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 Un regard sur le monde  politique et religieux

 Au 2 février 2005

 

N°29

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

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Le cardinal Joseph Ratzinger

Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi

Doyen du Sacré Collège

et

Les valeurs  l’Europe

 

Pour aborder ce sujet : « les valeurs de l’Europe », je me permettrai aujourd’hui, de donner la parole au Cardinal Joseph Ratzinger, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi et doyen du Sacré Collège. En effet le 13 mai 2004, dans la salle Capitulaire du Cloître de la Minerve, le Cardinal s’est adressé aux Sénateurs de la République Italienne, réunis pour leur XIVe législature. Il a abordé l’important sujet des « fondements spirituels de l’Europe ». Je ne retiendrai que sa conclusion. Elle concerne les valeurs qui ont fait l’Europe occidentale. Ses valeurs furent et sont , pour lui, raison du rôle civilisateur de l’Europe. La fidélité à ces valeurs fera  l’avenir de l’Europe, dans la grandeur. Son infidélité sera son déclin et sa ruine.

 

L’analyse du Cardinal est intéressante à plus d’un titre, même si on aimerait une formulation plus énergique, des certitudes  plus fortement dites et des conclusions plus clairement tirées.

 

Nous remarquerons dans le développement de la troisième idée :  sur le respect du sacré, sa manière d’aborder le problème de la « liberté religieuse » : «  Je ne voudrais pas entrer ici dans les discussions complexes de ces dernières années… ». Le cardinal  fait ici manifestement allusion à la « liberté religieuse ». Il ne veut pas dans ce discours en parler. Il y fait seulement allusion. Il reconnaît  que c’est un sujet « complexe ». M’est avis que le cardinal, aujourd’hui, poursuit ses réflexions sur ce sujet. Deux sujets, du reste, doivent lui  trotter dans sa tête, lui, Préfet de la Congrégation de la Doctrine de la foi : celui de la liberté religieuse, celui de la réforme de la liturgie. C’est bon ! Il serait grandement temps de s’asseoir à sa table…

 

 

I – La conclusion du cardinal Joseph Ratzinger.

 

 

«  Nous nous trouvons ainsi face à la question : comment les choses doivent-elles évoluer ? Dans les violents bouleversements de notre temps, y a-t-il une identité de l’Europe qui ait un avenir et pour laquelle nous puissions nous engager entièrement ?  Je ne suis pas en mesure de rentrer dans une discussion détaillée sur la future Constitution européenne. Je voudrais seulement indiquer brièvement les éléments moraux fondamentaux qui, à mon avis, devront en faire partie.

 

A - Un premier élément est l’inconditionnalité avec laquelle la dignité humaine et les droits de l’homme doivent être présentés comme des valeurs précédant toute juridiction d’Etat. Ces droits fondamentaux ne sont pas créés par  le législateur, ni conférés aux citoyens, « mais ils existent plutôt comme droit propre, ils doivent toujours être respectés par le législateur, ils s’imposent à lui comme valeurs d’ordre supérieur ». Cette validité de la dignité humaine préalable à toute action et à toute décision politique renvoie ultime ment au Créateur. Lui seul peut déterminer des valeurs qui se fondent sur l’essence de l’homme et qui sont intangibles. L’existence de valeurs qui ne soient pas manipulables par qui que ce soit, est la véritable garantie de notre liberté et de la grandeur humaine ; la foi chrétienne voit là le mystère du Créateur et de la condition d’image de Dieu que celui-ci a conférée à l’homme.

 

Personne, ou presque, ne niera aujourd’hui la priorité de la dignité humaine et des droits humains fondamentaux sur toute décision politique ; les horreurs du nazisme et de sa théorie raciste sont encore trop récentes. Mais dans le domaine concret de ce que l’on appelle les progrès de la médecine, il existe des menaces très réelles pour ces valeurs : qu’il s’agisse du clonage, de la conservation de fœtus humains à des fins  de recherche, du don d’organes, ou qu’il s’agisse de tout ce qui a trait à la manipulation génétique, la lente consomption de la dignité humaine qui nous menace aujourd’hui ne peut être méconnue de personne. A cela s’ajoutent de façon croissante les trafics d’êtres humains, les nouvelles formes d’esclavage, les trafics d’organes humains. On se prévaut toujours de finalités bonnes, pour justifier l’injustifiable. En ce qui concerne ces domaines, il y a dans la Charte des droits fondamentaux quelques points dont on  peut se réjouir, mais sur d’autres points importants, elle reste trop vague, alors qu’il y va du sérieux du principe qui est en jeu.

 

Résumons-nous : la fixation par écrit de la valeur et de la dignité de l’homme, de la liberté, de l’égalité et de la solidarité, avec les affirmations de fond de la démocratie et de l’Etat de droit, implique une image de l’homme, une option morale et une idée du droit qui ne sont pas du tout évidentes, mais qui constituent de fait des facteurs fondamentaux pour l’identité de l’Europe. Ces facteurs fondamentaux  devraient être garantis aussi dans leurs conséquences concrètes, et certainement ils ne peuvent être défendus que par la formation sans cesse renouvelée d’une conscience morale correspondante.

 

B - Un deuxième élément dans lequel apparaît l’identité européenne est celui du mariage et de la famille. Le mariage monogamique, à la fois comme structure fondamentale de  la relation entre homme et femme et comme cellule dans la formation de la communauté nationale, a été forgé à partir de la foi biblique. Il a donné à l’Europe, occidentale comme orientale, son visage particulier et son humanité particulières, parce que la forme de fidélité et de renoncement qu’il implique restait toujours à reconquérir, avec beaucoup de peines et de souffrances. L’Europe ne serait plus l’Europe si cette cellule fondamentale de son édifice social disparaissant ou  était modifiée dans son essence. La Charte des droits fondamentaux parle de droit au mariage, mais elle ne mentionne à son sujet aucune protection juridique et morale spécifique, et elle ne le définit pas précisément. Et nous savons tous à quel point le mariage et la famille sont menacés, d’un côté par la destruction de leur indissolubilité, par des formes toujours plus faciles de divorce, de l’autre par un nouveau comportement qui se répand de plus en plus, la cohabitation entre homme et femme hors la forme juridique du mariage. En contraste tapageur avec tout cela, il y a la requête de communauté de vie des homosexuels, qui aujourd’hui exigent paradoxalement une forme d’union juridique, qui sera  plus ou moins mise sur le même plan que le mariage. Avec cette tendance, nous sortons de l’histoire morale de l’humanité, qui, malgré la diversité des formes juridiques du mariage, savait que celui-ci, par essence, est l’union particulière d’un homme et d’une femme, union ouverte à la naissance des enfants et donc à la famille. Il ne s’agit pas ici de discrimination, mais  de la question de savoir ce qu’est la personne humaine et tant qu’homme et en tant que femme, et comment la vie commune d’un homme et d’une femme peut recevoir une forme juridique. Si d’une part leur vie commune se détache toujours plus de toute forme juridique, si d’autre part l’union homosexuelle est de plus en plus considérée sur un pied d’égalité avec  le mariage, alors nous nous trouvons face à une dissolution de l’image de l’homme dont les conséquences ne peuvent être qu’extrêmement graves.

 

C - Mon dernier point est la question religieuse. Je ne voudrais pas entrer ici dans les discussions complexes de ces dernières années, mais seulement mettre en relief un aspect fondamental pour toutes les cultures : le respect de ce qui est sacré pour l’autre, et particulièrement le respect pour le sacré au sens le plus haut, pour Dieu. Ce respect, on est en droit de l’attendre même de celui qui n’est pas disposé à croire en Dieu. Lorsque ce respect est bafoué dans une société, quelque chose d’essentiel est perdu. Dans notre

 

société actuelle, grâce à Dieu, on condamne quiconque déshonore la foi d’Israël, son image de Dieu, ses grandes figures. On condamne aussi quiconque dénigre le Coran et les convictions de fond de l’islam. Mais quand il s’agit du Christ et de ce qui est sacré pour les  chrétiens, la liberté d’opinion apparaît alors comme le bien suprême, et l’on considère que la limiter reviendrait à menacer ou même à détruire la tolérance et la liberté en général. Mais la liberté d’opinion trouve sa limite en ceci qu’elle ne  peut pas détruire l’honneur et la dignité de l’autre ; elle n’est pas la liberté de mentir ou de détruire les droits de l’homme.

 

Il y a, de la part de l’Occident, une étrange haine de soi-même, que l’on ne peut considérer que  comme quelque chose de pathologique. L’Occident fait de louables  efforts pour  s’ouvrir, plein de compréhension, à des valeurs  extérieures, mais il ne s’aime plus lui-même. Il ne voit plus de son histoire que ce qui est critiquable et négatif, et il n’est plus en mesure de percevoir ce qui y est grand et pur. Si elle veut vraiment survivre, l’Europe a besoin d’une nouvelle acceptation d’elle-même  - critique et humble, certes. La multiculturalité, qui est continuellement et passionnément encouragée et favorisée, est parfois avant tout un abandon et un reniement de ce qui nous est propre, une fuite hors de nos biens patrimoniaux. Mais la multicuturalité ne peut pas subsister s’il n’y a pas des constances communes, des points d’orientation à partir de valeurs propres. Elle  ne peut certainement pas  subsister sans le respect de ce qui est sacré. Elle implique l’ouverture aux éléments sacrés de l’autre, mais nous ne pouvons avoir cette attitude que si le sacré  -  Dieu  - ne nous  est pas étranger. Bien sûr, nous pouvons et nous devons apprendre de ce qui est sacré pour les autres. Mais devant les autres et pour les autres, il est de notre devoir de nourrir en nous-mêmes le respect de ce qui est sacré, et de montrer le visage de Dieu qui nous est apparu, du Dieu qui a compassion des pauvres et des faibles, des veuves et des orphelins, de l’étranger ; du Dieu qui est tellement humain qu’il est lui-même devenu un homme, un homme souffrant, qui, parce qu’il souffre en même temps que nous, donne à la douleur dignité et espérance.

 

Si nous ne faisons pas cela, non seulement nous renions l’identité de l’Europe, mais nous manquons à un  service que les autres sont en droit d’attendre de nous. Pour les cultures du monde, le profane absolu qui s’est formé en Occident est quelque chose de profondément étranger. Elles  sont convaincues qu’un monde sans Dieu n’a pas d’avenir. C’est pourquoi la multiculturalité nous appelle  à rentrer  à nouveau en nous-mêmes.

 

Nous ne savons pas comment les choses évolueront à l’avenir en Europe. La Charte des droits fondamentaux peut être un premier pas, un signe que l’Europe cherche à nouveau son âme  de façon consciente. Il faut donner raison à Toynbee sur le fait que le destin d’une société dépend toujours de minorités créatives. Les Chrétiens croyants doivent se considérer comme une minorité créative, et contribuer à ce que l’Europe  retrouve le meilleur de son héritage, pour être ainsi au service de l’humanité toute entière ».

 

Cardinal Joseph Ratzinger.

 

 

 

 

II- Résumons et synthétisons, s’il est permis, la pensée du cardinal.

 

 

 

 

Les valeurs de l’Europe sont  tout d’abord

 

 

 

A - Le « respect de la dignité humaine et de ses droits fondamentaux ». Mais attention !  le cardinal insiste d’une manière très claire sur le fondement de ces droits. Les droits fondamentaux de la personne humaine ne sont pas ceux qui sont  fondés sur  « l’expression de la volonté générale »,  mais bien ceux qui ont pour principe  « l’ordre divin ».

 

La différence est capitale et elle est très  clairement affirmée par le cardinal. Le lisant, je pensais  à un texte majeur de Jean Madiran, son  texte de l’ annexe VI de son livre : « les droits de l’homme ». Je vais me permettre de vous en redonner le texte. C’est un sujet capital. Cette dignité et ses droits sont antérieurs à tout ordre politique, quelqu’ il soit. Ils sont fondés sur ce qu’est l’homme en lui-même, sur son essence, c’est-à-dire sur la création voulue par Dieu. Ils ne dépendent  en rien, dans leur être, d’un quelconque droit positif. Le droit positif doit les respecter et jamais les « bafouer » et jamais en « inventer » qui ne soient pas conformes à l’ordre divin.  Ainsi parler du « droit à l’avortement », à « l’euthanasie »…. est une non-sens. Répétons-le, tant le sujet est important et généralement mal posé aujourd’hui dans la confusion des esprits :  Les vrais droits humains  sont premiers et antérieurs à toute loi positive. Ils sont essentiels à la nature humaine créée par Dieu. C’est le droit  dit « naturel » qui s’impose à tout Etat. Les valeurs de l’Europe sont donc  fondées sur le respect du droit naturel.

 

 

B - Le  respect de l’institution matrimoniale voulue par Dieu : l’union d’un homme et d’une femme et le respect de la famille, source de vie. Ce bien est le fondement de toute société ordonnée et industrieuse. La famille « monogame » doit donc  être aidée, protégée, sauvée, si nécessaire, par l’Etat. Elle est vitale pour une nation. Et Dieu sait si, aujourd’hui, elle est dénigrée, combattue, méprisée. Le discours du cardinal est bon.

 

 

C – L’attachement au « sacré »,  le respect du « sacré » et ici, en l’occurrence, l’attachement et le respect de la révélation divine du « Dieu incarné ». Là, se trouve la spécificité de l’Europe, les fondements de la « Civilisation » occidentale. Voilà l’identité de l’Europe. Il faut qu’elle soit fière de cette civilisation, de « sa » religion. Pourquoi donc, cette Europe, manifeste-t-elle, aujourd’hui, au contraire, bien souvent, honte et  vindicte…contre ses propres valeurs… alors qu’elles constituent sa propre identité. Comme si l’Europe finalement refusait sa propre identité, refusait son être propre et avait le dégoût d’elle-même, « ne s’aimait pas ».  Mais refuser sa propre identité, la combattre même….c’est proprement « suicidaire ».  Tel est la situation devant laquelle se trouve l’Europe si elle ne réagit pas. 

 

 

 

 

III – « Vers un redressement du discours tenu dans l’Eglise depuis 20 ans » ?

 

 

 

Jean Madiran, dans son livre « Les droits de l’homme » analyse la pensée de l’Eglise et son évolution sur ces fameuses déclarations des droits de l’hommes. Il pense pouvoir affirmer que le discours du pape Jean-Paul II  prononcé à Munich, en Allemagne, le 3 mai  1988, est le début d’un retour à la doctrine catholique sur ce sujet des « droits de l’homme », un retour à la doctrine exprimée encore par Pie XII, dans l’ »Osservatore Romano »,  en 1948. Je pense que le cardinal Joseph Ratzinger, dans ce discours, s’inscrit dans ce courant et exprime justement  la doctrine catholique.

 

Voici le chapitre de Jean Madiran. Intitulé : « Vers un redressement du discours tenu dans l’Eglise depuis 20 ans ».

 

« On entend beaucoup parler des droits de l’homme, mais on ne parle pas des droits de Dieu. C’est la raison pour laquelle nous nommons habituellement les droits de l’homme : « DHSD », « droits de l’homme sans Dieu ». Ce qui n’est, pour eux, ni un éloge, ni une qualification.

Mais j’ai commencé avec une ponctuation incorrecte. Il fallait des guillemets. C’était une citation : « On entend beaucoup parler, aujourd’hui, des droits de l’homme, a dit le pape Jean-Paul II. Mais  on ne parle pas des droits de Dieu. ». C’est  une critique. Des malicieux voudront peut-être préciser une autre critique. La simple critique de texte atteste en effet que depuis vingt ans le discours officiel de l’Eglise catholique a beaucoup parlé des « droits de l’homme » en oubliant beaucoup de mentionner « les droits de Dieu ».

 

Ces paroles du pape Jean-Paul II sont récentes. Elles ont été prononcées à Munich le 3 mai dernier. (1988). Elles annoncent peut-être un redressement du discours devenu habituel dans l’Eglise. Un redressement motivé : « Droits de l’homme et droits de Dieu sont étroitement liés » a dit Jean Paul II. « Là où Dieu et sa loi ne sont pas respectés, l’homme non plus ne peut faire prévaloir ses droits (….). Les  droits de Dieu et les droits de l’homme sont respectés ensemble ou sont violés ensemble (…). Il s’agit de donner à Dieu ce qui appartient à Dieu. Ce n’est qu’alors que sera donné à l’homme ce qui appartient à l’homme. » Il n’y a, au demeurant, rien d’étonnant à ce qu’un souverain pontife tienne un tel langage. L’étonnant, c’était de ne pas l’en tendre plus souvent, voire de ne plus l’entendre du tout.

 

A partir de Jean XXIII et de son encyclique « Pacem in terris », on voit brusquement apparaître dans l’Eglise un éloge, d’abord un peu réservé, et bientôt sans réserve, des modernes déclarations des DHSD. Pourtant il était arrivé à Jean-Paul II d’écrire aux évêques du Brésil, en décembre 1980 : « Les droits de l’homme n’ont de vigueur que là où son respectés les droits imprescriptibles de Dieu et l’engagement à l’égard des premiers est illusoire, inefficace et peu durable s’ils se réalisent en marge ou au mépris des seconds ».

 

 

 

Condamnation sévère, puisque les droits de l’homme étaient ainsi déclarés illusoires si l’on entend les « réaliser » non seulement « au mépris » mais même simplement « en marge » des droits de Dieu. Toutefois un tel enseignement était devenu d’une exceptionnelle rareté dans l’Eglise. Le rappel qui vient d’en être  fait au printemps à Munich sera-t-il aussi ignoré des catholiques et tenu par la plus grande partie  du clergé pour une clause de style sans portée pratique ? La fameuse « ouverture au monde »,  pratiquée unilatéralement en « ouverture à gauche », a vitale ment besoin, pour être admise dans le dialogue et le pluralisme maçonniques, de se présenter comme ralliée aux DHSD. Sans quoi, elle serait refoulée dans le camp de relégation sociologique étiqueté « extrême droite ».

 

Peut-être parce qu’il parlait en terre allemande, peut-être parce qu’il s’agissait de la béatification d’un jésuite allemand qui avait résisté au nazisme, Jean-Paul II a été explicitement précis sur l’identité des coupables : « Là où Dieu et sa loi ne sont pas respectés, l’homme non plus ne peut faire prévaloir ses droits. Nous l’avons constaté en toute clarté à la lumière du comportement des dirigeants nationaux-socialistes. Ils ne se sont pas intéressés à Dieu et ont poursuivi ses serviteurs ; et c’est ainsi qu’ils ont, aussi, traité inhumainement les hommes : à Daschau, aux portes de Munich, tout comme à Auschwitz, aux portes de mon ancienne résidence épiscopale de Cracovie. » Effectivement, on l’a constaté en toute clarté, il y a quarante et  cinquante ans, à la lumière du comportement des  dirigeants « nationaux-socialistes » ‘(c’est-à-dire « nazis », en abrégé). On le constate toujours aujourd’hui, et sans interruption depuis soixante dix ans, à la lumière du comportement des dirigeants communistes. Pourtant je cherche à quand  remonte donc le dernier texte pontifical qui fasse cette constatation non point platoniquement, à propos du marxisme et de sa philosophie, mais explicitement à propos du communisme, à propos du parti communiste, à propos des « dirigeants communistes ». Car enfin, les « dirigeants nationaux-socialistes » sont hors d’état de nuire depuis plus de quarante ans  et tous morts aujourd’hui. Même si l’on n’a pas compris l’avertissement de Soljénitsyne prévenant l’Occident que le communisme est bien pire et beaucoup plus dangereux que le nazisme, même si l’on croit que le nazisme est, en soi, pire que le communisme, il n’en reste pas moins que, selon la sagesse du proverbe, un chien vivant est plus dangereux qu’un lion mort. Il est remarquable que la rhétorique des droits de l’homme  -  même quand d’aventure ce ne sont pas les DHSD  - soit le plus souvent intimidée, voire paralysée, devant la progression universelle du communisme.

 

Mais voilà. Le même proverbe peut servir en sens contraire. Il est beaucoup moins périlleux de s’en prendre à un lion mort qu’à un chien vivant.

 

Il ne faudrait pas non plus laisser croire que le seul tort des DHSD soit d’être « sans  Dieu », c’est-à-dire sans fondement légitime et universellement obligatoire. Tels qu’ils sont énumérés et définis par la Déclaration de 1789 et par celle de 1948, ils énoncen,t ici ou là une juste  condamnation de l’arbitraire ( par exemple en interdisant la retro-activité des lois, mais c’est une interdiction à laquelle les  démocraties occidentales refusent de se soumettre). On semble cependant ne pas avoir remarqué que ces deux déclarations, par leur esprit et par leur lettre, disqualifient comme illégitime toute autorité qui n’émane pas expressément du suffrage universel. Quelle que soit l’étendue du domaine souverain que l’on consente à ce suffrage, il demeure et demeurera toujours que les réalités naturelles et surnaturelles désignées par Dieu-Famille-Patrie échappent à la souveraineté du suffrage universel et trouvent en dehors de lui leur loi qui nient radicalement les DHSD : et c’est toute la question, généralement inaperçue ». Jean Madiran. Annexe VI p. 144-149)

 

Pas par tout le monde et aujourd’hui,  pas par le cardinal Joseph Ratzinger.

 

Le cardinal, lui aussi, le 13 mai 2004, comme le pape Jean-Paul II, le 3 mai 1988, vient de redresser le discours que l’on entend encore trop souvent dans l’Eglise depuis 20 ans.

 

C’est heureux.

 

Et si, par aventure, dans sa présente réflexion sur « la liberté religieuse » et sur le reforme de la réforme »  liturgique, il était conduit par l’inspiration du Saint Esprit, à « redresser le discours tenu dans l’Eglise depuis 35 ans ?….

 

On peut vivre dans l’espérance !  Et si on s’asseyait à la table du cardinal comme il l’a proposé lui-même !