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Un regard sur le monde

politique et religieux

 

au 22 mai   2009

 

N° 217

 

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

Mgr Lefebvre

la FSSPX

et

la liberté religieuse.

 

 

La FSSPX, on le sait,  doit avoir prochainement des conversations  théologiques avec les autorités romaines. Le but de ces « colloques nécessaires » comme le dit le Cardinal Re dans son décret de la levée des excommunications est d’ «  approfondir toutes questions qui restent en suspens » afin « de pouvoir parvenir rapidement à une pleine et satisfaisante solution au problème qui s'est posé à l'origine ». Le Concile Vatican II, et principalement la liberté religieuse d’après Vatican II, et la réforme liturgique, la réforme de la Sainte Messe seront au cœur de ces conversations.

Nous avons déjà abordé le problème de la Nouvelle Messe. Voyez le « Regard sur le monde »  du 20 mars 2009, n° 208, intitulé « Mgr Lefebvre et la Nouvelle Messe.

 

Nous voulons aujourd’hui, et dans plusieurs numéros, aborder le problème de la liberté religieuse.

Souvenons-nous d’abord des circonstances historiques.

 

Nous étions en 1978.

 

C’était l’époque où le dossier «  Lefebvre » était confié, par le pape Paul VI, puis par le pape Jean Paul II, au cardinal Seper. .Le cardinal avait envoyé à Mgr Lefebvre, dans une lettre du 28 janvier 1978, un volumineux questionnaire où Mgr Lefebvre devait  répondre de certains de ses écrits et discours ainsi que de ses actes. Il devait le faire  d’abord par écrit, puis au cours de colloques. Il lui disait : « Sa sainteté le Pape Paul VI a chargé la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la foi d’examiner votre situation dans l’Eglise au point de vue des propositions doctrinales que vous avez prises dans vos déclarations et vos écrits et qui s’expriment aussi dans vos entreprises » Y était jointe en annexe l’exposé des  points litigieux : « L’annexe, y était-il dit, comprendra deux parties qui auront chacune, leurs subdivisions. La première partie traitera d’assertions particulières sur : 1) la liberté religieuse d’après Vatican II ; 2) l’Ordo Missae promulgué par le Pape Paul VI ; 3) le rite de la Confirmation également promulgué par lui. La deuxième partie aura pour objet des assertions plus générales : « 1) sur l’autorité du Concile Vatican II ; 2) sur l’autorité du Pape Paul VI ».

 

Mgr Lefebvre devait répondre à tout cela rapidement, dans le mois.

 

Notons aussi que la finalité de ces échanges était parfaitement exprimée par le cardinal Seper : Ils avaient pour but « une vraie réconciliation avec le Vicaire de Notre Seigneur Jésus-Christ et son Eglise ». Le cardinal le disait expressément : « Ces réponses seront étudiées avec un intérêt bienveillant ; car la Congrégation pour la Doctrine de la foi désire ardemment qu’avec l’aide du Seigneur vous puissiez trouver le chemin d’une vraie réconciliation avec le Vicaire de Notre Seigneur Jésus-Christ et son Eglise ».

 

2009. La FSSPX se trouve dans la même situation que Mgr Lefebvre, matériellement parlant.

 

La FSSPX est de nouveau, comme Mgr Lefebvre, face à la Congrégation de la Doctrine de la Foi  pour des entretiens doctrinaux dont l’objet est le même : éclaircissement à donner sur des points doctrinaux. La finalité est la même : afin de régulariser une situation canonique.

 

Mgr Lefebvre comprenait, bien sûr, en 1978, la valeur historique de tout cela. Il présentait son dossier dans Itinéraires par ces mots : « Je ne puis m’empêcher de penser en toute sincérité que ces colloques ont une valeur historique parce qu’ils sont l’écho d’une opposition profonde et qui remonte à tout le moins au Concile de Trente, entre la doctrine catholique et le libéralisme protestant, entre la foi catholique et le naturalisme rationaliste maçonnique, dont l’histoire des quatre derniers siècles est une illustration dramatique ».

 

L’importance historique aujourd’hui est la même. Elle n’a pas changé. 

 

Sur le plan doctrinal, nous nous trouvons devant « une  opposition profonde et qui remonte à tout le moins au Concile de Trente, entre la doctrine catholique et le libéralisme protestant, entre la foi catholique et le naturalisme rationaliste maçonnique, dont l’histoire des quatre derniers siècles est une illustration dramatique ». Comment imaginer une « conciliation » ? Les conversations risquent d’être longues, voire même de ne pas aboutir…Alors sera reculée d’autant la normalisation canonique de la FSSPX. Le temps ne jouera pas en faveur de la FSSPX. Il y a, du moins, un danger. C’est ma grande préoccupation.

 

Dans ce numéro de « Regard sur le monde » je commencerai à donner la réponse de Mgr Lefebvre sur la question particulière de la Liberté religieuse. La FSSPX devra nécessairement s’en inspirer….si elle veut être fidèle

 

A- La liberté religieuse du Concile Vatican II

 

Cette question est, dans l’annexe de la lettre du cardinal Seper, du 28 janvier 1978,  le premier  point des assertions particulières

 

Voici les critiques que le cardinal Seper adresse à la pensée de Mgr Lefebvre sur ce sujet. Mgr Lefebvre répondra point par point.

 

1-      La liberté religieuse selon le Concile Vatican II.

 

« Bien des fois, Monseigneur, vous vous êtes exprimé à son sujet, par exemple dans le texte suivant : « Jamais ce terme là (celui de la liberté religieuse) n’a été compris dans le sens admis par le Concile. Tous les documents précédents de l’Eglise qui parlent de la liberté religieuse entendent parler de la liberté de la religion (la vraie) et jamais de la liberté des religions. Toujours lorsque l’Eglise a parlé de cette liberté-là, elle a parlé de la liberté de la religion ( vraie) et de la tolérance vis-à-vis des autres religions. On tolère l’erreur. Lui donner la loiberté, c’est lui donner un droit : or elle elle n’en a pas. La vérité seule a des droits. Admettre la liberté religieuse des religions, c’est donner le même droit à la vérité qu’à l’erreur. Cela est impossible. Jamùais l’Eglise ne peut dire une chose pareille. A mon avis, oser dire cela est blasphémer…Si nous avons la foi, nous n’avons pas le droit d’admettre cela ; c’est l’erreur du droitcommun qui a été condamné par Pie IX et touts les Papes » (Mgr Lefebvre. Un évêque parle. 1976. p. 196-197)

Cette déclaration appelle les remarques suivantes :

 

  La Déclaration sur la liberté religieuse doit être lue dans le contexte des autres documents conciliaires, en particulier la Constitution dogmatique Lumen Gentium. (LG).  Elle dit clairement que « l’unique et vraie religion…. Subsiste dans l’Eglise catholique et apostolique à qui le Seigneur Jésus a confié le mandat de la faire connaître à tous les hommes »  Dignitatis humanae, (DH) (1)

 

  Le Concile n’enseigne nullement cet indifférentisme religieux condamné par les Papes. Il affirme au contraire que les hommes ont l’obligation morale de chercher la vérité, de la connaître et de régler toute leur vie selon ses exigences (Dignitatis Humanae, (2) Il rappelle aux fidèles le devoir de l’apostolat missionnaire et celui de former la conscience par la doctrine « sainte et certaine » de l’Eglise catholique « maîtresse de vérité de par la volonté du Christ » (cf D.H., 14)

 

Le Concile reconnaît à la personne humaine le droit de la liberté religieuse, c’est-à-dire le droit d’être à l’égard de tout pouvoir humain, exempte de contrainte (coercitio) en matière de recherche, de choix, de  profession même publique d’une religion (D.H. 2). Il fonde ce droit non pas sur un prétendu « droit » égal de ou à la vérité et à l’erreur, mais sur la transcendance de la personne et de ses droits ultimes à l’égard de la société civile, sur le plan connaturel à l’homme de tendre à la vérité et de la reconnaître selon le jugement de sa conscience et sur la liberté de l’acte de foi. (D.H. 2,3 10)

 

4° L’affirmation de ce droit à la liberté religieuse est dans la ligne des documents pontificaux antérieurs (cf. D.H. 2, note 2) qui, face aux excès de l’étatisme et aux totalitarismes modernes ont affirmé les droits de la personne humaine. Par la Déclaration conciliaire, ce point de doctrine entre clairement dans l’enseignement du Magistère et, bien qu’il ne soit pas l’objet d’une définition, il réclame docilité et assentiment (cf. Const. Dogm. Lumen Gentium, 25)

Il n’est donc pas licité aux fidèles catholiques de le rejeter comme erroné, mais ils doivent l’accepter selon le sens et la portée exacte que lui a donné le Concile, compte tenu de la doctrine catholique traditionnelle sur le devoir morale de l’homme et des sociétés envers la vraie religion et l’unique Eglise du Christ » (cF D.H. 1)

 

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Voici les critiques que la Congrégation de la doctrine de la foi adresse à Mgr Lefebvre.

Mgr Lefebvre y a répondu dans le temps opportun.

 

Voici sa réponse. En raison de sa longueur, nous vous la donnerons en plusieurs numéros.

 

Réponse de Mgr Lefebvre à la Sacrée Congrégation
pour la Doctrine de la Foi

Concernant la Liberté Religieuse

 

A) - Prologue.

 

Les paragraphes 1 et 2 du document sont en contradiction avec le paragraphe 3, et c'est un fait qui se constate dans les documents conciliaires assez fréquemment, d'une manière assez explicite dans le document Dignitatis Humanae (D.H), d'une manière implicite dans d'autres, ce qui est une source de confusion.

En effet, s'il est vrai que l'Église catholique est l'unique et vraie religion, toutes les personnes et toutes les sociétés en particulier la famille et la société civile doivent reconnaître pour unique et vraie religion l'Église catholique.

 Dans la mesure où les autorités constituées par Dieu et par Notre Seigneur Jésus-Christ sont catholiques, elles ont le devoir d'exercer leur autorité selon la fonction qui leur est donnée, en faveur de l'unique et vraie religion. A cet effet elles ont le devoir et le droit d'édicter des lois, des règlements, des prescriptions qui favorisent la connaissance et l'exercice de la vraie religion, et qui la défendent contre ce qui lui est opposé. Toute autorité catholique a le devoir d'agir ainsi dans sa sphère, concourant ainsi à l'application de la loi éternelle de Dieu, dont la loi naturelle n'est que le reflet.

Cette application doit se faire selon la vertu de prudence et le don de conseil, et par conséquent suivant les cas agir avec plus ou moins de tolérance, mais aussi avec une certaine exigence, et nécessairement appliquer les sanctions que comporte toute loi juste. Il n'existe pas de loi sans sanction pour les contrevenants. Dieu en donne l'exemple. Si Notre Seigneur a parlé de la patience et de la miséricorde de son Père, il a aussi `parlé de sa justice et des châtiments.

 

B) – Analyse de l’Article I.

 

            Première raison :

 

Monseigneur Lefebvre lit D.H. avec un préjugé défavorable ; or il suffit de lire quelques passages-clefs, pour voir que le « contexte » de la déclaration ne permet pas une interprétation critique.

 

Ainsi dans « Lumen Gentium » :

« C'est là l'unique Eglise du Christ dont nous professons dans le Symbole, l'unité, la sainteté, la catholicité et l'apostolicité, cette Église que notre Sauveur, après sa résurrection, remit à Pierre pour qu'il en fût le Pasteur (Jn 21, 17)... Cette Église, comme société constituée et organisée en ce monde, c'est dans l'Église catholique qu'elle se trouve, gouvernée par le successeur de Pierre, et les évêques qui sont en communion avec lui, bien que des éléments nombreux de sanctification et de vérité se .trouvent hors de sa sphère, éléments qui, appartenant proprement par don de Dieu à l'Église du Christ, appellent par eux-mêmes l'unité catholique. (n. 8)

 

 Ainsi de même dans D.H. :

« Cette unique vraie religion, nous croyons qu'elle subsiste dans l'Église catholique et   apostolique... » (n. 1)

 

RÉPONSE.

 

1. Dans L.G. le texte cité a bien sa place ; il importait en effet d'enseigner que l'Église, dont on affirme l'institution par le Christ, n'est autre que l'Église catho­lique, que l'on peut facilement reconnaître à « des preuves très nombreuses et éclatantes » (Léon XIII, Immortale Dei, « Paix Intérieure des Nations » - Docu­ments Pontificaux, Desclée - n. 132) et à ses quatre « notes » qui font d'elle-même un grand et perpétuel « motif de crédibilité » (Vatican I, « Dei Filius », Dz 1793-1794). De même dans D.H. il importait avant tout d'enseigner que Dieu ne veut être honoré que dans l'unique vraie religion qu'il a fondée lui-même, et qui est la religion de l'Église catholique. (Cf. Pie IX, Lettre Apostolique « Multiplices Inter » du 10.VI.1851, et Syllabus, prop. 21, Dz 1721.) On peut citer surtout de Pie IX en ce sens, son allocution au Consistoire, du 18.11.1861 :­

« Il n'y a en effet qu'une seule religion vraie et sainte, fondée et instituée par le Christ, Notre Seigneur, mère et nourrice des vertus, destructrice des vices, indicatrice du vrai bonheur, elle s'appelle catholique, apostolique et romaine. » («  L'Église », même collection, n. 230.)

 

 

2. Si donc l'opportunité de ces deux textes de Vatican II est indéniable, leur clarté l'est moins :

« Cette (unique) Église (du Christ), c'est dans l'Église catholique qu'elle se trouve » (L.G. 8).

« Cette unique vraie religion, nous croyons qu'elle subsiste dans l'Église catholique et apostolique. » (D.H. 1.)

Voilà des locutions nouvelles ! Pourquoi ne dit-on pas tout simplement avec la tradition que cette unique Église du Christ, c'est identiquement l'Église catholique ? On dit plus loin que des éléments de sanctification se trouvent hors des limites visibles de l'Église, qui appartiennent en droit à « l'Église du Christ » ; pourquoi ne dit-on pas : « à l'Église catholique s? On dit enfin que ces éléments « appellent par eux-mêmes l'unité catholique »; pourquoi ne dit-on pas, beaucoup plus clairement, qu'ils sont par eux-mêmes pour ceux qui en usent un appel au retour à l'unité catholique !?

Ainsi, dès le départ, le « contexte » de Vatican II dans la question de la liberté religieuse n'est pas aussi « clair « qu'on veut bien le dire !

 

C) - Analyse de l'Article II.

Seconde raison :

 

Vatican II n'enseigne nullement l'indifférentisme religieux condamné par les Papes, il enseigne au contraire :

- Tous les hommes ont l'obligation morale de chercher la vérité, d'y adhérer (dès qu'ils la connaissent) et de régler leur vie selon ses exigences.

- Le devoir des fidèles, de l'apostolat missionnaire.

- Le devoir des fidèles de se former la conscience par la doctrine « sainte et certaine » de l'Église catholique « maîtresse de vérité de par la volonté du Christ ». (D.H. 2 et 14.)

 

RÉPONSE.

 

Il est heureux que Vatican II n'enseigne pas l'indifférentisme individuel de la personne humaine vis-à-vis de la vraie religion ; c'est-à-dire la liberté morale, ou le droit de chacun, « d'embrasser la religion qu'il préfère, ou de n'en suivre aucune si aucune ne lui agrée » «Immortale Dei, P.I.N. 143) !

Mais ce que Vatican II enseigne, c'est l'indifférentisme de l'État vis-à-vis de la vraie religion.

 

Montrons donc :

 

1) Ce qu'enseigne Vatican II (DE. 13).

2) Que cela est contraire au « Droit public » de l'Église.

 

1. Ce qu'enseigne Vatican II ex professo, sur le Droit public de l'Église, c'est-à-dire sur ses rapports avec l'État et la Société civile.

 

-« La liberté de l'Église est un (ou « le ») principe fondamental dans les relations de l'Église avec les pouvoirs publics et tout l'ordre civil. » (A)

 

- « Dans la société humaine et devant tout pouvoir public, l'Église revendique la liberté au titre d'autorité spirituelle instituée par le Christ Seigneur et chargée par mandat divin d'aller par le monde entier prêcher l'Évangile à toute créature. » (B)

 

- « L'Église revendique également la liberté en tant qu'association d'hommes ayant le droit de vivre, dans la Société civile, selon les préceptes de la foi chrétienne. » (C)

 

- « Dès lors là où il existe un régime de liberté religieuse... là se trouvent enfin assurées à l'Église les conditions, de droit et de fait, de l'indépendance nécessaire à l'accomplissement de sa divine mission. » (D)

 

- « En même temps, les fidèles du Christ, comme les autres hommes, jouissent, au civil, du droit de ne pas être empêchés de mener leur vie selon leur conscience. Il y a donc bon accord entre la liberté de l'Église et cette liberté religieuse qui, -pour tous les hommes et toutes les communautés, doit être reconnue comme un droit et sanctionnée dans l'ordre juridique. » (E) (D.H. 13.)

2. Ces propositions sont contraires à l'enseignement traditionnel de l'Église sur le Droit public de l'Église.

 

            1)La « Libertas Ecclesiae est principium fundamentale. »

 

Non ! La liberté n'est pas le principe fondamental ni un principe fondamental en la matière. Le Droit public de l'Église est fondé sur le devoir de l'État de reconnaître la royauté sociale de Notre Seigneur Jésus-­Christ (1). Le principe fondamental qui gouverne les relations entre l'Église et l'État est donc le « oportet illum regnare » de S. Paul (1 Cor 15.25) ; ce règne ne

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(1)         L'opposition que nous voyons entre la « liberté » et la « royauté sociale de N.S.J.C. » n'est pas une opposition de contradiction, mais une opposition « includentis et inclusi »; en ce sens que la royauté sociale de N.S.J.C. inclut bien la liberté de l'Église par rapport au pouvoir temporel, mais que la seule liberté n'est pas le tout de la doctrine du règne social du Christ !

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regardant pas seulement l’Eglise mais devant être le fondement de la cité temporelle ; ainsi l'enseigne l'Eglise, voici ce qu'elle revendique comme son premier et principal droit dans la cité :

 

« On ne bâtira pas la cité autrement que Dieu ne l'a bâtie ; on n'édifiera pas la société, si l'Église n'en jette les bases et ne dirige les travaux ; non, la civilisation n'est plus à inventer ni la cité nouvelle à bâtir dans les nuées. Elle a été, elle est ; c'est la civilisation chrétienne, c'est la cité catholique. Il ne s'agit que de l'instaurer et de 1a restaurer sans cesse sur ses fondements naturels et divins contre les attaques toujours renaissantes de l'utopie malsaine, de la révolte et de l'impiété : OM­NIA INSTAURARE IN CHRISTO. »(S. Pie X, Lettre sur le Sillon, du 29.VIII.1910, n. 11.)

 

 

Cette doctrine, Léon XIII l'enseignait avant S. Pie X:

 

« Les chefs d'État doivent tenir pour saint le nom de Dieu et mettre au nombre de leurs principaux devoirs celui de favoriser la religion, de la protéger de leur bienveillance, de la couvrir de l'autorité efficace des lois, et ne rien statuer ou décider qui soit contraire à son intégrité. » (Immortale Dei, P.I.N. 131 ; cf. aussi « Libertas », P.I.N. 203.)

 

Et cette religion est bien sûr la seule vraie :

 

« Puisque est donc nécessaire la profession d'une seule (« unius religionis ») religion dans la cité, il faut professer celle qui uniquement est la vraie, et que l'on reconnaît sans difficulté... » (Libertas, loc. cit.)

 

Léon XIII, comme ses successeurs, et comme déjà S. Thomas d'Aquin, voit un double fondement au devoir de l'État envers la religion : 1) l'origine divine de la société civile (Immortale Dei, P.I.N. 130), 2) la fin de l'État lui-même, le bien commun temporel, qui doit faciliter positivement aux citoyens l'accès du Ciel !

 

« La société civile... doit, en favorisant la prospérité publique, pourvoir au bien de citoyens de façon non seulement à ne mettre aucun obstacle, mais à assurer toutes les facilités possibles à la poursuite et à l'acquisition de ce bien suprême et immuable auquel ils aspirent eux-mêmes. La première est de faire respecter la sainte et inviolable observance de la religion, dont les devoirs unissent l'homme à Dieu. » (Immortale Dei, P.I.N. 131.)

 

On trouve déjà ceci chez S. Thomas :

 

« Donc, puisque la fin de cette vie qui mérite ici-bas le nom de vie bonne est la béatitude céleste, il appartient à ce compte à la fonction royale (lisons « à l'État ») de procurer la vie bonne de la multitude selon ce qu'il faut pour lui faire obtenir la béatitude céleste ; c'est-à-dire qu'il doit prescrire (dans son ordre qui est le temporel) ce qui y conduit et, dans la mesure du possible, interdire ce qui y est contraire. » (De Regimine Principum, L 1, ch. XV.)

 

Enfin, chez Pie XII :

 

« Or ce bien commun, c'est-à-dire l'établissement de conditions publiques normales et stables, telles qu'aux individus aussi bien qu'aux familles il ne soit pas difficile de mener une vie digne régulière, heureuse, selon la loi de Dieu, ce bien commun est la fin et la règle de l'État et de ses organes.. » (Alloc. au Patriciat romain, du 8.1.1947, P.I.N. 981.)

 

Et qu'est-ce-que la loi de Dieu, sinon celle de son Église ? Une lettre de la Secrétairerie d'État à l'Archevêque de Sao Paulo, du 14.IV.1955, résume bien cette doctrine :

 

« Le devoir de rendre à Dieu le tribut d'hommages et de gratitude pour les bienfaits reçus, se rapporte non seulement aux individus, mais aussi aux familles, aux nations et  à l'État comme tel. L'Église, dans sa sagesse et sa maternelle sollicitude, a toujours incul­qué ce devoir. Les Quatre-Temps entre autres fins en sont, dans leur langage liturgique, une preuve éloquente. Une fois affaibli ou presque perdu dans la société moderne le sens de l'Église, et vu les conséquences de l'agnosticisme religieux des États, la nécessité s'impose de rebrousser chemin, de façon à ce que toutes les nations, fraternisant au pied de l'autel, réaffirment publiquement leur croyance en Dieu et élèvent la louange due au suprême souverain des peuples. »

 

Quel est donc le « suprême souverain des peuples », sinon Notre Seigneur Jésus-Christ ? Quelle est cette louange de l'autel, sinon le Saint Sacrifice de la Messe, acte religieux par excellence de l'Église catholique ?!

 

On est loin, on le voit, de la seule « liberté de l'Eglise » que se borne à revendiquer Vatican II, qui prend une partie de la doctrine pour abandonner l'autre à un silence scandaleux. L'Église de Vatican II affirmait bien sa volonté de ne revendiquer que la « liberté » et d'oublier le Droit public de l'Église et le règne social de Notre Seigneur Jésus-Christ, dans son message de clôture « aux gouvernants » (8.XII.1965) :

 

 

« Dans votre cité terrestre et temporelle, (le Christ) construit mystérieusement sa cité spirituelle et éternelle, son Église. Et que demande-t-elle de vous, cette Église, après deux mille ans bientôt de vicissitudes de toutes sortes: dans ses relations avec vous, les puissances de la terre ; que demande-t-elle de vous aujourd'hui ? Elle vous l'a dit dans un de ses textes majeurs de ce Concile : elle ne vous demande que la liberté. La liberté de croire et de prêcher sa foi, la liberté d'aimer son Dieu et de le servir, la liberté de vivre et de porter aux hommes son message de vie. » (1)

 

(1)Certes, même cette formulation extrême du libéralisme de Vatican II n'élimine pas, dans les textes, la doctrine des devoirs de l'Etat envers la religion :« Le pouvoir civil... doit donc certes, reconnaître et favoriser la vie religieuse des citoyens... N(D.H. 3). Mais le Concile laisse entendre que l'État satisfait à son devoir envers la religion quand il assure aux diverses communautés religieuses l'exercice de leurs religions multiples ! Où sont alors les droits de la seule vraie religion ? L'État va-t-il honorer Dieu et lui être agréable par plusieurs cultes disparates ?

(A suivre).