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 Un regard sur le monde  politique et religieux

 Au 20 janvier 2005

 

N°27

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

 

 

Ils ont décidé de réintroduire Mgr Gaillot

 

Le Vatican va-t-il laisser faire ?

 

 

Qu’est-ce qui me permet d’écrire ce titre de ce nouveau « Regard sur le monde » du 20 janvier 2005?

 

C’est la connaissance d’un courrier officiel adressé par l’évêché de Saint Flour à ses prêtres.

 

Ce courrier communiquait aux prêtres du diocèse, l’article de « Témoignage chrétien » prenant faite et cause pour Mgr Gaillot.  C’est un de ces prêtres, scandalisé, qui m’en a averti,

 

Oui, je dis bien scandalisé.

 

Voici l’article de « Témoignage Chrétien »

 

Edition du 13 janvier 2005

 

A propos de Monseigneur Jacques Gaillot.

 

 

Il est temps que les temps changent dans les mœurs catholiques pour témoigner, en esprit et en vérité, que l’Évangile rend libre.

 

     Dix ans, ça suffit !   par Michel Cool

 

Le cardinal Re, membre de la Curie romaine figurant parmi les successeurs potentiels de Jean Paul II, a écrit à Jacques Gaillot pour Noël. Philippe Barbarin, cardinal-archevêque de Lyon, a invité l’évêque de Partenia à prêcher une retraite pour ses prêtres diocésains. L’été dernier déjà, Jacques Gaillot avait été convié à Lourdes pour la visite du Pape et plutôt bien accueilli par ses pairs. Ces gestes n’annoncent-ils pas des retrouvailles prochaines après dix ans de séparation de corps ? L’attitude et les déclarations de l’ancien évêque d’Evreux, ainsi que celles de son entourage vont, elles aussi, dans le sens de l’apaisement, de l’aggiornamento (1), aurait-on dit au Concile. En dépit des remords, des meurtrissures et des incompréhensions accumulées de chaque côté, l’heure de la réconciliation ne saurait tarder davantage.

 

Dix ans de contre-témoignage évangélique, ça suffit ! L’extrême faiblesse de l’Église qu’a montrée cette triste scène de ménage a scandalisé bien au-delà des milieux catholiques. C’était oublier que l’Église est une œuvre humaine, faillible, capable de perdre le fil de son esprit fondateur. Cette affaire a délégitimé, pour beaucoup, les actes de repentance et de réconciliation, souvent prophétiques, qu’elle a posés ces dernières années. Il est temps que les temps changent dans les mœurs catholiques, non pas tant pour coller à l’air du temps que pour témoigner, en esprit et en vérité, que l’Évangile rend libre.

Jacques Gaillot n’est pas l’unique évêque en France à mettre son charisme au service des pauvres, des exclus et des marginaux. D’autres le font autant que lui, peut-être avec moins de talent, sûrement avec moins de faveur médiatique. Sa différence admirable tient surtout à ce qu’il aurait pu faire après sa destitution brutale de l’évêché d’Evreux et qu’il n’a pas fait : par exemple, prendre la tête d’un mouvement à revers de celui de Mgr Lefebvre pour défier Rome. Il n’a pas cédé à cette vanité, quitte à désoler certaines de ses ouailles tentées par une aventure schismatique. Il ne l’a pas fait, car tout en étant son fils terrible, l’Église catholique demeure sa mère, même s’il la juge sévère envers lui. « J’ai tout reçu d’elle, explique-t-il, jusqu’à mon passeport pour aller aux frontières. » (2) Sans diocèse fixe, Jacques Gaillot n’est pas sans famille. Cette fidélité, il l’entretient en priant et en méditant de longues heures dans sa retraite annuelle dans une abbaye bénédictine, ou dans sa chambre de la rue Lhomond, à Paris, chez les pères spiritains. Cette intense activité spirituelle est la face la plus cachée, la moins spectaculaire du personnage. C’est pourtant elle qui saute aux yeux de ses interlocuteurs à qui il rend hommage dans son dernier livre (3), ces hommes et ces femmes de l’« en bas », selon l’expression de Maurice Bellet.

 

Jacques Gaillot est moins, aux dires de certains, la mauvaise conscience d’une Église catholique prise en flagrant délit d’autoritarisme qu’un des signes extérieurs les plus controversés du « christianisme d’insolence » décrit avec force par Robert Scholtus (4), auquel beaucoup de fidèles s’identifient. « La dislocation du monde ancien, écrit-il, a ouvert des espaces encore inexplorés, où déjà se donnent rendez-vous les croyants qui ont décidé de laisser les morts enterrer leurs morts et de tendre la main aux vivants. [...] Ils cherchent à faire advenir l’humain [...] par leur seule présence, par pur amour. Dans la prose du monde, ils sont les poètes de l’événement christique. » Il est donc urgent d’inventer, nous déclare Maurice Bellet. Ce n’est pas le moindre mérite de ce dixième anniversaire d’un coup de crosse de trop, que de nous rappeler cette définition « simple et robuste » de l’Église : « Qui aime son frère, connaît Dieu. »

 

1. Mot italien signifiant « remise à jour ».

2. "La Croix" du 9 janvier 2005.

3. "Carnets de route", Jean-Claude Gawsewitch éditeur, 180 p., 16,50 €.

4. Robert Scholtus, "Petit christianisme d’insolence", Bayard-Christus, 15,90 €. Lire la critique dans TC n°3138.

 

 

Il y a quelque chose de tragique dans tout cela.

 

On appréciera à sa juste valeur l’article que Jean Madiran écrivait dans Présent le 19 janvier.

On appréciera entre autres, son sous-titre : « Un grand bon en arrière »

 

Oui nous revoilà 10 ans  en arrière.

 

 

 Mgr Gaillot désormais exemple et maître,

Un grand bond en arrière

 

« L’incroyable était donc vrai. Dans le diocèse de Lyon, Mgr Jacques Gaillot sera bien le prédicateur de la retraite sacerdotale qui aura lieu du 21 au 26 août. Nous n’arrivions pas à le croire (Présent du 7 et du 11 janvier). C’est le cardinal-archevêque en personne qui a ainsi établi Mgr Gaillot en maître et en exemple pour son clergé. Le scandale est profond. Les conséquences menacent  d’être dévastatrices.

 

Journaliste du Progrès de Lyon accréditée auprès de l’archevêché, Jeannine Paloulian semble avoir éprouvé quelque embarras à présenter (et à excuser) devant ses lecteurs la stupéfiante nomination de Mgr Gaillot. Elle invoque une certaine méconnaissance de l’affaire Gaillot » telle qu’elle s’était passé en 1995 : « Il y a dix ans, lorsqu’éclatait « l’affaire Gaillot », le jeune prêtre Philippe Barbarin était à Madagascar et donc à mille lieues de l’agitation et de l’émotion dont il n’avait perçu que de très lointaines et tardives bribes. »

 

C’est exact. Sauf en ceci que « le jeune » Philippe Barbarin était moins jeune qu’on ne le dit . C’est de 1994 à 1998,c’est-à-dire de l’âge de 44 ans à l’âge de 48 ans, qu’il fut « prêtre de Fidei donum », professeur de théologie et formateur au grand séminaire de Fianarantsoa (Madagascar). Cela peut être une explication psychologique, mais point une justification.

Jeannine Paloulian raconte aussi que le cardinal-archevêque et Mgr Gaillot « se sont rencontrés pour la première fois en août dernier à Lourdes, au moment de la visite du Pape » , et que « dès ce premier contact, l’archevêque de Lyon a eu l’intention de renouer avec son « frère dans l’épiscopat », d’où l’invitation à prêcher la retraite des prêtres du diocèse ».

 

C’est tout de même passer d’une extrême à l’autre, de la rupture directement au rang de maître qui enseigne les prêtres et d’exemple à suivre par eux. Pour « renouer » avec Mgr Fellay ou avec Mgr Tissier de Mallerais, leur proposera-t-on d’accéder d’un seul coup à la charge de directeur de conscience du clergé français ?

 

Nous ne voulons ici aucun mal à la personne de Mgr Gaillot, nous ne lui souhaitons que du bien, c’est-à-dire principalement de parvenir à une meilleure et plus exacte intelligence de ce que sont l’Eglise, sa doctrine, sa discipline. Nous ne faisons aucun obstacle, ce n’est ni notre affaire ni notre intention, à ce que ses « frères-évêques » lui assurent un logement et un minimum de subsistance matérielle, et lui manifestent une amicale sollicitude. Mais  il faudrait sortir de l’ambiguïté au lieu de s’y enfoncer davantage, et dire clairement au clergé catholique et au peuple chrétien si l’épiscopat français approuve, ou bien tolère, ou bien réprouve les « opinions » et comportements gauchistes, anarcho-trotskistes et libertaires de Mgr Gaillot.

 

Nous avons déjà noté que le journal La Croix, dans son dossier de trois pages sur le personnage (8 janvier), révélait que l’épiscopat français reprochait à Mgr Gaillot non point tant ses « prises de position iconoclastes » ou ses soi-disant « combats pour les exclus », mais son indiscipline à l’égard d’une prétendue « collégialité ». Parmi ces prises de positions iconoclastes, La Croix mentionnait celles en faveur de l’ordination sacerdotale des femmes ; mais évitait de mentionner celles en faveur de la promotion homosexuelle et celle en faveur du quotidien communiste l’Humanité. Mgr Gaillot n’a fait à leur sujet aucune rétractation ; au contraire, il persiste et récidive, avec l’autorité morale et médiatique renouvelée que lui confère le cardinal-achevêque de Lyon.

On se souvient peut-être qu’il y a plus de dix ans, avant la sanction pontificales écartant Mgr Gaillot de son diocèse d’Evreux, on entendait souvent opposer, en une formule trop simplificatrice, l’Eglise de Mgr Lefebvre à l’Eglise de Mgr Gaillot. Cette formule dangereusement réductrice risque de se trouver rela     ncée  par l’imprudence provocatrice de La Croix faisant honneur à Mgr Gaillot de n’être pas « un Lefebvre de gauche ». Un autre évêque, extrémiste qui est lui aussi un poulain des extrémistes de Golias, confie à France-Soir : « Comme moi, beaucoup d’évêques communiquent avec Mgr Gaillot et partagent des idées. »

 

L’Eglise qui se dit de France » est en train de faire un grand bond en arrière.

 

Jean Madiran (Présent 19 janvier 2005)