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 Un regard sur l’actualité politique et religieuse

 Au 26 novembre  2005

 

N°67

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

 

 

 

La Messe de toujours

Textes de Mgr Lefebvre

 

 

Monsieur l’abbé Traodec, supérieur du séminaire de Flavigny, en France, de la FSSPX, vient de publier aux éditions Clovis une livre intitulé : « La Messe de toujours ».

 

C’est un recueil ordonné, bien ordonné, de textes de Monseigneur Lefebvre sur la messe.

 

C’est même deux livres en un seul tome.

 

Le premier livre concerne la messe de toujours, comme l’aimait à l’appeler  Mgr Lefebvre.  C’est un   commentaire.

C’est même un beau commentaire théologique, spirituel et  liturgique sur la messe, sur notre belle messe traditionnelle, dans le rite de saint Pie V. En trois longs chapitres, en 245 pages, il parcourt la messe et ses parties et les commentent en utilisant exclusivement les textes de Mgr Lefebvre. C’est vraiment un livre de Mgr Lefebvre. Un livre posthume sur le sujet que Mgr Lefebvre aimait par-dessus tout: la messe et qu’il nous laissa comme son héritage.

 

Le deuxième, c’est un commentaire critique de la réforme liturgique. J’y reviendrai.

 

On est heureux de retrouver la pensée de Mgr Lefebvre. On en apprécie la qualité, la simplicité, l’ordre.

 

Monsieur l’abbé Troadec, ici,  a accompli un vrai travail de « bénédictin ». Quatre à cinq ans de labeur. Il a fallu qu’il fouille dans l’immense œuvre que nous a laissée Mgr Lefebvre, ses homélies, ses conférences, ses propres livres…Il a fallu qu’il ordonne tout cela à son sujet : la messe.

 

Dans le premier livre, il suit l’ordonnance de la messe de l’ « Intoibo ad altare Dei »  à l’ « Ite Missa est » et sur chacune des prières des trois parties de la messe,  il  donne les explications appropriées de Mgr Lefebvre. Oui ! Quel travail ! Je l’en félicite.

 

Quel travail ! Quel travail utile.

J’encourage tous et chacun à lire cet ouvrage. Il comprendra bien la beauté de la messe traditionnelle.

 

Mon attention fut rapidement attirée par le commentaire sur le « Canon » de la messe, la partie essentielle du sacrifice.

 

Je voudrais en extraire pour vous quelques belles pages pour vous donner le goût de le lire.

 

« Le Canon récité en silence ».

 

« Il y a un motif profond attaché à l’ordre de dire les prières du Canon à voix basse. C’est en raison de la grandeur du mystère qui va s’accomplir. Ce n’est pas par une manifestation extérieure mais bien par l’action du Saint Esprit que va être transformé ce pain dans le Corps, le Sang, l’Ame et la Divinité de Notre Seigneur. Tout cela doit donc nous attacher beaucoup à ces prières du Canon et en faire vraiment le centre, le cœur de notre vie spirituelle. Aussi, approchons-nous avec beaucoup de respect de ce moment si important dans nos journées. Imaginons que la sainte Eglise nous ait permis de dire une seule messe pendant notre vie sacerdotale ; avec quel soin nous préparerions ce moment, avec quelle humilité nous prononcerions  les paroles de la consécration ! Quelle n’est pas la grandeur de cet acte, qu’il soit  fait une fois ou qu’il soit fait mille fois ! Que le Bon Dieu nous accorde cette grâce insigne de le faire souvent, tous les jours, ne doit pas diminuer notre ferveur, notre adoration, car son importance est toujours le même. Demandons à la très Sainte Vierge Marie de nous aider à mieux comprendre cette grande action qui se produit par notre ministère sacerdotal !

Le sacrifice de la messe est vraiment le sacrifice  de la Croix. Or la sainte Vierge a assisté au sacrifice de la Croix. Et comment y a-t-elle assisté ? Elle y a assisté en silence ; et n’est-ce pas pour cela en effet que, lorsque  le prêtre a récité les belles préfaces, préfaces qui introduisent au cœur du sacrifice de la messe, et qui l’entraînent en quelque sorte sur le Sinaï comme Moïse, alors qu’il se trouve dans la nuée où est la présence divine, le peuple observe le silence ? Tandis que le prêtre offre le sacrifice et prononce les paroles sublimes  du Canon de la messe, ce saint Canon qui remonte en grande partie aux origines mêmes de la chrétienté, et pour l’essentiel à Notre Seigneur lui-même dans les paroles de la consécration, à ce moment-là le peuple reste en silence. Marie demeura en silence. Et que signifie ce silence ? Est-ce un silence d’indifférence ? Oh ! Certes non. Pas pour la Vierge Marie en tout cas. Il est bien dit de la Vierge Marie qu’elle gardait dans son cœur toutes les paroles qui étaient prononcées par Notre Seigneur : « Elle gardait toutes ces paroles dans son cœur » (Lc 2 19 et 51) Et alors, en entendant les paroles de Notre Seigneur sur la Croix, elle adorait en silence le grand dessein de la rédemption. Elle adorait en silence le dessein qui se réalisait devant ses yeux, et elle partageait certainement les sentiments de son divin Fils.
Je pense que c’est là une leçon pour nous, pour vous, bien chers fidèles, qui assistez au saint sacrifice de la messe : partagez les sentiments qui sont exprimés dans le Canon de la messe et qui nous élèvent dans le Ciel, qui rattachent véritablement la terre au Ciel et le Ciel à la terre.

 

Vous pouvez remarquer que, dans le Canon, la partie qui précède la consécration et la partie qui la suit ont une structure ascendante et descendante, dans le sens où l’on part du particulier pour aller au général et revenir au particulier : vous avez l’oblation particulière, le Memento des vivants, puis le Communicantes où l’on s’unit à l’Eglise triomphante. Vient ensuite l’oblation : le texte est si beau que j’ai cru bon de le choisir pour acte d’oblation dans la Fraternité parce qu’il m’a semblé que c’était vraiment le sommet de la liturgie de la messe que cet Hanc igitur.

Suivent alors les paroles de la consécration, puis l’oblation de Notre Seigneur présent, oblation figurée par le sacrifice d’Abel, le sacrifice de Melchisédech, puis vient le rappel des morts correspondant à celui de vivants, puis l’union à tous ceux qui sont dans le Ciel, en demandant dans une prière plus personnelle, que malgré nos péchés et non  à cause de nos mérites, nous obtenions le pardon de nos fautes et nous les rejoignons un jour. « Ne considérez pas nos mérites, mais le pardon que vous nous réservez ».

 

Partem aliquam : c’est très beau. Le petit mot aliquam a quelque chose des savoureux. Le prêtre ne demande pas grand-chose, une petite partie seulement, une toute petite place avec les martyrs qui sont au Ciel, avec tous ceux qui sont au Ciel. Da nobis aliquem partem : donnez nous une  petite place, une toute petite place. Le prêtre ne demande pas davantage : qu’une toute petite place lui soit faite avec les martyrs qui sont énumérés…

 

La prière à Dieu le Père : le Te Igitur.

 

La messe est essentiellement une messe hiérarchique, et c’est pourquoi le prêtre est tourné vers Dieu, vers le crucifix, et non vers l’assemblée. Se tourner vers l’assemblée donnerait l’impression que c’est elle qui est essentielle dans le sacrifice de la messe ou dans la communion. Mais c’est une erreur, car ce n’est pas l’assemblée qui compte, mais Dieu à qui nous offrons le sacrifice. Ce qui compte, c’est le sacrifice de la Croix, c’est Notre Seigneur Jésus-Christ, c’est pourquoi le prêtre se tourne vers la Croix et vers Dieu : il offre le sacrifice à Dieu, suivi des fidèles, car le pasteur marche devant son troupeau pour l’amener vers Notre Seigneur Jésus-Christ, vers Dieu et vers le Ciel. Il y a donc une hiérarchie dans le sacrifice de la messe. Ce n’est pas une messe collégiale, il n’y a pas de collégialité dans l’Eglise. Dans la messe, on ne dit pas qu’on offre le sacrifice avec la collégialité des évêques. Au début du canon, le prêtre dit qu’il offre le sacrifice de la messe avec celui qui remplit la fonction de pape et celui qui remplit la fonction d’évêque. Qu’il le fasse bien ou mal, c’est autre chose, et c’est le Bon Dieu qui le jugera. Mais c’est un fait, on a d’abord la hiérarchie, puis le prêtre, puis les fidèles, et pas  seulement quelques-uns ou quelques familles, mais toute la société des fidèles. Car toute la société doit être représentée auprès du sacrifice de la Croix : les rois, les princes, les magistrats, les militaires, toutes les fonctions et professions, tous doivent s’unir auprès de Notre Seigneur Jésus-Christ puisqu’il est l’unique chemin pour aller au Ciel.

C’est ce qui sanctifiait la société, et c’est pourquoi l’église se trouve au cœur du village, au cœur de nos cités, représentant la maison de Dieu vers laquelle toute la population chrétienne se rassemble pour monter au Ciel. Tout cela a une signification merveilleuse, et c’est la signification du vrai sacrifice d la messe.

 

Memento des vivants.

 

1.La messe application des mérites de la Croix.

 

Le renouvellement du sacrifice du Calvaire permet d’appliquer aux fidèles présents les mérites de la Croix, de perpétuer cette source de grâces dans le temps et dans l’espace. L’Evangile de saint Matthieu se termine par ces mots : « Et maintenant, moi, je serai avec vous  toujours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28 20)

Nous ne devons pas oublier que si la présence de Notre Seigneur parmi nous est la source de notre sanctification, elle l’est aussi pour toute la société. Cela a également une très grande importance : nous ne devons pas limiter l’influence de la messe et de la consécration à notre sanctification, mais l’étendre à la sanctification non seulement de l’assemblée qui est présente, mais aussi de toute la société, car c’est de  l’Eucharistie que rayonnent toutes les grâces, les grâces des sacrements.

 

2. La messe, source de grâces pour les époux chrétiens.

 

On oublie trop que le sacrement de mariage a sa signification et son symbole dans le sacrement de la Croix. Dieu a voulu créer la femme dans le sommeil d’Adam en tirant de son côté ce qui était nécessaire pour la création de la femme. (….) Lorsque Notre Seigneur a incliné la tête et qu’il a expiré, son cœur a été transpercé et c’est de son cœur qu’est née son Epouse mystique, l’Eglise. Quelle belle comparaison ! La naissance de la femme est le symbole de la naissance de l’Eglise du côté de Notre Seigneur transpercé par la lance. Et c’est cela la signification du mariage. La grâce du mariage est une grâce qui sort du cœur de Notre Seigneur Jésus-Christ et qui est symbolisée par son sacrifice. Aussi, le mariage est associé d’une façon toute particulière au sacrifice du Calvaire. C’est pourquoi l’Eglise a toujours voulu que le sacrement de mariage soit donné à l’occasion du sacrifice de la messe. Tout cela a une signification remarquable, extraordinaire, et doit encourager ceux qui sont dans les liens du mariage, dans leurs difficultés, dans leurs épreuves.
La fécondité du mariage entre Notre Seigneur et son Eglise est signifiée par sa Passion, par son Sang qui a coulé pour faire naître toute la famille chrétienne. Or, c’est bien cette signification-là qui est appliquée au sacrement de mariage.

Par conséquent, on peut dire en toute vérité que les époux qui assistent fréquemment au renouvellement du sacrifice de la Croix, donc au renouvellement des noces de Notre Seigneur avec son Eglise, ressuscitent la grâce de leur mariage et augmentent cette grâce particulière dont ils ont besoin pour accomplir dignement, en vrais chrétiens, ce qui leur est demandé dans le mariage. Ils doivent assister à la sainte messe. La sainte messe est vraiment la prière fondamentale de la famille chrétienne. L’Eglise l’a voulu ainsi.

De même que cette union entre Notre Seigneur Jésus Christ et son Epouse mystique a produit d’innombrables enfants et a été d’une fécondité extraordinaire, de même les époux doivent s’aimer, donner leur vie s’il le faut l’un pour l’autre pour répandre aussi la vie naturelle et la vie surnaturelle…C’est le signe de la grâce du mariage. Par conséquent, lorsque les époux assistent à la messe, leur grâce sacramentelle du mariage est renouvelée, est revivifiée par l’exemple du Calvaire, par l’Eucharistie qu’ils reçoivent, par cette Victime qui est en eux. Ils  doivent s’aimer et se donner l’un à l’autre jusqu’au sang s’il le faut afin de peupler le Ciel d’élus. Voilà ce qu’est le mariage. Nous ne devons pas l’oublier. Ainsi tout se retrouve dans la sainte Eucharistie, tout se retrouve dans le sang de Notre Seigneur Jésus-Christ.

Le mariage est à la naissance de la famille chrétienne et à la naissance des vocations qui viendront dans le futur, des enfants qui se consacreront à Dieu. C’est vraiment la naissance de l’Eglise. La sanctification de la famille par la Croix, par le saint sacrifice de la messe est très importante. De là naissent les vertus familiales. La société n’étant pas autre chose que la réunion des familles, si les familles se sanctifient, la société est sainte. D’où la source de la civilisation chrétienne qu’est le saint sacrifice de la messe. Les sociétés catholiques qui ont vécu autrefois étaient bâties autour de l’autel.

 

Unis à l’Eglise triomphante : Communicantes.

 

Le Canon n’est pas  un simple récit, c’est une action. Regardez sur les vieux missels, au-dessus du Communicantes, vous verrez Infra actionem. Regardez par curiosité : Infra actionem, « durant l’action ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Mais c’est que le prêtre fait une action sacrificielle.

 

Le prêtre fait le récit de la passion, mais un récit qui est efficient. Ce n’est pas seulement une narration, mais une action qui produit ce que Notre Seigneur a demandé aux Apôtres, quand il leur a dit : « Faites ceci en mémoire de moi » (Lc 22 19). La « mémoire » : c’est le récit ; « faites » : c’est l’action. En faisant à nouveau ce récit, le prêtre refait l’action du sacrifice de Notre Seigneur Jésus-Christ. Se produit alors la transsubstantiation, par la consécration du pain et du vin : voilà ce qu’est la réalité de notre foi.

 

1. Unis aux saints du Ciel.

 

Le saint sacrifice de la messe nous met en présence de Dieu, en présence du Ciel, nous fait communier avec le Ciel et avec tous les élus qui y sont déjà et que l’on nomme au cours de la sainte messe : la Vierge Marie, les martyrs, les saints anges. Nous devons suivre le chemin qu’ils ont suivi pour y arriver à notre tour.

 

2 La sainte Vierge unie à son Fils au pied de la Croix.

 

La très sainte Vierge Marie est d’abord et avant tout la mère du Prêtre éternel. NSJC a été essentiellement Prêtre pour l’éternité, Prêtres selon l’Ordre de Melchisédech. Toute la vie de Notre Seigneur Jésus Christ, toute sa raison d’être a été d’offrir le sacrifice de la Croix, de s’offrir sur la Croix. Voilà quel a été le but de la vie de NSJC. Toute sa vie, NSJC a été hanté par le désir de monter sur la Croix. Voilà pourquoi NSJC est venu, et  ce que nous enseigne la très Sainte Vierge Marie. Car la Vierge Marie n’est que le miroir de Notre Seigneur. Dans son cœur il n’y a pas d’autre nom inscrit que le nom de Jésus et Jésus crucifié. La Très sainte Vierge l’a accompagné partout jusqu’au sacrifice de la Croix. Elle était là présente, comme pour nous enseigner que ce qu’elle avait de plus cher, c’était d’accompagner Notre Seigneur sur le calvaire, au sacrifice de la Croix. .

Comment Dieu, Dieu créateur de toutes choses, Dieu l’immuable, Dieu l’Infini ? Dieu le Parfait, Dieu le Saint, Dieu l’Eternel a-t-il pris un corps semblable au nôtre et a-t-il été attaché à la Croix ? A qui demander la solution, à qui demander ce qui se passait dans le cœur de Notre Seigneur, dans son esprit, dans son âme, tout au cours de sa Passion, depuis le Jardin des Oliviers, à travers toutes ses souffrances, à travers le chemin qui le menait au Calvaire et sur la Croix, sinon à la très sainte Vierge Marie ?

S’il est vrai  que, même dans la nature, c’est la mère qui scrute le cœur de son fils et qui devine, sans même qu’il ait besoin de parler, les pensées de son fils, à plus forte raison la très sainte Vierge Marie, elle qui était près de la Croix  avec son divin Fils Notre Seigneur, essayait de scruter, elle aussi, les pensées de Jésus, les désirs de Jésus, les joies de Jésus, les souffrances de Jésus. C’est un grand mystère, le mystère de Dieu lui-même ! Jésus est Dieu. Alors comment la Très sainte Vierge Marie qui n’est qu’une créature, même si elle est remplie du Saint Esprit, pouvait-elle mesurer les sentiments de Dieu, les pensées de Dieu ? Comme le dit l’Ecriture : « L’Esprit Saint scrute les profondeurs de Dieu ». Puisque la très sainte Vierge était remplie du Saint Esprit, le Bon Dieu lui donnait certainement des grâces toutes particulières pour comprendre pourquoi ce Dieu était ainsi accroché à la Croix. Elle qui l’a suivi pendant trente trois années, qui lui a donné le jour, elle était la plus à même de comprendre tout ce qui se passait dans l’Ame de Jésus.

 

3. «  Unis à la Sainte Vierge au saint autel.

 

La sainte Vierge qui a participé le plus parfaitement, le plus profondément au sacrifice de la Croix et donc au saint Sacrifice de la messe,  est la personne qui a vraiment le mieux compris le saint Sacrifice de la messe  après Notre Seigneur lui-même. Elle peut vous donner  l’explication du mystère du saint Sacrifice de la messe. C’est lorsqu’elle était au Calvaire, à côté de la Croix, qu’elle a participé le plus  à ce grand mystère du sacrifice de la Croix. « La mère de Jésus se tenait debout près de la Croix » : c’est l’Evangile qui le dit. Elle a eu le cœur transpercé par le glaive à ce moment-là, en voyant les douleurs de son Fils. Elle a donc compati, elle a partagé la Passion de son Notre Seigneur, le sacrifice de la Croix.

Alors, pour participer le mieux au saint sacrifice de la messe, pour être vraiment uni pendant  toute sa vie au sacrifice de la Croix, il est bon de se mettre sous la protection de Notre Dame de Compassion, de Notre Dame des Douleurs

Souvenez-vous que la très sainte Vierge, qui a été présente auprès de Notre Seigneur Jésus-Christ au Calvaire, sera toujours aussi présente à côté de vous au saint autel, car la très sainte Vierge Marie ne quitte jamais son Fils. .

Quand nous sommes devant l’autel, pendant le sacrifice de la messe, nos pouvons nous dire réellement présents comme si nous étions auprès de la Sainte Vierge, saint Jean et sainte Marie-Madeleine au pied de la Croix. C’est absolument la même chose. Le Sang de Notre Seigneur vivifie nos âmes. Dans les miracles eucharistiques, le sang coule de l’hostie ; le sang est vraiment présent dans l’hostie.

Lorsque vous assistez au saint sacrifice de la messe, vous pouvez vous dire : « Je suis avec la Vierge Marie, je suis avec saint Jean, je suis avec Marie-Madeleine auprès de la Croix de NSJC » et vous pouvez demander que le Sang de Jésus se répande sur votre âme afin d’être sauvés.

Il me semble que la Vierge Marie qui se trouve près de la Croix, Notre Dame de Compassion, Notre Dame corédemptrice, invite chacun d’entre nous, chacune, chacune des créatures humaines qui naîtra en ce monde. Elle nous prend par la main en quelque sorte, pour nous conduire au Calvaire, pour nous faire participer aux mérites de NSJC.

 

La prière d’offrande : Hanc igitur.

 

1.Notre Seigneur unit son Corps Mystique à l’oblation de la Victime.

 

On ne peut pas imaginer d’union plus grande entre les membres et la tête du Corps Mystique, entre les fidèles et Notre Seigneur, puisque c’est par une participation de la grâce de notre Seigneur, c’est par une participation de sa nature que les membres du Corps Mystique sont unis à lui.

C’est donc Jésus qui en quelque sorte est étendu dans les membres de son Corps Mystique. A la messe, c’est Notre Seigneur qui offre la Victime et c’est lui qui est offert. Nous sommes donc pris dans  cette unité de NSJC, et donc nous sommes à la fois déjà un peu prêtres et victimes, nous nous offrons avec Notre Seigneur, mais c’est lui qui est le Prêtre et qui est la Victime. Il nous entraîne en tant que membres de son Corps Mystique dans l’oblation de la Victime. On ne peut pas imaginer quelque chose de plus beau, de plus profond, de plus consolant que cette oblation, car on ne peut pas imaginer pour nous une oblation plus parfaite. Ce ne serait pas possible si nous n’étions pas unis a Notre Seigneur par la grâce sanctifiante. Nous pourrions alors essayer d’offrir nos âmes, nos cœurs, nos corps au Bon Dieu, offrir notre vie, mais vous voyez quelle différence ! Etant séparés de Notre Seigneur – et surtout avec la tache du péché originel – notre oblation n’arriverait pas à Dieu, puisque , sans la grâce nous sommes dans l’état de pécheurs.

Mais maintenant, désormais sanctifiés par la présence de la grâce sanctifiante en nous, frères de Notre Seigneur, dans cette participation à la nature divine, il est évident que notre oblation prend la dimension de l’oblation de Notre Seigneur dans la mesure où nous sommes unis à lui.

 

2.Nous offrir avec Notre Seigneur en victime d’amour.

 

Nous nous unissons à l’autel à la grande prière de Notre Seigneur.

Si nous voulons réaliser vraiment la vertu de religion et être réellement des âmes religieuses, c’est en nous trouvant à l’autel, en nous unissant à Notre Seigneur que nous y parviendrons. C’est la plus belle prière que nous puissions faire : nous offrir avec Notre Seigneur à l’autel.

Tout ce monde, Dieu l’a fait pour la Croix, pour la rédemption des âmes, pour le saint sacrifice de la messe, pour les prêtres, pour que les âmes puissent s’unir à lui particulièrement comme victimes dans la sainte Eucharistie. Notre Seigneur se communique à nous comme Victime, afin que nous offrions notre vie avec la sienne, et que nous participions non seulement à notre rédemption, mais à la rédemption des âmes.

Préparer les âmes pour les amener à vivre et à communier au sacrifice de Notre Seigneur, s’unir au brasier d’amour pour la gloire de Dieu et l’amour du prochain, vivre en victimes d’amour à l’image et à la suite de Jésus et de Marie, c’est vivre alors la réalité céleste et divine de la vie de la grâce qui est toute orientée vers le sacrifice et vient du sacrifice de la Croix, du cœur transpercé de Jésus et de Marie.

 

Quam oblationem.

 

Quel a été le moyen choisi par Notre Seigneur pour transmettre la vie divine ? Le sacrifice de la Croix : l’oblation sanglante de sa vie humaine signifiant l’oblation de son Ame au Père, reproduction vivante et sensible du don éternel du Fils au Père.

Cette oblation, par un dessein admirable de sa toute puissance, il l’a léguée à l’Eglise d’une manière non sanglante dans le sacrifice eucharistique, qui perpétue son sacrifice sur la Croix d’une manière réelle.

Cette oblation est la grand prière de Notre Seigneur. Elle est nécessairement efficace pour la régénération des âmes.
La seule différence qu’il y a entre le sacrifice de la Croix et le sacrifice de la messe, c’est que l’un est sanglant et l’autre non sanglant. A la messe, il y a le Sang bien sûr, mais évidemment on ne le voit pas couler. Au Calvaire, on voyait le sang de Jésus couler, tandis que dans le sacrifice de l’autel on ne le voit pas couler. C’est la seule différence. C’est le même sacrifice, le même Prêtre qui sauve, la même Victime qu’au Calvaire. ….

….

Il n’y a rien d’aussi grand, rien d’aussi beau, dans toute l’histoire de l’humanité que le dernier soupir de Notre Seigneur Jésus-Christ, que l’oblation de l’âme de NSJC à son Père. C’est au moment même où il a expiré, que tout est consommé. Notre Seigneur l’a dit lui-même : « Tout est consommé » (Jn 19 30), mon amour  a été exprimé parfaitement à mon Père. « Père, je remets mon âme entre vos mains » (Lc 23 46) Notre Seigneur pouvait-il faire quelque chose de plus grand, de plus sublime ? Cet acte d’amour, de charité, de la part du Fils de Dieu envers son Père, a rendu une gloire infinie à Dieu, à la Trinité Sainte,  et nous a ouvert les portes du Ciel. Quelle chose admirable ! Et cet acte est renouvelé sur nos autels ; c’est cela qui continue sur nos autels : l’acte d’amour infini de Notre Seigneur vis-à-vis de son Père, rendant Gloire à son Père. Nous devons nous associer à NSJC pour rendre gloire aussi au Père céleste, à la Trinité Sainte, par Notre Seigneur Jésus-Christ, avec Notre Seigneur Jésus-Christ, en Notre Seigneur Jésus-Christ.

 

Il est vital de contempler la sainte messe, c’est-à-dire de contempler Notre Seigneur Jésus-Christ sur la Croix (…) et de voir dans cette Croix le sommet de l’amour de Dieu. Notre Seigneur peut se définir comme l’amour poussé jusqu’au sacrifice de soi, jusqu’au sacrifice suprême. Notre Seigneur a manifesté l’amour de son Père, l’amour du prochain jusqu’au sacrifice suprême, jusqu’à la dernière goutte de son Sang. C’est cela qui a toujours été l’objet principal de la contemplation de l’Eglise, mais je crois que cela a été en partie perdu de vue au moment de la naissance du protestantisme, peut-être par une certaine insistance très grande et en soi très louable sur l’aspect sacramentel de l’Eucharistie, mais laissant un peu dans l’ombre son aspect sacrificiel. Or c’est la même réalité, les deux se réalisent dans la consécration, dans les paroles de la consécration : le sacrifice et le sacrement. Alors on a voulu insister sur le sacrement à cause de la présence réelle, parce que la présence réelle était niée par les protestants, par beaucoup d’hérétiques à ce moment-là. On a insisté sur la présence réelle. Mais je pense qu’à notre époque, il faut remettre à l’honneur le sacrifice de Notre Seigneur, avec le sacrement bien sûr, avec la présence réelle, mais le sacrement représentant la Victime, la Victime qui s’offre sur la Croix, la Victime qui s’immole sur la Croix et au sacrifice de laquelle nous participons.

 

Il faut le reconnaître, on ne donne pas toujours sa place, même dans l’enseignement de l’Eglise, dans les catéchismes, au sacrifice de la Croix se perpétuant sur nos autels ; on a tendance à donner toute la place à l’Eucharistie et à ne faire qu’une allusion accidentelle au sacrifice. Cela représente un grand danger pour la foi des fidèles, surtout devant les attaques virulentes des protestants contre le sacrifice. Le démon ne se trompe pas lorsqu’il s’acharne à faire disparaître le sacrifice. Il sait qu’il attaque l’œuvre de Notre Seigneur au centre vital et que toute mésestime de ce sacrifice entraîne la ruine de tout la catholicisme, dans tous les domaines.

 

Les signes de la croix sur l’hostie et le calice.

 

Il est vraiment instructif, éclairant de voir combien Notre Seigneur réalise sur la Croix toutes les béatitudes. Si nous voulons participer aux béatitudes qui sont le couronnement de l’Esprit Saint dans les âmes, béatitudes qui préparent à la vie du Ciel, nous devons aussi participer à la vie de Notre Seigneur, à la Croix de Notre Seigneur. Au sommet de la vie spirituelle, au-dessus par conséquent des actes de vertu ordinaire, au-dessus des fruits du saint-Esprit, se placent les béatitudes. Elles sont le couronnement de l’œuvre divine en nous, le dernier, le plus sublime effet de la présence de celui que le Père a daigné nous envoyer pour notre sanctification, l’avant-goût du bonheur céleste.

Le Seigneur nous a fait connaître les béatitudes dans le sermon sur la montagne qui ouvre la période de sa vie publique. « Bienheureux, dit-il,  les pauvres en esprit, parce que le Royaume des cieux est à eux. Bienheureux les doux, parce qu’ils posséderont la terre. Bienheureux ceux qui pleurent, parce qu’ils seront consolés » (Mt 5 3-5)

Huit fois de suite, il répète avec des variantes la même expression « bienheureux », proclamant devant le monde étonné ce que le langage chrétien a nommes les huit béatitudes. Elles sont au nombre de huit. Alors voyons ces huit béatitudes, essayons de les appliquer à la Croix de NSJC, à NSJC crucifié et nous verrons combien elles s’y appliquent d’une manière merveilleuse.

 

-La pauvreté, l’esprit de pauvreté. S’il y a un lieu où Notre Seigneur est pauvre, où il manifeste sa pauvreté, c’est bien sur la Croix. Que lui reste-t-il ? Même sa mère, il la donne à saint Jean. Ses disciples l’ont abandonné. C’est vraiment l’abandon total : « Je remets mon âme entre vos mains » (Lc 23 46) Il pratique cet esprit de pauvreté de manière extraordinaire.

 

-La douceur, Notre Seigneur est l’Agneau, l’Agneau pascal qui est immolé. Il est donc comme un agneau : « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur » (Mt 11 29). Il a été immolé comme l’agneau qui se laisse faire, alors qu’il avait tout pour résister, puisqu’il a dit : « Si je voulais, je pourrais faire venir des légions d’anges. » Eh bien ! non : il s’est livré vraiment à son bourreaux comme un  agneau.

 

-Les larmes. Notre Seigneur a pleuré des larmes de sang. Que peut-on demander de plus ? « Bienheureux ceux qui pleurent ».

 

- La faim et la soif de la justice. Qu’y a-t-il d’autre que la Croix pour supprimer l’injustice et pour rétablir la justice ? Rétablir la justice vis-à-vis de son Père et rétablir l’amour du prochain, c’est peut-être l’objet principal du désir de Notre Seigneur de monter sur la Croix.

 

- La miséricorde. Où trouvons-nous Notre Seigneur plus miséricordieux que sur la Croix ? Son cœur  miséricordieux qui veut sauver les âmes que pouvait-il faire de plus dans son désir de venir à notre secours pour nous sauver ?

 

-La pureté de cœur. S’il y a un cœur pur, c’est bien celui de Notre Seigneur Jésus-Christ. Son cœur est vraiment tout entier tourné vers son Père, gonflé par l’amour qu’il a pour son Père et pour toute l’humanité. C’est de ce cœur transpercé que sortiront tous les cœurs purs qui viendront par la suite. Son cœur purifiera les âmes. Il sera à la source de toutes les virginités, de toutes les chastetés.

 

-L’amour de la paix. Mais que fait Notre Seigneur sur la Croix sinon rétablir la paix ? Notre Seigneur est venu apaiser la colère de Dieu et rétablir la paix.

 

-Les persécutions souffertes pour la cause de Dieu. Qu’est-il sur la Croix sinon persécuté pour la cause de Dieu ?

 

On voit que les béatitudes se réalisent d’une manière on ne peut plus parfaite sur la Croix.

Alors si nous voulons, nous aussi, pratiquer vraiment les béatitudes qui sont les dernières conséquences de la présence du saint-Esprit dans les âmes et qui préparent les âmes au Ciel, eh bien ! participons à la Croix de Jésus.

Ne soyons pas effrayés par les difficultés, les épreuves, les souffrances de toutes sortes, grandes ou petites. C’est le lot de la vie.

Comme le dit bien l’Imitation de Jésus-Christ, tout le monde a des souffrances, mais il y a une grande différence entre ceux qui souffrent en chrétiens, en union avec Notre Seigneur, pour gagner le ciel jouer sauver les âmes, pour réparer leurs péchés, et puis ceux qui se révoltent contre la souffrance. Ce serait un malheure que nous qui avons donné notre vie au Bon Dieu, nous qui voulons consacrer toute notre vie au Bon Dieu, nous ressemblions à ceux qui n’ont rien compris à la souffrance. Acceptons volontiers les difficultés, les épreuves, les contrariétés, en union avec Notre Seigneur, et alors la joie remplira notre cœur. Plus nous pratiquerons les béatitudes, plus nous accepterons toutes ces croix à l’exemple de Notre Seigneur, et plus nous serons heureux, plus la joie remplira nos âmes ».

 

L’élévation des yeux.

 

Au moment de la consécration, le prêtre, ministre du Médiateur universel, doit comme lui lever les yeux au ciel avec un ardent désir de s’unir à l’oblation du Christ toujours vivant qui ne cesse d’intercéder pour nous et qui ne cesse d’offrir avec lui à son Père tous les membres vivants de son Corps Mystique, particulièrement ceux qui souffrent à son exemple. Le père Garrigou-Lagrange a écrit des choses vraiment émouvantes sur le sujet. On sent qu’il avait une dévotion toute particulière pour la consécration : « On ne saurait trop recommander aux âmes intérieures d’avoir une grande dévotion pour la consécration qui est l’essence même du sacrifice de la messe, le moment le plus solennel de chacune de nos journées ».