A-Homélie : le semeur et sa semence.
« Et le semeur sortit pour
semer sa semence et il en tomba dans la bonne terre ; et quand
elle eut poussé, elle donna du fruit au centuple »…Et
le Seigneur d’expliquer aux disciples : « Ce qui
tombe dans la bonne terre, c’est ceux qui entendent, qui
gardent la Parole dans un cœur bon et excellent et qui
portent du fruit dans la persévérance ».
La Parole de Dieu est, de soi,
efficace…Mais cette efficacité dépend aussi
de celui qui l’écoute, qui l’entend et la
reçoit. S’il a un cœur bon et excellent…La
Parole de Dieu porte du fruit …dans la persévérance…du
fruit au centuple.
Et l’Eglise le démontre,
dans cette messe, l’illustre par l’exemple de saint
Paul…D’où le choix de notre Epître
où saint Paul fait son panégyrique…
Quelle fougue ! Quel enthousiasme
! Quelle chaleur dans le cœur de cet Apôtre ! Quelle
charité ! Quel amour pour le Christ !
C’est certainement une des pages de l’Ecriture Sainte,
les plus enflammées, les plus dynamiques, les plus enthousiasmantes
!
Ce qu’il est…cet Apôtre, cette âme de
feu qui l’anime, il le doit à la parole de Dieu,
il le doit à la grâce qu’il a reçu
gratuitement de Dieu et qui l’a fait ce qu’il est.
Il était ennemi de l’Eglise…et quel adversaire…et
sur le champ, sur le chemin de Damas, il fut fait « disciple
du Christ »…Et quel disciple !
A l’occasion de querelles
que les « hébreux-israélites » lui
faisaient…il se défend.
Il veut bien être comme eux, hébreux, israélite
; de la « descendance d’Abraham », il l’est…mais
dans son ministère ecclésial, comme ministre du
Christ, il l’est plus que quiconque, plus qu’eux…Plus
que ceux qui, judaïsants, lui cherchent des « noises
», lui contestant la liberté qu’il prend
à l’égard de la Loi…Alors, là
! Saint Paul s’anime…Ce qui va nous donner cette
merveilleuse page de l’Ecriture : « Ils sont ministres
du Christ ? Je vais dire une folie… « ut minus sapiens
dico », je le suis plus encore… « Plus ego
».
La comparaison n’est même
pas de mise !
Ecoutez :
« 23 Sont-ils ministres du
Christ? — Ah ! je vais parler en homme hors de sens :
— je le suis plus qu'eux : bien plus qu'eux par les travaux,
biens plus par les coups, infiniment plus par les emprisonnements;
souvent j'ai vu de près la mort;
24 cinq fois j'ai reçu des Juifs quarante coups de fouet
moins un; 25 trois fois, j'ai été battu de verges;
une fois j'ai été lapidé; trois fois j'ai
fait naufrage; j'ai passé un jour et une nuit dans l'abîme.
26 Et mes voyages sans nombre, les périls sur les fleuves,
les périls de la part des brigands, les périls
de la part de ceux de ma nation, les périls de la part
des Gentils, les périls dans les villes, les périls
dans les déserts, les périls sur la mer, les périls
de la part des faux frères, 27 les labeurs et les peines,
les nombreuses veilles, la faim, la soif, les jeûnes multipliés,
le froid, la nudité ! 28 Et sans parler de tant d'autres
choses, rappellerai-je mes soucis de chaque jour, la sollicitude
de toutes les Eglises?
29 Qui est faible que je ne sois faible aussi? Qui vient à
tomber sans qu'un feu me dévore?
30 S'il faut se glorifier, c'est
de ma faiblesse que je me glorifierai. 31 Dieu, qui est le Père
de notre Seigneur Jésus-Christ, et qui est béni
éternellement, sait que je ne mens point.
32 A Damas, l'ethnarque du roi
Arétas faisait garder la ville pour se saisir de moi;
33 mais on me descendit par une fenêtre, dans une corbeille,
le long de la muraille, et j'échappai ainsi de ses mains.
Chapitre 12 1 Faut-il se glorifier?
Cela n'est pas utile; j'en viendrai néanmoins à
des
visions et à des révélations du Seigneur.
2 Je connais un homme dans le Christ qui, il y a quatorze ans,
fut ravi jusqu'au troisième ciel (si ce fut dans son
corps, je ne sais; si ce fut hors de son corps, je ne sais :
Dieu le sait). 3 Et je sais que cet homme (si ce fut dans son
corps ou sans son corps, je ne sais, Dieu le sait) 4 fut enlevé
dans le paradis, et qu'il a entendu des paroles ineffables qu'il
n'est pas permis à un homme de révéler.
5 C'est pour cet homme-là
que je me glorifierai; mais pour ce qui est de ma personne,
je ne me ferai gloire que de mes faiblesses. 6 Certes, si je
voulais me glorifier, je ne serais pas un insensé, car
je dirais la vérité; mais je m'en abstiens afin
que personne ne se fasse de moi une idée supérieure
à ce qu'il voit en moi ou à ce qu'il entend de
moi.
7 Et de crainte que l'excellence
de ces révélations ne vînt à m'enfler
d'orgueil, il m'a été mis une écharde dans
ma chair, un ange de Satan pour me souffleter, [afin que je
m'enorgueillisse point].
8 A son sujet, trois fois j'ai
prié le Seigneur de l'écarter de moi, 9 et il
m'a dit : " Ma grâce te suffit, car c'est dans la
faiblesse que ma puissance se montre tout entière. "
Je préfère donc bien
volontiers me glorifier de mes faiblesses, afin que la puissance
du Christ habite en moi. 10 C'est pourquoi je me plais dans
les faiblesses, dans les opprobres, dans les
nécessités, dans les persécutions, dans
les détresses, pour le Christ; car lorsque je suis faible,
c'est alors que je suis fort. »
Quel souffle, Mes Bien chers frères.
Quel amour du Christ !
Mais ce qui est encore plus beau,
me semble-t-il, c’est l’humilité qui l’anime.
Cela aussi est le fruit de la Parole de Dieu qui, en lui, n’a
pas été vaine tant il est vrai que cette Parole
est vie…Humilité qu’il confesse à
la fin de cette exaltation de sa propre personne. Nul orgueil
! Nulle prétention ! Nulle fanfaronnade ne l’anime…mais,
bien au contraire, l’humilité, d’humbles
sentiments de lui-même : « Et de crainte que l'excellence
de ces révélations ne vînt à m'enfler
d'orgueil, il m'a été mis une écharde dans
ma chair, un ange de Satan pour me souffleter, [afin que je
m'enorgueillisse point]. A son sujet, trois fois j'ai prié
le Seigneur de l'écarter de moi, et il m'a dit : "
Ma grâce te suffit, car c'est dans la faiblesse que ma
puissance se montre tout entière. »
Retenons cette conclusion : «
Ma grâce te suffit » - « Sufficit tibi gratia
mea »- « car ma puissance atteint sa plénitude
dans la faiblesse ». « nam virtus in infirmitate
perficitur ».
Tel est le principe de la vie surnaturelle.
Et voilà la conclusion que
tire finalement saint Paul : « de grand cœur -libenter
– donc, je me glorifierai plutôt de mes faiblesses
afin que demeure en moi la puissance du Christ »
Oh ! Que tout cela est beau !
Et c’est ce qui nous permet
aussi de comprendre le choix du psaume 43 dans l’Introït
ce cette messe…Le psalmiste confesse, lui aussi, comme
saint Paul, sa misère et attend tout de la Puissance
de Dieu -« de virtute Dei » - qui le sauvera de
sa propre misère mais aussi des ennemis qui l’entourent
et le menacent : « Réveille toi ! Pourquoi dors-tu,
Seigneur. Sors… ». « Exsurge, Domine, adjuva
nos et libera nos », « Dresse-toi, Seigneur, viens
à notre aide, délivre nous…Car tu es le
seul Très Haut », « Tu solus Altissimus super
omnem terram »
Cette misère est aussi la
raison du choix du psaume 82 utilisé dans le Graduel
: « Oui, tu es le seul Très Haut ». Tout
devant toi n’est qu’ « herbes folles »,
ou « fétu qu’emporte le vent ». «
Devant toi, tout chancelle » parce que possédé
par la crainte.
Mais grâce à ta Parole, semence de Vie, «
tes élus échappent à l’arc »,
« à sa flèche ». Ils sont ainsi préservés
et libérés « ut liberentur electi tui ».
Cette misère est aussi la
raison du choix du psaume 59 dans le Trait.
Finalement - et saint Paul en est
le plus bel exemple – tout dépend de la puissance
divine, de sa Parole efficace…Tout dépend de sa
puissance…Tout…Et la gloire de saint Paul, preuve
de la Puissance de Dieu et sa faiblesse et sa misère…que
la Parole de Dieu peut alors combler de sa présence toute
puissante.
C’est le beau chant de l’Offertoire
qui est tiré du beau psaume 16 en ses versets 5 et 7
:
« Soutiens mes pas dans tes
sentiers
De peur que mes pieds ne chancellent
Incline vers moi ton oreille
Ecoute ma parole
Fais éclater ta miséricorde.
Seigneur, tu sauves ceux qui s’abritent en toi »
C’est qu’en effet,
Mes Bien Chers Frères, la Parole de Dieu est efficace.
Elle est créatrice. Et pour le prouver, nous avons le
beau texte de la Genèse : « Au commencement, Dieu
créa le ciel et la terre. La terre était informe
et vide ; les ténèbres couvraient l’abîme
et l’Esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux. Dieu
dit : « Que le lumière soit et la lumière
fut… » C’est ce que confirme le Ps 32 6 :
« Par la parole de Dieu, les cieux ont été
fait et toute leur armé par le souffle de sa bouche ».
Et l’Ecclésiastique le chante aussi : « C’est
par la parole du Seigneur que ses œuvres ont été
faites. Le soleil qui les éclaire les contemple toutes,
ouvrage du Seigneur, il est rempli de sa gloire ».
Elle est, cette parole, éternellement
efficace : « elle demeure éternellement »
nous dit Saint Pierre dans sa Ier Epître.
Elle est porteuse de vie pour ceux
qui la reçoivent. Saint Jean est formel. Il enseigne
: « En vérité , en vérité,
je vous le dis, celui qui écoute ma parole et croit à
celui qui m’a envoyé a la vie éternelle,
et n’encourt point la condamnation, mais il est passé
de la mort à la vie. En vérité, en vérité
je vous le dis, l’heure vient et elle est déjà
venue, où les morts entendront la voix du fils de Dieu,
et ceux qui l’auront entendu, vivront. Car comme le Père
a la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils
de l’avoir en lui-même » (Jn 5 24 25). Elle
est porteuse de mort pour ceux qui la rejettent. Elle est «
Principe de contradiction »
Cette parole, c’est le Christ
lui-même, parole créatrice. Et nous avons tout
le prologue de Saint Jean, de son évangile :
« 1.Au commencement était
le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était
Dieu. 2.Il était au commencement en Dieu. 3.Tout par
lui a été fait, et sans lui n'a été
fait rien de ce qui existe. 4.En lui était la vie, et
la vie était la lumière des hommes, 5.Et la lumière
luit dans les ténèbres, et les ténèbres
ne l'ont point reçue. 6.Il y eut un homme, envoyé
de Dieu; son nom était Jean. 7.Celui-ci vint en témoignage,
pour rendre témoignage à la lumière, afin
que tous crussent par lui: 8.non que celui-ci fût la lumière,
mais il avait à rendre témoignage à la
lumière. 9.La lumière, la vraie, celle qui éclaire
tout homme, venait dans le monde. 10.Il (le Verbe) était
dans le monde, et le monde par lui a été fait,
et le monde ne l'a pas connu. 11.Il vint chez lui, et les siens
ne l'ont pas reçu. 12.Mais quant à tous ceux qui
l'ont reçu, Il leur a donné le pouvoir de devenir
enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom, 13.Qui
non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté
de l'homme, mais de Dieu sont nés. 14.Et le Verbe s'est
fait chair, et il a habité parmi nous, (et nous avons
vu sa gloire, gloire comme celle qu'un fils unique tient de
son Père) tout plein de grâce et de vérité
».
Cette parole, elle est non seulement
créatrice, elle est aussi parole de vie :
« 1 Ce qui était dès le commencement, ce
que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce
que nous avons contemplé et ce que nos mains ont touché,
du Verbe de vie,
2 - car la Vie a été manifestée, et nous
l'avons vue, et nous lui rendons témoignage, et nous
vous annonçons la Vie éternelle, qui était
dans le sein du Père et qui nous a été
manifestée » (I Jn 1 1-3)
Mais elle est aussi parole de mort :
« Puis je vis le ciel ouvert, et il parut un cheval blanc;
celui qui le montait s'appelle Fidèle et Véritable;
il juge et combat avec justice. 12 Ses yeux étaient comme
une flamme ardente; Il avait sur la tête plusieurs diadèmes,
et portait un nom écrit que nul ne connaît que
lui-même ; 13 il était revêtu d'un vêtement
teint de sang : son nom est le Verbe de Dieu. 14 Les armées
du ciel le suivaient sur des chevaux blancs, vêtues de
fin lin, blanc et pur. 15 De sa bouche sortait un glaive affilé
[à deux tranchants], pour en frapper les nations ; c'est
lui qui les gouvernera avec un sceptre de fer, et c'est lui
qui foulera la cuve du vin de l'ardente colère du Dieu
tout-puissant. 16 Sur son vêtement et sur sa cuisse, il
portait écrit ce nom : Roi des rois et Seigneur des seigneurs.
»
A nous tous de nous laisser prendre par cette Parole divine,
elle est créatrice et vivante pour ceux qui craignent
le Seigneur.
C’est ce que nous voyons en saint Paul.
C’est ce que nous voyons en la Reine Marie Antoinette.
Lisez sa dernière lettre, celle qu’elle adressa
à sa belle sœur, Madame Elisabeth.
B- Lettre
de Marie Antoinette à Madame Elisabeth.
Ce 16 octobre 1793, à 4h30
du matin.
C’est à vous, ma sœur, que j’écris
pour la dernière fois. Je viens d’être condamnée,
non pas à une mort honteuse, elle ne l’est que
pour les criminels, mais à aller rejoindre votre frère.
Comme lui innocente, j’espère montrer la même
fermeté que lui dans ses derniers moments. Je suis calme
comme on l’est quand la conscience ne reproche rien. J’ai
un profond regret d’abandonner mes pauvres enfants. Vous
savez que je n’existais que pour eux et vous, ma bonne
et tendre sœur. Vous qui aviez par votre amitié
tout sacrifié pour être avec nous, dans quelle
position je vous laisse ! J’ai appris, par le plaidoyer
même du procès, que ma fille était séparée
de vous. Hélas ! la pauvre enfant, je n’ose pas
lui écrire, elle ne recevrait pas ma lettre. Je ne sais
pas même si celle-ci vous parviendra. Recevez pour eux
deux ici ma bénédiction. J’espère
qu’un jour, lorsqu’ils seront plus grands, ils pourront
se réunir avec vous et jouir en entier de vos tendres
soins. Qu’ils pensent tous deux à ce que je n’ai
cessé de leur inspirer : que les principes et l’exécution
exactes de ses devoirs sont la première base de la vie,
que leur amitié et leur confiance mutuelles en fera le
bonheur. Que ma fille sente qu’à l’âge
qu’elle a, elle doit toujours aider son frère par
les conseils que l’expérience qu’elle aura
de plus que lui et son amitié pourront lui inspirer ;
que mon fils à son tour, rende à sa sœur
tous les soins, les services que l’amitié peuvent
inspirer ; qu’ils sentent enfin tous deux que, dans quelque
position où ils pourront se trouver, ils ne seront vraiment
heureux que par leur union, qu’ils prennent exemple de
nous. Combien, dans nos malheurs, notre amitié nous a
donné de consolation ! Et, dans le bonheur, on jouit
doublement quand on peut le partager avec un ami ; et où
en trouver de plus tendre, de plus uni que dans sa propre famille
? Que mon fils n’oublie jamais les derniers mots de son
père, que je lui répète expressément
: qu’il ne cherche jamais à venger sa mort !
J’ai à vous parler d’une chose bien pénible
à mon cœur. Je sais combien cet enfant doit vous
avoir fait de la peine. Pardonnez-lui, ma chère soeur.
Pensez à l’âge qu’il a, et combien
il est facile de faire dire à un enfant ce qu’on
veut, et même ce qu’il ne comprend pas. Un jour
viendra, j’espère, où il ne sentira que
mieux tout le prix de vos bontés et de votre tendresse
pour tous deux
Il me reste à vous confier encore mes dernières
pensées. J’aurais voulu les écrire dès
le commencement du procès ; mais outre qu’on ne
me laissait pas écrire, la marche a été
si rapide que je n’en aurais réellement pas eu
le temps.
Je meurs dans la religion catholique, apostolique et romaine,
dans celles de mes pères, dans celle où j’ai
été élevée, et que j’ai toujours
professée. N’ayant aucune consolation spirituelle
à attendre, ne sachant pas si il existe encore ici des
prêtres de cette religion, et même le lieu où
je suis les exposerait trop si ils y entraient une fois. Je
demande sincèrement pardon à Dieu de toutes les
fautes que j’ai pu commettre depuis que j’existe
; j’espère que, dans sa bonté, Il voudra
bien recevoir mes derniers vœux, ainsi que ceux que je
fais depuis longtemps pour qu’Il veuille recevoir mon
âme dans sa miséricorde et sa bonté.
Je demande pardon à tous ceux que je connais, et à
vous ma sœur, en particulier, de toutes les peines que,
sans le vouloir, j’aurais pu lui causer. Je pardonne à
tous mes ennemis le mal qu’ils m’ont fait. Je dis
ici adieu à mes tantes et à tous mes frères
et sœurs. J’avais des amis ; l’idée
d’en être séparée pour jamais et leurs
peines sont un des plus grands regrets que j’emporte en
mourant ; qu’ils sachent du moins que jusqu’à
mon dernier moment j’ai pensé à eux.
Adieu ma bonne et tendre sœur ; puisse cette lettre vous
arriver ! Pensez toujours à moi. Je vous embrasse de
tout mon coeur, ainsi que ces pauvres et chers enfants. Mon
Dieu qu’il est déchirant de les quitter pour toujours
! Adieu, adieu ; je ne vais plus m’occuper que de mes
devoirs spirituels. Comme je ne suis pas libre dans mes actions,
on m’amènera peut-être un prêtre ;
mais je proteste ici que je ne lui dirai pas un mot, et que
je le traiterai comme un être absolument étranger(1).
(1) Marie Antoinette refusa, en
effet, de parler au curé de saint Landry, qui se présenta
à la Conciergerie pour entendre sa confession et l’assister
dans ses derniers moments. Elle ne dit pas mot à l’abbé
Girard qui l’accompagna dans la charrette qui devait la
mener au supplice. Il est fort possible qu’un prêtre
réfractaire, l’abbé Magnin, ait pu être
introduit dans sa cellule, quelques semaines plus tôt,
afin de lui donner la communion.
C- Face aux outrances
de l’islam modéré
par Jean Madiran.
Ce papier de Jean Madiran dans
Présent de samedi dernier, 11 février 2006 est
à lire attentivement.
« Le journal danois Jyllands Posten qui avait publié
le 30 septembre les 12 caricatures intitulées «
les visages de Mahomet » vient à nouveau de présenter
ses excuses.
Il l’avait déjà
fait le 30 janvier. Depuis lors il n’a pas cessé
de les renouveler. Dans la dernière version, il va jusqu’à
adresser maintenant une prière à Allah : «
Qu’Allah agrée notre démarche. »
Cela ne suffit pourtant pas. L’exigence
est désormais que les parlements européens votent
des lois faisant de l’anti-islamisme un délit analogue
à l’antisémitisme.
_ La chronologie de l’affaire
est accablante pour ce que l’on appelle « l’islam
modéré ».
Les caricatures de Mahomet dans
le quotidien danois avaient donc paru le 30 septembre. C’est
seulement le 20 octobre que les onze ambassadeurs de pays musulmans
en poste à Copenhague protestent auprès du Premier
ministre.
Ces onze pays représentent
l’islam responsable, officiel et modéré.
Le 29 décembre, les ministres
des affaires étrangères arabes se réunissent
au Caire pour condamner l’offense à Mahomet et
pour exiger des excuses du Danemark.
Ces pays ont de paisibles relations
diplomatiques et commerciales avec les pays occidentaux, dont
ils sont pour la plupart des alliés. Si l’on cherche
un islam qui soit civilisé, responsable, modéré,
c’est avant tout parmi eux qu’on peut
espérer le trouver.
Leur modération et leur
sens des responsabilités s’incarne, nous dit-on,
dans l’Arabie saoudite. Celle-ci, le 26 janvier, rappelle
son ambassadeur à Copenhague et lance contre le groupe
laitier danosuédois Arla Foods une campagne de boycott
qui gagne rapidement le Koweït, les Emirats, la Jordanie,
,le Maghreb.
Face à cette agressivité
officielle et croissante de l’islam responsable et modéré,
le 30 janvier le journal danois présente ses (premières)
excuses aux musulmans offensés.
Ce premier signe de faiblesse est
promptement suivi, le 4 février, par l’incendie
à Damas des ambassades du Danemark et de la Norvège
; et le 5 février, par l’incendie du consulat du
Danemark à Beyrouth et par les émeutes qui ravagent
le quartier chrétien, à Achrafieh ; et toute la
suite…
Le mobilisateur, le détonateur,
ce fut bien la spectaculaire campagne d’opinion et de
boycott menée officiellement pendant trois mois par les
gouvernements de l’islam responsable et modéré.
_ On comprend que le Vatican manifeste
une attitude diplomatique cherchant à sauvegarder la
paix. Tel est bien son rôle. On le comprendrait encore
mieux si c’était le fait de la Secrétairerie
d’Etat, dont c’est en somme la fonction, et qu’on
ne vienne pas mettre en avant dans cette affaire le «
dialogue interreligieux » et son spécialiste Mgr
Fitzgerald qui déplore à Rome que des médias
puissent reproduire les 12 caricatures « alors que des
vies sont en danger ». Ce ne sont tout de même pas
les caricaturistes danois, d’ailleurs repentants, qui
dans cette affaire mettent en danger des vies humaines.
_ Le président du conseil
pontifical Justice et Paix n’est pas plus roboratif, il
est aussi désolant que celui du dialogue interreligieux.
Le cardinal Martino, en effet, déclare de son côté,
selon l’AFP du 9 février : « Il faut développer
dans l’islam une laïcité que l’Europe
a mis des siècles à atteindre. » Et il ajoute
: « L’Eglise catholique veut être une voix
de paix, de dialogue, de disponibilité et de service.
»
Aimable philanthropie, mais que
l’on croyait subsidiaire. Avant de faire entendre une
voix de dialogue,
de disponibilité, de service (et de laïcité...),
on croyait pouvoir attendre de l’Eglise qu’elle
fasse entendre une parole de vérité.
Mais c’est bien la vérité qui est relativisée,
estompée, écartée par une philanthropie
laïque et hypertrophiée.
_ Rappelé par le président
Chirac, et d’ailleurs par la plupart des autorités
morales, religieuses et politiques, le principe républicain
du « respect de toutes les religions » conduit à
les considérer comme toutes également respectables.
Mais il n’est pas possible que ce soit parce qu’elles
seraient toutes également vraies. Elles ne peuvent être
considérées comme
également respectables que si toutes elles sont sans
autre fondement que purement subjectif, comme la croyance au
Père Noël ou à Croquemitaine. Les nations
européennes sont engagées dans cette voie. Mais
pas l’islam.
JEAN MADIRAN
Présent su 11 février 2006
D- L’enseignement
du pape
Nous publions ci-dessous le texte
intégral de la catéchèse que le pape Benoît
XVI a prononcée au cours de l’audience générale
du mercredi 8 février 2006 ?.
Lecture : Psaume 144, 14.17-18.21
14. Le Seigneur soutient tous ceux
qui tombent,
il redresse tous les accablés.
15. Les yeux sur toi, tous, ils
espèrent :
tu leur donnes la nourriture au temps voulu ;
16. tu ouvres ta main :
tu rassasies avec bonté tout ce qui vit.
17. Le Seigneur est juste en toutes
ses voies,
fidèle en tout ce qu'il fait.
18. Il est proche de ceux qui l'invoquent,
de tous ceux qui l'invoquent en vérité.
19. Il répond au désir
de ceux qui le craignent ;
il écoute leur cri : il les sauve.
20. Le Seigneur gardera tous ceux
qui l'aiment,
mais il détruira tous les impies.
21. Que ma bouche proclame les
louanges du Seigneur !
Son nom très saint, que toute chair le bénisse
toujours et à jamais !
1. Dans le sillage de la liturgie qui le divise en deux parties,
nous revenons sur le Psaume 144, un chant admirable en l'honneur
du Seigneur, roi aimant et attentif à ses créatures.
Nous voulons à présent méditer sur la deuxième
des sections qui constituent le Psaume: il s'agit des versets
14-21 qui reprennent le thème fondamental du premier
mouvement de l'hymne.
Dans celui-ci, on exaltait la piété,
la tendresse, la fidélité et la bonté divine
qui s'étendent à toute l'humanité, touchant
chaque créature. A présent, le psalmiste porte
toute son attention sur l'amour que le Seigneur réserve
de manière particulière au pauvre et au faible.
La royauté divine n'est donc pas détachée
et hautaine, comme cela peut parfois se produire dans l'exercice
du pouvoir humain. Dieu exprime sa royauté en s'inclinant
sur les créatures les plus fragiles et sans défense.
2. En effet, Il est tout d\'abord
un père qui «soutient tous ceux qui tombent»
et qui relève ceux qui sont tombés dans la poussière
de l'humiliation (cf. v. 14). Les êtres vivants sont,
en conséquence, tendus vers le Seigneur presque comme
des mendiants affamés et Il offre, comme un père
attentif, la nourriture qui leur est nécessaire pour
vivre (cf. v. 15).
A ce point, fleurit sur les lèvres
de l'orant, la profession de foi dans les deux qualités
divines par excellence: la justice et la sainteté. «
Le Seigneur est juste en toutes ses voies, fidèle en
tout ce qu'il fait » (v. 17). Il existe en hébreu
deux adjectifs typiques pour illustrer l\'alliance qui existe
entre Dieu et son peuple: saadiq et hasid. Ils expriment la
justice qui veut sauver et libérer du mal et la fidélité
qui est signe de la grandeur pleine d\'amour du Seigneur.
3. Le psalmiste se place du côté
de ceux qui en bénéficient, qui sont définis
par diverses expressions, en pratique, ce sont des termes qui
constituent une représentation du véritable croyant.
Celui-ci « invoque » le Seigneur dans une prière
confiante, il le « cherche » dans la vie «
avec un cœur sincère » (cf. v. 18), il «
craint » son Dieu, respectant sa volonté et obéissant
à sa parole (cf. v. 19), mais surtout il l'« aime
», assuré d'être accueilli sous le manteau
de sa protection et de son intimité (cf. v. 20).
La dernière parole du psalmiste
est, alors, celle par laquelle il avait ouvert son hymne: c'est
une invitation à louer et à bénir le Seigneur
et son « nom », c'est-à-dire sa personne
vivante et sainte qui œuvre et sauve dans le monde et dans
l'histoire. Plus encore, son appel est un appel à faire
en sorte qu\'à la louange orante du fidèle s'associe
chaque créature marquée par le don de la vie:
« Son nom très saint, que toute chair le bénisse
toujours et à jamais ! » (v. 21). C'est une sorte
de chant éternel qui doit s'élever de la terre
au ciel, c'est la célébration communautaire de
l'amour universel de Dieu, source de paix, de joie et de salut.
4. Pour conclure notre réflexion,
revenons sur ce doux verset qui dit: « Il [le Seigneur]
est proche de ceux qui l\'invoquent, de tous ceux qui l'invoquent
en vérité » (v. 18). Cette phrase était
particulièrement chère à Barsanuphe de
Gaza, un ascète mort autour de la moitié du VIe
siècle, souvent interpellé par des moines, des
ecclésiastiques et des laïcs pour la sagesse de
son discernement.
C\'est ainsi, par exemple, qu'à
un disciple qui exprimait le désir « de rechercher
les causes des diverses tentations qui l'avaient assailli »,
Barsanuphe répondait: « Frère Jean, ne crains
rien des tentations qui sont apparues contre toi pour te mettre
à l'épreuve, car le Seigneur ne te laisse pas
en proie à celles-ci. Lorsque l'une de ces tentations
te vient, ne prends donc pas la peine d'examiner ce dont il
s'agit, mais crie le nom de Jésus: « Jésus,
aide-moi ». Et il t'écoutera car « il est
proche de ceux qui l'invoquent ». Ne te décourage
pas, mais cours avec ardeur et tu rejoindras l'objectif, dans
le Christ Jésus notre Seigneur » (Barsanuphe et
Jean de Gaza, Epistolario, 39: Collection de Textes patristiques,
XCIII, Rome 1991, p. 109).
Et ces paroles du Père de
l'Antiquité valent également pour nous. Dans nos
difficultés, problèmes et tentations, nous ne
devons pas uniquement accomplir une réflexion théorique
— d'où venons-nous ? — mais nous devons réagir
de façon positive, invoquer le Seigneur, maintenir un
contact vivant avec le Seigneur. Nous devons même crier
le nom de Jésus: « Jésus, aide-moi ! ».
Et nous sommes certains qu'il nous écoute, parce qu'il
est proche de celui qui le cherche. Ne nous décourageons
pas, mais courons avec ardeur — comme le dit ce Père
— et nous atteindrons nous aussi l'objectif de la vie,
Jésus, le Seigneur. »