ITEM
42, Avenue de
Port. 06 80 71 71 01 ;
e-mail : abbe_aulagnier@hotmail.com.
Site : http://item.snoozland.com
Un regard sur le monde politique et religieux
Au 24 juin 2005
N°48
Le Testament
De la
« démocratie ».
Comme il vous en souvient, il me reste à
analyser la pensée du Pape Jean-Paul II sur la « démocratie », pensée
qu’il exprime dans son livre « testament spirituel et politique » :
« Mémoire et identité » en sa dernière partie.
C’est la cinquième partie du
livre. .
Elle est intitulée :
« La démocratie : possibilités et risques ».
Elle comprend quatre
chapitres, du chapitre 22 au chapitre 25.
En voici les titres
-Chapitre 22 : « La
démocratie contemporaine ».
-Chapitre 23 :
« Retour à l’Europe »
-Chapitre 24 : « La
mémoire maternelle de l’Eglise »
-Chapitre 25 : « La
dimension verticale de l’histoire de l’Europe ».
Ces titres ne sont pas sans
nous laisser, de prime abord, un peu perplexe…On
pourrait se demander, à part le premier chapitre qui parle directement de la
démocratie, en quoi les autres chapitres ont trait à ce problème. Du moins leur
titre ne le laisse pas très clairement comprendre. Et de fait, à première
lecture, cela ne saute pas aux yeux… Cependant, il y a dans ces quatre
chapitres une profonde unité de pensée ;
Essayons de le montrer.
Ces interlocuteurs, ses amis
polonais, lui posent la question :
«
Jean-Paul II rappelle
immédiatement la distinction classique des différents régimes politiques
possibles, en soi. « On connaît, dit-il, la distinction classique
entre les trois formes possibles de régime politique : la monarchie,
l’aristocratie et la démocratie » (p. 155)
Il rappelle également le
principe qui permet de faire cette distinction des gouvernements politiques. Cette distinction se
tire, dit-il, du côté du « sujet originaire du pouvoir ».
Il écrit : « Chacun de ces systèmes offre une réponse propre à la
question concernant le sujet originaire du pouvoir ». (p. 155)
C’est ainsi qu’avec
Avec l’aristocratie, le
pouvoir est en plusieurs, par plusieurs, selon les mérites ou autres.
Avec la démocratie, le
pouvoir est dans l’ensemble du peuple.
Il écrit : « Chacun des ces systèmes offre une réponse
propre à la question concernant le sujet originaire du pouvoir. Dans le système
monarchique, ce sujet est un individu, qu’il soit roi, empereur ou prince
souverain. Dans le système aristocratique le sujet est un groupe social, qui
exerce le pouvoir sur la base de titres particuliers, de mérite, par exemple,
la valeur dans les batailles, le lignage, la richesse. Dans le système
démocratique, par contre, la société entière est sujet du pouvoir, le peuple,
en grec « demos ». Il est évident qu’une gestion directe par tous
n’étant pas possible, la forme démocratique de gouvernement passe par l’action
des représentants du peuple, désignés par des élections libres » (p.
155-156).
Ce critère du « sujet originaire du pouvoir », tel
qu’utilisé par Jean-Paul II pour distinguer les
régimes politiques entre eux est un peu équivoque, même très équivoque.
Il faut préciser.
Pour saint Thomas, l’élément
nombre, per unum, per plures, per multos,
est seulement le moyen de la distinction formelle des gouvernements et de leur
classification. Il ne dit rien de plus, ni quant à
l’origine du pouvoir ni quant à la
substance du pouvoir. C’est ce que l’expression de Jean-Paul II, « le
sujet originaire du pouvoir », pourrait laisser entendre. Ce principe est juste si on ne voit en ce critère qu’une simple désignation possible de celui
qui exercera le pouvoir. Car, en un autre sens très exact, tout pouvoir vient
de Dieu. Il vient d’en haut : « Omnis potestas a Deo ». Le
peuple n’est donc pas, in se, « le
sujet originaire du pourvoir ». Le sujet originaire du pouvoir, en soi,
est Dieu. Je pense que le pape utilise
une expression dangereuse…
Il ne faut jamais oublier ce
que Léon XIII enseignait dans « Diuturnum ». Il disait : «Beaucoup de
nos contemporains, marchant sur les traces de ceux qui, au siècle dernier,
s’attribuèrent le nom de philosophes, disent que tout pouvoir vient du peuple,
de sorte que ceux qui l’exercent dans l’Etat ne l’exercent pas comme leur
appartenant mais comme le tenant du peuple par délégation et sous cette réserve
qu’il peut leur être retiré par la volonté de ce même peuple qui le leur a
délégué. Les catholiques ont une doctrine différente, et ils font descendre de
Dieu le droit de commander, comme de sa source naturelle et nécessaire.
Il importe de remarquer
ici que ceux qui doivent être placés à la tête des affaires peuvent, en
certains cas, être choisis par la volonté de la multitude, sans que la doctrine
catholique y contredise ou y répugne. Alors ce choix désigne le prince. Mais il
ne lui confère pas les droits du
principat. L’autorité n’est pas
donnée, mais est déterminé seulement celui (ou ceux) par qui elle devra être exercée ».
Cette précision de Léon XIII est, il est
vrai, de la plus haute importance. Certes Jean-Paul II ne rappelle pas ce
principe capital dans la vie politique des cités. Mais les réflexions qui vont suivre sur la
démocratie moderne et « ses risques » permettent de dire qu’il est toutefois au cœur de ses
réflexions.
Poursuivons !
Jean-Paul II reconnaît
ensuite que ces trois formes de régimes politiques ont existé dans le temps et
dans l’histoire si variée des peuples : « Ces trois formes d’exercice du pouvoir se sont réalisées dans
l’histoire des diverses sociétés et continuent à l’être aujourd’hui encore ».
(p. 156)
Toutefois, il reconnaît que
le régime démocratique est aujourd’hui la forme la plus répandue « La tendance contemporaine s’orient nettement
vers le système démocratique ».
Il en donne la
raison : cette forme répondrait « mieux à la nature rationnelle
et sociale de l’homme, et, en définitive, aux exigences de la justice sociale.
En effet, il est difficile de ne pas reconnaître que, si la société est
composée d’hommes, et que chaque homme est un être social, on doit attribuer à
chacun une participation au pouvoir, même s’elle est indirecte. » (p. 156)
Il insiste sur ce point à
deux reprises
C’est à la page 158 du
livre : « Ce regard rétrospectif
sur l’histoire des diverses formes de gouvernement nous permet de mieux
comprendre aussi la valeur éthique et sociale des présupposés démocratique du
système. Alors que dans les systèmes monarchiques et oligarchiques …une partie
de la société (souvent la très grande majorité) est condamnée à un rôle passif
ou subordonné, parce que le pouvoir est entre les mains d’une minorité, cela ne
devrait pas arriver dans les régimes démocratiques… En tout cas, l’éthique
sociale catholique appuie, en règle générale, la voie démocratique, parce
que, comme je l’ai déjà noté, elle répond davantage à la nature rationnelle et
sociale de l’homme ». (p. 158)
Ces affirmations, toutes à la louange de la
démocratie, ne vont pas jusqu’à exclure de la pensée du pape, les autres régimes ni même à
« canoniser » ce régime démocratique le faisant supérieur aux deux
autres. Il le dit expressément. « Toutefois
on est loin - il est bon de le préciser
– de « canoniser » ce système. En effet, il reste vrai que chacune
des solutions envisageables – la monarchie, l’aristocratie et la démocratie –
peut, à des conditions déterminées contribuer à la réalisation de ce qui est le
but essentiel du pouvoir à savoir le bien commun » (p. 158)
Pour le pape, ce qui fait, en tout état de cause, la beauté
du pouvoir politique, c’est sa finalité : la réalisation du Bien Commun, raison du pouvoir. Or cela,
laisse entendre le pape, peut très bien
se réaliser dans un régime qui ne soit pas démocratique.
C’est étonnamment nouveau de
lire cela sous la plume du pape. Car depuis le Concile Vatican II, l’opinion commune
dans l’Eglise était que la participation de tous les individus au gouvernement
de la communauté politique était affaire de justice naturelle et que donc la
monarchie, exercice par un seul du pouvoir de gouverner la société selon la
justice, cessait d’être une forme légitime de gouvernement et se rangeait parmi les formes illégitimes du seul fait de
s’opposer au régime populaire, seul légitime. La démocratie, dans l’Eglise et
dans le monde politique était devenue,
depuis le Concile Vatican II, la seule
forme légitime de société civile.
On voit combien la remarque
de Jean-Paul II est nouvelle et courageuse.
Ainsi pour le pape Jean-Paul
ce n’est pas tellement la forme du régime politique qui importe… C’est bien plutôt et surtout « le respect »,
par le gouvernement quel qu’il soit, « des
normes éthiques fondamentales ». Elles doivent être au cœur du pouvoir,
quel qu’en soit sa forme.
Au-delà de la forme du
régime, deux choses sont, dans la pensée du pape, fondamentales, en matière
politique : d’une part la « recherche du Bien Commun » par
le pouvoir politique et d’autre part le « respect de la loi naturelle ».
« Le respect des normes éthiques fondamentales,
écrit-il, est en tout cas le présupposé
indispensable à chacune des solutions ». (p. 158)
C’est cette grande
préoccupation: - le respect de la loi
naturelle par le pouvoir politique -
qui fait la grande unité de la
pensée du pape sur la politique et sur
la démocratie et qui explique la suite de l’exposé du pape, même si on ne voit
pas immédiatement le lien.
En effet après avoir rappelé
ce principe fondamental d’éthique politique, le Pape se lance dans l’histoire
du peuple hébreu. « Cela dit, il
peut cependant être utile de nous reporter encore une fois à l’histoire
d’Israël ». (p. 159) Il nous
rappelle l’histoire d’Abraham…Mais il en vient très vite à Moïse, le grand
« législateur » du peuple juif. Ce qui peut paraître une digression est,
au contraire, parfaitement dans le
sujet. « Il convient de préciser
immédiatement , écrit-il, qu’à la base de l’Etat d’Israël, comme société
organisée, il n’y a pas Abraham mais Moïse » (p. 159)
Moïse est pour le peuple
juif, un vrai « chef », mais aussi un « prophète ». Sa
mission fut d’établir, au nom de Dieu, les
bases non seulement religieuses mais
surtout juridiques de l’existence du peuple.
Alors le pape nous rappelle l’événement du mont
Sinaï : « L’événement essentiel qui eut lieu au pied du mont Sinaï fut un point
clé dans l’œuvre de Moïse. C’est là que fut scellé le pacte d’alliance entre
Dieu et le peuple d’Israël sur la base de la loi donnée par Dieu à Moïse sur
Et quelle est cette
loi ? Essentiellement le Décalogue. « La loi était essentiellement constituée par le Décalogue : les dix
paroles, les dix principes de conduite, sans lesquels aucune communauté
humaine, aucune nation ni même la société internationale ne peut se
réaliser » (p. 160)
Et ce Décalogue, rappelle le
pape, n’est rien d’autre que la loi naturelle inscrite au cœur de tout homme. « Les commandements… sont en effet
imprimés dans le cœur de l’homme » (p. 160) Saint Paul l’enseigne en
effet, lui aussi dans son Epître aux Romains (Rm 2 15). Elle est donc
absolument obligatoire pour tous. Elle
s’impose à tous. Elle est au cœur de la vie de tous et de toute façon au cœur
du « vivre ensemble », au cœur de la vie politique.
« La loi divine du Décalogue a aussi une valeur
obligatoire comme loi naturelle pour ceux qui n’acceptent pas
Et ce Décalogue a été
confirmé aussi par le Christ. « Le Christ a confirmé les commandements du
Décalogue comme fondement de la morale chrétienne, en en présentant la synthèse
dans les préceptes de l’amour de Dieu te du prochain ». (p. 161)
A ce niveau de son argumentation,
on en comprend pourquoi cette digression. Il va en faire l’application aux
différents régimes politiques. Tous sont tenus de le respecter dans leur
législation que cela soit en monarchie, en aristocratie, en démocratie. . Ce
code moral provenant de Dieu, ce code codifié dans l’Ancien et le Nouveau
Testament, ce code inscrit au coeur de tout homme est une loi universelle. Elle
est ainsi « la base intangible de
toute législation humaine dans n’importe quel système, en particulier dans le
système démocratique » (p. 161)
Voilà l’important. La forme
du gouvernement, dans la pensée du pape est
plutôt secondaire. Ce qui est premier c’est le « respect
des normes éthiques fondamentales », c’est le respect de la loi
naturelle. Les parlements, les princes, les rois doivent nécessairement s’en
inspirer. « La loi établie par l’homme, par les parlements et par toute autre
instance législative humaine, ne peut être en contradiction avec la loi
naturelle, c’est-à-dire, en définitive, avec la loi éternelle de Dieu ».
(p. 161)
Il ne faudrait pas croire,
dit le pape, que la loi soit le simple fait d’une majorité, le fait du seul
nombre, n’ayant aucune relation avec l’être, la réalité. Du reste Moïse, - il
est ici pris en exemple, - lui non plus,
ne fut pas l’auteur de la loi. « Moïse qui descend de
Il en doit être ainsi de tous
les pouvoirs, quelle qu’en doit la forme. On comprend ici pourquoi le pape fait
allusion à Moïse. Ce qu’il fit, à savoir transmettre les Commandements de Dieu
aux hommes, doit être fait, devrait être fait par tous les organismes d’Etat,
que l’on soit en monarchie ou démocratie. Tous, comme Moïse doivent être, en
matière législative, « les serviteurs et le porte parole de
Le pape est particulièrement
insistant sur ce sujet : « La
loi établie par l’homme, par les parlements et par toute autre instance
législative humaine, ne peut être en contradiction avec la loi naturelle,
c’est-à-dire, en définitive, avec la loi éternelle de Dieu » (p. 161).
Et de citer saint Thomas et sa célèbre définition de la loi qui est une
ordonnance de la raison. « La loi est une ordonnance de la raison en vue
du bien commun promulgué par ce lui qui a la charge de la communauté ».
« En tant qu’ordonnance de la
raison, la loi s’appuie sur la vérité de l’être ; la vérité de Dieu,
Quel est alors le rôle du législateur indépendamment du mode
de gouvernement ? Retenez bien. C’est un
passage capital. « Cette
vérité est la base de la loi naturelle. Le
Législateur lui ajoute l’acte de promulgation ». Je serais tenté de dire : « c’est
tout ». C’est ce qui a eu lieu sur
le SinaÏ. Moïse ne fut pas l’auteur de
Et c’est alors, sur une telle
argumentation, évidente, que le pape lance la plus grande mise en garde
contemporaine contre les régimes
démocratiques. On retrouve la pensée d’un Soljenitsyne.
Certes la démocratie, en soi,
est un mode de gouvernement qui réalise
le véritable « Etat de droit ».
« Dans ce système, dit le pape, la
vie sociale est en effet réglée par la loi établie par les parlements qui
exercent le pouvoir législatif. Dans ces assemblés s’élaborent les règles qui
définissent le comportement des citoyens dans les divers domaines du vivre
ensemble. Chaque secteur de la vie, c’est évident, aspire à une législation
appropriée, qui en assure le développement ordonné. Un Etat de droit réalise de
cette façon le postulat de toute démocratie : former une société e citoyens
libres qui poursuivent ensemble le bien commun ». (p. 159) ; Mais
faut-il encore que la loi ainsi voté par les parlements respecte la loi
naturelle, l’être, « la vérité du réel ».
Arrivé à ce point, nous
pourrons plus facilement comprendre la mise en garde du pape.
La démocratie est bien en soi
un « Etat de droit », peut bien,
en soi, engendrer un « Etat de droit ». Mais faut-il encore que les pouvoirs
qui l’animent respectent la loi naturelle. Se détourner de la loi naturelle, ne
plus la promulguer comme telle, faire fi de la réalité créée par Dieu, c’est risquer le plus grand des malheurs. Il
ne faut pas oublier, dit le pape, que le nazisme, cette « idolâtries du
mal », fut, avec le communisme, le
pire des totalitarismes. Or le nazisme fut
engendré par un régime démocratique.
« C’est un parlement
régulièrement élu qui accepta d’appeler Hitler au pouvoir dans l’Allemagne des années 1930 ; ensuite c’est le
Reichstag lui-même qui, en déléguant les pleins pouvoirs à Hitler, lui ouvrit
la route pour sa politique d’invasion de l’Europe, pour l’organisation des
camps de concentration et pour la mise en œuvre de ce qu’on appelle la
« solution finale » de la question juive, c’est-à-dire l’élimination
de millions de fils et de filles d’Israël ».(p. 162).
Ces régimes totalitaires avaient l’un
et l’autre oublier cette vérité première : la loi naturelle. C’est
là le drame qui a assombri notre XXe siècle.
C’est une « question d’importance essentielle, nous dit le
pape,
pour l’histoire de l’Europe au XXe siècle ». (p. 162)
Il ne suffit donc pas que la
loi soit promulguée par les instances compétentes. Faut-il encore qu’elle respecte la vérité, la réalité voulue par Dieu. Le pape écrit
alors ce jugement capital : « Il
suffit de se rappeler ces quelques événements, qui nous sont proche dans le
temps, pour voir clairement que la loi établie par l’homme a des limites fixées
par la loi naturelle, par laquelle c’est Dieu lui-même qui protège les biens
fondamentaux de l’homme » (p. 162)
Alors que sera notre siècle,
que va engendrer nos démocraties, quel totalitarisme nouveau nous menace
aujourd’hui, comme hier le nazisme, le
communisme ? … Voilà les justes interrogations qu’il faut se poser au début
de ce nouveau millénaire…quand on voit aujourd’hui régner, s’étendre même, l’irrespect des Commandements de Dieu. C’est
la pensée du pape. Il écrit : « C’est
bien dans cette perspective que l’on doit s’interroger, au début du nouveau
siècle et d’un nouveau millénaire, à propos de certains choix législatifs
effectués dans les parlements des régimes démocratiques actuels. On peut se
référer plus immédiatement aux lois de l’avortement. Quand un parlement
autorise l’interruption de grossesse, admettant la suppression de l’enfant à
naître, il commet une grave violence à l’égard d’un être humain innocent et
privé surtout de toute capacité d’autodéfense. Les parlements qui approuvent et
promulguent de telles lois doivent être conscients qu’ils outrepassent leurs
compétences et qu’ils se mettent en conflit manifeste avec la loi de Dieu et
avec la loi naturelle » (p. 163) C’est un appel solennel. Il me fait
penser à Pie XI rappelant le devoir des prêtres dans la morale conjugale..
Terrible réalité
Ce fut la grande
préoccupation du pontife durant les dernières années de son pontificat. Il
exposait déjà cela tout au début de son livre. Il ne faut passer sur ces
affirmations comme si elles n’avaient jamais été écrites. Non. Elles furent écrites. Elles sont comme un appel pathétique de Jean-Paul II à la sagesse
des pouvoirs politiques.
Voyez.
« Parvenus à ce point, on ne peut p omettre
d’aborder une question plus que jamais actuelle et douloureuse. Après la chute
des régimes édifiés sur les « idéologies du mal », dans les pays
concernés, les formes d’extermination
évoquées ci-dessus ont en fait cessé. Demeure toutefois l’extermination légale
des êtres humains conçus et non encore nés. Il s’agit encore une fois d’une
extermination décidée par des parlements élus démocratiquement, dans lesquels on en appelle au progrès civil des sociétés
et de l’humanité entière. D’autres formes de violation de la loi de Dieu ne
manquent pas non plus. Je pense par exemple aux fortes pressions du Parlement
européen pour que soient reconnues les unions homosexuelles comme une forme
alternative de famille, à laquelle reviendrait aussi le droit d’adopter. On
peut et même on doit se poser la question de savoir s’il ne s’agit pas , ici
encore, d’une « nouvelle idéologie du mal », peut-être plus
insidieuse et plus occulte, qui tente d’exploiter, contre l’homme et contre la
famille même, les droits de l’homme ». (p. 24-25)
Et le pape cherche la raison
de cette situation. « Pourquoi tout cela arrive-t-il ? Quelle
est la racine de ces idéologies de l’après-Lumières ? »
Le pape nous donne la
réponse : « La réponse est
simple : cela arrive parce que Dieu en tant que Créateur a été rejeté, et
du même coup la source de la détermination de ce qui est bien et de ce qui est
mal. On a aussi rejeté la notion de ce qui, de manière plus profonde, nous constitue
comme êtres humains, à savoir la notion de « nature humaine », comme
« donné réel » et à sa place, on a mis un « produit de la
pensée » librement formée et librement modifiable en fonction des
circonstances » (p. 25)
Alors on comprend qu’au-delà
des régimes démocratiques à promouvoir, c’est surtout un retour à la pensée thomiste, à la philosophie
de l’être qu’il faut revenir. Si l’on ne part pas d’un présupposé
« réaliste », on finit, dit le pape par « se mouvoir dans le vide ».
Voilà, une belle dissertation
sur la « Démocratie ».