ITEM

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 Un regard sur l’actualité politique et religieuse

 Au 10 novembre  2005

 N°65

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

 

 

 

 

ET SI LE MOT DE "PRÉSIDENCE"

CACHAIT UNE NOUVELLE THÉOLOGIE,

LA THÉOLOGIE PROTESTANTE ?

 

 

 

 

 

 

Ces derniers jours, sur le site de Zenit, j’ai pris connaissance, dans la traduction  française  qu’elle donne,  des « 50 propositions », présentées par les pères synodaux au pape Benoît XVI, le dimanche 23 octobre, à l’issue du Synode. Ces propositions n’ont pas  la perfection des textes – chapitres et canons -  du Concile de Trente sur le même sujet : l’Eucharistie. Loin de là. On pourrait se distraire à mettre en parallèle les textes sur le même sujet et  les comparer. On verrait la différence de qualité.

 

Je donne ici juste un seul exemple. Les deux « assemblées », celle de Trente comme celle du XI Synode des évêques rappellent le nécessaire respect dû à la Sainte Eucharistie

 

Voici les deux textes.

 

D’abord celui du XI Synode du  mois d’octobre :

 

Proposition 34

 « Le respect à l’égard de la sainte Eucharistie

Devant l’Hostie consacrée il convient d’observer la pratique de la génuflexion ou d’autres gestes d’adoration selon les différentes cultures. On rappelle l’importance de s’agenouiller lors des moments les plus importants de la prière eucharistique, en signe d’adoration et de louange au Seigneur présent dans l’Eucharistie. On encourage par ailleurs l’action de grâce après la communion, également par un temps de silence ».

 

Voici maintenant celui du Concile de Trente :

« Le culte et la vénération qui sont dus à ce très saint sacrement.


Parce que le Christ notre Rédempteur a dit qu'était vraiment son corps ce qu'il offrait sous l'espèce du pain Mt 26,26-29 Mc 14,22-25 Lc 22,19 1Co 11,24-26 on a toujours été persuadé dans l'Eglise de Dieu - et c'est ce que déclare de nouveau aujourd'hui ce saint concile - que par la consécration du pain et du vin se fait un changement de toute la substance du pain en la substance du corps du Christ notre Seigneur et de toute la substance du vin en la substance de son sang. Ce changement a été justement et proprement appelé, par la sainte Eglise catholique, transsubstantiation.
C'est pourquoi il ne reste aucune raison de douter que tous les chrétiens selon la coutume reçue depuis toujours dans l'Eglise catholique, rendent avec vénération le culte de latrie, qui est dû au vrai Dieu, à ce très saint sacrement.
En effet, celui-ci ne doit pas être moins adoré parce qu'il a été institué par le Christ Seigneur pour nous nourrir Mt 26,26-29 . Car nous croyons qu'en lui est présent ce même Dieu que le Père éternel a introduit dans le monde en disant "Et que tous les anges de Dieu l'adorent " He 1,6 Ps 96,7 lui que les mages ont adoré en se prosternant Mt 2,11 , lui enfin dont toute l'Ecriture témoigne qu'il fut adoré en Galilée par les apôtres Mt 28,17 Lc 24,52
En outre, le saint concile déclare que la coutume a été pieusement et religieusement introduite dans l'Eglise de Dieu de célébrer chaque année, en un jour de fête particulier, ce sacrement éminent et vénérable dans une vénération et une solennité spéciales, et de porter celui-ci avec respect et honneur dans des processions à travers les rues et les places publiques.
Il est, en effet, très juste qu'il y ait des jours saints fixés où tous les chrétiens, par des manifestations singulières et extraordinaires, attestent de leur reconnaissance et de leur mémoire envers leur commun

 

 

Seigneur et Rédempteur pour un bienfait si ineffable et vraiment divin, par lequel sont représentés sa victoire et son triomphe sur la mort….La coutume de conserver la sainte eucharistie en un lieu sacré est si ancienne que le siècle du concile de Nicée la connaissait déjà. En outre, porter cette sainte eucharistie aux malades et, pour ce faire, la conserver soigneusement dans les églises non seulement est chose très équitable en même temps que conforme à la raison, mais est aussi prescrit par de nombreux conciles et observé par une très ancienne coutume de l'Eglise catholique. C'est pourquoi ce saint concile a statué qu'il fallait garder absolument cette coutume salutaire et nécessaire ».

 

On appréciera ! C’est là un simple exemple…

 

Mais je vais revenir prochainement  sur l’ensemble de ce texte…

 

Ceci dit, dans ma lecture des « 50 propositions synodales », de ces derniers jours, mon attention a été attirée sur les propositions 33 et 37.

 

Dans ces deux propositions, le prêtre est encore défini comme « président ». Il est celui qui préside la célébration eucharistique.

 

Dans la proposition 33, il est dit : « Le vrai sujet qui agit dans la liturgie est le Christ ressuscité et glorifié dans l’Esprit Saint. Mais le Christ inclut l’Eglise dans son action et dans le don de lui-même. Le prêtre est celui qui préside, de manière irremplaçable, la célébration eucharistique tout entière, du salut initial à la bénédiction finale ; car, dans la célébration liturgique, le prêtre, en vertu de son ordination, représente Jésus Christ, chef de l’Eglise, et à sa manière, également l’Eglise elle-même ».

 

Il est vrai de dire que le « prêtre, en vertu de son ordination sacerdotale, « représente »  Jésus-Christ ». Mais il est faux de dire que le prêtre « préside » l’Eucharistie. « Présidence », « Représentation », les deux mots sont, ici,  accolés. Ils s’appellent l’un l’autre. Ils se précisent l’un l’autre. Cette « représentation » ne  confère-t-elle donc  au prêtre qu’un rôle de « présidence » ? Est-elle une « présidence » ? On retrouve là encore la définition originelle de l’article 7 –de l’ « Institutio Generalis » de la Constitution apostolique de Paul VI : « Missale romanum ».

 

Dans la proposition 37, il est dit : « Les pères synodaux reconnaissent la grande valeur des concélébrations, notamment celles présidées par l’évêque et ses prêtres, les diacres et les fidèles ».

Là aussi on fait une nette référence à la notion de « présidence». Mais il est  très surprenant,  que l’on dise que cette présidence est assurée, non seulement par l’évêque et ses prêtres »,  mais aussi par  « les diacres et  les fidèles ». On les excluait de cette fonction de présidence dans l’article 33…On les retrouve ici dans cette fonction !

 

J’avais abordé cette notion de présidence, d’une manière plus particulière, lorsque je me trouvais en Normandie, dans un numéro de « Nouvelles de Chrétienté », celui d’octobre 1997, au sujet d’un tract d’invitation émanant des autorités du sanctuaire de Lisieux pour clôturer l’année thérésienne. J’étais également revenu sur cette question en juillet 1999 à l’occasion d’une conférence donnée à Rome par le cardinal Mayer. Je viens de relire les deux articles

 

Je vous les redonne dans « ce Regard sur le monde » d’Item de cette semaine.

 

J’avais intitulé l’article sur la conférence du cardinal : « Lorsque Rome reconnaît le bien-fondé de nos critiques ».  Les considérations du  cardinal Mayer sur la notion de « présidence » corroborent notre

 

  

propre opinion. D’où son intérêt. Et le second, celui a propos du tract de Lisieux : « Et si le mot de « présidence » cachait une nouvelle théologie, la théologie protestante » ?

 

 

Voici les articles en question.

 

 

1- « Lorsque Rome reconnaît le bien-fondé de nos critiques ». 


« Le jeudi 17 Juin 1999, je recevais sur le site Internet du Prieuré Saint Jean-Eudes, un courrier du "Centre International d'Etudes Liturgiques", le C.I.E.L.

 

Il me fut remis, de main à main, par la responsable du site.

 

Elle me le tend. Je le prends et le lis sur place. Je ne fais pas attention, dès l'abord, au titre du communiqué :

 

"Conférence de son Eminence le cardinal Mayer". Ce document émane du C.I.E.L., ça ne me dit rien au départ.

 

Je lis toutefois les quatre pages reçues, je suis curieux…

 

Mon attention est éveillée à la lecture de la page 3 du document, à ces mots :

 

- "A côté des hypothèses radicales du professeur Herbert Haack (prêtre suisse, professeur, un temps, en exégèse à Tubingen), il  y a actuellement une tendance "intra-ecclésiale", "intra-catholique" qui évite d'utiliser le terme "prêtre" en y substituant celui de président, spécialement dans l'anglais "presider" comme cela a été employé dans la longue lettre émanant d'éminents évêques des Etats-Unis".

 

Ces mots, identifiant le prêtre - lors de la célébration eucharistique - à un président, attirent mon attention.

C'est très juste. Je relis le passage.

 

Je poursuis :

- "On parle, en général, du Président d'une société démocratique, nous sommes par conséquent conscients du fait que, avec cette expression, nous entrons - que nous le désirions ou non - dans une interprétation du rôle de président qui se trouve élu par une assemblée, pour être aussi "déposé" par l'assemblée".

 

Intéressant, intéressant, me dis-je !

 

Je continue ma lecture.

- "Malheureusement le goût pour ce titre de président semble être largement répandu dans l'Eglise".

 

Je suis tout à fait d'accord avec cette analyse de la situation.

 

Je me souvenais - tout en lisant - de l'article que j'avais écrit sur ce thème dans le Bulletin Saint Jean-Eudes - déjà - en Octobre 1997. Je l’avais intitulé : "Et si le mot de "Présidence" cachait une nouvelle théologie, la théologie protestante ?".

 

Je poursuis donc ma lecture toujours plus attentif.

 

 

- "J'ai pu entendre, une fois, une personnalité ecclésiastique romaine importante émettre les trois assertions suivantes :

- Qu'est-ce que le siège sacerdotal ? C'est le siège présidentiel.

      - Qu'est-ce que la prière eucharistique ? C'est la prière présidentielle.

 

      - Que doit apprendre le prêtre? L'art de présider."

 

L'auteur ne donne pas le nom de cette personnalité ecclésiastique romaine importante.

Je gage fort que ce soit Mgr. Bugnini, "l'animateur", le "penseur" de la réforme liturgique de la Sainte Messe, publiée en 1969.

 

Je suis de plus en plus interloqué, intéressé. En mon cœur, je me réjouis de ce constat.

C'est vrai.

 

L'auteur poursuit son analyse :

- "Devant une telle déformation de ce qu'est le sacerdoce, on reste stupéfait".

Oh combien !

Intéressé plus que jamais, je prolonge ma lecture et je lis cette belle affirmation doctrinale :

 

- "Le prêtre consacre, et les paroles de la consécration ne sont pas un simple récit de l'institution, mais elles sont les paroles du Seigneur dites par l'intermédiaire du prêtre, et c'est cette identification (…) du Seigneur et du prêtre" qui est la définition la plus adéquate du sacerdoce catholique.

 

Je finis enfin la lecture.

Mon attention est vive.

Mais qui a donc écrit ce texte ? De qui émane-t-il ?

 

Je reprends la page 1 et je vois que ce texte n'est rien d'autre qu'une conférence du cardinal Mayer, conférence prononcée par son Eminence à l'occasion de la présentation officielle des Actes du colloque du C.I.E.L., à Rome, le 17 mars 1999.

Un cardinal a écrit cela.

Le cardinal Mayer.

C'est formidable.

 

J'essaye de rafraîchir ma mémoire : mais qu'est-ce que le C.I.E.L., ce Centre International d'Etudes Liturgiques ?

Je téléphone à mon confrère, Monsieur l'abbé Bonneterre qui connaît tout en matière liturgique.

Il me met sur la piste.

Ce doit être un "centre liturgique" organisé dans la mouvance de la Fraternité Saint-Pierre, de Dom Gérard, créé après la publication du Motu Proprio "Ecclésia Dei adflicta" du pape Jean-Paul II.

Il ne se rappelle plus très bien du nom du fondateur.

Je le remercie de ces renseignements précieux qui me mettent sur la voie.

 

Sur l'en-tête du papier, je vois le numéro de téléphone, je vois l'adresse : 84 avenue Aristide Briand à Montrouge, en France.

Cette adresse "m'interpelle"…

Mais c'est l'ancien centre du M.J.C.F !

C'est aujourd’hui l’adresse du C.I.E.L.

 

Je téléphone, tombe sur une aimable secrétaire. Elle me donne toutes les précisions que je désirais sur le Centre, me rappelle le nom du Président, Loïc Mérian…

A cette agréable dame, je commande le livre : les Actes de ce 4ème Colloque du C.I.E.L.

Je reçois le livre deux jours plus tard.

C'est une affaire qui tourne. Deo Gratias !

 

 

Bien informé maintenant sur le C.I.E.L., je reprends le texte du Cardinal reçu sur Internet.

Il fait un éloge marqué du C.I.E.L. Il présente le Centre, répond à quatre questions.

 

Ø     Par qui le C.I.E.L. a-t-il été fondé ?  - Par des fidèles catholiques laïcs "qui collaborent très heureusement avec les prêtres sous la conduite des évêques unis au Pape"…

 

Ø     Pourquoi a-t-il été fondé par des laïcs ?  - Le Cardinal s'exprime joliment : "Mais, il faut tout de suite préciser, des laïcs non pas rebelles, des laïcs qui ne sont pas plus ou moins arrogants dans leur souhait d'une Eglise nouvelle mais des laïcs qui sont profondément catholique - bref des laïcs qui, eux, professent la foi de l'Eglise dans sa totalité, avec orthodoxie, qui acceptent dans un esprit d'obéissance, l'entière autorité sacramentelle, doctrinale et canonique de l'Eglise. Des laïcs qui ne se placent pas au même niveau que les institutions officielles, qui n'exercent aucun "magistère parallèle", qui ne s'attribuent pas un quelconque droit de réglementer et de diriger la liturgie, mais qui, d'un côté, se prévalent des dispositions contenues dans ce même droit canonique au sujet des associations autonomes de fidèles, lesquelles sont libres de, et dans un certain sens incitées à faire connaître à l'autorité ecclésiale, leurs propres désirs, et peut-être aussi parfois leurs propres craintes".

 

Ø     Par quels moyens le C.I.E.L. tente-t-il d'obtenir, de respecter, d'effectuer sa mission ? - "En cherchant à entretenir un contact avec tous, de la façon la plus large possible, en recherchant un contact personnel avec de nombreux évêques - et ceci doit être souligné parce que le contact personnel aide toujours beaucoup - il ouvre les cœurs et l'esprit vers une compréhension mutuelle. Et puis par les professeurs d'université de haut niveau qui participent aux colloques, une note scientifique est donnée aux travaux ainsi qu'un caractère interdisciplinaire, une internationalisation déclarée, accentuée, et une "internationalité" de publication : de fait, les Actes sont imprimés en trois langues - et bientôt cinq - ces trois langues étant le français, l'anglais et l'allemand. Les Actes bénéficient de cette façon d'une diffusion toujours croissante".

 

Le cardinal, ensuite, présente les Actes des trois premiers colloques. Il en rappelle les thèmes. De très beaux sujets, à la vérité :

- Les Actes de 1995, "La liturgie, trésor de l'Eglise" présente à nos yeux la splendeur de la liturgie ; sa magnificence, et même si elle est parfois livrée à la "créativité sauvage" de chacun, elle demeure toujours un trésor de l'Eglise et elle doit par conséquent, être considérée avec une grande vénération et une grande délicatesse.

- Les Actes de 1996, "Vénération et administration de l'Eucha-ristie", nous confrontent au mystère central de la vie ecclésiale.

- Les Actes de 1997, "Autel et sacrifice", ont un titre très significatif dans la mesure où le texte souligne immédiatement qu'il ne s'agit pas seulement d'une 'table", qu'il ne s'agit pas seulement du "banquet", d'une "repas", mais qu'il s'agit d'un autel qui évoque un sacrifice.

- Les thèmes des colloques fournissent un témoignage de la perception des problèmes "sensibles", qui intéressent l'Eglise d'aujourd'hui dans le domaine de la liturgie, et également dans les domaines de la doctrine, de la foi et de la pastorale.

 

Il analyse enfin les Actes du 4ème Colloque, raison de la conférence du Cardinal à Rome, le 17 mars 1999, consacrés "Au sacerdoce du Christ et de la participation unique de notre sacerdoce ministériel à ce sacerdoce unique du Christ".

 

Et c'est dans cette partie de sa conférence que l'on peut lire cette belle critique sur la notion de présidence qui est en train - dans l'Eglise "intra-ecclésiale" - de falsifier la vraie nature du sacerdoce.

 

Dès que j'ai reçu le livre du C.I.E.L., je l'ai lu intégralement, près de 320 pages. Bonne lecture de vacances…

 

Ce quatrième colloque - dont le livre nous donne les Actes - c'est, de fait, tenu au Foyer de Charité, La Part-Dieu, à Poissy, en France, dans le diocèse de Versailles.

 

Il y eut, lors de ce Colloque, treize intervenants, plutôt jeunes. J'ai été intéressé par trois ou quatre interventions :

- celle de Monsieur l'abbé Alain Contat sur la symbolique liturgique,

 

 

 

- celle du Père Martin Edward - un prêtre anglais - sur le thème : "la participation active des fidèles dans le magistère récent".

 

Cette communication serait digne d'être publiée dans le Bulletin Saint Jean-Eudes ainsi que celle du Père Ignacio Barreiro (Uruguay) qui fait un juste complément à la  précédente conférence : "La notion de participation dans les travaux préparatoires au schéma sur la liturgie du Concile Vatican II". De bien intéressantes communications. J'ai également fort apprécié la conférence de Mgr. Walter Brandmüller, un allemand,  sur "La prédication des laïcs à la lumière de la Tradition", même celle de monsieur l'abbé Franck Quoëx (un prêtre français de la région d'Annecy) : "Explication du rite de l'ordination sacerdotale dans le rite romain".

 

 

En lisant ce livre, j'apprends les personnalités et les fondations qui fréquentent ce centre : le monastère de Randol : le Révérend Père Field y fit une communication en 1995 - le monastère du Barroux : Dom Gérard y fut présent également cette même année - le monastère de Triors - les abbés de la Fraternité du Christ-Roi - les abbés de Mgr. Wladimir - les abbés de la  Fraternité Saint-Pierre. Ils sont reçus par Mgr. Lagrange, évêque de Gap. Les journalistes de La Nef fréquentent aussi ce Centre : Christophe Geffroy, Philippe Maxence. Mickael Davies, président international d'Una Voce…

 

Et j'apprends enfin le thème du prochain colloque le cinquième : L'histoire et la théologie du Missel Romain. Il se tiendra des 11 au 13 Novembre prochain. On ne donne pas encore le lieu.

 

Je félicite Loïc Mérian de cette initiative, la création du C.I.E.L. qui a vu le jour en 1994.

Je lui ai écrit pour le féliciter et reprendre contact, et lui dire mes compliments. Si l'on veut refaire le front commun - nécessaire et utile - dans le respect de l'histoire - des histoires - et des spécificités de chacun, il faut bien recréer des liens…

 

Mais au-delà de toutes ces savantes interventions de théologie trop souvent positive, ce sont les propos du cardinal Mayer qui m'intéressent au plus haut point.

 

Le souci qu'il exprime - dans cette conférence - sur l'identité menacée du prêtre est bien juste, malheureusement.

 

Nous le disons depuis longtemps.

 

C'est un des points essentiels qu'a touché la nouvelle théologie de la réforme liturgique de la messe jusqu'à en falsifier la notion.

 

C'est là une des raisons qui nous ont fait refuser "l'Ordo Missae" de 1969… et nous le font encore refuser.

 

Cette critique que confirme aujourd'hui le Cardinal a été notée, relevée, exposée dès 1969, lors de la présentation au Souverain Pontife, le pape Paul VI, du Bref examen critique par les cardinaux Ottaviani et Bacci.

 

Les cardinaux attiraient précisément l'attention du Pontife sur ce sujet.

 

Souvenez-vous de l'article 7 "La messe ou repas du Seigneur est l'assemblée du peuple de Dieu qui se réunit, présidée par le prêtre…"

Le prêtre, ici, est bien définit comme un président d'assemblée. Son action à l'autel est bien une présidence.

 

Souvenez-vous de l'article 10 définissant la prière eucharistique comme une prière présidentielle : "Merito igitur orationes praesidentiales nominantur".

 

Souvenez-vous de l'article 12 obligeant le prêtre à prononcer les prières eucharistiques - et donc les paroles de la consécration - à "haute et intelligible voix", "natura partium praesidentialium exigit ut clara et elata voce proferantur".

 

Vous n'imaginez tout de même pas un président parlant à voix basse… devant son assemblée…

 

 

Eminence, vous dites que "le goût pour ce titre de président semble être largement répandu dans l'Eglise".

Ce sont vos propres paroles.

C'est très vrai mais à qui la faute ?

Cette nouvelle théologie du prêtre-président ne se trouve pas seulement dans la bouche "d'une personnalité ecclésiastique romaine importante". Vous ne dites pas laquelle.

Elle ne se trouve pas seulement "dans une longue lettre émanant d'éminents évêques des Etats-Unis", ce que vous déplorez à juste titre.

Elle ne se trouve pas seulement dans les exposés "des luthériens très libéraux".

 

 

Cette nouvelle théologie se trouve explicitement enseigné dans l'exposé doctrinal de la nouvelle messe - l'Institutio generalis - et c'est là, le drame.

 

Vous dites être "stupéfait".

Vous dites être "malheureux" d'avoir entendu cette nouvelle théologie dans la bouche de ce grand personnage.

Vous dites être stupéfait d'avoir entendu de cette bouche les trois assertions suivantes :

¨     Qu'est-ce que le siège sacerdotal ? C'est le siège présidentiel.

¨     Qu'est-ce que la prière eucharistique ? C'est la prière présidentielle.

¨     Que doit apprendre le prêtre? L'art de présider.

 

La prière eucharistique, c'est la prière présidentielle. Mais, Eminence, c'est la thèse de l'article 10 et 12 de l'Institutio generalis.

 

Le siège sacerdotale, c'est le siège présidentiel. Le rôle du prêtre, c'est de présider. Il faut lui enseigner cet art.

 

Mais, Eminence, c'est la thèse de l'article 7.

 

Cette nouvelle thèse du prêtre-président, Eminence, n'est pas seulement la thèse d'un jour, d'un professeur éminent. Elle n'est pas seulement la thèse d'évêques américains. Elle est aussi la thèse de l'Institutio generalis.

Et dès lors, cette nouvelle théologie, Eminence, bien naturellement nourrit la pensée, l'action, le ministère et des prêtres et des évêques catholiques.

 

Non seulement la pensée de votre illustre personnage.

Non seulement la pensée de l'épiscopat américain.

Mais aussi la pensée de prêtres et d'évêques français.

 

Cette théologie nouvelle s'infiltre partout.

"…il  y a actuellement - dites-vous - une tendance "intra-ecclésiale", "intra-catholique" qui évite d'utiliser le terme "prêtre" en y substituant celui de président"

 

Nous en sommes convaincus

Nous l'avons, nous-mêmes, constaté dans le diocèse de Bayeux-Lisieux… déjà en 1997 lors de la clôture de l'année thérésienne.

Nous avons été invité par le recteur, très aimablement, aux diverses manifestations des cérémonies de clôture.

Nous avons reçu comme tous les fidèles du diocèse, comme tous les bienfaiteurs de la Basilique, une invitation, un dépliant format A4.

On nous invitait - entre autres - :

Ø    le samedi 27 Septembre 1997:

à participer, à 21 h. 30, à la messe d'ouverture des Fêtes solennelles, présidée par Mgr. Pican, évêque de Bayeux-Lisieux, à la Basilique.

 

 

Ø    Le dimanche 28 Septembre 1997 :

à 10 h. 30, à la messe pontificale, présidée par le cardinal Poupart.

 

Vous le voyez, Eminence, la théologie nouvelle sur le sacerdoce-président s'étend largement.

Elle s'infiltre partout "intra-catholicos" :

- des instances secrètes,

- aux écrits solennels - une constitution apostolique (NDLR …et aujourd’hui aux écrits synodaux…du XI Synodes des évêques…)

- au fin fond des sacristies grandes et petites.

 

Et s'il y avait un lien de cause à effet…

 

Il est impératif de corriger cette Institutio generalis et de corriger le nouvel Ordo Missae.

 

La paix de l'Eglise est à cette seule condition.

 

Lorsque Rome reconnaît le bien fondé de nos critiques :

 aujourd'hui : de la nouvelle théologie sur le sacerdoce-président,

demain : sur la liberté religieuse.

*

.

Vous lirez avec bonheur, je pense,  l'article que je consacrais à ce sujet dans le bulletin d'Octobre 1997.

Bonne lecture.

          C'est un peu le journal d'un homme libre. J'aime ça.

2 -  « Et si le mot de « présidence » cachait une nouvelle théologie, la théologie protestante » ?

 

 

« Nous avons reçu, mon confrère et moi-même, une invitation aux ultimes cérémonies de la fin de l'année thérésienne, un A4 trois volets recto verso, deux couleurs.  C'est une belle présentation, de bon goût. 

Je regarde le programme des messes. Je vois l'annonce d'une messe d'ouverture - le 27 Septembre - le Samedi, par Monseigneur PICAN, l'annonce d'une Messe pontificale, le Dimanche 28 Septembre. La présence du cardinal POUPART est, en effet, annoncée.  Il sera le légat pontifical, "l'envoyé spécial" du pape JEAN-PAUL II.  Merveilleux !  Merveilleux !

 

 

 

Un mot pourtant attire mon attention, pas immédiatement mais sans retard cependant : on nous dit que la Messe d'ouverture sera présidée par Monseigneur PICAN :

 

Samedi 27 Septembre 1997 :

21 h. 30  - Messe d'ouverture des Fêtes solennelles, présidée par Monseigneur PICAN, évêque de Bayeux et Lisieux (à la Basilique)

 

Je suis interloqué. 

 

Je poursuis ma lecture.  La Messe pontificale est aussi dite "présidée" par le cardinal POUPART :

 

Dimanche 28 Septembre 1997 :

10 h. 30  - Messe pontificale, présidée par le cardinal POUPART, du Conseil Pontifical de la Culture, envoyé spécial du pape JEAN-PAUL II

 

Je vois également un autre titre étonnant :  Messe inter-nationale.

Tous les jours de cette semaine, on nous annonce une "Messe internationale".

 

"Messe internationale", "Messe présidée".  Quelles drôles d'expressions, me disais-je.

 

Jusqu'à Vatican II et même quelques années encore après, les évêques célébraient la Messe.  Ils officiaient assistés du clergé selon la solennité de la fête mais ils ne présidaient pas. 

 

La Messe était le sacrifice non sanglant du Christ, Seigneur et Maître.  Elle n'était jamais dite "Messe internationale".

Les prêtres, eux aussi, faisaient de même.  Ils officiaient.  Ils célébraient - toujours jusqu'à Vatican II - et même quelques années encore après.  Ils offraient le sacrifice de la Messe, le sacrifice du Christ à l'autel, en présence des fidèles, pour "les vivants et les morts".  Leurs Messes - à eux non plus - n'étaient pas dites "Messe internationale".  Prêtres, évêques ou Pape, c'était la même Messe.

 

Comme cela est étrange, me disais-je en moi-même.

On ne célèbre plus la Messe.

Ce n'est plus cela.  On la préside.

Le prêtre, l'évêque, le cardinal préside aujourd'hui ce qu'hier, il célébrait : la MESSE.

 

Et si ce nouveau vocabulaire, ce mot nouveau exprimait une nouvelle théologie ?

 

Mais pourquoi donc cette question, pourquoi donc cette inquiétude ?  Est-elle légitime ?  N'est-ce pas, là, suspicion gratuite et malhonnête ?

Pourquoi ?

 

 

 

Souvenez-vous de la publication de la nouvelle Messe.  Souvenez-vous de la Constitution apostolique "Missale Romanum" publiée le 3 Avril 1969 par le pape PAUL VI.  Souvenez-vous du nouveau missel romain, le "Missale Romanum" présenté au pape PAUL VI par le cardinal GUT, le 11 mai 1970 et mis en vente à la mi-juin.

Souvenez-vous du fameux article 7 de "l'Institutio generalis", préface de la Constitution apostolique et repris en introduction du nouveau Missel romain.

 

Ce texte et tout particulièrement cet article 7, résume parfaitement la réforme liturgique et en indique toute l'orientation doctrinale nouvelle.

 

Or, il parle lui aussi de "présidence", d'assemblée du peuple réuni sous la "présidence" du prêtre.

En voici le texte français :

 

"La Cène du Seigneur ou Messe est (c'est une définition) la synaxe sacrée ou rassemblement du peuple de Dieu, réuni sous la présidence du prêtre pour célébrer le Mémorial du Seigneur.  C'est pourquoi

 

 

s'applique éminemment au rassemblement local de la Sainte Eglise, la promesse du Christ : "là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis au milieu d'eux" (Mat.18, 20)".

 

Ce texte, vous le voyez, évite de parler du sacrifice eucharistique.  Il évoque la présence divine par le simple rassemblement des fidèles.  Il fait du prêtre un simple président de cette assemblée.  Il s'éloigne ainsi jusqu'à la contradiction de toutes les définitions toujours reçues sur la messe et sur le prêtre dans l'Eglise.  Il affirme les thèses protestantes.  Il s'éloigne de la profession de foi - le Credo de PAUL VI - du 30 Juin 1968 où le pape déclarait :

 

"Nous croyons que la Messe célébrée par le prêtre, représentant la personne du Christ en vertu du pouvoir reçu par le sacrement de l'Ordre et offerte par lui au nom du Christ et des membres de son corps mystique, est le sacrifice du Calvaire rendu sacramentellement présent sur nos autels".

 

C'est clair.

C'est radicalement différent de ce qu'enseigne l'article 7 incriminé.  Il s'éloigne de la doctrine de l'Eglise rappelée, ici, par PAUL VI.  Mais il se rapproche dangereusement de la doctrine protestante, de la doctrine - par exemple - du pasteur Max THURIAN.  Celui-ci écrit dans son livre Le sacerdoce et le ministère, à propos du ministre de l'autel :

 

"Celui-ci préside le repas, invoque le Saint Esprit, dit les paroles du Christ, présente au Père le mémorial de la Croix, de la Résurrection et de l'intercession du Fils, le sacrifice de louange, de supplication de l'Eglise (est omise la finalité propitiatoire du  sacrifice !).  Il ne jouit pas d'un pouvoir sacerdotal privé.  C'est en tant que pasteur de la communauté chrétienne, entouré des fidèles et avec eux, qu'il accomplit ce ministère de présidence eucharistique, qu'il participe à l'unique sacerdoce du Christ".

 

Entre la doctrine de l'article 7 et la pensée de Max THURIAN, il n'y a pas grande différence.

  

Lors de la publication de l'article 7 exprimant plus la doctrine protestante que la catholique, l'Eglise s'émut.  De nombreux théologiens réagirent.  De nombreux évêques, cardinaux, aussi.  Le cardinal OTTAVIANI adressa une lettre au Souverain Pontife pour dire son émotion.  Il présentait au Pape Le Bref examen critique qui, sur cet article 7, faisait le commentaire suivant, très sévère :

 

"La définition de la Messe est donc réduite à celle d'une Cène.  Cette Cène est, en outre, caractérisée comme étant celle de l'assemblée, présidée par le prêtre; celle de l'assemblée réunie afin de réaliser "le

Mémorial du Seigneur" qui rappelle ce qu'Il fit le Jeudi Saint.  Tout cela n'implique ni la présence réelle, ni la réalité du sacrifice, ni le caractère sacramentel du prêtre qui consacre, ni la valeur intrinsèque du principe eucharistique, indépendamment de la présence de l'assemblée".

 

La conclusion du cardinal alors, tombe comme un couperet :

 

"En un mot, cette nouvelle définition ne contient aucune des données dogmatiques qui sont essentielles à la Messe et qui en constituent la véritable définition. L'omis-sion en un tel endroit de ces données dogmatiques ne peut être que volontaire.  Une telle omission volon-taire signifie leur dépas-sement et au moins, en pratique, leur négation".

 

Cette critique fit l'effet d'une bombe et ébranla les bureaux de la Congrégation pour le Culte divin dirigée, à l'époque, par le cardinal GUT, assisté du fameux Monseigneur BUNIGNI

 

Aussi, sans retard, le texte de l'article 7 de "l'Institutio Generalis" du 3 Avril 1969 fut modifié à l'occasion de l'édition définitive du nouveau Missel romain.  Cette nouvelle rédaction - sans être parfaite - était plus conforme à la doctrine catholique.

 

Ces modifications pour heureuses qu'elles furent, ne donnèrent pas cependant totale satisfaction.  Loin de là.  Les craintes persistèrent... et la résistance, toute catholique à la Nouvelle liturgie de la messe, s'organisa.

 

Les craintes demeuraient bien légitimement. 

 

Pensez !

 

Si le texte de l'article 7 fut modifié, on fit remarquer immédiatement que ces modifications n'eurent aucune incidence, aucune conséquence sur le nouvel "Ordo Missae" proprement dit.  La Nouvelle Messe dans son texte et ses rubriques restait- elle - identique, inchangée.  Elle restait façonnée, conçue, inspirée par la doctrine « protestante » de l'article 7 de 1969. 

 

Or, c'est cette nouvelle messe qui allait être "la prière dominicale" des fidèles.  Les craintes des catholiques restaient vives.  L'axiome "Lex orandi, lex credendi" justifiait amplement l'inquiétude.

Et puis et surtout, c'est toujours à la première rédaction de "l'Institutio generalis" que l'Episcopat français continue de se référer aujourd'hui encore, ignorant les changements intervenus dans le texte de 1970.

 

C'est vrai.  Voyez.

 

Le Conseil permanent de l'Episcopat français a publié le 2 Décembre 1976, des précisions sur la célébration eucharistique.  Qu'y lit-on ?

 

" Nous invitons les pasteurs à relire les textes majeurs de la réforme liturgique pour y retrouver ses motifs, ses grandes orientations et les directives d'application".

 

Et comme texte majeur, le Conseil permanent indique le texte de "l'Institutio generalis" mais il précise bien qu'il faut le lire dans son édition de 1969, dans sa première rédaction non corrigée.

 

Ainsi "l'Institutio generalis", dans sa première rédaction plus protestante que catholique, demeure bien la grande orientation doctrinale de la réforme liturgique de la Messe.

 

Or, ce document doctrinal dit bien que la Cène du Seigneur ou Messe est "le rassemblement du peuple de Dieu réuni sous la présidence du prêtre pour célébrer le Mémorial du Seigneur".

 

La Messe est bien dite - ici, dans ce texte - présidée par le prêtre.  Je n'invente rien.  C'est bien l'affirmation exprimée.

 

C'est bien aussi ce qui est dit dans les invitations envoyées au nom de Monseigneur PICAN, évêque de Bayeux :

 

Le pèlerinage de Lisieux vous invite à célébrer le centenaire de        la mort de Sainte Thérèse.....

le Samedi 27 Septembre, à 21 h. 30  - Messe d'ouverture des fêtes solennelles, présidée par Monseigneur PICAN, évêque de Bayeux-Lisieux....

 

Il n'est pas dit que Monseigneur PICAN préside les fêtes solennelles du centenaire.  Il est bien écrit : "....Messe d'ouverture des fêtes solennelles, présidée par Monseigneur PICAN...."

 

Le participe passé "présidée" est au singulier.  Il ne peut se rapporter "aux fêtes solennelles", mots qui sont au pluriel.  Il se rapporte nécessairement à "la Messe d'ouverture".  Monseigneur PICAN aurait pu - de fait - présider les Fêtes à Lisieux....  Tout aurait pu se dérouler sous sa haute présidence.  L'expression aurait été - là - parfaitement convenable.  Mais ce n'est pas, ici,  le sens de la phrase.

 

Ainsi, Monseigneur PICAN - si j'en crois l'invitation reçue - annonce bien vouloir présider la Messe d'ouverture, le Samedi 27 Septembre.

 

Et ce qui fut annoncé, fut exécuté.

 

Mais écrire cela, faire cela, c'est, peut-être,  ne pas être fidèle à la doctrine catholique.

 

La doctrine catholique, en effet, nous enseigne que le sacerdoce a été institué par Notre Seigneur Jésus-Christ, à la dernière Cène, lorsqu'Il prononçait les paroles : "Faites ceci en mémoire de moi".

 

Dès lors, le prêtre est ordonné pour l'Eucharistie, pour le renouvellement du sacrifice de la Croix.  Il est ordonné pour l'autel, pour l'oblation du sacrifice de la Croix.  Il y a une relation réelle entre le prêtre et le sacrifice.  Il est ordonné essentiellement pour réaliser la consécration du pain au corps de Notre Seigneur Jésus-Christ et du vin en son Sang, consécration qui l'identifie - sacramentellement - au Christ.  C'est ainsi qu'il réactualise le sacrifice de la Croix.  A l'autel, le prêtre agit "in persona Christi", dans la personne même du Christ.  C'est pour cela que le sacrifice  de l'autel et le sacrifice de la Croix sont un seul et même sacrifice puisque c'est la même victime, le même prêtre, le Christ qui par les mains du prêtre s'offre, de nouveau, là, sous un mode non sanglant, à son Père, en sacrifice propitiatoire d'agréable odeur.

Oui, seul le prêtre est ministre de l'autel et là, il agit "in persona Christi".

 

Le Concile de Trente nous le rappelle : « Jésus-Christ, Notre Seigneur, prêtre pour l'éternité selon l'ordre de Melchisedech, opère instrumentalement par le prêtre qui célèbre la Messe ».

 

« Il offrit à Dieu, son Père, son Corps et son Sang sous les espèces du pain et du vin et, sous ces mêmes signes sensibles, Il les distribua à manger à ses apôtres qu'Il établissait alors prêtres du Nouveau Testament; à eux et à leurs successeurs dans le sacerdoce, Il donna l'ordre de les offrir par ses paroles : "Faites ceci en mémoire de moi" comme l'Eglise l'a toujours compris et enseigné".

 

Or, le Christ, prêtre et victime sur la Croix, ne préside rien du tout.  De grâce!   Il s'offre en holocauste, à notre place, pour notre avantage, à son Père qui veut en sa justice, le sacrifice d'une telle victime sainte.  C'est par ce sacrifice, en cet acte théandrique que la justice de Dieu a pu, seule, être satisfaite.

Il y a une différence essentielle entre la messe qui est sacrifice propitiatoire et cette « messe » - dite Cène du Seigneur - qui selon l'article 7 serait un simple « rassemblement du peuple de Dieu réuni sous la présidence du prêtre pour célébrer le Mémorial du Seigneur ».

 

L'une exprime vraiment la doctrine catholique, l'autre serait plutôt la Cène protestante, une simple assemblée eucharistique.

 

 

Pour le protestant, pour Max THURIAN, pour l'article 7 de "l'Institutio generalis" selon sa première formulation, le prêtre préside, de fait, la synaxe sacrée, le rassemblement du peuple de Dieu.  Il agit - là - au nom du peuple, comme son représentant et nullement au nom du Christ, "in persona Christi". 

 

C'est du reste, le sens que la réforme liturgique donne au Canon de la Messe.  Elle le définit - expressis verbis - comme étant "une prière présidentielle".  Ce sont les articles 10 et 12 de "l'Institutio generalis" qui nous le disent. Or la prière présidentielle est celle qui est adressée à Dieu, au nom de tout le peuple saint et de tous ceux qui sont présents.  Ainsi, le prêtre agirait au nom du peuple de Dieu lorsqu'il prononce les paroles de la consécration. De fait, là,  il préside

Mais c'est la thèse protestante. Et c'est pourquoi il ne faut pas s'étonner que les paroles de la consécration soient définies par "l'Institutio generalis" comme étant seulement "narratio institutionis".  La Messe ne serait alors faite que pour "célébrer le Mémorial du Seigneur".  Mais, c'est là encore, une thèse protestante.

 

A grand Dieu !

 

Fort de cette analyse et de cette connaissance, quand je lis dès lors que Monseigneur PICAN est à Lisieux le 27 Septembre pour présider une Messe d'ouverture aux fêtes solennelles du centenaire de la mort de Sainte Thérèse, je peux, légitimement, craindre.  Je peux trembler.  Je suis en droit de m'interroger.  Il n'y a aucune suspicion malveillante.

 

Et si les mots nouveaux exprimaient une nouvelle théologie.... la théologie protestante ?

 

On préside aujourd'hui ce qu'hier, on célébrait.

La doctrine protestante n'aurait-elle pas, insensiblement, avec le temps supplantée la doctrine catholique..... dans les faits, dans les actes quotidiens de notre religion ?

 

On peut le craindre.

 

C'était clair dans la doctrine de l'article 7 de "l'Institutio generalis".

 

N'en serait-il pas ainsi aujourd'hui... et dans les actes quotidiens... ce qui serait plus grave encore.  Les fidèles de l'Eglise catholique ne deviendraient-ils pas protestants sans le savoir, sous l'autorité de leurs évêques et de leur secrétariat ?

 

 

LEX ORANDI, LEX CREDENDI.

 

Le temps fait insensiblement son œuvre.  Trente ans après le Concile Vatican II, insensiblement, tout tranquillement, sans qu'ils s'en aperçoivent, les fidèles deviendraient-ils  protestants ?  Ils n'y peuvent rien.  Ils suivent bien légitimement leurs prêtres et leurs évêques. On les invite à une Messe que le prêtre ne fait que présider.  Le prêtre serait-il devenu protestant, aurait-il accepté la thèse protestante, l'article 7 ?  A force de lire et relire les textes majeurs de la réforme liturgique de la Messe comme les évêques les y invitaient en 1976, ils peuvent bien finir par être influencés.  Leur doctrine, leur foi, ne serait-elle pas devenue protestante ?  Ne veulent-ils pas seulement "présider" l'Eucharistie ?  Font-ils alors ce que veut faire l'Eglise ?  Leur intention est-elle droite - droitement catholique ?  Le sacrement est-il valide puisque l'intention de faire ce que fait l'Eglise est une des conditions de validité du sacrement ?  Est-ce bien au sacrifice de la messe auquel ils assistent?  Auquel ont assisté des milliers et des milliers de catholiques le 27 Septembre, le 28 Septembre ?

 

 

Vous n'en savez rien.  Vous ne pouvez répondre.  Vous pouvez toutefois craindre.  Cette crainte me paraît légitime quand on vous invite à assister à une Messe d'ouverture présidée par un prêtre, fut-il l'évêque du lieu !

 

Et dans cette crainte, vous pouvez légitimement, en fils soumis de l'Eglise, demander à qui de droit ce qu'il en est au prêtre, à l'évêque, au cardinal.

La question est grave : il s'agit de la vérité de l'acte posé : la Cène protestante ou la Messe catholique.

Ils ne peuvent refuser de répondre.

Ils doivent répondre.

La chose est trop grave pour qu'ils se taisent.

Il s'agit de la validité du sacrement, du renouvellement du sacrifice de la Messe ou de la commémoration du Mémorial du Seigneur.

Les fidèles à Lisieux, le 27 Septembre ont-ils assisté à la cène protestante ou à la messe catholique ?  J'insiste.

Cette question n'est pas une petite affaire.  Ont-ils assisté, à Lisieux, à la Messe catholique ou à la Cène protestante ?  Les fidèles ont besoin de le savoir clairement.

En leur nom, je pose la question à Monseigneur PICAN, à Monseigneur POUPART.

Ils ne peuvent pas nous laisser dans l'inquiétude, dans le doute.  La situation est trop grave.

Et si le changement de mot cachait un changement de doctrine ?

 

Et l'ajout du mot « internationale » à « messe » ne vient-il pas, lui aussi, confirmer nos inquiétudes.

Auparavant, on ne parlait jamais de « Messe internationale ».  Cette expression pour un catholique est ridicule.  La Messe catholique ne peut être « internationale ».  Elle est l'acte personnel du Christ, un acte sublime d'amour.  Cet acte n'a rien d'international.  Cela ne veut rien dire à moins que..... à moins qu'il faille entendre par Messe, « l'assemblée du peuple ».

 

Alors, oui - dans ce cas - une assemblée du peuple peut être internationale.  Cela veut dire quelque chose, cela précise quelque chose de nouveau mais alors, on retrouve la définition protestante de la Messe, de l'article 7 de « l'Institutio generalis »:

 

« La Messe est le rassemblement du peuple de Dieu réunit sous la présidence du prêtre pour célébrer le Mémorial du Seigneur ».

 

A Lisieux, la Messe présidée par Monseigneur PICAN, par le cardinal POUPART était peut-être, de fait, simplement une assemblée internationale du peuple sous leur haute présidence.  Mais  ce ne serait pas alors le culte catholique mais simplement la Cène protestante, un simple mémorial.

 

 

 

De grâce Monseigneur.  De grâce, Eminence, répondez-nous pour tranquilliser nos inquiétudes.  Elles sont légitimes.

Dites-nous que nous nous trompons et que nos inquiétudes sont vaines.

Et si le changement de mot signifiait un changement de doctrine ?

 

Abbé Paul Aulagnier