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Un regard sur le monde  politique et religieux

Au 15 septembre  2005

 

N°57

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

 

La Bataille de la Messe

C'est le titre du livre que je viens de publier aux Editions de Paris. J'en assurais " le service de presse ", le jour même de la fête de l'exaltation de la Sainte Croix. C'est donc le jour public de sa diffusion. J'y vois un petit signe du Bon Dieu. Je suis sensible à ces signes. Je vous dirai bientôt que le jour même de la fête de Saint Pie X, notre patron céleste, le 3 septembre 2005, j'ai fait une visite qui pourrait bien être intéressante…pour le futur… Je vous dirai tout quand tout sera conclu si cela doit se conclure…
Pour l'instant parlons de ce livre : " La bataille de la Messe ".
Voilà comment je le présente en quatrième page de couverture.
" Pendant des siècles, le peuple de Dieu vit en paix dans l'Eglise, nourri par le missel restauré de Pie V à l'occasion du Concile de Trente au XVI siècle.
Après le Concile Vatican II, un nouvel Ordo Missae est " fabriqué " à la hâte, comme l'écrit le futur Benoît XVI. Dans la pensée des réformateurs, la messe ancienne a vécu.
Voici le bilan de plus de trente années de tribulation d'un rite offensé, diffamé, presque entièrement effacé par dénigrements, mépris, interdictions et persécutions ecclésiastiques.
Mais la bataille initiée le 3 avril 1969 n'est pas achevée. Avec l'honneur à nouveau rendu au rite ancien viendra peut-être le temps de la justice ; et aussi celui de la réforme de la Réforme "
L'objet de ce livre est ainsi clairement énoncé.
Il survole trente ans - et plus - de ce combat que j'ai pu mener au côté de Mgr Lefebvre, dans sa ligne, sous son inspiration, avec son éclairage, sa conviction profonde, son amour de cette liturgie romaine qu'il célébrait si bien, sans lenteur mais avec quelle recueillement. Tout cela reste en ma mémoire. La messe catholique, ce sacrifice du Christ Seigneur, était vraiment pour lui, le cœur de l'Eglise. Il voyait en elle la raison du sacerdoce catholique, la raison de tout l'apostolat sacerdotal. Cette messe aimée fut la raison de la création de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X. Et avec quelle foi, il nous a appris à l'aimer, à la vénérer. Avec quelle attention, il veillait à la bonne formation liturgique de ses membres. Rien n'était trop beau pour le culte divin, pour l'honorer d'estime, d'application.
Il est bien légitime que je me sois passionné ma vie durant, comme mes confrères, pour le maintien de ce culte catholique. Je souhaite son retour dans la sainte Eglise, son retour paisible…juste, loyal, nécessaire. Nous n'en sommes peut-être plus loin….
Mais il faut garder la mémoire des événements qui ont marqué cette " bataille ", cette difficile bataille, cette invraisemblable bataille. Il me fut permis d'en vivre, de loin, de près, les grands moments. Cette bataille, de fait, a une histoire. Il faut en garder le souvenir.
Je la raconte en 11 chapitres.
Les voici.
I La Constitution Apostolique Missale Romanum du 3 avril 1969 et le Bref Examen Critique du 21 octobre 1869.
II De la résistance des dociles. Le zèle de ta maison me dévore.
III La lettre Quattuor abhinc annos
IV 1986 La commission des neuf Cardinaux

V 1988 L'année de sacres

VI 1988-1998 Les communauts Ecclesia Dei Adflicta et le soutien de s cardinaux

VII 1998 Le pèlerinage à Rome des Communauté Ecclesia Dei

VIII La division de la Fraternité saintg Pierre, La législation Medina : " le cardinal dit le droit "

IX 2001-2002 Le 25 décembre 2001 - Le 18 janvier 2002

X De la législation Medina à l'érection de l'administration apostolique Saint Jean Marie Vianney

XI Epilogue L'événement historique du 24 mai 2003.


Voici le bon de commande : A commander : aux Editions de Paris 13 rue Saint Honoré 78000 Versailles Tel O6 79 17 38 08 Fax 01 45 53 06 79 Courriel editionsdeparis@wanadoo.fr Site http://www.editions-de-paris.com.
" La bataille de la Messe ". 19 euros. Frais de port 5 euros.


Pour vous encourager à l'acheter pour le lire, je me permets de vous en donner un chapitre entier. Celui qui m'a le plus passionné. Celui qui m'a valu le plus grand des ennuis. Celui où j'analyse ce que les Pères de Campos du Brésil ont su obtenir de la part de Rome : la facultas de dire la messe tridentine, comme droit reconnu à l'Administration Apostolique Saint Jean Marie Vianney et à ses prêtres dans toutes les églises de leur administration, aujourd'hui construites et à construire, demain. Et les limites au seul diocèse de Campos ne seront pas éternelles…

J'ai toujours considéré ce 18 janvier 2002, date du décret d'érection de cette Administration Apostolique Saint Jean Marie Vianney, comme un grand événement pour l'Eglise…C'est pourquoi j'ai tenu à y assister…alors que Paul VI l'avait, pensait-il, définitivement bannie, pour ne pas dire abolie, de l'Eglise au nom de son autorité apostolique.

De la législation Medina
à
L'érection de l'administration apostolique Saint Jean Marie Vianney


L'érection de l' " administration apostolique Saint Jean Marie Vianney " par la lettre du Jean Paul II du 25.12.2001, et plus précisément l'article 3 du décret de son érection, le 18 janvier 2002, lui donnant la facultas de célébrer la messe dite de Saint Pie V, a modifié la législation " Medina " de juillet 99.
Il faut d'abord reconnaître la vraie nature de cette facultas. Il faut ensuite en tirer toutes les conséquences.
Cette facultas est-elle une concession ou un pouvoir permanent ? Les opinions.

Pour certains, il n'y aurait aucune nouveauté, aucun progrès quant à la reconnaissance du droit de la messe, mais plutôt une régression.

Il ne s'agirait, de nouveau, que d'une nouvelle " concession ". La situation des Pères de Campos, quant à la messe, ne serait pas différente de celle des abbés de la Fraternité Saint Pierre, vivant dans le cadre du " Motu Proprio " Ecclesia Dei Adflicta " du 3 juillet 1988.
C'est la pensée de Monsieur l'Abbé de Tanoüarn exprimée dans " Pacte " d'avril 2002.
Il conteste que ces " accords " aient pu faire avancer la cause traditionnelle. Il traduit ainsi l'article 3 du décret : " La faculté de célébrer la Sainte Eucharistie est concédée à l'Administration Apostolique ". Il corrige un peu plus loin sa traduction et reconnaît qu'elle est " attribuée ". Le mot latin est " tribuitur ".
" Concédée ", " attribuée " … ? Quoiqu'il en soit cette " facultas " peut, dit-il, " aussi bien être retirée à ceux à qui elle a été octroyée ".
" Au fond pour les traditionalistes, cette faculté est une sorte de lot de consolation qui ne préjuge pas d'un avenir normalisé ".
Il conclut : " On retrouve la doctrine de la secrétairerie d'Etat sur la messe traditionnelle qui n'est pas un droit mais une concession. Le Cardinal Ré (quel hasard) en a d'ailleurs été l'un des principaux tenants. Il est en pleine cohérence avec lui-même ".
Monsieur l'Abbé Barthe - de Catholica - donne, de cet article 3, une interprétation radicalement différente.
Il écrit :
" Mais aussi étrange qu'elle soit, la pétition bi-ritualiste vient d'obtenir une consécration pratique de taille, avec la création d'une administration apostolique sur mesure pour l'évêque, Monseigneur Rangel et pour les prêtres de l'Union Sacerdotale Saint Jean-Marie Vianney dans le diocèse de Campos au Brésil. Certes, la présence d'évêque n'est pas formellement requise pour que l'on puisse parler d'une famille liturgique spécifique, mais on ne voit pas comment les rites orientaux pourraient vivre comme tels sans la présence en leur sein de la plénitude du sacerdoce.
" Cette récente reconnaissance " d'un évêque de rite tridentin en tant que tel peut s'interpréter comme la légitimation ou l'amorce de la légitimation pour les autorités de rite Paul VI d'un rite Saint Pie V ".

" Avancée décisive de la critique de la réforme ou au contraire victoire de celle-ci qui intègre en son sein la liturgie antérieure ? Incontestablement, l'affaire a un intérêt stratégique non négligeable car dans un système idéologique il ne peut pas y avoir pluralisme entre partisans de l'édifice ancien (rituel en l'espèce) et de diverses tendances de la construction nouvelle ".
" A cet égard, la reconnaissance de Campos crée un équilibre instable qui ébranle l'ensemble conciliaire " (Catholica - Printemps 2002).
J'opine plutôt du côté de Monsieur l'Abbé Barthe.
Mais les arguments doivent être avancés.

Les arguments

Examinons de près cet article 3 du décret d'érection de l'administration apostolique Saint Jean-Marie Vianney.
Deux textes doivent être étudiés en cette affaire :
- la lettre du Pape Jean Paul II du 25 décembre 2001
et
- le décret d'érection de cette administration, ses statuts approuvés par le Pape le 18 janvier 2002.

Le sens des mots :
Voici les textes :
- la lettre du Souverain Pontife du 25.12.2001 :
" On confirmera à l'administration apostolique la faculté (facultas) de célébrer l'Eucharistie et la liturgie des heures selon le rite romain et la discipline liturgique codifiée par notre prédécesseur Saint Pie V avec les adaptations introduites par ses successeurs jusqu'au bienheureux Jean XXIII ". 1)

Jean Paul II utilise bien le verbe " confirmare " qu'il met au futur : " confirmabitur ".
- le décret d'érection de l'administration du 18 janvier 2002 :
" Est accordé (tribuitur) à l'administration apostolique la faculté (facultas) de célébrer la Sainte Eucharistie, les autres sacrements … selon le rite romain … de Saint Pie V. "

Le verbe utilisé ici est " tribuere ". Le verbe latin est clair. Il veut dire " repartir " entre les tribus, distribuer, partager, donner, voire même assigner - décerner - accorder - attribuer - respecter.
Dans la lettre du Pape, on a le verbe " confirmare " qu'il ne faut pas traduire par " confirmer " comme le traduisent les Dominicains d'Avrillé dans " Le Sel de la Terre " - n° 40 - p. 157. C'est un verbe beaucoup plus précis et fort. Il veut dire " consolider - fortifier - affermir ". Il peut même se traduire par " cimenter " : ainsi dans l'expression " confirmare societatem jurejurando " que l'on traduira par " cimenter une alliance par un serment ". Il peut même être utilisé dans les traités, dans les actes juridiques et on le traduira à ce moment par " ratifier ". Or, ratifier vient du nom latin : ratus et du verbe facere. Et ratus se traduit par " fixé ", " réglé ", " constant ", " invariable ". On parlera en ce sens " du cours constant et immuable des astres " : " Astrorum rati immutabilesque cursus".
C'est ainsi un verbe très fort. Il exprime l'idée de force, de solidité, de stabilité, de constance. (1)
Du reste " firmus " est un adjectif qui veut dire ferme, solide, fort, sûr, durable.
Ces verbes - et celui de la lettre du Pape du 25.12.2001- confirmare - et celui du décret - tribuere - se complètent, se précisent l'un l'autre. Il donne ainsi le vrai sens au mot facultas utilisé ici pour désigner ce qui est reconnue par Rome aux Pères de Campos : la facultas de dire la messe de Saint Pie V.

1) Je donne ici la traduction des Dominicains d'AVRILLE. Personnellement, je traduirais : " sera ratifié à l'administration … " . Voici le texte latin : " Confirmabitur Administrationi Apostolicae facultas celebrandi Eucharistiam et Liturgiam Horarum secundem Ritum Romanum atque disciplinam liturgicam ad Nostri Decessoris sancti Pii V praescripta … "

Les interprétations :

Ce n'est pas une simple concession, comme le traduit trop vite Monsieur l'Abbé de Tanoüarn. Sa traduction de cet article 3 du décret est fausse. Il dit que cette facultas donnée par Rome est simplement " concédée". Rome leur accorde une faculté. Il traduit " tribuere " par " concéder ". Il n'y aurait ainsi pour lui aucune différence entre le Motu Proprio " Ecclesia Dei " et surtout la lettre " Quattuor abhinc annos " et le décret d'érection de l'administration en ses documents constitutifs !

La lettre " Quattuor abhinc annos " :

Là, avec la lettre " Quattuor abhinc annos ", puis le " Motu Proprio " Ecclesia Dei Adflicta " Rome concédait, permettait de fait - c'est le terme - un simple " indult ". De plus, cet indult n'était pas concédé aux prêtres et aux fidèles qui, par aventure, en feraient la demande, mais simplement à l'évêque. La lettre " Quattuor abhinc annos " concède à l'Evêque le pouvoir de donner l'indult de la messe Saint Pie V, à ceux qui lui en feraient la demande, sous certaines conditions très restrictives.

La lettre du Pape du 25 décembre 2001 :

Ici, avec le décret du 18 janvier 2002 et la lettre du Pape du 25 décembre 2001, les choses sont différentes.
C'est une faculté donnée - accordée. Il y a une certitude. " Confirmare " a une valeur juridique. C'est une sorte de traité - qui est ratifié par les deux parties signataires - qui est comme cimenté - qui est comme un engagement - une alliance cimentée qui engage les deux parties signataires, qui ne dépend donc pas d'une seule partie, qui serait mutable, changeable à merci par la volonté d'un seul et selon son seul caprice. Non ! Ce décret est comme un traité - un accord ratifié par les parties - réciproquement. Il engage sur l'honneur - la signature donnée - les parties au contrat. Un des objets de ce contrat est la messe ancienne. Elle est donnée aux prêtres de cette administration. Ils ont la faculté - la facultas - de célébrer la messe et tous les autres sacrements - l'épiscopat le moment venu - dans le rite dit de Saint Pie V.

Le sens du mot facultas :

Facultas - en latin - est un mot aussi très fort, très précis - c'est le pouvoir de faire quelque chose, de dire, d'exécuter. Il exprime la puissance physique ou morale qui rend un être capable d'agir. On pourra alors le traduire par le mot : vertu, le mot : propriété. Au sens figuré on le traduira par le droit de faire une chose. C'est ainsi que les juristes vont même jusqu'à le traduire par " droit ".

Ce qui, ici, conviendrait bien, étant donné l'utilisation des verbes latins " tribuere " et " confirmare " qui, encore une fois, ont une connotation juridique et sont utilisés pour la signature d'actes juridiques, de traité ou d'alliance ou d'accord juridique. Ce qui est le cas.

C'est pourquoi, je ne partage pas l'avis trop tranché de Monsieur l'Abbé de Tanouarn dans le " Pacte " d'avril 2002. Il s'est trompé sur le sens du verbe tribuere. Ce qui l'a conduit à nous proposer une fausse analyse de la facultas donnée aux pères de Campos.

La messe dite de Saint Pie V : un droit reconnu pour les Pères de Campos

Le sens des mots étant précisé, on peut comprendre alors ceci : il y a une différence essentielle entre la lettre " Quattuor abhinc annos " et donc avec le Motu Proprio " Ecclesia Dei Adflicta " qui en reprend la substance d'avec le décret qui donne existence à l'administration apostolique et qui en précise le pouvoir quant à l'usage du rite traditionnel pour la célébration de la Sainte Messe.
La messe de toujours est, cette fois, depuis le 25 décembre 2001, reconnue de droit. Elle est de droit la " propriété " de l'administration apostolique personnelle Saint Jean-Marie Vianney.
Ce droit, son exercice - cette " facultas " - ce pouvoir de la dire - ne dépend plus de l'ordinaire du lieu comme en 1984 avec la lettre " Quattuor abhinc annos ".
Ce droit - cette " facultas " - est " la propriété " de cette administration apostolique, son bien, celui de Monseigneur Rangel … qui a pleine juridiction sur ses membres, son clergé, ses fidèles. Dans cette administration apostolique, il n'existe plus " de bi-ritualisme " mais bel et bien et uniquement le rite dit de Saint Pie V. Quelle différence avec ce que Rome a imposé en 2000 à la Fraternité Saint Pierre !

C'est un " pouvoir " - une " facultas " - inhérent à toute église, à tout prêtre qui se trouve dans cette administration. Il n'est plus question de leur en donner seulement libre usage dans " leurs prieurés " par exemple ni de désigner, éventuellement, des églises dans le diocèse et d'en préciser les horaires comme pour la Fraternité Saint Pierre dans le cadre du Motu Proprio " Ecclesia Dei Adflicta. "
Ici, dans l'administration apostolique de Campos, le curé est de plein droit responsable de son église. Il a pleine juridiction. Il a pleine jouissance de sa " facultas ". Il a la " cura animarum " … avec la faculté de dire la messe de Saint Pie V pour le bien de ses fidèles, aussi bien pour les messes basses, les messes chantées, pour les messes de " requiem " que pour les messes de mariage et ainsi pour tous les autres sacrements … indépendamment des désirs de l'Evêque résidant de Campos.

Les précisions que donnait le Cardinal Medina aux prêtres de la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre - le 18 octobre 1999 - alors en pleine crise liturgique ne sont plus de règle pour les membres et les prêtres de l'administration apostolique Saint Jean-MarieVianney.

Droit ou simple tolérance :

Est fini le caractère limitatif prévu dans l'indult de 1984, repris dans le Motu Proprio de 1998 avec cependant une plus grande libéralité … du moins dans la pensée du Pape … Et en ce sens, Jean Madiran, avec raison, pouvait intituler son article dans Itinéraires : " la messe revient ". Mais on sait en effet avec quelle limitation, restriction, les ordinaires des lieux donnaient le bénéfice de l'indult. La messe ancienne existait de nouveau, certes mais avec quelle restriction ! Comme en liberté surveillée.
Elle jouissait - de nouveau - d'une tolérance dans l'Eglise mais comme on tolère un mal. Les membre de ces communautés Ecclesia Dei allèrent du reste un jour se plaindre à Rome de cette politique épiscopale par trop restrictive. Nous étions le 24 octobre 1998.
Il n'y a rien de tel maintenant avec la facultas reconnue aux prêtres de Campo en faveur de la messe. Ils viennent d'obtenir tout simplement, cette fois sans restriction aucune la possibilité de continuer à recourir à l'intègre et fécond missel romain de Saint Pie V, comme le demandait à l'époque le Cardinal Ottaviani… Ce qu'il n'obtint pas. Ce que nul n'a obtenu … Ce que Monseigneur Rangel a obtenu…Quelle évolution !

Droit sans concession :

Il faut même préciser.
Cette " facultas " de dire la messe de toujours a été reconnue aux Pères de Campos sans qu'ils soient obligés - pour autant - de reconnaître " la rectitude doctrinale " de la nouvelle messe. C'était le cas pour les prêtres des communautés Ecclesia Dei. Ils devaient - eux - pour pouvoir célébrer la messe de toujours selon la permission concédée par l'indult :
- non seulement reconnaître la " validité " de la nouvelle messe - ce que personne n'a jamais nié.

- mais aussi et surtout, reconnaître la parfaite " légitimité et rectitude doctrinale " de la nouvelle messe.

Cette permission - cet indult - n'était donnée - de soi - qu'à cette condition. C'était expressément écrit dans la lettre " Quattuor abhinc annos. " C'était la première condition à satisfaire. Et cette condition fut expressément reprise dans le " Motu Proprio Ecclesia Dei Adflicta " : c'était la note 9 du petit " c " du chapitre 6. Et elle fut réclamé de tous…
Elle était encore rappelée par le Cardinal Medina, le 18 octobre 1999 : " que ces fidèles - les bénéficiaires de cet indult - de leur côté acceptent sincèrement la doctrine du Concile Vatican II ainsi que la légitimité et la cohérence avec la foi orthodoxe des textes liturgiques promulgués dans le cadre de la rénovation liturgique. "
Le " bi-ritualisme " si l'on veut - était de rigueur … mais dans une profonde inégalité d'un rite à l'autre.
" La loi générale demeurait l'usage du rite rénové depuis le concile, alors que l'usage du rite antérieur relevait de privilèges qui devaient garder le caractère d'exception ". (Mgr. Ré - lettre du 17 janvier 1994).
Rome sut attendre dix ans pour amener l'ensemble des communautés Ecclesia Dei adflicta à cette confession d'orthodoxie de la nouvelle messe, et ainsi à la reconnaissance de la " légitimité " du bi-ritualisme.
Ce fut Dom Gérard, on le sait, qui le 24 octobre 1998, au nom de tous, le proclama devant le Cardinal Ratzinger: " C'est dans cet esprit de paix et de communion que le 27 avril 1995 j'ai accepté de concélébrer avec le Saint Père, désirant montrer par là que nous tous qui militons pour le maintien de l'ancien missel, nous croyons à la validité et à l'orthodoxie du nouveau rite. "
Rien de tout cela n'est demandé - cette fois - à Monseigneur Rangel et à ses prêtres. Ils l'auraient du reste refusé … eux qui venaient de rappeler à leurs fidèles la pensée de Monseigneur de Castro Mayer, sa prise de position contre la nouvelle messe, pour le maintien de la messe ancienne. Ils ont seulement reconnu - ce que Monseigneur Lefebvre reconnaissait lui-même :
" la validité du Novus Ordo Missae promulgué par le Pape Paul VI lorsqu'il est célébré correctement, avec l'intention d'offrir le véritable sacrifice de la messe ".

L'administration Saint Jean-Marie Vianney : une famille liturgique spécifique

Hier, Rome écrivait aux prêtres des communautés Ecclesia Dei adflicta : " Comme la manière actuelle de célébrer, selon le rite romain correspond à la norme liturgique commune, on ne doit pas parler de " deux rites " ou " de bi-ritualisme ". La concession faite pour le Motu Proprio Dei Adflicta sauvegarde la sensibilité liturgique des prêtres et des fidèles habitués à la manière ancienne de célébrer mais ne les constitue nullement en une église rituelle ".

Avec les pères de Campos, c'est chose faite aujourd'hui, même s'il ne faut pas employer le mot. Une administration apostolique personnelle - un diocèse - pourra célébrer sans problème, de plein droit, la messe tridentine.

Monsieur l'Abbé de Tanoüarn, dans son article de " Pacte " (avril 2002) semble ne pas le reconnaître : " il ne s'agit pas d'un exarchat traditionaliste " (p.3). Je lui réponds : " mais bien sûr que si. "

Monsieur l'Abbé Barthe le reconnaît du reste lui-même.
" Mais aussi étrange qu'elle soit, la pétition bi-ritualiste (2) vient d'obtenir une consécration pratique de taille, avec la création d'une administration apostolique sur mesure pour évêque, Monseigneur Rangel, et pour les prêtres de l'Union Sacerdotale Saint Jean-Marie Vianney, dans le diocèse de Campos, au Brésil ".

(2) Précisons : cette expression " La pétition bi-ritualiste " peut s'entendre sur le plan pratique et nullement sur le plan théologique. On ne peut admettre, de soi, le nouveau rite en raison de son équivocité mais il ne dépend pas de nous que ce rite nouveau existe dans l'église, même si on doit tout faire pour sa disparition.

" Certes, la présence d'évêque n'est pas formellement requise pour que l'on puisse parler d'une famille liturgique spécifique mais on ne voit pas comment les rites orientaux pourraient vivre comme tels sans la présence en leur sein de la plénitude du sacerdoce. "

C'est, du reste, ce qu'a confirmé le secrétaire de la Congrégation du Clergé, au nom de Cardinal Castrillon Hoyos, Mgr Csaba Ternyàk, dans sa lettre protocolée sous le n° 20021399, du 10 juillet 2002, à Mgr Rangel :
" Conformément à la lettre autographe " Ecclesiae unitas " du Saint Père Jean-Paul II, datée du 25 Décembre 2001, et au décret " Animarum bonum ", du 18 Janvier 2002, émanant de la Congrégation des évêques, le rit liturgique codifié par saint Pie V, avec les adaptations décidées par ses successeurs jusqu' au Bienheureux Jean XXIII, est devenu le rit propre de l'Administration apostolique, de sorte qu'aucun prêtre légitimement admis à célébrer dans les églises propres de l' Administration apostolique personnelle Saint Jean-Marie Vianney n'a pas besoin d'autorisation supplémentaire pour user du Missel romain dans son édition typique de 1962… "


Les conséquences : une nouvelle législation.

Dès lors, il est fini le temps où la hiérarchie pouvait affirmer sans restriction que la messe nouvelle était la seule loi générale en matière liturgique. Il faudra bien qu'elle tienne compte - aujourd'hui - de cette facultas de nouveau accordée, de nouveau affirmée en faveur de la messe " tridentine " pour les pères de Campos. Elle redevient un droit - un droit reconnu - " cimenté " - " ratifié " dans un diocèse.

Dès lors, il est fini le temps où Monseigneur Ré pouvait affirmer à Monsieur de Saventhem en 1994 : " les diverses dispositions prises (en matière liturgique) depuis 1984 avaient pour but de faciliter la vie ecclésiale à un certain nombre de fidèles, sans pérenniser pour autant les formes liturgiques antérieures ".

Ce temps en faveur exclusivement de la nouvelle messe est fini. Cette affirmation " sans pérenniser pour autant les formes liturgiques antérieures " est finie, obsolète. Une faculté est donnée à certains pour précisément pérenniser dans l'Eglise, la forme liturgique antérieure.
Les mots ont un sens. Les affirmations aussi. Ce qui est écrit est écrit et ne peut pas ne pas avoir été écrit.

La messe de toujours : un droit positif.

Certes, c'est du droit positif, me dit Monsieur l'Abbé de Tanoüarn, et le droit positif peut changer. Bien sûr !
Mais il faut reconnaître que la lettre du Pape Jean-Paul II a été signée un 25 décembre de l'année 2001 - et que cette lettre dit : " Confirmabitur facultas ". C'est publiquement - officiellement que la facultas a été donnée à certains prêtres, ceux de l'Administration Apostolique Saint Jean-Marie Vianney de célébrer les Saints Mystères dans le rite ancien, pour en assurer la pérennité dans l'Eglise et leurs églises.
Rien ne fera que le décret d'érection de cette administration ne fut signé le 18 janvier dernier et que ce décret dise : " Tribuitur facultas ". (3)
L'Eglise, par la main du Pape Jean Paul II, le reconnaît aujourd'hui et le veut faire respecter. Elle veut " pérenniser " cette messe. Elle utilise un verbe en conséquence " confirmabitur facultas ".
Comme l'écrivait très joliment Monsieur de Saventhem à Monseigneur Ré dans sa lettre du 27 mai 1994 lui contestant son interprétation de l'indult du Pape de 1984 : " sans pérenniser pour autant les formes liturgiques antérieures " : " Même ecclésiologiquement, cette clause paraît indéfendable. La " liturgie classique " du rite romain de la messe est déjà douée de pérennité intrinsèque en tant que monument incomparable de la foi. Son usage universel et multi-séculaire bien avant la Constitution apostolique " Quo Primum " lui confère en outre la pérennité canonique de la consuetudo immemorabilis. Par conséquent, la pérennisation dont parle votre lettre n'est aujourd'hui ni à octroyer ni à ôter à la liturgie classique. Elle est simplement à reconnaître et à faire respecter dans les dispositions réglant son emploi à côté des rites réformés " (Nef - p.388).

" Le droit de dire la messe de toujours est " :
C'est précisément ce que le Pape a fait le 25 décembre 2001 et le 18 janvier 2002 en créant une forme juridique ad hoc. C'est un début.
Dès lors, ils sont finis ces temps où une autorité pouvait écrire :
" La loi générale demeure l'usage du rite rénové depuis le Concile alors que l'usage des rites antérieurs relève actuellement de privilèges qui doivent garder le caractère d'exception ". C'est Monseigneur Ré - toujours lui - qui s'exprimait ainsi.

Le Cardinal Medina lui emboîtait le pas le 3 juillet 1999 - Il était encore préfet de la Congrégation du Culte Divin - Il ne s'exprimait pas différemment pour les communautés Ecclesia Dei. Il ne cessait, lui aussi, d'invoquer, pour éviter de voir pérenniser la messe ancienne, les notions " d'indult ", de " privilège ", de " période d'exception ". La messe de Saint Pie V n'était que " tolérée ". Elle n'était qu'un privilège, qu'un indult … pour une période transitoire.
(3) ROME confirme - du reste - cette interprétation. Dans sa lettre du 4 mai 2002 à Monseigneur Fellay, le Cardinal Castrillon Hoyos écrit en effet :
'Tale abbraccio si è concretizzato con la forma giuridica piu adatta, offerta in modo permanente, allo sviluppo del carisma della suddetta Unionne, in sena all'unica Chiesa di Cristo con a Capo Pietro : mi riferisco all'Amministrazione Apostolica personale di Campos, che non è una soluzione transitoria ma è data stabilmente (di questa stabilità e di questa volontà non si può in alcun modo dubitare). So che molte persone, laici, sacerdoti e religiosi della Fraternita San Pio X, vogliono trovare la pace della conscienza, nella piena riconciliazione con la Chiesa ".
On voit en particulier combien sont futiles les paroles du Père COTTIER le 19 janvier dans une interview à l'Agence ZENIT (texte cité dans le SEL DE LA TERRE- n° 40 - p. 166). : " Peu à peu, il faudra prévoir des pas supplémentaires : par exemple, qu'ils participent aussi à la célébration dans le rite réformé. Mais nous ne devons pas précipiter "). Il n'est du reste pas chargé du dossier et ne connaît pas les engagements de l'autorité.

Ce temps-là est fini.

L'autorité ne pourra jamais plus écrire : " On doit affirmer que le missel romain antérieur au Concile Vatican II n'est plus en vigueur comme une alternative de libre choix pour l'ensemble des Eglises qui appartiennent au rite romain ".
C'était Monseigneur Médina à son Eminence le Cardinal Bonicelli, archevêque de GÊNES en 1999
Ce temps est fini, bien fini. Du moins, faudrait-il " préciser ", " prendre en compte " le cas de Campos.
Il y a une faculté - un droit, un pouvoir - qui a été officiellement reconnue, publiquement publiée, aujourd'hui en vigueur. Elle est. Le droit de dire la messe de toujours est.
Hier - le 25 décembre 2001, il était dit : " confirmabitur facultas " …
Aujourd'hui, le 18 janvier 2002 - cette même facultas " tribuitur " - " elle est donnée ".
Elle est.
Non point que nous n'avions pas le droit de la célébrer ni hier, ni aujourd'hui : " Son usage universel et multiséculaire bien avant la Constitution apostolique Quo Primum lui conférait la pérennité canonique de la Consuetudo immemorabilis ".

Mais précisément, ce droit ayant été contesté, nié, bafoué, détruit, pendant des années, il est heureux qu'enfin la hiérarchie reconnaisse et fasse respecter ce droit dans des dispositions réglant son usage … d'abord particulier puis un jour universel.

Ainsi, cette facultas - donnée, scellée -, n'a peut-être pas encore été déclarée pour " l'ensemble des églises " … mais elle est reconnue pour " certaines églises ", celles de l'Administration Apostolique personnelle Saint Jean-Marie Vianney, à Campos, au Brésil. Demain, cette facultas le sera pour d'autres églises, pour nous… Et après-demain " pour tous " pour " l'ensemble des Eglises ".

Le 24 mai 2003 : le cardinal affirme le " droit de cité " de la messe de " toujours ".

Aussi ne faut-il pas être étonné que le cardinal Castrillon Hoyos ait pu déclarer, le 24 mai 2003, à Sainte Marie Majeure, au nom du Pape, que la messe " traditionnelle ait " droit de cité " dans la sainte Eglise catholique et romaine.

Il y a des mouvements inéluctables.

Celui du retour de la messe de toujours dans l'Eglise en est un.