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Un regard sur le monde

politique et religieux

 

au 1 août 2008

 

N° 178

 

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

Benoît XVI

et

Monseigneur Lefebvre

 

 

De nombreux abbés  de la Fraternité sacerdotale saint Pie X s’appliquent, toujours,  et sans relâche,  à montrer les différences qui existent ou existeraient entre la pensée de Mgr Lefebvre qu’il nous a laissée dans ses divers ouvrages et celle de Benoît XVI. Leur but étant de montrer par là qu’aucun accord n’est encore possible avec le Vatican. Ils utilisent souvent des formulations anciennes du cardinal Ratzinger…Mais ils s’efforcent peu d’actualiser leur étude. Pourtant autre le cardinal, autre Benoît XVI !

 

Je voudrais quant à moi, analyser les derniers discours que Benoît XVI nous a donnés en Australie, et plus particulièrement celui  du 17 juillet, juste à son arrivée à Sydney, celui qu’il prononça devant les évêques et les séminaristes, le 18 juillet, dans la cathédrale de Sydney, et celui devant les jeunes, le dimanche 20 juillet.  Je vous ai donné ces textes in extenso dans les deux derniers numéros d’Item (Item n° 176, n°177). Vous pourrez les relire. Ils sont importants. Mon but est d’essayer de rapprocher les pensées du Pape et de Mgr Lefebvre sur des sujets très actuels : la liberté et la laïcisation des Etats modernes. Deux thèmes importants développés dans les homélies du pape.

 

 Il faut aujourd’hui, me semble-t-il, dans la vérité,  plus œuvrer à l’unité qu’à la division.  

 

Pendant les vacances, j’ai eu l’occasion de relire la vie de sainte Jeanne d’Arc du cardinal Xavier-Marie Touchet. A la page 175 de son premier tome, le cardinal défend la position de la sainte de la Nation et son désir de faire oublier les rancœurs et les colères entre les gens de « sang de France : « Plus il y aura de sang de France ensemble, en vérité mieux nous en vaudrons », disait-elle au roi Charles VII. C’est là une belle attitude ! Pourquoi ne pas imiter cet exemple entre tous ceux qui gardent la belle messe tridentine devant un modernisme toujours à l’intérieur de l’Eglise ? Le temps des divisions ne devrait plus jouer, chacun gardant pourtant ses spécificités.

 

J’utiliserai pour cela les deux ouvrages importants de Mgr Lefebvre : « Ils l’ont découronné » et  « C’est moi l’accusé qui devrait vous juger ». J’utiliserai plus particulièrement ses deux exposés fameux sur « la loi et la liberté ». Nous verrons combien la pensée du Pape exposé en Australie et celle de Mgr Lefebvre dans ces deux livres sont proches, l’un et l’autre développant la pensée de l’Eglise sur ses points fondamentaux et très actuels.

 

La doctrine de l’Eglise sur la liberté.

 

Mgr Lefebvre veut défendre la position doctrinale de l’Eglise sur la liberté contre ses détracteurs.

 

On reproche à l’Eglise de ne pas tenir suffisamment compte de la liberté. Elle est pourtant un bien absolu. Elle est le bien fondamental de l’homme, bien sacré et inviolable auquel il n’est pas permis de porter atteinte par quelque coaction que ce soit. Et cela en tout domaine. Cette liberté est sans limite : voilà enfin l’acquis définitif du siècle. A cette liberté, on ne peut lui porter la moindre limitation. Dès lors cette liberté sans limite doit être la pierre « angulaire » sur laquelle seront jugées toutes choses au point de vue du droit, de la morale, de la politique, de la vie sociale, du progrès. Sera équitable, juste et bon, dans une société, dans la vie de l’individu, tout ce qui aura pour base le principe de la liberté individuelle inviolée. Inique et pervers, tout le reste, toute limite ou contrainte. C’est le principe fondamental de l’homme moderne, du monde moderne. Qui se lève ou oserait se lever là contre, est ou serait exclu de la considération des hommes ou de  tout respect. Reste vrai  ce principe : « pas de liberté pour les ennemis de la liberté ».

 

Alors Mgr Lefebvre, comme le pape du reste, se pose la question : si donc la liberté est  le formel de l’être intelligent, n’est-il pas juste qu’on en fasse la base de tout, de tout l’ordre social et que tout lui soit sacrifié ?

 

C’est la grande question à laquelle il faut impérativement répondre pour trouver l’ordre et le vrai.

 

Mgr Lefebvre, dans son exposé de son livre « Ils l’ont découronné », prend le soin de faire les distinctions nécessaires. Le pape, s’il ne les fait pas directement dans ses homélies prononcées en Australie, les suppose cependant. Nous le verrons.

 

Liberté psychologique et liberté morale.

 

Voyons tout d’abord ce que dit Mgr Lefebvre.

 

Il faut, dit-il, distinguer différentes sortes de libertés, ce que ne fait pas le monde moderne qui vit ainsi dans la confusion.

 

Il faut distinguer la liberté psychologique de la liberté morale.

 

La liberté psychologique ou libre arbitre, propre aux êtres pourvus d’intelligence, est la faculté de se déterminer vers tel ou tel bien, indépendamment de toute nécessité intérieure. La liberté fait la distinction radicale de la personne humaine d’avec le monde animal. La caractéristique de la personne humaine étant d’être sui juris, de relever d’elle-même, et donc d’être responsable.

 

Le Pape a  un très bel exposé sur ce sujet. Il contemple la création sortie des mains de Dieu dans un style très poétique. Et de là, il s’élève à la création de l’homme fait à l’image et à la ressemblance de Dieu. C’est dans cette considération que se trouve la raison de la noblesse de l’homme, raison de son « libre arbitre » dont parle plus haut Mgr Lefebvre. Le sens est le même.

 

Le pape dit : « d'en haut,( i.e. de son avion) la vue de notre planète fut quelque chose de vraiment magnifique. Le miroitement de la Méditerranée, la magnificence du désert nord africain, la forêt luxuriante de l'Asie, l'immensité de l'Océan Pacifique, l'horizon sur la ligne duquel le soleil se lève et se couche, la splendeur majestueuse de la beauté naturelle de l'Australie, dont j'ai pu jouir au cours des deux derniers jours ; tout cela suscite un profond sentiment de crainte révérencielle. C'est comme si nous capturions de rapides images sur l'histoire de la création racontée dans la Genèse : la lumière et les ténèbres, le soleil et la lune, les eaux, la terre et les créatures vivantes. Tout cela est « bon » aux yeux de Dieu (cf. Gn 1, 1-2, 4). Plongés dans une telle beauté, comment ne pas faire écho aux paroles du Psalmiste quand il loue le Créateur : « Qu'il est grand ton nom par toute la terre » (Ps 8, 2) ?

 

Mais il y a bien plus encore, quelque chose que, du ciel, il nous est difficile de percevoir : des hommes et des femmes créés rien que moins à l'image et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1, 26). Au cœur de la merveille de la création, nous nous trouvons, vous et moi, la famille humaine « couronnée de gloire et d'honneur » (cf. Ps 8, 6). Quelle merveille ! Avec le psalmiste, nous murmurons : « Qu'est-ce que l'homme pour que tu penses à lui ? » (cf. Ps 8, 5). ».

 

C’est dans « cette gloire et cet honneur » que se fonde la racine du libre arbitre de l’homme.

 

De ce libre arbitre, « gloire et honneur » de l’homme, il faut distinguer la liberté morale. « Cette liberté morale, dit Mgr Lefebvre, concerne, elle,  l’usage du libre arbitre : usage bon si les moyens choisis conduisent à l’obtention d’une fin bonne, usage mauvais s’ils n’y conduisent pas. Vous voyez dès lors que la liberté morale est essentiellement relative au bien ».

 

Le pape lui constate que cette « dignité merveilleuse de la personne humaine, sortie des mains de Dieu pour le bien,  peut être détournée de sa finalité et au lieu de trouver le bien, c’est la décadence que l’on trouve. Le pape parle, lui, à l’occasion de cette liberté morale,  de « plaies » de « blessure », de « cicatrices » d’« hostilités, parfois même dangereuses » ; alors l’homme par cette liberté peut choisir « comme un poison qui menace de corroder ce qui est bon, de remanier ce que nous sommes et de nous détourner du but pour lequel nous avons été créés ».

 

Et le Pape rentre dans les détails et les détournements du bien possibles: « Les exemples ne manquent pas, vous le savez bien. Parmi les plus évidents, se trouvent l'abus d'alcool et de drogue, l'exaltation de la violence et la dégradation de la sexualité, qui sont souvent présentés par la télévision et par Internet comme un divertissement. Je me demande comment peut-on expliquer aux personnes qui sont réellement victimes de violences et d'abus sexuels que ces tragédies, reproduites sous forme virtuelle, doivent être considérées comme un simple « divertissement » !

 

Voilà ainsi, pour le pape, une liberté dévoyée, détournée de sa raison, du bien à faire, à choisir.

 

Benoît XVI rejoint, là,  Léon XIII, comme Mgr Lefebvre, qui définit la liberté morale, comme « la faculté de se mouvoir dans le bien ». La liberté morale, pour nos trois auteurs, n’est donc pas un absolu. Mais elle est toute relative au Bien, au Vrai.

 

Là, Benoît XVI parle très fortement : Il affirme : « Il y a aussi quelque chose de sinistre qui découle du fait que la liberté et la tolérance sont très souvent séparées de la vérité. Cela est alimenté par l'idée, largement diffusée aujourd'hui, qu'aucune vérité absolue ne peut guider nos vies. Le relativisme, en donnant une valeur quasi indistincte à toute chose, a rendu l'« expérience » plus importante que tout. En réalité, les expériences, sans tenir compte de ce qui est bon et vrai, peuvent conduire non pas à une liberté authentique, mais au contraire, à une confusion morale ou intellectuelle, à un affaiblissement des principes, à la perte de la propre estime, et même au désespoir »

 

Ainsi pour Benoît XVI, comme pour Mgr Lefebvre,  comme pour tout vrai philosophe, la liberté est un bien relatif, relatif au Bien et finalement à la loi. Ne pas le dire, c’est risquer, dit Benoît XVI d’être entraîné dans une « confusion morale et intellectuelle », à la « perte de toute estime » et ultimement au « désespoir ». Oui la liberté est relative au bien et ultimement à la loi. A la loi, et d’abord à la loi éternelle, poursuit Mgr Lefebvre, dans son livre « Ils l’ont découronné » p 33, « qui est dans l’intelligence divine, puis la loi naturelle qui est la participation à la loi éternelle par la créature raisonnable.  C’est cette loi qui détermine l’ordre posé par le créateur entre les fins qu’il assigne à l’homme et les moyens aptes à obtenir ces fins. La loi n’est pas antagoniste de la liberté, c’est au contraire une aide nécessaire et il faut dire cela aussi des lois civiles dignes de ce nom. Sans la loi, la liberté dégénère en licence qui est de « faire ce qui me plait ».

 

Le pape Benoît XVI rejoint là encore, totalement,  la pensée de Mgr Lefebvre lorsqu’il disait aux jeunes de  Sydney : « Chers amis, la vie n'est pas réglée par le hasard, elle n'est pas accidentelle. Votre existence personnelle a été voulue par Dieu, bénie par Lui et il lui a été donné un but (cf. Gn 1, 28) ! La vie n'est pas une simple succession de faits et d'expériences, même si de tels événements peuvent être utiles. Elle est une recherche de ce qui est vrai, bien et beau. C'est précisément en vue de tels objectifs que nous accomplissons nos choix, que nous exerçons notre liberté et en cela, c'est-à-dire en ce qui est vrai, bien et beau, nous trouvons le bonheur et la joie. Ne vous laissez pas tromper par ceux qui voient en vous de simples consommateurs sur un marché offrants de multiples possibilités, où le choix en lui-même devient le bien, la nouveauté se fait passer pour beauté, l'expérience subjective remplace la vérité ».

 

Il est clair que les pensées de nos deux auteurs se rejoignent  très heureusement. Le pape attire l’attention des jeunes contre cette « liberté » qui détourne le jeune du bien, alors qu’elle est, qu’elle doit être « une recherche de ce qui est vrai, bien et beau ». Le pape s’exprime ici d’une manière positive, Mgr Lefebvre, d’une manière négative lorsqu’il écrit dans son livre, à la page 34  « que la possibilité de faillir au bien loin d’être l’essence et la perfection de la liberté, est la marque de l’imperfection de l’homme déchu !Bien plus , comme l’explique saint Thomas d’Aquin, la faculté de péché n’est pas une liberté, mais une servitude : « celui qui commet le péché est esclave du péché » .

 

La pensée est bien identique, même si elles s’expriment d’une manière différente.

 

La pape a le mérite, en plus, de montrer quel est le « détrousseur » de cette liberté dévoyée : la consumérisme moderne qui dénature l’essence des choses faisant passer l’accidentel pour l’essentiel,  « la nouveauté pour la beauté…le  libre choix pour le bien ». Le monde moderne ne développe plus le bien et donc la loi qui le permet d’atteindre  mais « le choix en lui-même », pour lui-même. 

 

Ainsi nous comprenons, en lisant le Pape Benoît XVI et Mgr Lefebvre que « nous n’avons pas le droit de faire quoi que ce soit qui nous éloigne du Bien et donc de Dieu ; sinon nous n’usons pas de notre liberté, nous nous livrons à la licence. Il faut bien voir la distinction : la licence s’étend à n’importe quoi, c’est faire tout ce que l’on veut. La liberté, au contraire, c’est la faculté de se mouvoir dans le bien ».

 

Or ce bien, cette loi, le Christ nous « l’offre », nous dit Benoît XVI. Il est même « le Chemin, la Vérité et la Vie ». Le mot est de Benoît XVI : « Le Christ offre davantage ! Bien plus, il offre tout ! Seulement Lui, qui est la Vérité, peut être le Chemin et donc aussi la Vie. Ainsi, le « chemin », que les Apôtres portèrent jusqu'aux extrêmes limites de la terre, est la vie en Christ. C'est la vie de l'Église. Et l'entrée dans cette vie, dans la vie chrétienne, se fait par le Baptême ».

 

C’est alors l’occasion pour le pape Benoît XVI de faire un bel exposé sur le baptême et sa raison qui est de faire de l’homme « une créature nouvelle » : vivant la loi nouvelle de l’Evangile. Tel est le langage de la foi. Elle est la plus belle des lois. Elle nous donne la plus belle des lois. Benoît XVI s’élève ici au sublime : « La foi nous enseigne qu'en Jésus Christ, Parole incarnée, nous parvenons à comprendre la grandeur de notre propre humanité, le mystère de notre vie sur la terre et le destin sublime qui nous attend au Ciel La foi nous enseigne, en outre, que nous sommes des créatures de Dieu, faites à son image et à sa ressemblance, dotées d'une dignité inviolable et appelées à la vie éternelle » ( 18 juillet)

 

 Et refuser de reconnaître cette sublime dignité surnaturelle est gravissime, nous dit le pape : « Là où l'homme est diminué, c'est le monde qui nous entoure qui est diminué; il perd sa signification ultime et s'écarte de sa finalité. Ce qui en ressort, c'est une culture non pas de la vie, mais de la mort. Comment peut-on considérer cela un « progrès » ? Au contraire, c'est un pas en arrière, une forme de régression qui, en définitive, assèche les sources mêmes de la vie, de l'individu comme de la société tout entière ».

 

La Laïcisme d’Etat

 

Et Mgr Lefebvre comme Benoît XVI parlent tous deux, à cet endroit, du  laïcisme de l’Etat, de la sécularisation de l’Etat. Mgr Lefebvre cite et analyse, en particulier, l’encyclique de Léon XIII « Immortale  Dei » qui condamne cette proposition : « l’Etat ne se croit lié à aucune obligation envers Dieu ». Dans sa condamnation, il est rejoint par Benoît XVI.  Benoît XVI  dénonce, et avec quelle force, ce libéralisme d’Etat : « Beaucoup prétendent aujourd'hui que Dieu doit être laissé de côté et que la religion et la foi, acceptables sur le plan individuel, doivent être, ou exclues de la vie publique, ou utilisées uniquement pour poursuivre des objectifs pragmatiques limités. Cette vision sécularisée tente d'expliquer la vie humaine et de modeler la société en se référant peu ou sans se référer du tout au Créateur. Il est présenté comme une force neutre, impartiale et respectueuse de chacun. En réalité, comme toute idéologie, le sécularisme impose une vision globale. Si la présence de Dieu est insignifiante dans la vie publique, alors la société pourra être modelée d'après une image dépourvue de Dieu. Mais quand Dieu est éclipsé, notre capacité de reconnaître l'ordre naturel, le but et le « bien » commence à s'évanouir. Ce qui avec ostentation a été promus comme conquête de l'intelligence humaine, s'est bien vite manifesté comme folie, avidité et exploitation égoïste. C'est ainsi que nous nous sommes rendu toujours plus compte qu'il est nécessaire d'être humbles face à la complexité délicate du monde de Dieu ».

 

Il est difficile d’être plus clair !

 

C’est cette même pensée que Mgr Lefebvre nous exposait à Ecône.

 

Ces affirmations n’ont pas été prononcées par le pape Benoît XVI  à la légère, d’une manière inconsidérée. Le pape y revient en effet le jour suivant, devant les évêques et les séminaristes. Avec une clarté étonnante, de ce sécularisme,  il en dénonce encore une fois, les graves conséquences. Il leur dit : « Trop souvent, cependant, nous nous retrouvons immergés dans un monde qui voudrait mettre Dieu « de côté ». Au nom de la liberté et de l'autonomie humaine, le nom de Dieu est mis sous silence, la religion est réduite à une dévotion personnelle et la foi est écartée de la place publique. Parfois, une mentalité de ce genre, totalement opposée à l'essence de l'Évangile, peut même en venir à obscurcir notre compréhension de l'Église et de sa mission. Nous aussi, nous pouvons être tentés de réduire la vie de foi à une simple question de sentiment, affaiblissant ainsi sa capacité d'inspirer une vision cohérente du monde»

 

Et là encore, le pape, de cet oubli de Dieu,  en rappelle les conséquences politiques : « Et pourtant l'histoire, y compris celle de notre temps, nous démontre que la question de Dieu ne peut jamais être tue, ainsi que l'indifférence à la dimension religieuse de l'existence humaine, en dernière analyse, diminue et trahit l'homme lui-même…. Là où l'homme est diminué, c'est le monde qui nous entoure qui est diminué; il perd sa signification ultime et s'écarte de sa finalité. Ce qui en ressort, c'est une culture non pas de la vie, mais de la mort. Comment peut-on considérer cela un « progrès » ? Au contraire, c'est un pas en arrière, une forme de régression qui, en définitive, assèche les sources mêmes de la vie, de l'individu comme de la société tout entière ».

 

 

Ailleurs, le pape va encore rappeler les conséquences  de  cet indifférentisme religieux de l’Etat. Il entraîne, dit-il,  l’irrespect de la loi naturelle, de la vie, Ces conséquences sont dénoncées par Mgr Lefebvre comme par le Pape. Le pape s’exprime là aussi très fortement :

 

« Savons-nous reconnaître que la dignité innée de tout individu s'appuie sur son identité la plus profonde, étant image du Créateur, et que, par conséquent, les droits humains sont universels et se basent sur la loi naturelle, et qu'ils ne dépendent ni des négociations ni de la condescendance, et bien moins encore des compromis ? C'est ainsi que nous sommes amenés à réfléchir sur la place qu'occupent dans nos sociétés les indigents, les personnes âgées, les immigrés, les sans-voix. Comment se fait-il que la violence domestique tourmente tant de mères et d'enfants ? Comment se fait-il que l'espace humain, le plus beau et le plus sacré qu'est le sein maternel, soit devenu un lieu de violence indicible ? »

 

Combien cette dernière phrase est belle et émouvante ! « L’avortement, transformant le sein maternel, « en un lieu de violence indicible » ! Mgr Lefebvre adressait-il, lui aussi, le jour même du vote de la loi sur l’avortement en France,  un « télégramme de supplique » à chaque député et sénateur. Ultime démarche d’un évêque catholique. En vain !

 

Alors face à ce monde qui oublie Dieu et qui détruit la vraie liberté morale de beaucoup, transformant la liberté en vraie licence, qui se détruit lui-même, Benoît XVI donne le véritable idéal de la civilisation chrétienne que chacun des jeunes doit cultiver, rechercher, enseigner. Il le donnait aux séminaristes, dans la cathédrale de Sydney, le samedi matin. Mgr Lefebvre ne l’aurait nullement refusée, ni dédaignée, lui qui écrivait en l’ultime page de son livre : « Ils l’ont découronné » : « Tandis qu’ils détruisent, nous avons le bonheur de reconstruire…Notre Père que votre Règne arrive ».

 

«  Fortifiée par l'Esprit et s'inspirant d'une riche vision de foi, une nouvelle génération de chrétiens est appelée à contribuer à l'édification d'un monde où la vie est accueillie, respectée et aimée, non rejetée ou ressentie comme une menace et par conséquent détruite.

 

Une nouvelle ère où l'amour n'est pas avide et égoïste, mais pur, fidèle et sincèrement libre, ouvert aux autres, respectueux de leur dignité, cherchant leur bien et rayonnant la joie et la beauté.

 

Une nouvelle ère où l'espérance nous libère de la superficialité, de l'apathie et de l'égoïsme qui mortifient nos âmes et enveniment les relations humaines.

 

Chers jeunes amis, le Seigneur vous demande d'être des prophètes de cette nouvelle ère, des messagers de son amour, capables d'attirer les personnes au Père et de bâtir un avenir plein d'espérance pour toute l'humanité.

 

Le monde a besoin de ce renouvellement ! Dans nombre de nos sociétés, à côté de la prospérité matérielle, le désert spirituel s'étend : un vide intérieur, une crainte indéfinissable, un sentiment caché de désespoir. Combien de nos contemporains se sont creusés des citernes fissurées et vides (cf. Jr 2, 13) en cherchant désespérément le sens, la signification ultime que seul l'Amour peut donner ? C'est là le don immense et libérateur que l'Évangile apporte : il nous révèle notre dignité d'hommes et de femmes créés à l'image et à la ressemblance de Dieu. Il nous révèle la sublime vocation de l'humanité qui est de trouver sa propre plénitude dans l'amour. Il renferme la vérité sur l'homme, la vérité sur la vie. »