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Un regard sur le monde
politique et religieux
au 2 janvier 2009
N° 197
Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier
Benoît XVI et le rite de
donner la communion sur les lèvres.
et non plus dans la main.
Tout le monde a vu que, lors de son voyage en France à la mi septembre, le pape Benoît XVI a distribué la sainte Eucharistie aux fidèles agenouillés, sur les lèvres. Cette pratique s’était perdue au lendemain du Concile Vatican II.
Aujourd’hui, le pape veut que l’on revienne, sur ce point, à la pratique ancienne, plus respectueuse de
Certains évêques lui donne leur concours dans ce difficile retour à
Mgr Athanasius Schneider est un de ceux-la.
Il est évêque auxiliaire de Karaganda, au Kazakhstan. Il vient de publier un petit livre dont le titre est « Dominus est » aux éditions Tempora.
Ce petit livre est honoré d’une préface de Mgr Renjith.
Qui est Mgr Renjith ? Rien moins qu’un proche
collaborateur du Pape, en matière liturgique. Il a 61 ans, évêque du Sri Lanka,
ancien nonce apostolique en Indonésie, il est aujourd'hui Archevêque Secrétaire
de
Mgr Renjith reconnaît qu’à la forme ancienne s’est
substituée une manière moins respectueuse de distribuer la communion : la
communion dans la main. Il affirme : « Dans le même temps, il faut reconnaître, au sujet de la communion dans
la main, que cette pratique a été introduite de manière abusive et à la hâte
dans certains milieux de l’Église juste après le Concile, changeant la coutume
séculaire qui avait précédé pour devenir désormais la pratique régulière dans
toute l’Église ». C’est ce que nous avons toujours dit dans les
milieux de
Nous reproduisons ci-après la préface rédigée par Mgr Malcom Ranjith de l'ouvrage « Dominus Est », préface que « Paix liturgique » vient de publier dans son dernier numéro.
A- Préface de Mgr Malcom Ranjith
« Dans le livre de l’Apocalypse, saint Jean raconte qu’après avoir vu et entendu ce qui lui avait été révélé, il s’était lui-même prosterné en adoration, au pied de l’ange de Dieu (cf. Ap 22, 8). Se prosterner ou se mettre à genoux, devant la majesté de la présence de Dieu, en une adoration humble, était déjà une habitude de respect que le peuple d’Israël manifestait en la présence du Seigneur.
Il est dit au Premier livre des Rois : « Quand Salomon eut achevé d’adresser au Seigneur cette prière et cette supplication, il se releva de devant l’autel du Seigneur, où il était agenouillé, les mains étendues vers le ciel, et s’étant mis debout, il bénit toute l’assemblée d’Israël » (1 R 8, 54-55). La position de supplication du roi est claire : il était à genoux devant l’autel.
La même tradition est également visible dans le Nouveau Testament quand nous voyons Pierre se mettre à genoux devant Jésus (cf. Lc 5, 8), Jaïre lui demander de guérir sa fille (Lc 8, 41), le Samaritain revenir le remercier ou Marie, la sœur de Lazare, demander la vie de son frère (Jn 11, 32). C’est la même attitude de prosternation devant la stupeur que provoque la présence ou la révélation divine que l’on remarque généralement dans le livre de l’Apocalypse (Ap 5, 8, 14 et 19, 4).
À cette tradition était étroitement liée la conviction que le Temple Saint de Jérusalem était la demeure de Dieu, et que, par conséquent, il fallait y disposer tout le corps dans une attitude exprimant un sentiment profond d’humilité et de respect à l’égard du Seigneur présent.
Même dans l’Église, la conviction profonde que, dans les
espèces eucharistiques, le Seigneur est vraiment et réellement présent ainsi
que la pratique croissante de conserver
De fait, en ce qui concerne la présence réelle du Christ dans les espèces eucharistiques, le Concile de Trente déclare : in almo sanctae Eucharistiae sacramento post panis et vini consecrationem Dominum nostrum Iesum Christum verum Deum atque hominem vere, realiter ac substantialiter sub specie illarum rerum sensibilium contineri, « dans le vénérable sacrement de la sainte Eucharistie, après la consécration du pain et du vin, notre Seigneur Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, est vraiment, réellement et substantiellement contenu sous l’apparence de ces réalités sensibles »(DS 1651).
Par ailleurs, saint Thomas d’Aquin avait déjà défini l’Eucharistie latens Deitas (Saint Thomas d’Aquin, Hymne Adoro Te devote). La foi dans la présence réelle du Christ sous les espèces eucharistiques appartenait déjà alors à l’essence de la foi de l’Église catholique et faisait partie intégrante de l’identité catholique. Il était clair qu’on ne pouvait édifier l’Église si une telle foi venait à peine à être ébranlée. Donc, l’Eucharistie, pain transsubstantié en Corps
du Christ et vin en Sang du Christ, Dieu parmi nous, devait être accueillie avec émerveillement, avec le plus grand respect et dans une attitude d’humble adoration.
Le Pape Benoît XVI, en se référant aux paroles de saint Augustin, nemo autem illam carnem manducat, nisi prius adoraverit; peccemus non adorando, « que personne ne mange cette chair sans d’abord l’adorer ; nous pécherions si nous ne l’adorions pas » (Enarrationes in Psalmos 98, 9 ; CCL 39, 1385), souligne le fait que « recevoir l’Eucharistie signifie se mettre en attitude d’adoration envers Celui que nous recevons. […] Ce n’est que dans l’adoration que peut mûrir un accueil profond et vrai » (Sacramentum Caritatis 66).
Selon cette tradition, il est évident qu’adopter des gestes et des attitudes du corps et de l’esprit qui facilitent le silence, le recueillement, l’humble acceptation de notre pauvreté face à la grandeur infinie et à la sainteté de Celui qui vient à notre rencontre sous les espèces eucharistiques, devenait cohérent et indispensable. La meilleure façon d’exprimer notre sentiment de révérence à l’égard du Seigneur-Eucharistie était de suivre l’exemple de Pierre qui, comme nous dit l’Évangile, se jeta à genoux devant le Seigneur en lui disant : « Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un pécheur » (Lc 5, 8).
Aujourd’hui, comme
nous le voyons dans certaines églises, une telle pratique est tombée toujours
plus en désuétude, et les responsables, non seulement exigent que les fidèles
reçoivent
agenouilloirs,
obligeant les fidèles à s’asseoir ou à se tenir debout, même durant l’élévation
des Espèces eucharistiques présentées pour être adorées. Le comble est de
constater que de telles mesures ont été prises dans les diocèses, par les
responsables de la liturgie, ou dans les églises, par les curés, sans même
consulter le moins du monde les fidèles, alors qu’aujourd’hui, plus que jamais,
on parle dans de nombreux milieux de démocratie dans l’Église.
Au sujet de la
communion dans la main
Dans le même temps, il faut reconnaître, au sujet de la communion dans la main, que cette pratique a été introduite de manière abusive et à la hâte dans certains milieux de l’Église juste après le Concile, changeant la coutume séculaire qui avait précédé pour devenir désormais la pratique régulière dans toute l’Église. On a justifié un tel changement en affirmant qu’il reflétait mieux l’Évangile ou l’antique pratique de l’Église. Il est vrai que si l’on peut recevoir sur la langue, l’on peut aussi recevoir sur la main, ces deux organes du corps étant d’une égale dignité. Certains, pour justifier cette pratique, font référence aux paroles de Jésus : « Prenez et mangez » (Mc 14, 22 ; Mt 26, 26). Quelles que soient les raisons favorables à cette pratique, nous ne pouvons ignorer ce qui se passe au niveau mondial, quand une telle pratique vient à se réaliser. Ce geste contribue à un affaiblissement graduel et croissant de l’attitude de respect envers les saintes Espèces eucharistiques. À l’inverse, la pratique précédente avait mieux préservé ce sentiment de vénération. Au lieu de cela, se sont glissés un manque alarmant de recueillement et un esprit de générale insouciance. Il arrive désormais de voir des personnes ayant communié qui retournent à leur place comme si rien d’extraordinaire ne s’était produit. Dans la grande majorité, ce sont les enfants et les adolescents qui sont distraits. Dans de nombreux cas, on ne remarque pas ce sens de gravité et ce silence intérieur qui doivent être les signes de la présence de Dieu dans l’âme. Et puis il y a toutes sortes d’abus : ceux qui emportent les saintes espèces pour les garder comme souvenirs ; ceux qui les vendent, ou pire encore, ceux qui les emmènent afin de les profaner dans des rites sataniques. On a pu faire le constat de telles situations : jusque dans les grandes concélébrations, même à Rome, on a pu trouver à plusieurs reprises les Saintes Espèces jetées par terre. Cette situation nous amène à réfléchir non seulement sur cette grave perte de la foi, mais aussi sur ces outrages et offenses faites au Seigneur, Lui qui daigne venir à notre rencontre en voulant nous rendre semblables à Lui, afin que se reflète en nous la sainteté de Dieu.
Le Pape parle de la
nécessité non seulement de comprendre le sens véritable et profond de
l’Eucharistie, mais aussi de la célébrer avec dignité et respect. Il dit que
nous devons être conscients « de l’importance des gestes et des postures, comme
le fait de s’agenouiller pendant les moments centraux de la prière
eucharistique » (Sacramentum Caritatis, 65). De plus, en parlant de la réception de
Dans cette perspective, il faut apprécier le petit livre écrit par S. E. Mgr Athanasius Schneider, évêque auxiliaire de Karaganda, au Kazakhstan, dont le titre Dominus est est tout à fait significatif. Ce livret veut apporter sa contribution dans la discussion actuelle sur l’Eucharistie, comme présence réelle et substantielle du Christ dans les espèces consacrées du pain et du vin. Il est à noter que Mgr Schneider commence sa présentation par une note personnelle qui rappelle la profonde foi eucharistique de sa mère et de deux autres femmes, foi
conservée au milieu de tant de souffrances et de sacrifices, que la petite communauté catholique de ce pays a supportés durant les années de persécution soviétique.
En partant de sa propre expérience qui a éveillé en lui une
grande foi, de l’émerveillement et de la dévotion à l’égard du Seigneur présent
dans l’Eucharistie, il nous présente un
excursus historico-théologique qui explique bien comment la pratique de
recevoir
Aujourd’hui, je crois que le moment est arrivé de bien évaluer cette pratique, de revoir et, si nécessaire, d’abandonner la pratique actuelle qui, en réalité, ne se trouve indiquée ni dans Sacrosanctum Concilium lui-même, ni par les Pères Conciliaires, mais qui fut acceptée après avoir été introduite abusivement dans certains pays.
Aujourd’hui plus que jamais, il est nécessaire d’aider les fidèles à retrouver une foi vive en la présence réelle du Christ dans les espèces eucharistiques, dans le but de renforcer la vie même de l’Église et de la préserver au milieu des dangereuses déviations de la foi que de telles situations continuent à provoquer. Les raisons d’une telle orientation ne doivent pas être tant théoriques que pastorales – autant spirituelles que liturgiques : elles doivent contribuer à une meilleure édification de la foi. En ce sens, Mgr Schneider fait preuve d’un courage louable parce qu’il a su saisir la vraie signification de la parole de saint Paul : « Que tout se passe de manière à édifier » (1 Co 14, 26).
Malcolm Ranjith
Évêque Secrétaire de
NB :
Ces propos viennent d’être confirmés par le nouveau préfet de
« Que signifie recevoir la communion dans la bouche ?
Que signifie se mettre à genoux devant le Saint-Sacrement ? Que signifie
l’agenouillement à la messe ? Cela signifie adorer, cela signifie
reconnaître la présence réelle de Jésus-Christ dans l’Eucharistie. C’est une
attitude de respect et un témoignage de foi de l’homme qui s’abaisse devant
Dieu parce qu’il sait que tout vient de Lui ; nous restons sans voix
devant la gloire de Dieu, devant sa bonté et sa miséricorde. Voilà pourquoi
recevoir la communion dans la main en restant debout, ce n’est pas la même
chose que de la recevoir dans la bouche en s’agenouillant. Ici, l’attitude a
une grande importance. Nous devons parvenir à retrouver une attitude qui
témoigne du respect que nous avons lorsque nous recevons le Seigneur qui se
donne en nourriture. C’est ce que souhaite le pape. »
Cardinal Antonio
Cañizares Llovera
Nouveau préfet de
la congrégation pour le culte divin,
au quotidien
espagnol
B- Le processus de la communion dans la main.
Par « processus » de la communion dans la main, nous
entendons celui qui a été engagé par le mouvement interne de l'Instruction Memoriale
Domini et par le mouvement analogue qui va de cette Instruction à
Ces trois documents ont paru
dans
Les deux premiers proviennent de
I- L'Instruction
L'Instruction Memoriale Domini de
Ce document y déclare que « de nos jours des changements importants et
nombreux ont été introduits dans le rite de la célébration de
l'Eucharistie, afin qu'il réponde mieux aux besoins spirituels et
psychologiques des hommes d'aujourd'hui ». De plus « a été rétabli, dans certaines circonstances, l'usage de la communion
sous les deux espèces du pain et du vin ». « Par ces éléments de
renouveau ( ?) le signe du banquet eucharistique et l'accomplissement fidèle du
mandat du Christ sont devenus plus manifeste( ? ) et vivants( ?) »
«
Mais en même temps, ces dernières années, la participation plus complète ( ?) à
la célébration eucharistique, exprimée par la communion sacramentelle, a
suscité ça et là le désir de revenir à l'ancien usage de déposer le pain
eucharistique dans la main du fidèle, lequel se communie lui-même en le
portant à sa bouche. »
Et
même, « dans certains endroits et dans certaines communautés, cette
façon de faire est pratiquée, bien que le Saint Siège n'ait pas encore donné
l'autorisation demandée ».
Voilà donc, à la date du 28 mai 1969, quelle était la situation, telle du moins qu'elle était vue du Vatican : le renouveau continuait de grandir admirablement, le « signe du banquet eucharistique » était devenu plus manifeste et plus vivant, et cette participation plus complète avait suscité (spontanément) le désir de communion dans la main. Celle-ci était déjà pratiquée par certaines communautés qui en avaient demandé l'autorisation et ne l'avait pas « encore » reçue.
Désobéissance grave qui, dans l'Instruction Memoriale
Domini n'est a aucun moment qualifiée de désobéissance,
et qui à aucun endroit n'est ni condamnée, ni blâmée, ni déplorée, ni même
regrettée. Dans la présentation vaticane qui en est ainsi faite, cette
désobéissance devient une simple anticipation, parfaitement normale :
anticipation d'une évolution ultérieure et d'une autorisation à venir. Telle
est la manière aujourd'hui habituelle qu'à l'Autorité de détruire elle-même son
autorité.
De toute façon, à la
lecture de la première partie du document, la communion dans la main apparaît
comme un fruit logique du « renouveau » dont nous jouissons depuis le
Concile (lequel cependant n'est ni allégué ni nommé).
Mais, parvenu à ce point, le document change brusquement de ton, de
style, de contenu : comme s'il changeait de rédacteur et même de pensée. Avec une soudaine fermeté et un ample exposé de
motifs précis, il se met, en sens contraire, à établir qu'il est meilleur « que
ce soit le ministre lui-même qui dépose sur
la langue du communiant une parcelle de pain consacré », et que « rien
» ne doit être changé à cette manière de faire.
Les
principales considérations invoquées sont les suivantes :
- «
Cette façon de distribuer la sainte communion » (sur la langue) a « derrière
elle une tradition multiséculaire. »
-« Elle exprime le respect des fidèles envers l'Eucharistie »
-Elle « ne blesse en rien la dignité personnelle de ceux qui s'approchent de ce sacrement »
Elle « assure plus efficacement... que soit écarté tout danger de
profanation ». -Elle est conforme à la volonté
des évêques : sans doute « un petit nombre de Conférences
épiscopales » et « certains évêques » avaient demandé la
communion dans la main. Le Souverain Pontife a consulté « tous les évêques
de l'Eglise latine ».
Trois questions leur ont été posées. Voici les
questions et les réponses :
« 1- Pensez-vous qu'il
faille exaucer le voeu que outre la manière traditionnelle, soit également
autorisé le rite de la réception de la communion dans la main ?
Placet
567
Non Placet 1233 ;
Placet juxta modum 315 Réponses non valides 20
«
2- Aimeriez-vous que ce nouveau
rite soit expérimenté d'abord dans de petites communautés avec l'autorisation de l'Ordinaire du lieu
-Placet
751
-Non placet : 1215
Réponses
non valides : 70
« 3- Pensez-vous qu'après une bon ne préparation catéchétique, les fidèyles accepteraient volontiers ce nouveau rite ?
Placet
835
Non Placet 1185
Réponses
non valides 128.
« Ces
réponses montrent donc qu'une forte majorité d'évêques estiment que rien ne
doit être changé à la discipline actuelle ;
et que si on la changeait cela offenserait le sentiment et la sensibilité
spirituelle de ces évêques et de nombreux fidèles. »
« C'est
pourquoi... eu égard à la gravité du sujet et à la valeur des arguments
invoqués, le Souverain Pontife n'a pas pensé devoir changer la façon
traditionnelle de distribuer la sainte communion aux fidèles ».
Conclusion : «Aussi le Saint Siège
exhorte-t-il vivement les évêques, les prêtres et les fidèles à respecter attentivement la loi toujours en
vigueur et qui se trouve confirmée de nouveau, en prenant en
considération tan t le jugement émis par la majorité de l'épiscopat catholique
que la forme utilisée actuellement dans la sainte liturgie, et enfin le bien
commun de l'Eglise ».
Cette conclusion rejette avec
autorité, sans laisser subsister aucune équivoque ni aucune possibilité d'échappatoire, ce que semblait admettre
l'introduction du même document.
Seulement, l'Instruction Memoriale
Domini comporte encore quelque s lignes : un petit ajout, presque un
postscriptum, dont la longueur est inférieure au septième de la longueur
total du document.
A nouveau changent le ton, le contenu (et
peut-être le rédacteur) ; et ce qui avait été rejeté se trouve
maintenant accepté :
« Mais là où s'est déjà introduit un usage différent —
celui de déposer la sainte communion dans la main — le Sain t Siège, afin
d'aider les Conférences épiscopales à accomplir leur tache pastorale, devenue
souvent plus difficile dans les circonstances actuelles, confie à ces
mêmes Conférences la charge et le devoir de peser avec
soin les circonstances particulières qui pourraient exister, à condition
cependant d'écarter tout risque de manque de respect ou d'opinions fausses qui
pourraient s'insinuer dans les esprits au sujet de la très Sainte Eucharistie,
et d'éviter soigneusement tous autres inconvénients ».
« De
plus, en pareils cas, pour que cet usage s'établisse comme il faut, les
Conférences épiscopales prendront, après
prudent examen, les décisions opportunes, par vote secret et à la majorité des
deux tiers. Ces décisions seront ensuite soumises au Saint Siège, pour en recevoir
la nécessaire confirmation ».
Ainsi l'Instruction Memoriale Domini est
un champ de bataille.
Le oui et le non y coexistent, comme si l'on enregistrait avec impartialité les pensées opposées de deux papes concurrents.
Cette
Instruction, en effet, maintient d'une part la communion traditionnelle comme
rite unique exigé par le bien commun de l'Eglise, le « Souverain Pontife », une
« forte majorité d'évêques », « la valeur des arguments » et cetera.
Mais d'autre part, elle permet en fait ce qu'elle a déclaré contraire à la « valeur des arguments », « à une forte majorité d'évêques » , au « Souverain Pontife », et au bien commun de l'Eglise ».
Cette
contradiction dramatique inhérente à l'Instruction romaine Memoriale Domini,
son caractère intrinsèquement « autodestructeur », et la singulière
révélation qui s'en dégage, ont été tenus absolument cachés par l'épiscopat
français et la presse française, dans la
présentation qu'ils nous ont faite du «
nouveau » rite de la communion.
2
En date du 6 juin 1969, également signé par
Benno card. Gut préfet et Annibal Bugnini, une Lettre de
Cette Lettre de
Les
rédacteurs de cette Lettre se réclament de leur Instruction précédente et s'y
réfèrent. Mais ils l'enfreignent (ou la dépassent », si l'on préfère) sur deux
points qui aggravent encore l'auto-destruction » :
1-La
porte ouverte par l'Instruction à la communion dans la main était limitée très
explicitement : « là où s'est déjà introduit un usage différent : celui de
déposer la sainte communion dans la main ». Il est de notoriété publique et
incontestable, qu'à la date du 6 juin
2-Le rite nouveau dont parlait l'Instruction était
très clairement décrit et délimité : « déposer le pain eucharistique dans la
main », « déposer la sainte communion dans la main ». Ce n'était pas assez
:
En attendant le prochain document et la prochaine innovation.
3-
Non datée, cette Note a été publiée par le Conseil
permanent de l'épiscopat français « au terme de sa réunion qui s'est tenue à
Paris du 17 au 19 juin 1969 ».
Elle ne fait
aucune allusion à l'instruction Memoriale Domini : considérant sans
doute cette Instruction pour ce qu'elle a été en fait, un masque, un faux-nez,
une étape déjà « dépassée », huit jours après par ses propres rédacteurs Gut et
Bugnini.
«La majorité des évêques, déclare
«
substituée », insinue très exactement le contraire de la vérité.
« Le
Saint Père a pris en considération le fait que des désirs très nets s'expriment
dans certaines régions pour que les fidèles
puissent recevoir la sainte communion dans la main ». Le fait que de
tels « désirs » se soient « exprimés » a été pris en
considération pour être catégoriquement rejeté et non pour être accepté, ainsi
que le montre clairement la lecture de l'instruction Memoriale Domini. Autrement
dit, il a été pris en considération... négative.
Ce qui a été pris en considération positive, c'est un
autre fait : le fait qu'en certains lieux, la communion dans la main était
effectivement pratiquée par désobéissance aux lois en vigueur et aux volontés du
Saint Siège. On sait que depuis 1958, la ferme désobéissance est une
nouvelle source de droit et de la loi dans l'Eglise ( à condition toutefois que
cette désobéissance aille dans un certain sens et non dans un
autre).
Nous avons là une nouvelle confirmation de cet
état d'anarchie et de subversion où sont tombées les lois et les moeurs
ecclésiastiques. Nous y voyons aussi, une fois de plus, qu'elles n'y
sont pas tombées spontanément : elles y sont poussées par le comportement
de l'autorité.
Mais les évêques français voulaient cacher que la vraie cause, attestée par l'Instruction, de l'autorisation de la communion dans la main, est la désobéissance prise en considération positive et respectueuse par le Saint-Siège. D'ailleurs cette fois, ils n'avaient pas eux-
mêmes
désobéi ou guère : point assez en tous cas pour fonder un droit selon les
nouvelles procédures ecclésiastiques. L'usage
de la communion dans la main n'avait pas été introduit sur l'ensemble du
territoire français ; notre épiscopat avait manqué ce train-là. Les évêques
n'auraient pas pu dire aux français : -Parce que vous communiez déjà dans la
main et seulement « là où » vous avez eu le mérite de cette désobéissance, le
Saint Siège vous autorise à continuer. » Alors ils inventent autre chose dans
leur Note.
Le Conseil
permanent fait allusion aux « motifs pastoraux exposés par la conférence
épiscopale française » : exposés au Saint Siège, dans le secret, derrière le
dos des fidèles. Ce fameux exposé de motifs pastoraux n'a pas été publié.
L'examen de
ces trois documents, chacun en lui-même et tous comparés à chacun, fait donc
apercevoir une cascade d'incohérence, d'inexactitudes et de truquages
successifs. Nous ignorons dans quelle
mesure une telle constatation atteint leur éventuelle valeur juridique : mais
nous n'avons même plus envie de le savoir. Nous constatons que l'on nous trompe
à jet continu et cela nous suffit.