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Un regard sur le monde
politique et religieux
au 13 février 2009
N° 203
Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier
La levée de
l’excommunication des évêques de
Jugement.
La levée de l’excommunication des évêques de
Elle était nécessaire pour
le bien de l’Eglise. Elle était nécessaire d’abord pour le bien de
Elle était aussi inéluctable.
L’élection de Benoît XVI la rendait en effet chaque jour de plus en plus probable,
prévisible.
Il le laissait clairement entendre dans sa lettre aux Evêques de l’Eglise catholique qui accompagnait le Motu Proprio Summorum Pontificum du 7 juillet 2007. Il écrivait :
« J’en arrive
ainsi à la raison positive qui est le motif qui me fait actualiser par ce Motu
Proprio celui de 1988. Il s’agit de parvenir à une réconciliation interne au
sein de l’Eglise. En regardant
le passé, les divisions qui ont lacéré le corps du Christ au cours des siècles,
on a continuellement l’impression qu’aux moments critiques où la division
commençait à naître, les responsables de
l’Eglise n’ont pas fait suffisamment pour conserver ou conquérir la
réconciliation et l’unité ; on a
l’impression que les omissions dans l’Eglise ont eu leur part de culpabilité
dans le fait que ces divisions aient réussi à se consolider.
Ce regard vers le
passé nous impose aujourd’hui une obligation : faire tous les efforts afin que tous ceux qui désirent réellement
l’unité aient la possibilité de rester dans cette unité ou de la retrouver à
nouveau.
Il me vient à l’esprit
une phrase de la seconde épître aux Corinthiens, où Saint Paul écrit:
« Nous vous avons parlé en toute liberté, Corinthiens; notre cœur s'est
grand ouvert. Vous n'êtes pas à l'étroit chez nous; c'est dans vos cœurs que
vous êtes à l'étroit. Payez-nous donc de retour ; … ouvrez tout grand votre cœur, vous aussi ! » (2Co
6,11-13). Paul le dit évidemment dans un autre contexte, mais son invitation
peut et doit aussi nous toucher, précisément sur ce thème. Ouvrons généreusement notre cœur et laissons entrer tout ce à quoi la
foi elle-même fait place ».
On ne peut être plus clair. Benoît XVI veut travailler à
l’unité dans le sein de l’Eglise. Il veut tout faire pour que cette unité se
réalise. Il prendra tous les moyens surtout ceux qui touchent la foi et qui
expriment la tradition et sa richesse. Rien ne doit être négligé « afin que tous ceux qui désirent
réellement l’unité aient la possibilité de rester dans cette unité ou de la
retrouver à nouveau ». La messe traditionnelle a-t-elle été la raison
d’un grave conflit, il faut arrêter ce conflit d’autant que la messe
tridentine, latine, grégorienne est une richesse de l’Eglise !
Pour la réalisation de cette unité, qui lui tient à cœur, il demande la collaboration de tous les évêques. Il est même particulièrement « pugnace » dans cette demande. Il cite saint Paul. Que les évêques s’ouvrent enfin aux richesse de la tradition liturgique : « Il est bon, leur dit-il, pour nous tous, de conserver les richesses qui ont grandi dans la foi et dans la prière de l’Eglise, et de leur donner leur juste place ». Il compte sur eux.
Benoît XVI veut cette unité. Elle suppose la levée de l’excommunication
des quatre évêques de
Il le confessait de nouveau dans son discours aux évêques de France réunis à Lourdes en septembre dernier. C’est dire combien l’idée lui tient à cœur ! « Nul n'est de trop dans l'Église », disait-il. Cette phrase fut remarquée de tous.
Elle fut prononcée dans le cadre du culte liturgique qu’il
veut restaurer, c’est la raison de son Motu Proprio. Il disait aux
évêques : « Le culte liturgique
est l'expression suprême de la vie sacerdotale et épiscopale, comme aussi de
l'enseignement catéchétique. Votre charge de sanctification du peuple des
fidèles, chers Frères, est indispensable à la croissance de l'Église. J'ai été
amené à préciser, dans le Motu proprio
Summorum Pontificum, les conditions d'exercice de cette charge, en ce
qui concerne la possibilité d'utiliser aussi bien le missel du bienheureux Jean
XXIII (1962) que celui du Pape Paul VI (1970). Des fruits de ces nouvelles
dispositions ont déjà vu le jour, et j'espère que l'indispensable pacification
des esprits est, grâce à Dieu, en train de se faire. Je mesure les difficultés
qui sont les vôtres, mais je ne doute pas que vous puissiez parvenir, en temps
raisonnable, à des solutions satisfaisantes pour tous, afin que la tunique sans couture du Christ ne se déchire pas davantage.
Nul n'est de trop dans l'Église. Chacun,
sans exception, doit pouvoir s'y sentir chez lui, et jamais rejeté. Dieu
qui aime tous les hommes et ne veut en perdre aucun nous confie cette mission
de Pasteurs, en faisant de nous les Bergers de ses brebis. Nous ne pouvons que
Lui rendre grâce de l'honneur et de la confiance qu'Il nous fait. Efforçons-nous donc toujours d'être des
serviteurs de l'unité !
La aussi, le pape Benoît XVI ne pouvait s’exprimer plus clairement: « Nul n'est de trop dans l'Église Chacun, sans exception, doit pouvoir s'y sentir chez lui, et jamais rejeté.». « Efforçons-nous donc toujours d'être des serviteurs de l'unité ! »
Ne pensez-vous pas que de telles phrases répétées étaient le signe évident que Benoît XVI voulait procéder aussi vite que possible à la levée des excommunications. Ce serait son œuvre. Elle était nécessaire mais aussi inéluctable
Mais au-delà de cette intention personnelle, nettement affirmée,
qu’il veut faire partager au corps
épiscopal, on peut dire aussi que tout un ensemble de faits préparait cette
levée d’excommunication des évêques de
Ce sera les deux idées que je développerais dans cet exposé.
A- Les faits antérieurs qui ont préparé cette
levée d’excommunication.
On sait que cette levée d’excommunication était demandée
instamment par
On sait également que cette levée d’excommunication ne fit aucun problème pour les pères de Campos, nos amis. Dès lors que Mgr Rangel, évêque consacré sans mandat pontifical par Mgr Tissier de Mallerais, au Brésil, était prêt à faire « amande honorable », Rome était prête à lever, sans difficulté, l’excommunication qui le frappait.
« Amande honorable » ! Mais ce que Rome demandait à Mgr Rangel, à cette époque, était facile à accepter, et de toute façon, c’était sans commune mesure avec les exigences imposées à Mgr Lefebvre, vingt ans plus tôt….Les choses évoluaient…
Il suffisait que Mgr Rangel et les pères de Campos
reconnaissent « le Primat » du Souverain Pontife, « son gouvernement sur l'Eglise
universelle, ses pasteurs et ses fidèles », en déclarant aussi « ne vouloir pour rien au monde
être séparée de Pierre sur qui Jésus Christ a fondé son Eglise » pour que le Pape, c’était à l’époque Jean-Paul II, lève l’excommunication et les peines canoniques
de tout ce petit monde.
C’était clairement
dit dans
Jean- Paul II s’adresse aux « Au vénérable frère Licinio Rangel et aux Chers Fils de l'Union Saint Jean Marie Vianney de Campos au Brésil
Il leur dit :.
« L'unité de l'Eglise est un don que nous offre le Seigneur, Pasteur et Tête du Corps mystique, et qui demande en même temps une réponse empressée de la part de chacun de ses membres qui ont reçu cette garde pressante du Sauveur: « Afin que tous soit un, de même que Vous, Père, vous l'êtes en moi et moi en vous, afin qu'eux-mêmes aussi soient un en vous: afin que le monde croie que Vous m'avez envoyé ». (Jn. 17,21) »
Il reconnaissait que dans leur lettre du 15 août 2001, les pères non seulement avaient
renouvelé leur profession de foi en
signifiant, je cite, leur «
pleine communion avec
En conséquence de quoi, le Pape reconnaissait leur entière communion avec l’Eglise catholique
« Après avoir
considéré toutes ces choses et ayant devant les yeux la gloire de Dieu, le bien
de
Et fort de cette reconnaissance, le pape levait toutes les censures et peines, non seulement de Mgr Rangel, mais de tous les membres de l’Union Saint Jean Marie Vianney :
« C'est
assurément avec une très grande joie, pour que pleine communion soit rendue
certaine, que nous déclarons la levée de la censure dont il est traité au can
1382 CIC, à votre égard, Vénérable Frère, en même temps que la levée de toutes
les censures et le pardon de toutes les irrégularités dans lesquelles sont
tombés les autres membres de cette Union ».
Fait au Vatican, le 25 décembre, en la solennité de
Jean-Paul II
Avouez que les conditions exigées pour la réintégration
canonique dans l’Eglise de nos amis n’étaient pas draconiennes. Il ne leur était plus demandé la reconnaissance pleine et
entière du Concile Vatican II. Il ne leur était plus demandé la reconnaissance de l’orthodoxie
de
Or les conditions imposées par Rome à Mgr Rangel, sont celles là mêmes que Rome demanda et proposa à Mgr Fellay.
C’est clairement reconnu dans la lettre de Mgr Fellay au Cardinal
Castrillon Hoyos citée dans le Décret du 21 janvier 2008 du Cardinal Re. Le
cardinal Re le cite : «
Décret de
Prot. N. 126/2009
« Par la lettre du 15 décembre 2008 adressée à
Son Éminence, le Cardinal Dario Castrillón Hoyos, Président de
Les expressions utilisées par Mgr Rangel et celles utilisées par Mgr Fellay sont absolument identiques. A croire qu’elles ont la même source…
Nous prenons actes que c’est le 15 décembre 2008 que Mgr Fellay a enfin accepté les conditions que Rome lui proposait le 4 juin 2008 et qu’il refusait au début ne voulant voir dans ce texte qu’un « ultimatum » inacceptable.
Il vous souvient, en effet, que le 4 juin 2008 réunis à Rome, avec ses collaborateurs, le Cardinal Castrillon Hoyos proposa à Mgr Fellay, assisté de son deuxième conseillé, un protocole en cinq points.
J’en parle dans
Là,
le cardinal Castrillon Hoyos posait à
Ces conditions furent connues assez rapidement par les indiscrétions de la presse. Elles étaient simples : un préalable en cinq points.
En voici le texte complet. Il fut écrit en français, d’où, peut-être, la maladresse des expressions et le français très incertain :
« Conditions qui résultent de l’entretien du 4 juin 2008 entre le cardinal Dario Castrillon Hoyos et l’Evêque Bernard Fellay
1- L’engagement d’une réponse proportionnée à la générosité du Pape.
2- L’engagement d’éviter toute intervention publique qui ne respecte pas la personne du Saint-Père et qui serait négative pour la charité ecclésiale.
3-
L’engagement d’éviter la prétention d’un magistère supérieur au Saint-Père et ne pas proposer
4- L’engagement à démontrer d’agir honnêtement en toute charité ecclésiale et dans le respect de l’autorité du Vicaire du Christ.
5- L’engagement de respecter la date – fixé à la fin du mois de juin – pour répondre positivement. Cela sera une condition requise et nécessaire comme préparation immédiate à l’adhésion pour accomplir la pleine communion. »
A la lecture de ce texte, nous étions dans la joie. Les choses ne pouvaient pas ne pas « s’arranger ».
Avec ce nouveau texte du 4 juin 2008, nous étions loin des obligations qui furent toujours imposées à Mgr Lefebvre, même encore en 1988. Il fallait qu’il reconnaisse ses erreurs…
Aujourd’hui, rien de tout cela, rien n’était demandé, mais seulement le respect de la fonction du Vicaire du Christ sur l’Eglise et sa Primauté dans le gouvernement de l’Eglise
Qui ne pourrait accepter ces conditions ?
Mgr
Lefebvre, en fondant
Il ne s’en prenait jamais
directement à la personne du Souverain Pontife qu’il citait avec respect. Il
formait les séminaristes dans l’amour de Rome. Le texte, peut-être le plus dur
qu’il écrivit dans cette crise de l’Eglise, sa fameuse déclaration du 21
novembre 1974, respecte ce principe. En voulant garder
« C'est pourquoi sans aucune rébellion, aucune amertume, aucun ressentiment nous poursuivons notre oeuvre de formation sacerdotale sous l'étoile du magistère de toujours, persuadés que nous ne pouvons rendre un service plus grand à la Sainte Église Catholique, au Souverain Pontife et aux générations futures ».
L’amour de Rome fut la règle d’or de toute sa vie épiscopale ! Il appliqua, cependant ce principe sans faiblesse ! C’est ce qu’on lui reprochera…peut-être.
On pouvait donc s’attendre à ce que ses « disciples » accueillent avec sympathie ces cinq points et qu’une réponse positive soit donnée dans les délais légitimement demandés…- le « problème » dure depuis si longtemps !- pour la fin du mois de juin.
.
On pouvait remarquer, de plus, qu’il n’était fait aucune allusion ni au
Concile Vatican II ni à la réforme de la liturgie issue du Concile Vatican II.
On ne demandait donc pas à
Oui ! Qui ne serait d’accord avec ces points de théologie demandés par Rome le 4 juin 2008? Qui ne signerait un tel texte ? Mgr Lefebvre n’a pas voulu créer ni jamais édifié son œuvre et ses séminaires, en « contaposition de l’Eglise ». Il la voulait dans l’Eglise, au service de l’Eglise, animée de la plus fidèle théologie catholique. Et si par aventure, des dissonances d’avec la doctrine catholique se manifestaient dans l’enseignement du pape et des dicastères romains, il faisait « la sourde oreille » et attendait des jours meilleurs. Il le dit expressément, encore dans sa déclaration du 21 novembre 1974 :
« Aucune
autorité, même la plus élevée dans la hiérarchie, ne peut nous contraindre à
abandonner ou à diminuer notre foi catholique clairement exprimée et professée
par le magistère de l'Église depuis dix-neuf siècles.
« S'il arrivait,
dit saint Paul, que NOUS-MÊME ou un Ange venu du ciel vous enseigne autre chose
que ce que je vous ai enseigné, qu'il soit anathème. » (Gal. 1, 8.)
N'est-ce pas ce que
nous répète le Saint-Père aujourd'hui? Et si une certaine contradiction se
manifestait dans ses paroles et ses actes ainsi que dans les actes des
dicastères, alors nous choisissons ce qui a toujours été enseigné et nous
faisons la sourde oreille aux nouveautés destructrices de l'Église ».
Mgr Lefebvre ne se fit jamais le « censeur » de la
chrétienté, ni le redresseur de torts. Je ne le vis jamais
« polémiquer », il en avait horreur,
sinon une fois avec M l’abbé de Nantes, et encore ce texte
n’était-il pas de lui. Il ne se donnait
aucun « ministère » particulier, fut-il de « critique ». Il
agissait seulement en tant qu’évêque, en tant que gardien de la foi. Il voulait
seulement transmettre à toute une génération ce qu’il avait lui-même reçu. Il ne s’est octroyé aucune fonction
dans l’Eglise. Il exerça seulement celle que
Pour toutes ces raisons et d’autres encore, nous pouvions penser, vous dis-je, que ses disciples, entre autres ses quatre évêques, réagiraient favorablement à la nouvelle demande romaine!
Et bien non ! Rien à faire ! Mgr Fellay s’exprima quelques semaines plus tard, le 20 juin, dans son sermon des ordinations à Winona aux Etats-Unis. Il ne vit dans ces « conditions » qu’un « ultimatum » insupportable, qu’une obligation de se « taire » Il renouvela, avec un peu de suffisance, ses attaques publiques contre la personne du Souverain Pontife. Il le présenta aux fidèles comme « libéral », le « pire des libéraux ». Il renouvela cette critique dans le discours qu’il prononça lors de la procession du vœu de Louis XIII, à Saint-Malo, le 15 août 2008, devant 1300 personnes. : « Le pape Benoît XVI est un « grand libéral », affirma-t-il !
Mgr Tissier de Mallerais, d’habitude plus discret et mieux inspiré, dirigea lui aussi, après le 4 juin 2008, contre Benoît XVI, ses nouvelles attaques. Des critiques terribles. Il le déclara, ce qu’il avait déjà dit à Paris, le 11 novembre 2007, lors d’une conférence, à laquelle j’ai assisté, tout simplement « moderniste », « un vrai moderniste, avec la théologie entière du modernisme, et mise à jour d’aujourd’hui ». Il le déclara dans une interview à une revue américaine, « The Angelus ». Il le redit de nouveau dans Fideliter de septembre-octobre 2008.
On aurait envie de leur dire : Un peu de mesure ! Tout de même. Nous n’avons rien entendu de tel ni dans le discours du Pape aux Bernardins, ni dans son discours devant la foule immense réunie aux Invalides, à Paris. Aux Bernardins, il a fait l’apologie de la civilisation chrétienne, œuvre essentiellement bénédictine. Son insistance sur le « quaerere Deum », « chercher Dieu », fut particulièrement heureuse et sa conclusion sur l’ « objectivité » de cette recherche de Dieu et sa nécessité montre la fragilité des critiques de Mgr Tissier de Mallerais. Aux Invalides, sa présentation du sacerdoce, de la messe, de la présence réelle, du chant grégorien, son appel à la vocation sacerdotale à ces milliers de jeunes, auraient plu à Mgr Lefebvre. Pourquoi continuer à se « braquer » ? Pourquoi ne pas s’ouvrir un peu ? Pourquoi ne pas remarquer le changement ? Est-ce par fidélité à Mgr Lefebvre? Elle serait mal comprise ! J’aurais envie alors de leur dire : Ne faites pas du « lefébvrisme ». « N’ayez pas peur ».
Mais le temps passa…Quelques mois…. Et le 15 décembre 2008, Mgr Fellay écrit la fameuse lettre où il reconnaît finalement la condition réclamée par Rome : le « respect de l’autorité du Vicaire du Christ ».
« Nous sommes
aussi toujours bien ancrés dans la volonté de rester catholiques et de mettre
toutes nos forces au service de l’Eglise de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui
est l’Eglise catholique romaine. Nous acceptons son enseignement filialement. Nous croyons fermement à
Je dis « finalement » parce qu’il mit pratiquement 6 mois pour les accepter. Au début, vous dis-je, il ne fut sensible qu’à l’ « ultimatum ». Il ne vit que l’ « ultimatum ». Il reconnaît même, dans son entretien avec Olivier Figueras dans Monde et Vie que cet « ultimatum » « assombrit » de nouveau ses relations avec Rome.
Olivier Figuéras lui pose la question : « Vous attendiez-vous, Monseigneur, à cette levée de l’excommunication vous concernant ?
Il répond : « …Quand au moment où cela s’est passé, je ne m’y attendais pas. Ces derniers mois, après l’affaire de l’ultimatum, même après qu’elle ait été résorbée, nous étions plutôt en froid. Puis j’ai écrit la lettre du 15 décembre qui est mentionnée dans le décret et dans ma lettre aux fidèles ».
Ainsi le temps passa et il accepta enfin les demandes de Rome du 4 juin 2008 et confessa dans sa lettre du 15 décembre la foi sur le Pontife romain.
Ce que reconnut, en son temps, Mgr Rangel, en 2001, était enfin reconnu, presque mot pour mot par Mgr Fellay.
Il faut noter cette identité de langage
-Pour Mgr Rangel : Le pape reconnaît que dans leur
lettre du 15 août 2001, les
pères de Campos ont renouvelé leur
profession de foi en signifiant leur « pleine communion avec
- Pour Mgr Fellay : « Nous sommes aussi toujours bien ancrés dans la volonté de rester
catholiques et de mettre toutes nos forces au service de l’Eglise de Notre
Seigneur Jésus-Christ, qui est l’Eglise catholique romaine. Nous acceptons son
enseignement filialement. Nous croyons
fermement à
Mais quelles différences dans les conditions imposées à Mgr Rangel, à Mgr Fellay et, hier, à Mgr lefebvre. On peut mesurer le chemin parcouru.
Là, avec Mgr Rangel, avec Mgr Fellay, Rome ne demande rien au sujet de la messe nouvelle sinon la reconnaissance de sa validité.
Avec Mgr Lefebvre il fallait qu’il confesse non seulement sa validité, mais sa légitimité et son orthodoxie. Et qu’il ne célèbre que celle-là.
Avec Mgr Lefebvre, il fallait qu’il prenne la nouvelle messe dans sa totalité, avec le nouveau lectionnaire, le nouveau calendrier.
Là avec Mgr Rangel, avec Mgr Fellay, rien de tout cela.
Même à Mgr Rangel, Rome propose une Administration Apostolique avec comme rite propre, la messe tridentine, latine et grégorienne.
C’ était précisé dans les statuts de l’Administration. C’est le § 3 des statuts:
« III - La faculté est accordée à l'
Administration apostolique de célébrer la sainte Eucharistie, les autres
sacrements,
C’est tout à fait nouveau.
Aucun doute d’interprétation n’était
possible, le secrétaire de
« LETTRE DE
Congrégation pour le Clergé
Prot. N° 20021399
Cité du Vatican, le 10 Juillet 2002
A son Excellence Révérendissime
Dom Licinio RANGEL
Administrateur apostolique
de l'Administration apostolique Saint Jean-Marie Vianney
Monseigneur,
A la date du 8 Juillet dernier,
Conformément à la lettre autographe
« Ecclesiae unitas » du Saint Père
Jean-Paul II, datée du 25 Décembre 2001, et au décret « Animarum bonum », du 18 Janvier 2002, émanant de
En transmettant cette directive qui dissipera d'éventuels doutes et sera certainement d'un grand secours sur le chemin d'une communion ecclésiale que l'on souhaite toujours plus forte et profonde, je saisis cette occasion pour adresser à Votre Excellence révérendissime, mes salutations cordiales, y ajoutant celles du Cardinal Préfet, momentanément absent, et mes meilleurs voeux de bonne santé et de paix, avec lesquels je suis, Monseigneur, de Votre Excellence révérendissime, le très dévoué serviteur dans le Seigneur.
Csaba Ternyàk,
Archevêque titulaire d'Eminentiana,
secrétaire
Il en fut de même pour l’IBP, en 2006
Tout cela préparait la publication du Motu Proprio Summorum Pontificum du 7 juillet 2007
qui est quasi la reconnaissance de la première condition demandée par
Et il ne faut pas oublier tout le travail du cardinal
Ratzinger en ce domaine liturgique. Il ne faut pas oublier le travail du
cardinal Stckler. Il ne faut pas oublier la publication de l’encyclique « Ecclesia de Eucharistia vivit » qui
parle particulièrement des « ombres » dans la vie liturgique de
l’Eglise, des « ombres » qu’elle connaît depuis
Il ne faut pas non plus oublié la célébration de cette messe tridentine par le cardinal Castrillon Hoyos à Sainte Marie Majeur en 2003
Tout cela permet de mesurer le chemin parcouru en matière liturgique depuis l’interdiction formelle mais a typique de la messe de Paul VI lors du Consistoire du 24 mai 1976…jusqu’au Motu Proprio Summorum Pontificum. En passant par le Motu Proprio de Jean-Paul II Ecclesia Dei adflicta »
Tous ces faits brièvement rappelés permettent de comprendre que l’on s’acheminait petit à
petit, même si
Pour moi, ce que Rome a fait pour Campos, elle était, elle est
prête à le faire pour
A savoir donner le privilège de la messe tridentine. C’est fait
Lever l’excommunication. C’est fait
Lui donnant une forme canonique identique à celle des pères de Campos avec le privilège de l’exemption.
Mais il faut que
Je vous ai fait remarqué qu’il y a beaucoup de points
identiques entre la levée d’excommunication de Mgr Rangel et des quatre évêques
de
Ce n’est pas le cas pour
Il faut encore procéder à l’ultime étape demandée par
Rome en accepte le principe. Le Décret du Cardinal Re, du 21 janvier 2008 l’affirme
Il écrit : « Sa
Sainteté Benoît XVI – paternellement sensible au malaise spirituel manifesté
par les intéressés à cause de la sanction d’excommunication et confiant dans
l’engagement exprimé par eux dans la lettre citée de n’épargner aucun effort
pour approfondir dans les nécessaires colloques avec les Autorités du
Saint-Siège les questions encore ouvertes, et de pouvoir ainsi parvenir
rapidement à une pleine et satisfaisante solution du problème posé à l’origine
– a décidé de reconsidérer la situation canonique des Évêques Bernard Fellay,
Bernard Tissier de Mallerais, Richard Williamson et Alfonso de Galarreta
relative à leur consécration épiscopale.
Cet acte
exprime le désir de consolider les relations réciproques de confiance,
d’intensifier et de rendre stables les rapports de
En souhaitant
que ce pas soit suivi sans tarder de la pleine communion avec l’Église de toute
Je désapprouve personnellement le principe de ses conversations théologiques. Des corrections théologiques du Concile devraient venir de la hiérarchie elle-même , du haut et non de la base Je trouve que le procédé manque à l’esprit hiérarchique de l’Eglise, que c’est une manière bien démocratique d’agir…Mais laissons ce point de côté, Puisque les conversation théologiques doivent avoir lieu, il faut espérer que les colloques ne tardent pas a démarrer au plus vite et qu’ils aboutissent à l’heureux effet souhaité de tous : l’unité.
B- C’est ma
deuxième idée.
On sait que
pour Monsieur l’abbé Celier, il
n’y aura, de la part de
Dans cette précision, nous avons, nous tenons le principe de la future régularisation canonique de
Alors la question qu’il faut se poser est la suivante :
ce mouvement dans l’Eglise vers
C’est la question décisive.
Tout est là !
Il faut que les
autorités romaines s’engagent clairement
en faveur de la foi, de
Sur ce point doctrinal, il me semble que les choses, du côté de Rome, évoluent également très heureusement.
Sur ce point, on pourrait multiplier les preuves même lors du Pontificat de Jean-Paul II.
Je ne vais donner qu’une seule considération. : le Testament politique de Jean-Paul II que j’ai analysé, et qui fut publié juste avant son décès, dans un livre « Mémoire et Souvenir ».
Pour Jean-Paul II, l’anthropocentrisme et
l’idéalisme cartésien sont au cœur du monde moderne. L’idéalisme est la raison, le principe, dit-il, de ce qu’il appelle les « idéologies du mal », celles de
hier et celles d’aujourd’hui. Hier avec le nazisme et le communisme,
Aujourd’hui avec la législation sur l’avortement et la destruction de la
famille. L’anthropocentrisme, l’idéalisme cartésien : voilà les raisons de
l’oubli de Dieu et de sa Loi et de l’édification d’un monde opposé au monde divin.
Sur ces idées d’anthropocentrisme…Mgr Fellay devrait se trouver à l’aise, lui
qui tout récemment a déclaré dans une interview au journal suisse « Le
temps » que c’ était l’anthropocentrisme qui était la raison du mal actuel
et de la crise de l’Eglise. « Pour
l’essentiel, cette crise est due, disait-il, à une nouvelle approche du monde,
une nouvelle vue de l’homme, à savoir un anthropocentrisme qui consiste en une
exaltation de l’homme et un oubli de Dieu. L’arrivée des philosophies modernes,
avec leur langage moins précis, a amené une confusion dans la théologie ».
Il y a là
certainement des points de rapprochements possibles.
Mais c’est surtout
avec Benoît XVI que l’Eglise retrouve sa Tradition..
Je ne
donnerai qu’un exemple, son homélie du 8 décembre 2005.
Dans son homélie du 8 décembre 2005, le pape Benoît XVI a
clairement porté une correction substantielle au document conciliaire « Gaudium et Spes » et plus
particulièrement à l’introduction de ce document, aux numéros 4 à 10. Là, les
Pères conciliaires analysent le monde moderne. « Il importe, disent-ils,
de connaître et de comprendre ce monde dans lequel nous vivons, ses
attentes, ses aspirations, son caractère souvent dramatique ». Ils
donnent alors « quelques-uns des
traits fondamentaux du monde actuel ». Dans cette description, ils ne
font aucune mention du péché originel qui, on le sait, est au cœur pourtant du
drame humain et explique son histoire. Cette omission est étonnante,
avouez ! Benoît XVI, dans son
discours du 8 décembre 2005,va corriger
cela. Il porte lui aussi son regard sur ce monde moderne. Mais il le
décrit précisément à la lumière du péché
originel. Il le dit formellement. « Si
nous réfléchissons sincèrement à nous-mêmes et à notre histoire, nous
constatons qu'à travers ce récit (du péché originel) est non seulement décrite
l'historie du début, mais l'histoire de tous les temps, et que nous portons
tous en nous une goutte du venin de cette façon de penser illustrée par les
images du Livre de
« Quelle est la situation qui nous est présentée dans cette page ?
L’homme n’a pas confiance en Dieu. Tenté par le serpent, il nourrit le soupçon
que Dieu, en fin de compte, ôte quelque chose à sa vie, que Dieu est un
concurrent qui limite notre liberté et que nous
ne serons pleinement des êtres humains que lorsque nous l'aurons mis de côté; en somme, que ce n'est que de cette
façon que nous pouvons réaliser en plénitude notre liberté. L'homme vit avec le soupçon que l'amour de Dieu crée une dépendance et qu'il
lui est nécessaire de se débarrasser de cette dépendance pour être pleinement
lui-même. L'homme ne veut pas recevoir
son existence et la plénitude de sa vie de Dieu. Il veut puiser lui-même à
l'arbre de la connaissance le pouvoir de façonner le monde, de se transformer
en un dieu en s'élevant à Son niveau, et de vaincre avec ses propres forces la
mort et les ténèbres. Il ne veut pas compter sur l'amour qui ne lui semble
pas fiable; il compte uniquement sur la connaissance, dans la mesure où
celle-ci confère le pouvoir. Plutôt que
sur l'amour il mise sur le pouvoir, avec lequel il veut prendre en main de
manière autonome sa propre vie. Et en agissant ainsi, il se fie au mensonge
plutôt qu'à la vérité et cela fait
sombrer sa vie dans le vide, dans la mort… Nous
vivons de manière juste, si nous vivons selon la vérité de notre être,
c'est-à-dire selon la volonté de Dieu. Car la volonté de Dieu ne constitue
pas pour l'homme une loi imposée de l'extérieur qui le force, mais la mesure
intrinsèque de sa nature, une mesure qui est inscrite en lui et le rend image
de Dieu, et donc une créature libre. Si
nous vivons contre l'amour et contre la vérité – contre Dieu – , alors nous
nous détruisons réciproquement et nous détruisons le monde. Alors nous ne trouvons pas la vie, mais
nous faisons le jeu de la mort. Tout cela est raconté à travers des images
immortelles dans l'histoire de la chute originelle et de l'homme chassé du
Paradis terrestre ».
L’autonomie ! Voilà la revendication moderne. Mais
c’est là un drame, nous dit Benoît XVI. Il parle de « la
dimension dramatique du fait d'être autonome ». C’est dire qu’ « être
véritablement un homme comprend la liberté de dire non, de descendre au fond
des ténèbres du péché et de vouloir agir seul; que ce n'est qu'alors que l'on peut exploiter totalement toute
l'ampleur et la profondeur du fait d'être des hommes, d'être véritablement
nous-mêmes; que nous devons mettre cette liberté à l'épreuve, également contre
Dieu, pour devenir en réalité pleinement nous-mêmes. En un mot, nous
pensons au fond que le mal est bon, que nous avons au moins un peu besoin de
celui-ci pour faire l'expérience de la plénitude de l'être. … Nous pensons que
traiter un peu avec le mal, se réserver un peu de liberté contre Dieu est au
fond un bien, et peut-être même absolument nécessaire.
Cependant, en regardant le monde autour de nous, nous constatons qu'il n'en est
pas ainsi, c'est-à-dire que le mal empoisonne toujours, il n'élève pas l'homme,
mais l'abaisse et l'humilie, il ne le rend pas plus grand, plus pur et plus
riche, mais il lui cause du mal et le fait devenir plus petit…L’homme qui
s'abandonne totalement entre les mains de Dieu ne devient pas une marionnette
de Dieu, une personne consentante, ennuyeuse; il ne perd pas sa liberté. Seul
l'homme qui se remet totalement à Dieu trouve la liberté véritable, l'ampleur
vaste et créative de la liberté du bien. L'homme qui se tourne vers Dieu ne
devient pas plus petit, mais plus grand, car grâce à Dieu et avec Lui il
devient grand, il devient divin, il devient vraiment lui-même. L'homme qui se
remet entre les mains de Dieu ne s'éloigne pas des autres en se retirant dans
sa rédemption en privé; au contraire, ce n'est qu'alors que son cœur s'éveille
vraiment et qu'il devient une personne sensible et donc bienveillante et
ouverte ».
Tel est le regard que Benoît XVI porte sur le monde moderne. Ce regard est « ontologique », « essentiel ». Il nous fait penser au jugement que nous donnait déjà Jacques Maritain dans son fameux livre « Antimoderne ». Cela vaut la peine d’être rappelé.
« Désormais
l’animal raisonnable va s’appuyer sur lui-même, la pierre d’angle ne sera plus
le Christ. L’esprit d’indépendance absolue,
qui, en définitive, porte l’homme à revendiquer pour lui-même l’ «
aséité », et que l’on peut appeler
l’esprit de
Le jugement est le même, « ontologique» prenant en compte le fait du péché originel
Combien il s’éloigne de l’analyse des Pères conciliaires,
dans ces numéros 4 à 10 de l’introduction de « Gaudium et Spes ». Le
jugement des Pères conciliaires est sociologique et bien trop
« superficielle ». Benoît XVI le corrige. Heureusement !
Il faut que cela soit dit ! Les prêtres de
Mgr Lefebvre, lui aussi, le faisait déjà remarquer dans son livre « J’accuse le Concile ! »
Il déclarait, dans l’aula conciliaire, le 9 septembre 1965, c’était son troisième point de sa dixième intervention : « Dans l’exposition introductive ( de ce texte de Gaudium et Spes) comment peut-on taire continuellement le péché originel. Alors que nulle explication valide de l’histoire du monde et du monde actuel ne peut être donnée sans référence à ce fait historique et à ce fait actuel » ( J’accuse le Concile ! p 92)
Le Concile Vatican II peut être corrigé, nous dit l’abbé Celier. O combien ! C’est fait. Ce se fera encore…Mais il ne doit plus être la seule référence du Magistère de l’Eglise, demande l’abbé Celier. Les choses évoluent, même en ce domaine. Là, nous pouvons évoquer les toutes récentes paroles de Benoît XVI, le 9 octobre 2008, sur le pape Pie XII réhabilitant non seulement sa mémoire mais surtout sa doctrine, regrettant « que le débat historique, qui n’a pas toujours été serein, sur la figure du serviteur de Dieu Pie XII, (ait) négligé de mettre en lumière tous les aspects de son pontificat polyédrique. Les discours, poursuit le pape, les allocutions et les messages qu’il a adressés aux scientifiques, aux médecins, aux responsables des plus diverses catégories de travailleurs, dont certains d’entre eux sont, encore aujourd’hui, d’une extraordinaire actualité et qui continuent d’être un point ferme de référence, ont été nombreux ». Et de nous rappeler les encycliques « Mystici Corporis » du 29 juin 1943, « Divino afflente spiritu », du 20 septembre 1943, « Mediatoir Dei » du 20 novemebre 1947. C’est nouveau. L’enseignement du Concile Vatican II n’est plus la seule référence.
Voilà ce qui sera approfondi dans ces colloques
«nécessaires » nous dit le Décret du cardinal Re.
Il faut prier Notre Dame pour qu’il en soit ainsi et sans retard.