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Un
regard sur le monde politique et
religieux
Au 28 juin 2006
N°
95
Une interview du Secrétaire de
MgrAlbert Malcom Ranjith
Monsieur Antoine-Marie Izoard
, de l’Agence I.MEDIA, agence très
au fait des choses vaticanes, a obtenu, le 22 juin 2006, une très intéressante interview du tout nouveau
secrétaire de
Le prélat aborde essentiellement
deux questions, l’une concernant le
missel de Paul VI, l’autre concernant le missel dit de saint Pie V
A- Concernant le « missel dit de Saint
Pie V», il affirme trois choses :
a- qu’ « il n’a jamais été aboli ou mis au ban ». Nous en prenons acte. Et sommes heureux de l’apprendre
d’une bouche autorisée de l’Eglise. Mais alors comment faut-il interpréter les paroles du Pape Paul VI lors du
Consistoire du 24 Mai 1976 où il demandait lui-même, et avec solennité, engageant
même son autorité apostolique, que nul prêtre, nulle communauté religieuse ne célébre
désormais selon le missel de saint Pie V ?
J’y insiste
chaque fois…car il ne faut pas oublier que c’est parce que nous avons affirmé durant
des années que cette messe de Saint Pie V n’était pas abolie, qu’elle pouvait donc être célébrée en toute
légalité que nous avons été mis au ban « ecclésial », que Mgr
Lefebvre a été condamné » et son
séminaire déclaré fermé, supprimée sa Fraternité….et
que les abbés Laguérie et Héry ne peuvent se faire rendre justice dans
l’Eglise parce que Rome considère que
b- que le missel dit de saint
Pie V pourrait bien revenir dans l’Eglise et être de nouveau célébré en toute
liberté. Cela est à l’étude, beaucoup le demandent instamment. Le pape le sait.
Il y réfléchit et tout le monde, même au Vatican, est dans l’attente de sa
décision. « L’Eglise doit alors être sensible à
ces urgences … Je ne sais pas si cela doit
prendre la forme d’une approbation du missel
de saint Pie V ou d’un renouvellement du
missel actuel (de Paul VI, ndlr). Le
pape sait tout cela, il connaît ces
questions, il est bien conscient de cette situation, il y réfléchit et nous attendons ses
indications »
Durant des années, j’ai étudié
très particulièrement la pensée du cardinal Ratzinger sur ce sujet. (cf Mon
livre « la bataille de la messe) J’en concluais : le cardinal veut cette
restauration…Les pressions qu’il doit subir, dans le gouvernement de l’Eglise, le
fera-t-il céder et abandonner sa résolution alors qu’il était encore
cardinal? Il faut prier pour lui.
c- que le missel dit de saint
Pie V est un peu comme l’archétype, dans l’Eglise, de toute liturgie qui doit exprimer et le
« sacré » et le « transcendant » et la vérité du dogme . Il
pourrait servir de norme à ce qu’on appelle la « réforme de la
réforme » du missel de Paul VI.
B- Concernant le missel de Paul VI, il
affirme également deux choses
a- que la vie liturgique qui se
manifeste dans l’Eglise, depuis la
publication de ce missel de Paul VI, a suivi
des « directions erronées » qui sont
de vrais « changements » mettant en
péril la doctrine catholique. Il dit que
ces changements ont été « peu réfléchis », qu’ils ont été « faits aussi dans la « rapidité »,
dans un esprit de rejet. Tout cela va contre ce que voulait formellement le
Concile dans sa Constitution Sacro
Sanctuim Concilium. « Tout ceci a porté un
tord considérable à la vie liturgie de l’Eglise. ».
L’archevêque va même jusqu’à
préciser ces changements liturgiques. Ces directions erronées. Il ne cite pas
1-comme l’abandon du sacré et de la mystique,
2-la confusion entre le sacerdoce commun et celui
consacré avec un appel spécifique,
en d’autres mots la confusion des rôles entre les laïcs et les prêtres.
3-Il y a aussi la vision du concept d’Eucharistie comme un banquet
commun plutôt que l’accentuation sur la
mémoire du sacrifice du Christ au calvaire et sur son efficacité sacramentelle pour le salut,
ou encore certains changements comme
d’avoir vidé les églises en les protestantisant… ».
On voit que ce sont les
critiques que le courant traditionaliste a exprimées dès le début de la réforme
liturgique et qui furent synthétisées dans le Bref Examen Critique présenté en vain à Paul VI. En vain !
Lors de sa prise de position
officielle, en cette affaire liturgique devant son corps professoral et ses
séminaristes, qui doit dater du 3 mai 1971, si ma mémoire ne me trompe
pas, Mgr Lefebvre relevait aussi ces
trois « errances » doctrinales. Pas plus, pas moins. Il avait eu
l’audace de la vérité. C’est tout à son honneur et à sa gloire. Il est
indispensable que justice lui soit rendue. Je l’écrirai, jusqu’à ma mort. Ce
qui n’empêche pas, bien sûr, qu un « modus vivendi » puisse être
trouvé avec Rome pour faciliter la vie ecclésiale et la paix de tous dans
les diocèses.
b- que ce missel doit donc
être réformé. C’est à cette occasion qu’il parle de la « réforme de la réforme ».
Ce missel doit être réformé en s’inspirant des «acquis
du passé », dit-il, non qu’il faille pour autant abandonner les
« gains » du Concile comme l’usage de la langue vernaculaire et la richesse biblique
mieux utilisée. Il ne faut surtout pas oublier « ces aspects »
dit-il. « Nous ne disons pas qu’il faut complètement abandonner les gains du Concile comme l’utilisation de la langue
vernaculaire, l’usage substantiel des Ecritures sacrées… Mais,
en renforçant ce que nous avons gagné
lors du Concile, il faut renforcer les acquis du passé ».
c- que ce travail de la «
réforme de la réforme liturgique » ne se fera pas sans l’aide des évêques
qui sont les pasteurs du troupeau et qui ne doivent pas oublier ce rôle liturgique
dans leur tache pastorale. « Cet amour
des pasteurs doit devenir un grand désir d’être les agents du salut de leurs fidèles, pas
seulement un salut politique ou des
aspects humains de la vie, mais aussi
intérieur et profond. Cet amour doit nécessairement s’exprimer dans la joie de se
consacrer à une vie liturgique joyeuse,
mystique et sacrée ».
Cette interview de Mgr Mgr
Albert Malcom Ranjith est important et montre bien l’évolution romaine en
matière liturgique.
Peut-on encore dire raisonnablement,
comme on l’entend dire trops souvent encore dans
Nous ne sommes plus
- en 1976 avec le Consistoire
du 24 mai 1976, interdisant toute messe tridentine.
- ni en 1984, avec la lettre
« Quattuor abhinc annos »,
- ni en 1988 avec la lettre
« Ecclesia Dei adflicta »
- ni en 2002 avec la création
de l’Administration apostolique saint Jean Marie Vianney car l’usage de la
messe tridentine était réservé aux seuls prêtres de l’administration ou à ceux
disant la messe dans les églises de l’Administration apostolique.
Nous sommes en 2006…La mesure
en faveur de la messe tridentine sera , cette fois, universelle, à l’échelle de
l’Eglise universelle et son droit reconnu…
On approche de la solution
Voici le texte de l’interview
de Mgr Albert Malcom Ranjith Patabendige Don
Vatican - Agence I.MEDIA - 22 juin 2006
Mgr Albert Malcom Ranjith
Patabendige Don regrette certains
résultats négatifs de la réforme liturgique
post-conciliaire et souhaite que la messe actuelle de Paul VI soit bien étudiée et perfectionnée au
regard de certains aspects de la
liturgie du passé. Le secrétaire de
attend aussi la décision du
pape de lever le doute sur la validité
du missel préconciliaire de saint Pie V,
susceptible de satisfaire la frange traditionaliste de lEglise.
Interrogé par I.MEDIA, le Sri Lankais
Mgr Malcom Ranjith a, en premier lieu,
donné sa définition de la liturgie
actuelle de l’Eglise :
La vie liturgique de l’Eglise
est le moment particulier dans lequel le
fidèle à la possibilité
d’entrer dans un rapport plus
intime avec le Seigneur.
Dans la vie liturgique, l’Evangile
et la foi deviennent un choix. La foi n’est
pas seulement
intellectuelle, elle devient
une chose du coeur et mène à un
engagement. C’est dans l’expérience liturgique
que ce rapport avec le Seigneur, la foi, se renforce et se transforme en vie. Pour cela, la
liturgie est très importante. Le Concile
Vatican II a tellement souhaité ce
renouvellement, cet aggiornamento, dans
lequel les fidèles comprennent ce qu’ils croient ou
cherchent de comprendre, et
puis sont convaincus de ce qu’ils
croient et cherchent à vivre cette foi au
quotidien. Ainsi, la liturgie devrait être le véhicule de ce renouvellement.
Mais,
malheureusement, après le Concile,
certains changements peu réfléchis ont été
faits, dans la rapidité, dans l’enthousiasme, dans le rejet de certaines exagérations du passé.
Ceci a amené à une situation opposée à
celle que l’on souhaitait.
Pouvez-vous donner quelques exemples ?
On voit que la liturgie a
pris des directions erronées comme l’abandon du sacré et de la mystique, la confusion entre le
sacerdoce commun et celui consacré avec
un appel spécifique, en d’autres mots la
confusion des rôles entre les laïcs et les prêtres. Il
y a aussi la vision du concept d’Eucharistie comme un banquet commun plutôt que l’accentuation sur
la mémoire du sacrifice du Christ au
calvaire et sur son efficacité
sacramentelle pour le salut, ou encore
certains changements comme d’avoir vidé les églises en les
protestantisant…
Ces changements de mentalité ont affaibli le rôle de la liturgie plutôt
que de le renforcer. Ceci n’était pas l’idée de Sacro sanctum concilium
(Constitution conciliaire sur la liturgie
promulguée par Paul VI le 4 décembre 1963, ndlr) qui voulait que la liturgie soit
participante, approfondie, mise plus en
contact avec
Ceci a causé d’autres résultats négatifs pour la vie de l’Eglise.
Ainsi, pour faire face à la
progression du sécularisme dans le
monde, il ne fallait pas devenir nous aussi
sécularistes, mais que nous approfondissions encore plus car le monde a toujours plus besoin de l’Esprit, de l’intériorité. En abandonnant certains
aspects, nous avons perdu une occasion. On voit bien, chez des
jeunes d’aujourd’hui, y compris chez de jeunes prêtres, une nostalgie du passé, une
nostalgie pour certains aspects perdus.
Il y a, en Europe, un réveil
très positif.
Que peut faire
Nous voulons rappeler à tous,
surtout les responsables comme les
évêques, les commissions liturgiques ou les
chercheurs, qu’il ne faut pas oublier ces
aspects. Nous ne disons pas qu’il
faut complètement abandonner les gains
du Concile comme l’utilisation de la langue vernaculaire, l’usage substantiel des
Ecritures sacrées… Mais, en renforçant ce que nous avons gagné lors du Concile, il faut renforcer les acquis
du passé.
Cela veut-il dire que le missel
préconciliaire de saint Pie V doit être
reconnu de nouveau ?
Cette question est
de plus en plus fréquente. Cela démontre aussi que certains voudraient l’obtenir.
L’Eglise doit alors être sensible à ces urgences
que les gens sentent et regagner
certains aspects de la liturgie du passé.
Je ne sais pas si cela doit prendre la forme d’une approbation du missel de saint
Pie V ou d’un renouvellement du missel
actuel (de Paul VI, ndlr). Le pape sait
tout cela, il connaît ces questions, il
est bien conscient de cette situation, il
y réfléchit et nous attendons ses indications.
Le missel de saint Pie V a-t-il été
réellement invalidé après le Concile
Vatican II ?
Il n’a jamais été
aboli ou mis au ban. Mais, à cause de ce qui s’est passé avec
les fidèles de Mgr Lefebvre, cette messe
a prise une certaine identité qui n’est
pas juste.
Cela signifie-t-il que l’Eglise devrait, en
quelque sorte, récupérer le missel de
saint Pie V ?
C’est ce que nous
attendons, que le pape décide à ce propos. Même si l’on récupère la
messe de saint Pie V, la messe
post-conciliaire de Paul VI doit être bien étudiée et perfectionnée là où c’est
possible. C’est ce que certains appellent la réforme de la
réforme. Si l’on approuve de
nouveau la messe de saint Pie V, cela ne veut pas dire que celle de Paul VI restera inchangée. Il faut l’approfondir encore
pour la faire devenir encore plus belle,
plus transcendante.
Il y a urgence à prendre de telles décisions
?
Lorsque l’on se presse à
prendre des décisions, on tombe dans l’erreur.
Il faut beaucoup réfléchir, et surtout
prier pour le Saint-Père et l’Eglise, et écouter ce que le Seigneur veut de nous.
Sans émotion mais avec une objectivité absolue, en voyant
le passé, ce que nous avons gagné, là où
nous sommes trompés et comment nous pouvons retrouver ces aspects perdus.
Nous souhaitons
que cela arrive le plus vite possible, mais
sans empressement. Les évêques sont
appelés à devenir des pasteurs, aimant
leur peuple. Cet amour des pasteurs doit
devenir un grand désir d’être les agents
du salut de leurs fidèles, pas seulement un salut politique ou des aspects humains de la
vie, mais aussi intérieur et profond. Cet amour doit nécessairement
s’exprimer dans la joie de se consacrer à
une vie liturgique joyeuse, mystique et sacrée.
Propos recueillis à Rome par
Antoine-Marie Izoard -
Agence I.MEDIA
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