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Un
regard sur le monde politique et religieux
Au 31 août 2006
N° 100
Par Monsieur
l’abbé Paul Aulagnier
Jean Madiran, dans Présent
de mardi, mercredi et jeudi de cette semaine du 28 août fait quelques considérations sur de récentes déclarations
de nos évêques sur le catéchisme. Ils se sont exprimés en effet sur ce sujet dans
Jean Madiran rappelle
heureusement
-
que le catéchisme
est un enseignement sérieux qui repose
sur
-
que la foi se
transmet par la famille,
-
que cette
transmission n’est nullement un « automatisme » mais repose sur le
propre témoignage et le courage des
parents,
-
que la
pratique dominicale a pour fondement rien moins qu’un commandement divin...
Dans son deuxième papier,
Jean Madiran attire l’attention sur le thème de la transmission de la foi dans
la famille. C’était le thème du Pape Benoît XVI développé à Valences, dans son
homélie de la messe. C’est l’idée que
j’ai reprise dans l’homélie que
A- Le KT( catéchisme) entre le violon, le foot,
les jeux vidéo
C’est la saison : la « campagne pour le KT »
(c’est-à-dire pour le catéchisme) est ouverte en Ile-de-France. L’autre
quotidien catholique parisien nous l’avait annoncé vendredi dernier : « Dès
lundi, un nouveau visuel, jouant sur le goût du merveilleux, s’affichera
dans les huit diocèses partenaires. »
A Paris,
notre archevêque est mieux inspiré sur d’autres sujets. Sur le KT, c’est un
désastre. Il déclare au Figaro : « Aujourd’hui, entre le violon, le
foot, les jeux vidéo, il n’est pas évident de caser le caté. » …Parce que
là n’est pas sa place. Pas plus aujourd’hui qu’avant-hier.
La place du
catéchisme n’est point parmi les jeux, mais (au moins) au niveau des leçons
sérieuses, comme l’arithmétique ou la géographie. Il y a un demi-siècle,
c’était déjà cette chute-là du catéchisme que critiquait Mgr Lusseau, cette
tendance à organiser le catéchisme comme un « divertissement agréable », comme
un « joyeux passe-temps » : « A l’âge où les catéchisés sont initiés
à la vie chrétienne, protestait en 1957 Mgr Lusseau, les enfants entendent
aussi des leçons de grammaire, d’histoire, de sciences (…).
Quelle mine prendront les cours de catéchisme orientés selon la
méthode nouvelle ! Assez vite l’enfant pourrait bien conclure que
la classe où l’on enseigne les
matières
profanes est chose sérieuse, tandis que le cours de religion est un joyeux
passe-temps. (…) L’on ne se passionne pas pour un enseignement qui ne se
dispense que sous forme d’un divertissement agréable. »
Avant-hier
donc, en 1957, c’était déjà la «méthode nouvelle » du chanoine Collomb et de
son catéchisme progressif. Et c’est encore la « méthode nouvelle
» d’aujourd’hui.
Une nouveauté
qui en cinquante ans devrait commencer à s’user.
Pie XII
avait arrêté net les vagabondages du catéchisme progressif. L’épiscopat
baissa la tête jusqu’à sa mort en 1958, et même jusqu’en 1968. Puis il revint
ouvertement à sa « méthode nouvelle » de joyeux passe-temps. L’abbé Berto
fit entendre
la même protestation que Mgr Lusseau onze ans plus tôt : « Le résultat
infaillible, écrivait- il, sera que les enfants auront de plus en
plus d’estime pour les sciences dites profanes, de plus en plus
de mépris pour la religion catholique, ou ce qu’on leur aura persuadé
être la religion catholique. » Et il concluait : « Nous sommes
en présence d’une “religion” qui n’est pas celle de Jésus- Christ.
»
Selon
Eh bien non,
justement pas, le catéchisme n’est pas plus en concurrence avec Narnia et Harry
Potter qu’il ne l’est avec le violon, le foot et les jeux vidéo. Il ne
s’adresse pas aux aptitudes naturelles des enfants, que ce soit leur goût des
jeux, leur attrait pour les contes de fées ou même leur soif de spiritualité.
Il s’adresse à une capacité reçue par le baptême, leur capacité surnaturelle de
recevoir la parole de Dieu : la recevoir sérieusement, la recevoir pieusement, la
recevoir saintement. On voit venir au catéchisme un nombre croissant d’enfants
qui ne sont pas baptisés ?
Cela demande
en effet une attention particulière et une pédagogie adaptée. Mais cela ne doit
en aucune manière priver les enfants baptisés de leur capacité et de leur droit
de recevoir dans son intégralité substantielle la parole de Dieu. A demain.
JEAN MADIRAN
B- Le KT entre le violon, le foot, les jeux vidéo (II)
L’automatisme de la transmission
Si l’on se demande comment il peut se faire que le
noyau dirigeant de l’épiscopat français, pour le catéchisme comme pour tout le
reste, demeure immuablement figé depuis un demi-siècle dans les mêmes impasses,
malgré la succession des générations, rappelons pour mémoire la réponse : c’est
qu’il se recrute 1) par cooptation, 2) sous la surveillance (et le droit de
veto) de gouvernements laïcistes.
Selon les
chiffres donnés par l’archevêque de Paris au Figaro de vendredi dernier,
70 % des Français « se disent catholiques », mais seulement 5 % d’entre eux
sont « réellement pratiquants ». En somme, les catholiques réellement
pratiquants
seraient en France environ 2 millions. On comprend que les évêques aient le
souci, car ils en ont la responsabilité surnaturelle, des quarante millions de
Français qui se disent catholiques mais ne pratiquent pas. C’est sans doute
pourquoi la catéchèse épiscopale est orientée vers les adultes non pratiquants
et s’efforce de parler leur langage : il y a là un autre problème, qui
aujourd’hui n’est pas de notre propos. Nous parlons du petit catéchisme, celui des
enfants baptisés et pratiquants, celui qui est absent (voire interdit) dans la
plupart des diocèses.
L’archevêque
de Paris déclare à
Au mieux, c’est
une lourde maladresse.
Au pire, une
incroyable méchanceté : assimiler la transmission en famille à un automatisme !
Maladresse
ou méchanceté non pas seulement à l’égard des générations catholiques
d’autrefois ou de naguère, mais à l’égard des familles chrétiennes
d’aujourd’hui. Car la transmission en famille, si elle s’est réduite en nombre,
n’a pas disparu. Et rien ne s’y fait tout seul, par automatisme : mais au prix,
le plus souvent, de sacrifices quotidiens, de prudence attentive et d’amour.
Les familles chrétiennes qui veulent transmettre la tradition catholique ont
assez de tracas, d’embarras et de soucis par la faute des carences
catéchétiques de l’enseignement diocésain pour qu’on n’aille pas raconter
qu’elles s’en remettent à des automatismes. L’archevêque de Paris ne devrait
pas manifester à leur endroit une ignorance tellement invraisemblable qu’elle
ressemble à du mépris.
Professer
que la transmission en famille « ne joue plus » est insupportablement méprisant
pour les familles où elle joue encore. Il s’agit, numériquement, d’une petite
minorité. Mais c’est en elle que se « joue » l’avenir, parce que c’est en
elle que
germent le mieux, et d’abord le plus normalement, les vocations sacerdotales ou
religieuses, les persévérances fidèles, les laïcs responsables et militants.
Cela dépend initialement du petit catéchisme que l’enseignement diocésain ne
donne plus, mais que les familles savent retrouver auprès d’un prieuré, d’une
fraternité sacerdotale, d’un institut, d’un monastère, et parfois même, par
exception,
dans une
paroisse.
Pour
l’archevêque de Paris, « dans un contexte » où il y a si peu de
pratiquants parmi ceux qui se disent catholiques, « il s’agit moins de
consolider ou de transmettre que d’initier à la foi ». On peut
craindre que prétendre initier sans transmettre ni consolider soit parler pour
ne rien dire.
_
Ce n’est pas
le concile de Trente qui a inventé les quatre piliers, les quatre points
principaux de tout catéchisme catholique, qu’il soit pour des enfants ou
pour des adultes. La préface du catéchisme du concile de Trente dit bien qu’il
s’agit là de
ce que « nos Pères » ont toujours fait : « C’est avec une profonde sagesse
que nos Pères ont ramené toute
la
doctrine et toute la science du salut à quatre points principaux (…). Nous
croyons devoir avertir les Pasteurs que chaque fois qu’ils auront à mettre en
lumière un passage de l’Evangile ou de toute autre partie de l’Ecriture sainte,
ils
pourront
toujours le ramener à l’un de ces quatre points et y prendre comme à sa source
l’explication désirée. »
Répétons-le
sans nous lasser, les quatre points principaux sont : les trois connaissances
nécessaires au salut, et l’explication des sacrements sans lesquels la
connaissance demeure inefficace.
JEAN MADIRAN
C Le KT entre le violon, le foot, les jeux vidéo (III)
Un exocet épiscopal contre le catéchisme
Le discours de l’archevêque-évêque diffusé par le journal
catholique.
Il ne s’agit d’ailleurs point d’une malfaisance
isolée. Ce discours est conforme à la pensée, aux propos, aux silences de la
plupart des évêques français, et en tout cas
de la « nouvelle gouvernance de l’Eglise de France ».
La question
posée : « Un quart des catholiques se disent pratiquants mais seulement 7 %
viennent chaque dimanche à la messe… »
La réponse
archiépiscopale : « Il faut bien comprendre que la pratique religieuse n’est
que l’une des expressions de la foi !… Pour certains, pratiquer ce sera aller
en pèlerinage une fois dans l’année, faire baptiser leur enfant ou célébrer religieusement
leur mariage… Il ne faut donc pas avoir une conception trop étroite de la
pratique. »
L’exocet épiscopal carbonise la cible :
la « conception » qui est éliminée comme « trop étroite » est celle du
troisième commandement du Décalogue. Et si le troisième commandement peut être
bousillé au gré d’un arbitraire épiscopal, il n’y a pas de raison que les
autres commandements soient épiscopalement mieux défendus. Quand
Souviens-toi
du jour de repos pour le sanctifier. Six jours tu travailleras et feras tout
ton travail ; mais le septième jour est le jour de repos de Jéhovah ton Dieu.
Tu ne feras aucun travail, toi, ni ton fils ni ta fille, ni ton serviteur ni ta
servante, ni ton bétail ni ton hôte…» (Ex 20, 8-10)
En méprisant
ce commandement, le discours archiépiscopal viole à la fois la loi naturelle,
la loi divine et la loi ecclésiastique. La loi naturelle, qui veut que l’homme
passe un certain temps à rendre hommage à son Créateur ; la loi divine, qui
pose le principe d’un jour entier de repos pour le sanctifier ; la loi
ecclésiastique qui précise
: c’est le
dimanche, et c’est l’assistance à la messe.
En outre, ce
troisième commandement a un caractère social. Par les derniers mots cités, il «
ne commande pas seulement à l’individu mais à la famille et, par une
conséquence nécessaire, à la société tout entière » (Père Emmanuel).
L’exocet
archiépiscopal est une fusée à plusieurs étages. Comme si son auteur avait
craint que la première explosion n’ait pas tout à fait anéanti le catéchisme,
il l’achève par un second coup plus largement dévastateur.
Telle est en
effet la préoccupation dominante dans la plupart des diocèses.
C’est là une
inversion encore plus grave que l’inversion sexuelle. L’urgent en effet serait
au contraire d’inviter les l’Eglise ;
davantage à l’écoute de la parole de Dieu transmise par l’Eglise ; par la foi
de l’Eglise ; par la tradition de l’Eglise ; par les sacrements de l’Eglise ;
mais non point par le discours trop souvent aberrant d’un clergé dont la
majeure partie a été intellectuellement détraquée.
Le
catéchisme catholique est foncièrement hétérogène à cette catéchèse de
marketing qui veut passionnément « correspondre aux attentes d’aujourd’hui » et
qui dans cet esprit cherche sa réussite (ses « succès » !) dans une augmentation
publicitaire du nombre des « inscrits au catéchisme ». Dans un tel esprit, ce
sont des inscriptions à
rien du
tout.
JEAN MADIRAN