ITEM

42, Avenue de la Marne.  03200 Vichy.  Tel. 04 70 97 95 02

Port. 06 80 71 71 01 ; e-mail : abbe_aulagnier@hotmail.com. Site : http://item.snoozland.com

 

Un regard sur le monde  politique et religieux

Au 31 août 2006

 

N° 100

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

Jean Madiran, dans Présent de mardi, mercredi et jeudi de cette semaine du 28 août fait quelques  considérations sur de récentes déclarations de nos évêques sur le catéchisme. Ils se sont exprimés en effet  sur ce sujet dans la Croix et le Figaro.

Jean Madiran rappelle heureusement

-         que le catéchisme est  un enseignement sérieux qui repose sur la Révélation,

-         que la foi se transmet par la famille,

-         que cette transmission n’est nullement un « automatisme » mais repose sur le propre témoignage et le courage  des parents,

-         que la pratique dominicale a pour fondement rien moins qu’un commandement divin...

 

Dans son deuxième papier, Jean Madiran attire l’attention sur le thème de la transmission de la foi dans la famille. C’était le thème du Pape Benoît XVI développé à Valences, dans son homélie  de la messe. C’est l’idée que j’ai reprise dans l’homélie que la Providence m’a permis de prononcer cette semaine devant des familles amis  et que vous pouvez lire dans la « Paroisse saint Michel » de cette semaine

 

 

 

A-  Le KT( catéchisme) entre le violon, le foot, les jeux vidéo

 

C’est la saison : la « campagne pour le KT » (c’est-à-dire pour le catéchisme) est ouverte en Ile-de-France. L’autre quotidien catholique parisien nous l’avait annoncé vendredi dernier : « Dès lundi, un nouveau visuel, jouant sur le goût du merveilleux, s’affichera dans les huit diocèses partenaires. »

 

 

 

A Paris, notre archevêque est mieux inspiré sur d’autres sujets. Sur le KT, c’est un désastre. Il déclare au Figaro : « Aujourd’hui, entre le violon, le foot, les jeux vidéo, il n’est pas évident de caser le caté. » …Parce que là n’est pas sa place. Pas plus aujourd’hui qu’avant-hier.

 

La place du catéchisme n’est point parmi les jeux, mais (au moins) au niveau des leçons sérieuses, comme l’arithmétique ou la géographie. Il y a un demi-siècle, c’était déjà cette chute-là du catéchisme que critiquait Mgr Lusseau, cette tendance à organiser le catéchisme comme un « divertissement agréable », comme un « joyeux passe-temps » : « A l’âge où les catéchisés sont initiés à la vie chrétienne, protestait en 1957 Mgr Lusseau, les enfants entendent aussi des leçons de grammaire, d’histoire, de sciences (…). Quelle mine prendront les cours de catéchisme orientés selon la méthode nouvelle ! Assez vite l’enfant pourrait bien conclure que la classe où l’on enseigne les

matières profanes est chose sérieuse, tandis que le cours de religion est un joyeux passe-temps. (…) L’on ne se passionne pas pour un enseignement qui ne se dispense que sous forme d’un divertissement agréable. »

 

Avant-hier donc, en 1957, c’était déjà la «méthode nouvelle » du chanoine Collomb et de son catéchisme progressif. Et c’est encore la « méthode nouvelle » d’aujourd’hui.

Une nouveauté qui en cinquante ans devrait commencer à s’user.

 

Pie XII avait arrêté net les vagabondages du catéchisme progressif. L’épiscopat baissa la tête jusqu’à sa mort en 1958, et même jusqu’en 1968. Puis il revint ouvertement à sa « méthode nouvelle » de joyeux passe-temps. L’abbé Berto

fit entendre la même protestation que Mgr Lusseau onze ans plus tôt : « Le résultat infaillible, écrivait- il, sera que les enfants auront de plus en plus d’estime pour les sciences dites profanes, de plus en plus de mépris pour la religion catholique, ou ce qu’on leur aura persuadé être la religion catholique. » Et il concluait : « Nous sommes en présence d’une “religion” qui n’est pas celle de Jésus- Christ. »

 

Selon La Croix, le « responsable de la communication pour le diocèse de Saint-Denis » nous déclare : « La nouvelle campagne s’appuie sur la curiosité très naturelle  des enfants, leur soif de spiritualité et l’attrait pour les mondes merveilleux et magiques, comme le montrent les succès de Harry Potter et de Narnia. »

 

Eh bien non, justement pas, le catéchisme n’est pas plus en concurrence avec Narnia et Harry Potter qu’il ne l’est avec le violon, le foot et les jeux vidéo. Il ne s’adresse pas aux aptitudes naturelles des enfants, que ce soit leur goût des jeux, leur attrait pour les contes de fées ou même leur soif de spiritualité. Il s’adresse à une capacité reçue par le baptême, leur capacité surnaturelle de recevoir la parole de Dieu : la recevoir sérieusement, la recevoir pieusement, la recevoir saintement. On voit venir au catéchisme un nombre croissant d’enfants qui ne sont pas baptisés ?

Cela demande en effet une attention particulière et une pédagogie adaptée. Mais cela ne doit en aucune manière priver les enfants baptisés de leur capacité et de leur droit de recevoir dans son intégralité substantielle la parole de Dieu. A demain.

JEAN MADIRAN

 

 

B- Le KT entre le violon, le foot, les jeux vidéo (II)

 

L’automatisme de la transmission

Si l’on se demande comment il peut se faire que le noyau dirigeant de l’épiscopat français, pour le catéchisme comme pour tout le reste, demeure immuablement figé depuis un demi-siècle dans les mêmes impasses, malgré la succession des générations, rappelons pour mémoire la réponse : c’est qu’il se recrute 1) par cooptation, 2) sous la surveillance (et le droit de veto) de gouvernements laïcistes.

 

 

Selon les chiffres donnés par l’archevêque de Paris au Figaro de vendredi dernier, 70 % des Français « se disent catholiques », mais seulement 5 % d’entre eux sont « réellement pratiquants ». En somme, les catholiques réellement

pratiquants seraient en France environ 2 millions. On comprend que les évêques aient le souci, car ils en ont la responsabilité surnaturelle, des quarante millions de Français qui se disent catholiques mais ne pratiquent pas. C’est sans doute pourquoi la catéchèse épiscopale est orientée vers les adultes non pratiquants et s’efforce de parler leur langage : il y a là un autre problème, qui aujourd’hui n’est pas de notre propos. Nous parlons du petit catéchisme, celui des enfants baptisés et pratiquants, celui qui est absent (voire interdit) dans la plupart des diocèses.

 

L’archevêque de Paris déclare à La Croix du 25 août, au sujet du « caté » : « L’automatisme de la transmission en famille ne joue plus. »

Au mieux, c’est une lourde maladresse.

Au pire, une incroyable méchanceté : assimiler la transmission en famille à un automatisme !

 

Maladresse ou méchanceté non pas seulement à l’égard des générations catholiques d’autrefois ou de naguère, mais à l’égard des familles chrétiennes d’aujourd’hui. Car la transmission en famille, si elle s’est réduite en nombre, n’a pas disparu. Et rien ne s’y fait tout seul, par automatisme : mais au prix, le plus souvent, de sacrifices quotidiens, de prudence attentive et d’amour. Les familles chrétiennes qui veulent transmettre la tradition catholique ont assez de tracas, d’embarras et de soucis par la faute des carences catéchétiques de l’enseignement diocésain pour qu’on n’aille pas raconter qu’elles s’en remettent à des automatismes. L’archevêque de Paris ne devrait pas manifester à leur endroit une ignorance tellement invraisemblable qu’elle ressemble à du mépris.

 

Professer que la transmission en famille « ne joue plus » est insupportablement méprisant pour les familles où elle joue encore. Il s’agit, numériquement, d’une petite minorité. Mais c’est en elle que se « joue » l’avenir, parce que c’est en

elle que germent le mieux, et d’abord le plus normalement, les vocations sacerdotales ou religieuses, les persévérances fidèles, les laïcs responsables et militants. Cela dépend initialement du petit catéchisme que l’enseignement diocésain ne donne plus, mais que les familles savent retrouver auprès d’un prieuré, d’une fraternité sacerdotale, d’un institut, d’un monastère, et parfois même, par exception,

dans une paroisse.

 

Pour l’archevêque de Paris, « dans un contexte » où il y a si peu de pratiquants parmi ceux qui se disent catholiques, « il s’agit moins de consolider ou de transmettre que d’initier à la foi ». On peut craindre que prétendre initier sans transmettre ni consolider soit parler pour ne rien dire.

_

Ce n’est pas le concile de Trente qui a inventé les quatre piliers, les quatre points principaux de tout catéchisme catholique, qu’il soit pour des enfants ou pour des adultes. La préface du catéchisme du concile de Trente dit bien qu’il

s’agit là de ce que « nos Pères » ont toujours fait : « C’est avec une profonde sagesse que nos Pères ont ramené toute

la doctrine et toute la science du salut à quatre points principaux (…). Nous croyons devoir avertir les Pasteurs que chaque fois qu’ils auront à mettre en lumière un passage de l’Evangile ou de toute autre partie de l’Ecriture sainte, ils

pourront toujours le ramener à l’un de ces quatre points et y prendre comme à sa source l’explication désirée. »

 

Répétons-le sans nous lasser, les quatre points principaux sont : les trois connaissances nécessaires au salut, et l’explication des sacrements sans lesquels la connaissance demeure inefficace.

JEAN MADIRAN

 

 

C Le KT entre le violon, le foot, les jeux vidéo (III)

 

Un exocet épiscopal contre le catéchisme

 

Le discours de l’archevêque-évêque diffusé par le journal La Croix est une sorte d’exocet susceptible de faire exploser toute possibilité diocésaine d’un catéchisme

catholique.

Il ne s’agit d’ailleurs point d’une malfaisance isolée. Ce discours est conforme à la pensée, aux propos, aux silences de la plupart des évêques français, et en tout cas

de la « nouvelle gouvernance de l’Eglise de France ».

 

La question posée : « Un quart des catholiques se disent pratiquants mais seulement 7 % viennent chaque dimanche à la messe… »

 

La réponse archiépiscopale : « Il faut bien comprendre que la pratique religieuse n’est que l’une des expressions de la foi !… Pour certains, pratiquer ce sera aller en pèlerinage une fois dans l’année, faire baptiser leur enfant ou célébrer religieusement leur mariage… Il ne faut donc pas avoir une conception trop étroite de la pratique. »

 

 L’exocet épiscopal carbonise la cible : la « conception » qui est éliminée comme « trop étroite » est celle du troisième commandement du Décalogue. Et si le troisième commandement peut être bousillé au gré d’un arbitraire épiscopal, il n’y a pas de raison que les autres commandements soient épiscopalement mieux défendus. Quand La Croix diffuse dans toute la France, et sans contradiction depuis quinze jours, un tel message hiérarchique, comment enseigner le catéchisme catholique dans les diocèses ? Il faut d’abord être réfractaire aux opinions absurdes et suicidaires qui y sont archiépiscopalement dominantes.

 

Souviens-toi du jour de repos pour le sanctifier. Six jours tu travailleras et feras tout ton travail ; mais le septième jour est le jour de repos de Jéhovah ton Dieu. Tu ne feras aucun travail, toi, ni ton fils ni ta fille, ni ton serviteur ni ta servante, ni ton bétail ni ton hôte…» (Ex 20, 8-10)

 

En méprisant ce commandement, le discours archiépiscopal viole à la fois la loi naturelle, la loi divine et la loi ecclésiastique. La loi naturelle, qui veut que l’homme passe un certain temps à rendre hommage à son Créateur ; la loi divine, qui pose le principe d’un jour entier de repos pour le sanctifier ; la loi ecclésiastique qui précise

: c’est le dimanche, et c’est l’assistance à la messe.

En outre, ce troisième commandement a un caractère social. Par les derniers mots cités, il « ne commande pas seulement à l’individu mais à la famille et, par une conséquence nécessaire, à la société tout entière » (Père Emmanuel).

 

L’exocet archiépiscopal est une fusée à plusieurs étages. Comme si son auteur avait craint que la première explosion n’ait pas tout à fait anéanti le catéchisme, il l’achève par un second coup plus largement dévastateur. La Croix nous dit, et apparemment elle en exulte, que l’archevêque-évêque « invite l’Eglise à être davantage à l’écoute des attentes des jeunes ».

Telle est en effet la préoccupation dominante dans la plupart des diocèses.

C’est là une inversion encore plus grave que l’inversion sexuelle. L’urgent en effet serait au contraire d’inviter les  l’Eglise ; davantage à l’écoute de la parole de Dieu transmise par l’Eglise ; par la foi de l’Eglise ; par la tradition de l’Eglise ; par les sacrements de l’Eglise ; mais non point par le discours trop souvent aberrant d’un clergé dont la majeure partie a été intellectuellement détraquée.

 

Le catéchisme catholique est foncièrement hétérogène à cette catéchèse de marketing qui veut passionnément « correspondre aux attentes d’aujourd’hui » et qui dans cet esprit cherche sa réussite (ses « succès » !) dans une augmentation publicitaire du nombre des « inscrits au catéchisme ». Dans un tel esprit, ce sont des inscriptions à

rien du tout.

JEAN MADIRAN