppression, comme, malheureusement, cela se produit souvent pour les règnes terrestres, mais il est le siège d'une expression de pitié, de tendresse, de bonté, de grâce, de justice, comme on le répète à plusieurs reprises tout au long des versets qui contiennent la louange.

La synthèse de ce portrait divin se trouve dans le v. 8 : le Seigneur est « lent à la colère et plein d'amour ». Ce sont des mots qui évoquent la présentation que Dieu lui-même avait faite de sa propre personne au Sinaï, où il avait dit: «Yahvé, le Seigneur, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d'amour et de fidélité » (Ex 34, 6). Nous avons ici une préparation de la profession de foi de saint Jean l'Apôtre à l'égard de Dieu, nous disant simplement qu'Il est amour: « Deus Caritas est » (cf. 1 Jn 4, 8.16).

4. Outre sur ces belles paroles, qui nous montrent un Dieu « lent à la colère, riche en grâce », toujours disponible à pardonner et à aider, notre attention se fixe également sur le très beau verset suivant, le verset 9: « La bonté du Seigneur est pour tous, sa tendresse, pour toutes ses œuvres ». Une parole à méditer, une parole de réconfort, une certitude qu'Il apporte dans nos vies. A ce propos, saint Pierre Chrysologue (380 env.-450 env.) s\'exprime ainsi dans le Deuxième discours sur le jeûne: « «Grandes sont les œuvres du Seigneur» : mais cette grandeur, que nous voyons dans la grandeur de la Création, ce pouvoir est dépassé par la grandeur de la miséricorde. En effet, le prophète ayant dit: «Grandes sont les œuvres de Dieu», il ajouta dans un autre passage: «Sa miséricorde est supérieure à toutes ses œuvres». Chers frères, la miséricorde remplit le ciel, remplit la terre... Voilà pourquoi la grande, généreuse, unique miséricorde du Christ, qui réserva tout jugement pour un seul jour, assigna tout le temps destiné à l'homme à la trêve de la pénitence... Voilà pourquoi le prophète qui n\'avait pas confiance dans sa propre justice se précipite tout entier vers la miséricorde: «Pitié pour moi, mon Dieu — dit-il —, dans ton amour, selon ta grande miséricorde» (Ps 50, 3)» (42, 4-5: Sermons 1-62bis, Scrittori dell\'Area Santambrosiana, 1, Milan-Rome 1996, pp. 299.301). Et ainsi, nous aussi, nous disons au Seigneur: « Pitié pour moi, ô Dieu, selon la grande miséricorde ».