ITEM
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Un
regard sur le monde politique et religieux
au
28 décembre 2006
N° 113
par Monsieur l’abbé
Aulagnier
Réponse à mes confrères de
Des confrères de
Ils font remarquer que Mgr Ricard,
l’archevêque de Bordeaux et président de
Ils semblent s’en réjouir. Comme c’est étrange !
Comme si un combat, même partiel, pouvait ne pas servir le
bien commun ! Comme si une défaite, même provisoire, pouvait ne pas être
infiniment triste et nuire la cause commune.
Ils semblent même craindre une
faiblesse, voire même une trahison, des responsables de l’Institut du Bon
Pasteur. « Ils vont céder… Ils vont accepter l’inacceptable : la
création voulue par le cardinal d’une paroisse personnelle… mais avec le
bi-ritualisme ! Ou alors vont-ils se « réfugier dans le prochain Motu
Proprio… demandé et obtenu grâce à la ténacité et à la résistance de
Ces dernières paroles m’ont fait réfléchir.
Voici quelques réflexions !
Je pense, de fait, que la messe
tridentine et sa libéralisation sur les autels de l’Eglise devrait faire
l’objet du prochain Motu Proprio de Benoît XVI dont on parle beaucoup ces
derniers temps.
Si ce texte voit le jour et avec cet objet, je m’en
réjouirai profondément.
Il sera, il est vrai, le résultat d’une forte
« ténacité ». J’en conviens, volontiers.
Mais pourquoi penser et écrire qu’il
sera l’œuvre de la ténacité de la seule résistance de
Certes,
Mais pourquoi vouloir absolument tirer
la couverture à soi, à soi seul, comme si ce combat de la messe avait été le
combat de la seule FSSPX ? Pourquoi ne pas reconnaître aussi le rôle d’un
chacun, dans cette « affaire » ? Pourquoi être exclusif ?
Je me permettrai de rappeler la position
des laïcs, la position d’Itinéraires, de Jean Madiran qui l'animait
pendant de longues années, précisément pendant ces années si importantes de
l’après-Concile… Itinéraires n’aurait pas existé en ce temps-là…
que feraient, que seraient ces jeunes prêtres aujourd’hui volontiers donneurs
de leçon… N’oublions pas que nous sommes des héritiers et qu’il faut garder
en tout domaine une piété filiale envers ceux qui nous transmettent… Dans
mon papier de la semaine dernière, je ne faisais que rappeler les lettres
de Jean Madiran au Pape Paul VI du 27 octobre 1972, renouvelées au Pape
Jean-Paul II, le 1er août 1988… Je voudrais aujourd’hui les
donner in extenso. Elles sont peu
connues. Elles doivent être lues.
« Lettre à Paul VI de
1972 :
Très Saint Père,
Rendez-nous
l’Ecriture, le catéchisme et la messe.
Nous en sommes de plus en plus privés par une
bureaucratie collégiale, despotique et impie qui prétend à tort ou à raison,
mais qui prétend sans être démentie s’imposer au nom de Vatican II et de Paul
VI.
Rendez-nous la messe catholique
traditionnelle, latine et grégorienne selon le Missel romain de saint Pie V.
Vous laissez dire que vous l’auriez interdite. Mais aucun pontife ne pourrait,
sans abus de pouvoir, frapper d’interdiction le rite millénaire de l’Eglise
catholique, canonisé par le concile de Trente. L’obéissance à Dieu et à
l’Eglise serait de résister à un tel abus de pouvoir, s’il s’était
effectivement produit, et non pas de le subir en silence. Très Saint Père, que
ce soit par vous ou sans vous que nous ayons été, chaque jour davantage sous
votre pontificat, privés de la messe traditionnelle, il n’importe. L’important
est que vous, qui pouvez nous la rendre, nous la rendiez. Nous vous la
réclamons.
L’Eglise militante est présentement
comme un pays soumis à une occupation étrangère : on fait mine de tout
accepter, mais le coeur n’y est pas, oh non ! C’est le conditionnement
psychologique et c’est la contrainte sociologique qui font marcher les gens. Un
parti que vous avez bien connu quand il faisait l’innocent et cachait ses
desseins, un parti que le succès a révélé cruel et tyrannique, domine
diaboliquement l’administration ecclésiastique. Ce parti actuellement dominant
est celui de la soumission au monde moderne, de la collaboration avec le
communisme, de l’apostasie immanente. Il tient presque tous les postes de
commandement et il règne, sur les lâches, par l’intimidation, sur les faibles,
par la persécution.
Très Saint Père, confirmez dans leur
foi et dans leur bon droit les prêtres et les laïcs qui, malgré l’occupation
étrangère de l’Eglise parle parti de l’apostasie, gardent fidèlement l’Ecriture
sainte, le catéchisme romain, la messe catholique.
Et puis, surtout, laissez venir jusqu’à
vous la détresse spirituelle des petits enfants.
Les enfants chrétiens ne sont plus
éduqués, mais avilis par les méthodes, les pratiques, les idéologies qui
prévalent le plus souvent, désormais, dans la société ecclésiastique.
Les innovations qui s’y imposent en se
réclamant à tort ou à raison du dernier concile et du pape actuel, - et qui
consistent, en résumé, à sans cesse retarder et diminuer l’instruction des
vérités révélées,à sans cesse avancer et augmenter la révélation de la
sexualité et de ses sortilèges, - font lever dans le monde entier une
génération d’apostats et de sauvages,chaque jour mieux préparés à demain
s’entretuer aveuglément.
Rendez-leur, Très Saint Père,
rendez-leur la messe catholique,le catéchisme romain, la version et
l’interprétation traditionnelles de l’Ecriture.
Si vous ne les leur rendez pas en ce monde, ils vous les
réclameront dans l’éternité.
Daigne Votre Sainteté agréer, avec ma
très vive réclamation, l’hommage de mon filial attachement à la succession
apostolique et à la primauté du Siège romain, et pour votre personne,
l’expression de ma profonde compassion ».
Jean Madiran (27 octobre 1972)
A Sa Sainteté le Pape Jean-Paul II
« Très Saint Père,
Je réitère auprès de votre suprême autorité ma réclamation à
votre prédécesseur :
-
Rendez-nous
l’Ecriture, le catéchisme et la messe.
Aux
motifs toujours aussi impérieux présentés en 1972 au pape Paul VI, que voici.
La plupart des chrétiens, tout au long
de leur vie, n’ont au mieux que trois livres de religion : le missel, le
catéchisme et
La messe traditionnelle, celle de votre
ordination, vous ne la célébrez jamais, pas même une fois l’an pour la fête de
saint-Pie-V le 5 mai. Comment ne pas en conclure que vous ne l’aimez
plus ? Que vous ne l’aimiez pas ?
Nous n’avons pas cessé de l’aimer. Nous
la réclamons. Personne, pas même le souverain pontife, n’avait le droit de nous
en priver. Cette persécution qui s’obstine depuis dix-huit ans restera sans
doute dans l’histoire de l’Eglise comme la plus grande honte du Siège romain.
Cela fait donc une vingtaine d’années
que l’Eglise, spécialement en France, vit sous le régime de l’interdiction des
deux monuments de la tradition catholique qui sont directement à la portée du
peuple chrétien : le missel et le catéchisme de nos anciens et de nos
pères dans la foi.
A leur place, depuis vingt ans, on nous
impose les nouveautés issues de Vatican II comme si elles étaient infaillibles,
mais sans jamais oser – ou pouvoir- faire de cette obligation un précepte
infailliblement énoncé.
Le concile Vatican II n’a défini aucun
article de foi qui viendrait s’ajouter ou se substituer à ceux qui ont été
antérieurement définis. Et cependant, en maintes occasions, Votre Sainteté
elle-même présente les décrets conciliaires comme s’ils avaient été écrits sous
l’inspiration de l’Esprit Saint, au même titre ou quasiment que
Devant ces désordres majeurs le pontife
romain, qui voyage beaucoup à travers le monde depuis Paul VI, demeure
moralement immobile depuis vingt ans, insensible aux demandes,aux
supplications, aux clameurs, aux souffrances quand elles ne se manifestent pas
du bon côté. Aucune réponse qualifiée n’est faite non plus aux questions et aux
objections. Seulement l’argument d’autorité, en omettant les explications et
réfutations dont l’Eglise jusqu’ici l’accompagnait toujours. Face à nos réclamations
motivées concernant l’interdiction des catéchismes, la mise hors la loi de la
liturgie traditionnelle, le saccage scientiste de l’Ecriture, ces vingt années
d’immobilisme ont été aussi vingt années de mutisme.
Très Saint Père, n’est-ce pas
trop ?
Je le demande au Vicaire de Notre
Seigneur Jésus-Christ, en toute fidélité à la succession apostolique et à la
primauté du Siège romain.
Jean Madiran (1er août 1988)
Quelle force d’âme !
Et puis la libéralisation de la messe
sur les autels de la chrétienté n’est pas l’unique « réclamation » de
Mgr Lefebvre, n’est pas l’unique solution au problème de la crise de la messe,
de la crise de l’Eglise.
Il lui faut des prêtres qui l’aiment, cette messe, des
évêques aussi.
Il faut que le Pape Benoît XVI finisse
par la célébrer cette messe, un jour, sur l’autel du Bernin, « ad caput » et pour toujours… Voilà
qui ferait avancer grandement l’affaire. Je crois à la force de l’exemple. Des
écrits, nous en avons… Nous en avons à la pelle, Nous en avons plus qu’il en
faut. Jean-Paul II nous en a donnés… plus qu’on ne pouvait en lire… La réforme
liturgique est pourtant toujours en attente.
Il faut surtout un cadre juridique.
On en voit toute l’importance dans
l’affaire de la paroisse de saint-Eloi à Bordeaux… Et c’est pourquoi les
« opposants » ‒ ceux qui ne l’aiment pas cette messe, qui n’en veulent
pas… qui poussent en sens contraire, retardent toute signature… toute signature
d’un accord juridique ayant pour objet précisément la messe, dans son droit
exclusif.
Rome doit subir des pressions énormes,
vraisemblablement de pouvoirs divers, cachés. Cela fut toujours le cas… Nous en
avons un témoignage formel, celui du Cardinal Stickler, en 1986. On ne le dira
jamais assez. Un accord était sur le point d’être signé en 1986… Il aurait eu
certainement notre approbation… En raison des pressions de divers épiscopats,
Jean-Paul II ne le signa pas… On sait maintenant, tout récemment encore, depuis
le témoignage de Sophie de Ravinel du Figaro qu’il en était déjà de même
en 1982… Elle possède même le texte latin… J’aimerais l’avoir…
Il en est de même aujourd’hui encore.
Ce Motu Proprio sur la messe était signé par la pape, nous dit-on… Il ne
sort toujours pas…
Devant ces pressions Rome semble
hésiter.
Je l’ai bien vu dans mon affaire
personnelle. A mon arrivée dans le diocèse de Clermont, l’archevêque avait bien
reçu de Rome un dossier « ad hoc ».
Il était quelque chose de très officiel. Il avait été rédigé à Rome. De Rome,
il était venu à la nonciature de Paris, de Paris à Clermont. Rome demandait que
me soit confiée une paroisse personnelle. Cela m’aurait plu… L’archevêque
refusa…Et Rome se retira et fit silence…
En sera-t-il de même dans l’érection de cette paroisse
personnelle à Bordeaux, à Saint-Eloi ? Je ne le sais. Je ne l’espère pas.
La situation est différente… Les « quémandeurs » sont forts… Mais les
opposants sont en place, ils sont aussi forts. Le Cardinal Ricard parle de
« longues et difficiles tractations,
d’un grand climat de défiance mutuelle, de crainte de part et d’autre »…
Tout cela n’est pas bon et m’inquiète… Il le déclarait sur RCF-Gironde, le 24
décembre… « Longues et difficiles
tractations »…
C’est pourquoi je reste convaincu
- et je l’ai dit dès le début de la fondation de l’Institut du Bon Pasteur
(voir Regards sur le Monde du 21 septembre 2006) et je le
répète pour ne rien cacher, que, pour moi, seule l’érection d’une
« Administration Apostolique » universelle avec exemption juridique
de l’ordinaire du lieu et reconnaissance du droit propre et exclusif de la
messe de toujours sur toute fondation de cette Administration Apostolique est
la solution. C’est la solution que Mgr Rangel a obtenue à Campos, au Brésil.
C’est la seule solution !
C’était la pensée de Mgr Lefebvre. Il
en demandait la création à Rome avant même que soient réglés les problèmes
doctrinaux.
Il l’exprimait dans sa lettre du 21
novembre 1987.
Il en précisait les termes, les
conditions. Qu’on nous prenne « tels que nous sommes ». C’était son
expression. C’était la première condition, pour ne pas dire la condition
unique… Qu’on nous prenne avec notre amour de la messe, de la liturgie romaine,
du chant grégorien. Qu’est-ce que cela peut avoir d’étrange… N’est-ce pas, du
reste, ce qu’a demandé le Concile du Vatican lui-même ? Qu’on nous prenne
avec notre amour du sacerdoce qui est une grande chose, puisqu’il participe de
la grandeur même de
Qu’on nous prenne avec notre position
sur le Concile Vatican II qui n’est finalement rien d’autre que celle exprimée,
à la fin du Concile, par le Cardinal Felici.
Je n’ai cessé, depuis trois ans, de
reprendre cette pensée de Mgr Lefebvre sur ce sujet. Depuis 2003, date de mon exclusion.
C’est plus de treize fois que j’en ai parlé sur mon site ITEM. La
première fois, c’était dans l’interview que des journalistes du « The
Wonderer » me demandaient.
J’en reprends ici le texte :
A la question : « Considérant votre amitié et votre proximité avec Mgr
Lefebvre, pensez-vous qu’il aurait accepté l’offre de réconciliation que Rome a
récemment présentée à
Je répondais :
Je crois sincèrement que Mgr Lefebvre
aurait accepté, aujourd’hui, « un accord » avec Rome. Il aurait, peut-être, été
plus prudent, plus exigeant sur certains points que ne le fut Mgr Rangel, mais
il aurait été, cette fois, jusqu’au bout. Les exigences demandées par Rome aux
Pères de Campos, à savoir : la reconnaissance du Pape Jean-Paul II comme
légitime successeur de Pierre, la reconnaissance du Concile Vatican II
interprété à la lumière de
Du reste, si Mgr Lefebvre a retiré sa
signature du protocole en 1988, c’est-à-dire s’il n’a pas voulu aller jusqu’à
l’accord final, c’est parce qu’ on ne lui donnait pas les garanties de
protection nécessaires qu’il réclamait justement, à savoir : la majorité
dans la commission, commission qui devait avoir pour but de protéger
Eh !
bien, cette protection nous l’aurions dans le cadre d’une bonne administration
apostolique. Nos « évêques », reconnus par Rome, auraient ce rôle protecteur
que voulait absolument Mgr Lefebvre, vis-à-vis les dicastères romains qui
seraient tentés d’indiscrétions modernistes. Ils joueraient le rôle dévolu à la
commission prévue : la défense de
Je crois vraiment être resté dans la
juste pensée de Mgr Lefebvre. Je crois ne pas avoir débordé ni à gauche ni à
droite. Je crois être resté dans la ligne de la pensée de Mgr Lefebvre.
Pourquoi ne jamais parler de la lettre
de Mgr Lefebvre au cardinal Gagnon.
Je suis stupéfait de constater qu’en
2001, le 13 janvier 2001, lorsque la question des rapports avec Rome fut
abordée au plus haut niveau, le Conseil Général de
Or, il se trouve que Rome propose à Mgr
Fellay, aujourd’hui, cette Administration Apostolique. Il l’a dit dans un point
de presse en 2006. Le journal
« Quelle
forme aurait cette régularisation ? Ce pourrait être un statut d’autonomie, par exemple une administration apostolique personnelle comme
celle créée en 2001 à Campos (Brésil) pour les fidèles de Mgr Antonio de
Castro Mayer, autre évêque intégriste, co-consécrateur lors des ordinations
illicites de 1988. « Je suis presque sûr qu’on nous
l’accordera, confie Mgr Fellay. Même si nous ne voulons pas être des
catholiques à part : l’ancienne messe, nous ne la demandons pas pour nous, mais
pour tous. Mais peut-être faudra-t-il passer par cette étape transitoire. »
Alors pourquoi ne pas aller de l’avant…
Pourquoi attendre… attendre toujours, attendre un règlement doctrinal,
règlement qui prendra des années… Alors que l’Administration Apostolique nous
donnerait le cadre juridique d’un apostolat plus facile nous permettant de
nouveau de quadriller
Je suis disposé à en débattre avec
tous…
Abbé
Paul Aulagnier