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Un regard sur le monde
politique et religieux
au 29 août 2008
N° 180
Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier
Rome
et
Mgr Fellay
Une normalisation
impossible.
Mgr Bernard Fellay, dans son sermon, prononcé lors de la
procession du vœu de Louis XIII, à Saint-Malo, le 15 août 2008, devant 1300
personnes, a donné, aux fidèles, quelques
informations nouvelles sur la situation de
On constatera toujours la grande fermeté de Mgr Fellay face à Rome. « Nihil novi sub sole ».
On sera également attentif aux grandes affirmations toujours très générales, trop générales, de Mgr Fellay sur la situation romaine. N’y aurait-il rien de changé à Rome ? Ne faudrait-il pas aujourd’hui affiner un peu le jugement ? Le pape Benoît XVI est un « grand libéral », lisons-nous ! Son « apologie » du régime démocratique des USA le prouverait amplement. Mais pourquoi ne pas prendre en compte également les discours de Benoît XVI en Australie et en faire une synthèse. Vous pouvez en trouver l’analyse dans Item du début du mois d’août (cf Item du 1 août 2008).
Rien ne changera dans les relations avec Rome, nous dit Mgr
Fellay, tant que les conversations
doctrinales n’auront pas été engagées, et la crise doctrinale, issue du Concile
Vatican II, réglée…ou en voie de règlement. Alors la « normalisation »
de
Des affirmations de Mgr Fellay, nous retiendrons surtout ce
paragraphe : « Mais de notre
côté, que l’on comprenne bien, nous n’avons absolument rien refusé de la part
de Rome. Encore maintenant nous continuons à dire qu’on ne peut pas régler la
situation canonique de
C’est ce qui nous
arrive. Rome, en voulant passer un accord canonique ou, pour reprendre cette
image, en nous proposant une voiture, un bateau, une maison, ne veut surtout
pas qu’on discute de la pierre sur laquelle doit être bâtie la maison. Pour les
autorités romaines, il va de soi que l’ambiance dans laquelle circulerait cette
voiture ou naviguerait ce bateau, c’est l’ambiance doctrinale de Vatican II.
Pour elles, il est absolument évident qu’il n’y a pas de remise en cause des
nouveautés de Vatican II, et c’est précisément là le point crucial, le point
sur lequel nous voulons amener Rome. Et tant que Rome ne veut pas faire cela,
nous ne pouvons pas aller de l’avant. Nous sommes obligés de passer par là,
parce que sinon c’est construire sur du sable. Et nous ne voulons pas
construire sur du sable. C’est au nom de la foi, de l’enseignement de l’Eglise,
de la pratique de l’Eglise que nous disons cela ».
A- Quelques réflexions de bon sens.
Il me semble, pourtant, qu’il serait raisonnable que
1- Tout en reconnaissant que la crise dans l’Église est essentiellement doctrinale, et qu’elle s’est particulièrement manifestée à l’occasion du Concile, Mgr Lefebvre ne faisait pas de la résolution de cette crise doctrinale, un préalable à toute « normalisation » et à toute « réintégration ». La meilleure preuve c’est qu’il envisageait une « normalisation » alors que nous étions en plein « débordement » moderniste avec l’affaire d’Assise en 1986 : réunion interreligieuse qui fut un scandale pour la chrétienté. Voir le Pape, vicaire du Christ, ravalé au même niveau que les chefs des fausses religions, avait quelque chose de choquant… Le scandale d’Assise se perpétuait encore en 1987 et Mgr Lefebvre acceptait pourtant en 1988 de s’asseoir à une table de « négociation ». Oui ! Quoi qu’il en soit de cette crise doctrinale,
Mgr Lefebvre a toujours cherché à normaliser sa situation avec les autorités de l’Église. Il était favorable à cette « normalisation » et à cette « réintégration ». Il voulait trouver une solution.
Et il s’est toujours trouvé disposé et disponible pour envisager la solution et la concrétiser. « Que Rome ait changé ou non » n’était pas pour Mgr Lefebvre, le problème comme cela semble être le cas pour Mgr Williamson (cf. Minute du 8 mars 2006) et aujourd’hui encore pour Mgr Fellay. Le moindre « mouvement » de Rome était pour lui occasion d’espérance et de grande disponibilité. Il était Romain et savait que l’on ne peut se passer de Rome, « Mère et Maîtresse de toutes les églises » de qui nous recevons tout. Il ne faudrait pas l’oublier.
2- Avant même la résolution doctrinale de la crise dans
l’Église, Mgr Lefebvre était donc favorable à une normalisation de la situation
de
sacerdotal, à
3- Or la solution romaine aujourd’hui proposée par Rome à
4- C’était du reste ce que demandait Mgr Lefebvre le 21 novembre 1987, dans la lettre qu’il remettait au Cardinal Gagnon à l’issue de sa visite apostolique. Mgr Lefebvre n’a pu, lui-même, obtenir ces conditions de liberté et de certitude, en 1988 alors qu’il négociait avec Rome et le Cardinal Ratzinger. Il ne put obtenir, en effet, ni la majorité dans la « commission
romaine » qu’il suggérait à Rome de créer pour
présider à l’harmonieux développement de
choses qui permettaient certainement, et à elles seules, l’exercice concret de cette liberté de mouvement. Mgr Lefebvre n’était pas un « doctrinaire » ni un « idéologue ». Mais il avait
une pensée très concrète et pratique, juridique même. L’expérience qu’il eut en Afrique dans l’organisation des Conférences épiscopales africaines qu’il créa, lui donna l’expérience des organisations pratiques qui permettent la réalisation de buts voulus et souhaités. Il savait l’importance de la pratique pour obtenir une fin particulière. Il aimait le « pragmatisme
organisateur », l’art des chefs.
5- Mais depuis 1988, le temps passa. Rome s’approcha petit à
petit et de plus en plus vers la solution demandée par Mgr Lefebvre dans sa
lettre du 21 novembre 1987. Nous pouvons le constater dans la solution
proposée, en 2001- 2002, à Mgr Rangel, évêque sacré par Mgr Tissier de Mallerais
dans le cadre de l’Association Sacerdotale Saint- Jean-Marie-Vianney, sis au
diocèse de Campos, au Brésil. Là, dans le cadre d’une nouvelle Administration Apostolique,
Rome a reconnu pour ses prêtres et membres le droit à
de
personnelle et cumulative avec l’ordinaire du lieu, assurait pleine liberté à ses sujets.
Les prêtres et les membres de cette Administration Apostolique dépendent
totalement et exclusivement de leur propre évêque, qui a été ordonné « dans
qu’est l’Église. Si l’on veut s’en affranchir, alors on cesse d’être catholique.
Mgr Williamson et Mgr Fellay, en refusant d’accepter ces propositions romaines d’une Administration Apostolique universelle et nullement limitée à un diocèse comme dans le cas de Campos, - un pas supplémentaire fait par Rome -, pensent différemment de Mgr Lefebvre et ne voient pas la grande liberté que Rome nous donnerait dans un tel cadre juridique. On bâtirait nullement sur le sable. On resterait nullement en calle sèche. Bien au contraire.
6- En effet s’il est évident que la crise doctrinale dans l’Église ne sera pas finie parce que notre situation sera normalisée, cette normalisation nous permettrait cependant, un meilleur et plus facile apostolat. Le fait qu’ils soient considérés comme « excommuniés et schismatiques » – même s’il n’en est rien –, ne facilite pas les choses. Que craindre si « ils » sont bien « bordés»… Craindre d’être envahis par une foule de« libéraux »… ? Ce n’est pas une sainte crainte. Il est clair que Mgr Lefebvre ne la partageait pas, lui qui avait soif des
âmes et de leur salut tel que N.S.J.-C le manifesta sur le
bois de
malfaiteur… et qui, in extremis, eut un bon mouvement.
7- La normalisation de la situation de
8- Enfin la normalisation de notre situation dans l’Église est aussi une question de « stratégie ». Mgr Lefebvre était un grand « stratège »… Qu’on veuille bien l’imiter ! Il faut savoir apprécier les « enjeux ».
B- Voici maintenant les réflexions de Mgr Fellay au 15 août 2008
« Que
demandez-vous à l’Eglise ?
Mes bien chers frères,
Nous sommes ici pour accomplir le vœu du roi Louis XIII. On
pourrait dire que plus que jamais il nous faut essayer d’accomplir ce vœu pas
seulement par une procession, pas seulement lors d’une acclamation de
Car nous vivons des temps très spéciaux. Si vous voulez,
nous pouvons risquer ce mot : nous vivons des temps apocalyptiques, non pas
pour nous complaire dans le fantastique, mais tout simplement parce que ce que
nous vivons correspond à ce qui est décrit dans ce livre de l’Ecriture Sainte
qu’est l’Apocalypse. Il est vrai que, pris dans un sens très large,
l’Apocalypse décrit ce qui se passe dans l’Eglise depuis la mort de Notre
Seigneur jusqu’à la fin des temps. Dans un sens large, on doit prendre ce livre
comme la description de la vie de l’Eglise. Certains auteurs, des saints même y
ont vu diverses interprétations, et ont pris certains chapitres pour dire : «
Ce chapitre vaut pour telle époque, celui-ci pour celle-là ». Nous savons que
le futur nous échappe, et qu’il est toujours dangereux de vouloir appliquer
Il reste pourtant que ce que nous vivons - au niveau de la
société humaine et de l’Eglise – n’est pas normal, sort complètement de
l’habituel et de l’ordinaire. Nous sommes vraiment dans une période où tout est
bouleversé, où on attaque jusqu’aux principes les plus profonds. C’est une
période invraisemblable. On voudrait pouvoir dire que cela ne peut pas être,
que cela ne doit pas exister. Cependant c’est ce que nous vivons, c’est une
réalité ! Et on n’a pas le droit de faire jouer la foi contre la réalité. Si
c’est réel, c’est réel ! Nous avons les promesses de Notre-Seigneur : « Les
portes de l’enfer ne prévaudront pas contre l’Eglise » (Mat., XVI,18).
Notre-Seigneur est
Le message de Notre
Dame à
Il est très intéressant de se rappeler que Notre Dame, à
Or il me semble que ce n’est pourtant pas sans raison que nous voyons beaucoup de choses qui sont faites ou publiées à Rome et qui ne sont plus l’expression de la foi catholique. On peut aller jusqu’à dire que nous assistons à l’apparition d’une nouvelle Eglise, une Eglise qui se prétend catholique, mais qui n’a plus rien de catholique. Elle a ses rites, ses lois, sa bible, sa manière de faire, mais ce n’est plus ce que l’Eglise a enseigné depuis des siècles. Cette Eglise nouvelle nous l’appelons conciliaire, ou plutôt c’est elle-même qui se fait appeler ainsi. Toutefois il est presque impossible de la distinguer de la vraie. C’est un peu comme un cancer généralisé. Le cancer dans une personne ne s’identifie pas à cette personne, ce n’est pas sa vraie nature, c’est une maladie, mais qui est bien là en elle. Lorsque le cancer se réduit à une tumeur on peut le circonvenir pour l’exclure ; mais lorsque les métastases sont répandues dans le corps entier le médecin arrête, car il constate que le cancer est partout. Il n’ose plus prendre son bistouri pour extirper le corps étranger qui se trouve dans cette personne.
Pascendi de saint Pie
X et Humani Generis de Pie XII
C’est une image qui tente d’exprimer tant bien que mal un mystère, le grand mystère où l’on voit, dans l’Eglise, ce corps étranger qui propage autre chose que la foi catholique, qui veut être l’ami de toutes les religions, qui prétend qu’on peut se sauver dans toutes les religions, que le Saint-Esprit utilise comme moyen de salut toutes les religions. Tout cela est faux, cela n’a jamais été l’enseignement de l’Eglise ! Nous avons aujourd’hui une Eglise qui promeut ce qui a été condamné il y a moins de 50 ans. Et nous voyons que cela s’est produit au cours du concile Vatican II. Un concile qui n’a pas tellement inventé lui-même des nouveautés, mais qui a consacré et qui a légalisé ce qui était condamné comme erreur 10 ans auparavant. A ce propos, je vous conseille beaucoup de relire l’encyclique de Pie XII Humani Generis sur les erreurs modernes. C’est la dernière grande condamnation des erreurs dans l’Eglise. Elle ressemble un peu à Pascendi de saint Pie X qui condamnait le modernisme, mais saint Pie X avait réussi à l’époque à neutraliser l’ennemi. Il disait bien que cet ennemi était à l’intérieur. Déjà au début du XXe siècle, il dénonçait l’ennemi de l’Eglise comme travaillant à l’intérieur de l’Eglise. Eh bien ! ce travail de sape a continué, et nous sommes aujourd’hui dans cette situation très difficile où, d’un côté, nous sommes obligés par nécessité, pour être sauvés, de maintenir notre foi dans l’Eglise – Eglise qui ne peut pas rester une abstraction, car elle est une réalité concrète, visible, c’est l’Eglise catholique -, et en même temps que nous confessons notre foi dans l’Eglise, dans tout ce qu’elle est et a été, nous devons nous détacher, nous séparer, nous opposer à un corps étranger, un corps nouveau qui se veut lui-même nouveau, qui s’est propagé pendant 40 ans, et qui porte des fruits de mort.
Cette révolution dans l’Eglise a causé plus de dommages à l’Eglise que les guerres, les persécutions. Bien plus de morts spirituelles, plus d’abandons, plus de pertes pour l’Eglise - dans les congrégations religieuses ou chez les prêtres - ont été causés par cette révolution interne que par les guerres, les persécutions… Même la persécution communiste n’a pas réussi à faire autant de morts spirituelles que cette crise inaugurée par Vatican II. Aussi nous nous battons, nous nous défendons contre ce poison qui n’est pas l’esprit de l’Eglise catholique. Le malheur est que, jusque dans les plus hautes sphères du gouvernement de l’Eglise, on trouve les propagateurs de l’erreur. Mais ils ne répandent pas ces nouveautés de manière uniforme et constante.
Paul VI parle des «
fumées de Satan » dans l’Eglise
Ainsi Paul VI, qui juste après Jean XXIII a mis en place cette nouvelle religion, est capable de dire qu’il y a dans l’Eglise des forces, des idées qui ne sont pas l’Eglise. Il va même affirmer que par une fissure les fumées de Satan sont entrées dans l’Eglise. Une telle parole nous glace. Il dira à Jean Guitton qu’il se peut que cette pensée étrangère à l’Eglise triomphe. C’est bien lui qui l’a dit, mais en ajoutant que ce ne sera jamais l’Eglise, car il y aura toujours une part, aussi infinitésimale soit-elle, qui restera. C’est Paul VI qui parle, celui qui fait la nouvelle messe et qui y tient, celui qui lance l’œcuménisme ! Quel mélange !
Il y a également ce fait dont on ne parle pas beaucoup : lorsque le même Paul VI a publié la nouvelle messe, le cardinal Journet est allé le voir parce que la définition qui se trouvait dans l’introduction de cette nouvelle messe était franchement hérétique. Le cardinal Journet est donc allé voir le pape, et Paul VI a pleuré devant lui en disant qu’il avait signé sans lire. Voilà comment est passée la nouvelle messe avec un pape qui faisait confiance à son collaborateur, Bugnigni, sans même lire les textes qu’il lui présentait ! Bien sûr, on a corrigé cette définition, mais on n’a pas corrigé la messe. C’est un exemple des irrégularités qui se sont multipliées et qui ont démoli l’Eglise. Prenez la communion dans la main ! Le texte qui introduit cette pratique dans l’Eglise est en fait une condamnation. Ce document dit que cela n’est pas permis, mais que dans quelques régions l’usage s’en est introduit et que là on peut continuer. Et c’est ainsi que la communion dans la main a été répandue dans le monde entier. Au niveau de la pénitence, il y a un texte qui dit que la pénitence est une très bonne chose , qu’il faut faire pénitence - c’est le texte qui traite des indulgences -, mais on finit au terme de sa lecture par ne plus savoir ce que c’est que faire pénitence. Et ainsi de suite, on pourrait prendre les documents les uns après les autres. C’est une confusion invraisemblable !
Jean-Paul II dénonce
une « apostasie silencieuse »
Le pape suivant Jean-Paul II, celui qui a fait Assise, se lamentait au début de son pontificat sur le fait que l’erreur, l’hérésie soit répandue à pleines mains dans l’Eglise, que le chrétien d’aujourd’hui soit tenté par l’agnosticisme. Ce pape à la fin de sa vie déplorera une « apostasie silencieuse ». S’il a pu ainsi se lamenter, c’est qu’il avait encore un regard catholique, et pourtant c’est lui qui a causé le désastre sans nom d’Assise.
Voyez, mes bien chers frères, je vous donne ces éléments
pour vous montrer combien cette situation est difficile, combien il nous faut
approcher de cette réalité avec beaucoup de prudence, en se rappelant toujours
que nous touchons là à un mystère. Le mystère est une vérité qui nous dépasse,
c’est une réalité que nous pouvons constater, mais dont nous n’avons pas la
clef explicative. Ce mystère que nous constatons ressemble au mystère de
Il y a des époques où l’on voit plus clairement cette
passion, dans les persécutions par exemple. Celle que nous vivons aujourd’hui
est beaucoup plus difficile à percevoir parce que c’est une persécution non
physique mais spirituelle, et parce que le bras qui persécute n’est pas à
l’extérieur mais à l’intérieur de l’Eglise. Cela devient presque intenable. Le
Bon Dieu nous oblige à une épreuve de la foi terrible. Il exige de nous une foi
héroïque, et dans des temps pareils, mes bien chers frères, il faut se tourner
vers
A propos de
l’ultimatum du cardinal Castrillon Hoyos
Je voudrais profiter de ces instants pour vous donner des
nouvelles sur ce qui se passe maintenant à Rome par rapport à
On nous remet une note écrite, et le cardinal me demande de la lire devant tout le monde. Dans cette lettre qui ressemble vraiment à un ultimatum, il est dit en substance : « Jusqu’ici j’ai affirmé que vous n’étiez pas schismatiques, mais désormais je ne pourrai plus le dire. Aujourd’hui il faut que vous acceptiez les conditions claires que nous allons vous imposer ». Après avoir lu, j’ai demandé au cardinal quelles étaient ces conditions claires, parce qu’elles n’étaient pas écrites. Et le cardinal ne m’a absolument rien répondu. J’ai reposé la question en lui demandant : « Qu’est-ce que vous attendez de moi ? » ; à ce moment-là, presque à voix basse, il a répondu : « Si vous pensez en conscience que vous devez dire cela à vos fidèles, faites-le ! Mais vous devez respecter la personne du pape ». Ce sur quoi je lui ai répondu que je n’avais pas de problème. Et c’est ainsi que cette réunion s’est terminée. - Comment puis-je affirmer que le motif de cette réunion était vraiment la dernière Lettre aux amis et bienfaiteurs ? C’est ce que je lui ai demandé, puisqu’il y faisait référence : « Pouvez-vous me dire ce qui ne va pas dans cette lettre ? » ; il l’a alors relue devant moi, et le seul reproche qu’il a pu formuler était le fait que j’écrive que les couvents étaient vides, ainsi que les séminaires. Il m’a dit : « Cela n’est pas vrai ». C’était le seul reproche.
Alors en quoi consiste l’ultimatum, quel est son objet ? A la sortie de cette entrevue, je disais à M. l’abbé Nély que j’étais très frustré parce que j’avais assisté à une mise en scène théâtrale, emplie d’émotion, où le cardinal déclarait : « C’est fini ! Je convoque une conférence de presse. J’arrête tout ! ». Mais ce qu’on attendait vraiment de moi, je l’ignorais. Si bien que j’ai renvoyé M. l’abbé Nély le lendemain pour qu’il pose la question encore une fois : « Qu’est-ce que vous voulez ? » ; alors on l’a fait attendre une demi-heure, le temps de rédiger les fameux cinq points qui ont été diffusés sur Internet.
Cinq points dont le premier dit ceci : « Il faut que Mgr Fellay s’engage à donner une réponse proportionnée à la générosité du pape ». Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? C’est une parole extrêmement floue qui peut dire tout et rien. On est obligé de supposer que cette générosité du pape était le Motu Proprio. Et la réponse proportionnée était de l’en remercier, tout en reconnaissant qu’il n’était pas pour nous, puisqu’il était pour tous les prêtres de l’Eglise. Sinon on ne voit pas bien.
Ensuite je devais m’engager, dans cette lettre, à respecter la personne du pape. Je suppose que cela veut dire qu’on ne doit pas l’injurier, mais si on considère comme une injure de dire qu’il est parfaitement libéral, juste après un voyage aux Etats-Unis où il n’a fait que louer l’Etat américain en déclarant que la liberté de toutes les religions était magnifique. Vraiment on ne peut pas trouver de déclaration plus libérale que celle-là. Je ne vois pas ce qu’il y a d’injurieux dans mes paroles.
Le troisième point est plus sensible, parce qu’on me demande
de ne pas m’ériger « en magistère au-dessus du pape et de ne pas poser
Nous considérons
comme essentielle cette confrontation théologique
On dit que j’ai refusé une proposition de Rome, mais il n’y
avait pas de proposition de Rome. (1) Il y avait simplement un cardinal
impatient de ce que les choses, disait-il, « traînent ». Or nous avions depuis
l’an 2000 dit aux autorités romaines que nous ne leur faisions pas confiance et
que si elles voulaient un dialogue il fallait commencer par donner des signes
qui puissent nous faire retrouver quelque confiance. Ces signes étaient au nombre
de deux : la liberté de la messe traditionnelle et le retrait du décret
d’excommunication des évêques. Après sept ans, on peut dire qu’un des points
est réalisé. Reste le deuxième. Après cela nous sommes disposés à discuter,
avions-nous dit. Et nous le disons encore car c’est très important, nous
considérons vraiment comme essentielle cette confrontation théologique qui doit
permettre de voir si ce qui a été dit au concile et après le concile, est
fidèle à
NB : 1 Mgr Fellay oublierait-il les
propos qu’il tenait le 13 janvier 2006, à l’Association des journalistes de l’Information Religieuse
(l’AJIR) ! Il laissait clairement entendre que
les autorités romaines, responsables du
dossier, en particulier le Cardinal Castrillon Hoyos, étaient presque prêtes à « régulariser » la situation canonique de la ,FSSPX dans le sein de l’Église, en lui « accordant » un « statut d’autonomie » – mesurez l’importance de la chose – et qu’à cet effet, elles
envisageraient très sérieusement la création d’ « une Administration Apostolique personnelle comme celle créée en
2001-2002, à Campos (Brésil)». Le journal
nous ne voulons pas être des Catholiques à part: l’ancienne Messe,
nous ne la demandons pas pour nous, mais pour tous. Mais peut-être faudra-t-il
passer par cette étape transitoire ».
Nous avons 20 siècles d’enseignement de la doctrine de l’Eglise. Ce sont ces choses-là qui jugent le pape. Ce n’est pas nous. Le pape est infaillible quand il correspond aux conditions qui lui sont données. Et puisqu’il le sait, qu’il fasse usage de son infaillibilité ! Et il dira la foi, comme ses prédécesseurs. Maintenant si, comme au concile Vatican II, on ne veut pas faire usage de cette infaillibilité, il arrivera ce qui est arrivé.
Nous ne voulons pas
construire sur du sable
Mais de notre côté, que l’on comprenne bien, nous n’avons
absolument rien refusé de la part de Rome. Encore maintenant nous continuons à
dire qu’on ne peut pas régler la situation canonique de
la peine. De même, si on vous dit qu’on vous donne une Rolls Royce, mais qu’elle ne peut que rester au garage, pourquoi vous la donne-t-on ? Ou si on vous dit qu’on vous donne un bateau, mais qu’il doit rester en cale sèche.
C’est ce qui nous arrive. Rome, en voulant passer un accord canonique ou, pour reprendre cette image, en nous proposant une voiture, un bateau, une maison, ne veut surtout pas qu’on discute de la pierre sur laquelle doit être bâtie la maison. Pour les autorités romaines, il va de soi que l’ambiance dans laquelle circulerait cette voiture ou naviguerait ce bateau, c’est l’ambiance doctrinale de Vatican II. Pour elles, il est absolument évident qu’il n’y a pas de remise en cause des nouveautés de Vatican II, et c’est précisément là le point crucial, le point sur lequel nous voulons amener Rome. Et tant que Rome ne veut pas faire cela, nous ne pouvons pas aller de l’avant. Nous sommes obligés de passer par là, parce que sinon c’est construire sur du sable. Et nous ne voulons pas construire sur du sable. C’est au nom de la foi, de l’enseignement de l’Eglise, de la pratique de l’Eglise que nous disons cela.
De Rome nous
attendons la foi
On nous déclare : « Vous savez, aujourd’hui le pape vous veut du bien, mais qui viendra après lui ? On n’en sait rien ! Donc c’est maintenant le moment ou jamais où vous devez accepter ». J’ai répondu au cardinal qui me tenait ce discours : « Eminence, je crois au Saint Esprit. Si le Saint Esprit est capable d’éclairer ce pape, il pourra aussi éclairer le suivant ». Et si lui nous veut du bien, peut-être que le prochain pape nous voudra encore plus de bien. Encore une fois, on ne peut pas discuter sur la foi, on n’a pas le droit de trafiquer la foi. Quand on voit d’une manière si claire ce qui se passe dans l’Eglise - c’est le Bon Dieu qui nous donne cette grâce -, il n’y a pas de place pour une négociation. D’ailleurs je n’aime pas ce terme, il est faux. Nous ne sommes pas en négociation avec Rome. De Rome, nous attendons la foi. C’est la première chose qui s’est produite à notre baptême, cela a été la première question : « Que demandez-vous à l’Eglise ? – La foi ». « Que vous procure la foi ? – La vie éternelle ». C’est là le contrat passé au baptême. Nous demandons à l’Eglise la foi, nous savons qu’il n’y a que l’Eglise qui peut nous la donner. Eh bien ! nous maintenons cette demande première du baptême. Nous ne faisons rien d’autre. On pourrait résumer tout notre combat à cela, car nous savons que l’Eglise est la seule entité établie par Dieu qui puisse sauver - on ne peut pas être sauvé en dehors de l’Eglise : Hors de l’Eglise pas de salut –, et nous savons que ce salut vient par la foi et par la grâce. C’est ce que nous demandons à Rome, rien de plus rien de moins. Cela prendra le temps qu’il faut.
Serons-nous encore vivants lorsque les choses se seront
enfin améliorées ou pas ? Bien sûr que nous l’espérons, mais nous n’en savons
rien. Il est vrai qu’humainement parlant, on voit un certain nombre d’éléments
qui montrent que l’on va vers un mieux. Au niveau des principes, il y a un
réveil, il y a une attente surtout dans les jeunes générations, chez celles qui
n’ont rien reçu, une attente qui se tourne vers
« Les fruits sont
bons, donc il y a le Saint Esprit ! »
Il faut donc continuer, le temps qu’il faudra ! Est-ce que
cette affaire du début de l’été va vraiment finir en déclaration de schisme,
comme certains de nos ennemis le voudraient ? J’en doute, mais je n’en sais
rien. Et puis qu’est-ce que cela changerait ? De toute façon, les évêques nous
traitent en schismatiques, comme les pires êtres qui puissent exister sur
terre. Dans leurs églises ils reçoivent tout le monde, ils font des cérémonies
de prières avec tout le monde, mais avec nous c’est comme si nous étions la
peste. Il faut voir cela ! En même temps qu’ils disent à Rome que nous ne
sommes pas schismatiques, on nous traite comme les fléaux de l’humanité. Cela
durera le temps que cela durera, mes bien chers frères. Nous avons chaque jour
la consolation de la grâce, nous voyons bien le Bon Dieu à l’œuvre dans nos
âmes, dans les âmes de nos enfants. Nous voyons bien que ce sont des fruits de
la grâce, et Rome aussi le reconnaît. Ce même cardinal Castrillon parlant de
Nous recourrons donc à
Pour conserver à ce sermon son caractère propre, le style oral a été maintenu. Seuls les intertitres et les références scripturaires ont été ajoutés.