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Un regard sur l’actualité politique et religieuse
Au 5 décembre 2004
N°20
Nicolas Sarkozy
Son livre
«
En six chapitres, Nicolas
Sarkozy nous présente sa pensée « politique » et sa
« praxis » sur un thème principal et unique:
Il consacre le chapitre 3 à l’Eglise catholique et à
notre fameuse « loi de 1905 ». Le centenaire en sera certainement
fêté l’an prochain par
« Au passage »,
pourrait-on dire, il nous donne son avis
sur
Vous le voyez, le livre est
court mais les sujets, importants.
Vraiment des questions de sociétés. Au cœur de notre vie quotidienne. Les
réponses sont-elles à la hauteur de l’ importance des questions traitées ?
Il s’exprime clairement. Dans
son chapitre I, il se laisse même aller à une certaine
« convivialité », à une certaine « sincérité » qui n’est
pas déplaisante. Et qui a attiré ma sympathie.
Il se dit
« catholique ». Il n’en a pas la pensée. Il n’en a pas la
connaissance, ni la philosophie. La pensée catholique, jamais ne l’anime
vraiment dans aucun des sujets importants abordés. C’est une pensée
« d’ailleurs ». C’est une pensée puisée au fonds des loges
« maçonniques ». C’est clair. Il en a tous les principes, tous les
« a priori ». Lisez le discours du Président Chirac recevant les
loges à l’occasion du 250è anniversaire de la fondation de la
« maçonnerie » en France. Vous retrouvez, là, tous les grands idéaux maçonniques, ceux
qu’exprime Sarkozy dans ce livre. Il est sympathique, vous dis-je, quand il
parle de l’espérance. Il dit que tout
homme a besoin d’espérance pour vivre mieux et le phénomène religieux y
contribue. Mais allez voir ce qu’est, pour lui, l’espérance ? Quel en est l’objet ? Quel en est la
raison ? Vous n’en saurez rien. Pour lui,
le phénomène « religieux », quelle que soit la religion - elles sont toutes mises sur le pied
d’égalité – agnosticisme oblige -
engendre l’espérance. Point. C’est ainsi. C’est très « naturaliste ».
Et ce n’est pas certain pour toutes les religions…
Nous aborderons dans les
semaines qui viennent les différentes idées exprimées. Sa pensée sur la
« laïcité », sur l’Islam, sur la « loi de 1905 » et sa
modification, sur l’Europe, sur l’éducation. Il se veut un grand homme
politique ….
Mais aujourd’hui, je voudrais
seulement abordé la « conception » qu’il exprime sur l’islam et opposer principe à principe, idée
à idée. Il a une conception fausse sur l’islam. Comme tant d’autres, il veut
absolument distinguer l’Islam de l’islamisme. L’un ne serait pas l’autre. Ce
serait même par « racisme » -
vous prononcez même le mot qui tue aujourd’hui
- que vous feriez cet amalgame.
Il s’exprime ainsi dès la première page de son livre. C’est son avant-propos.
« Au moment où j’écris
les dernières lignes de ce livre, deux de nos compatriotes (Christian Chesnot
et Georges Malbrunot) ont été enlevés en Irak et sont séquestrés par ceux-là
mêmes qui ont assassiné Enzo Baldoni, leur confrère italien. Les victimes de
cette prise d’otages ne sont pas seulement ces deux malheureux journalistes et
leur guide. Ce sont des millions de musulmans à travers le monde qui souffrent,
une fois encore, de l’amalgame suscité par la barbarie de ces criminels. Ce
sont des millions de croyants qui se trouvent mis en cause par l’attitude de
quelques fanatiques insensés se réclamant d’une foi et d’une espérance qui
professent l’inverse de ce qu’ils sont devenus. Ces fous de Dieu n’ont rien
à voir avec Lui. Ils sont ivres de haine, de vengeance, de sang, de
destruction, de cruautés. Ils détournent un message d’amour et de paix en
instrument de guerre ….Le
CFCM, représentatif de tous les courants de l’islam de France, atteste d’abord
à la face du monde et des preneurs d’otages que l’islam n’a rien à voir
avec cela. Il ne peut y avoir de voix plus crédible et plus forte pour
dénoncer la confusion mentale des preneurs d’otages, saper la crédibilité de
leurs revendications et combattre les amalgames ».
Certes toute violence, mais
la légitime défense n’est pas une violence…,
est condamnable et doit être dénoncée. D’où qu’elle vienne.
Mais vouloir présenter, en
opposition, l’islam comme « pacifique », c’est ne rien connaître de
la nature de l’islam et de son histoire.
Je vous présente les
réflexions de deux auteurs.
Les unes, plus
politiques : celles de Georges Dillinger.
Les autres, plus philosophiques, plus historiques, plus
théologiques, plus éclairantes et convaincantes encore : celles de Gianni
Baget Bozzo, professeur de dogme. Il fut ami du cardinal Siri.
Il faut connaître la tactique que l’Islam
utilise pour pénétrer chez nous. Cet article de Georges Dillinger le fait
merveilleusement bien comprendre. Et montre, à contrario, la formidable erreur
de Sarkozi
« Etre sourcilleux sur la distinction entre
l’islam et l’islamisme ne me paraît pas sérieusement fondé. D’une part, parce
que l’islamisme ne foisonne que sur le terreau de l’islam. L’un ne saurait se
développer sans l’autre. D’autre part et surtout, parce qu’il y a tous les
intermédiaires entre le musulman pratiquant une religion apaisée et insérée
dans la société civile et l’islamiste militant sinon combattant, voire
terroriste. Pour ne pas avoir à choisir entre deux dénominations et deux
concepts séparés par une frontière aussi floue, j’ai choisi de parler ici des
activités de l’islam.
Quand Rachid Kaci nous dit que les islamistes ne sont pas mus par une idéologie
religieuse mais par une idéologie politique, je prétends que c’est encore de la
langue de bois faussement rassurante. Car le mot politique évoque pour les
Français un jeu factice et dérisoire, sans idéal, sans conviction, sans projet
autre que de s’approprier les avantages matériels d’un pouvoir éphémère. Et le
mot évoque aussi ces dirigeants polichinelles aux ordres des médias et des
lobbies. Une idéologie politique ne serait rien. Ce qui se cache sous des
prétextes religieux, c’est une entreprise combattante, décidée à imposer sa
mystique, son fanatisme, son intolérance absolue, ses inégalités insupportables
et la détermination d’appliquer à tous ceux qui refuseront la conversion le
statut infamant de dhimmis.
L’islam en France, actuellement, sait jouer
magistralement d’un double jeu, d’un double langage, d’une double tactique, qui
sont d’une efficacité redoutable. Mais de tout temps, pour vaincre des
infidèles, la ruse et la duplicité, quand ce n’est pas la violence, n’ont-elles pas été autorisées,
voire légitimées, par la tradition musulmane ? D’un coté, en effet, il y a
le discours rassurant tout fait de bonnes intentions et de bons sentiments. De
beaux parleurs qui demain se révèleront comme les islamistes les plus
fanatiques, savent tenir, la main sur le cœur, le discours le plus édifiant. Et
ces plaidoyers jouent sur plusieurs tableaux avec un machiavélisme consommé. En
premier lieu, ils se fondent sur le droit sacré de chaque homme d’adorer Dieu,
de pratiquer sa religion, de se soumettre à ses commandements. Les Français
s’émeuvent-ils de la généralisation de pratiques qui leur sont totalement
étrangères ? Ces beaux parleurs font appel à la tolérance, preuve que l’islam
n’est plus intolérant. Et ils ajoutent à cela l’appel à la charité et à la
compassion. Les émigrés, disen,t-ils, sont souvent malheureux. On les a trop
souvent « ghettoïsés ».
Ils sont des exclus de notre société. Oserions-nous aggraver ces malheurs en
leur retirant le secours de leur religion, en leur en restreignant la pratique
ou les comportements qu’elle exige (prétendument)
Et
puis, ils jouent même la morale. Tel recteur d’une mosquée prestigieuse nous
rappelle que l’islam défend la pudeur, condamne les relations sexuelles hors
mariage ou entre individus du même sexe, sanctionne le vol ou le crime, exige
le respect de l’autorité. Comment un tel discours ne séduirait-il pas une
multitude de Français, effrayés par l’effondrement moral total qui affecte toute
la société française, spécialement depuis les évènements de mai 68 et le
triomphe de l’idéologie libertaire qui les sous-tendait ?
Un cas est significatif de la pratique magistrale que
ces activistes tirent de leur connaissance parfaites des ressorts profonds de
notre psychologie. Ainsi,, lorsque la loi qu’a rendu nécessaire le
développement du port du voile à l’école en France, était en préparation, on
parlait dans les pays musulmans de loi
sacrilège. Mais en France, les meneurs parlaient de « loi raciste ». Sacrilège, en rappelant trop le langage du catholicisme de
naguère, aurait pu choquer une partie de la population française : ne
serait-on pas en présence d’un regain de l’obscurantisme et du pouvoir de
nouveaux curés ? Raciste, au contraire, met tous les
torts dans notre camp, et des torts inadmissibles quand on pense à la
connotation qu’on a développée sur ce terme. Ah, en vérité, ces beaux parleurs
nous connaissent bien !
Demain l’instrumentalisation de la
violence
Quand l’activiste évoqué ci-dessus reste en
principe pacifique et habité de bonnes intentions (religieuse) il peut être
considéré naïvement comme peu inquiétant par beaucoup de Français. Mais, en
fait, ce n’est là qu’un volet d’une stratégie double qui bénéficiera d’autres
concours, plus militants, plus combattants. En fait,, dans cette perspective,
l’activisme de l’islam profitera d’une situation qu’il n’a pas créée.
Celle –ci tient à deux faits tristement complémentaires. Il y a d’une part
l’importance démesurée du flux allogène et de sa fécondité. Pendant des
siècles,
Bien entendu, ces jeunes ne sont pas tous
musulmans, même quand leurs parents le
sont, ni islamistes. Beaucoup sont plus attirés par tous les attraits de la
modernité et du consumérisme que par la prière, le jeûne ou l’aumône. Mais la haine qu’ils nourrissent à l’égard de
notre société les rend disponibles pour être embrasés demain par une
force qui décidera de se servir d’eux, de leur vacuité spirituelle, de leur
jeunesse, de leur désespoir, de leur agressivité.
En outre, dès maintenant, la présence de bandes
qui se livrent à une véritable guérilla sur notre territoire, contribue à
développer chez de nombreux français la peur, qui vient ajouter ses effets
paralysants à l’aboulie et à la résignation qui affectent tant d’entre eux.
L’objectif : une nation dans
la nation.
La constitution d’une armée au sein d’une nation
non musulmane est l’objectif des islamistes pour assurer le passage de
Or le voile est un uniforme même quand il n’est pas la
sinistre burka, même quand il
n’est que le linge innocent qui drape une gamine charmante. La conscience de
faire partie d’une individualité spécifique et l’existence de ces différences
radicales sont les objectifs des menées islamistes. Leurs exigences hautement
et fortement réclamées de mesures dérogatoires à l’égard des lois de l’Etat se
multiplient, et se multiplieront pour cette raison tactique. Et les arguments
prétendument religieux, tels le souci de la pudeur, ne sont que des prétextes d’une efficacité ravageuse.
Quand un nombre croissant de personne vivant en France
échappent aux lois - y compris pénales –
imposées jusqu’alors à tous, telles que la sanction de la polygamie, quand on
multiplie tous les jours les occasions nouvelles de se soustraire à ces lois,
je prétends qu’on ne fait pas du communautarisme ; on laisse se créer une
nation dans la nation, un Etat dans l’Etat et, pour demain, un corps de
bataille logé dans une société française
qui n’est plus qu’un troupeau désuni et démoralisé.
Une nation musulmane émergente de la nation française,
forte d’une armée dont les guerriers seront les guérilleros d’aujourd’hui.
Telles sont les perspectives inéluctables que
dessinent la situation actuelle et sa désagrégation constante ».
Je ne donnerai ici que quelques passages de son étude
« fulgurante » sur l’Islam. Il l’étudie dans sa nature intrinsèque et
tire des conclusions étonnantes. Pour nous, ces réflexions montrent combien nos
hommes politiques se trompent sur le phénomène récent de l’immigration et de
l’islam. L’étude n’est pas facile. Elle est très cohérente. Si vous êtes
pressé….allez tout de suite au paragraphes 14, 15, 18, 20 21, 26, 27, 33. Vous
aurez au moins les conséquences que l’auteur
déduit de son analyse du « Dieu du Coran »
1 - « Aujourd’hui l’Europe et l’Occident se trouvent face au
nouveau phénomène de l’Islamisme politique, commencé en 1979 par la révolution
iranienne. L’Occident vit un défi sans avoir su encore y penser. C’est une
confrontation qui n’est pas seulement religieuse mais globale: culturelle,
civile et politique. Et c’est ainsi qu’elle est vécue dans le monde islamique.
Ce livre tente une lecture philosophique du Dieu du Coran pour en extraire les
différences avec le Dieu chrétien et avec la tradition culturelle de
l’Occident. Il soutient que l’Islam n’est pas une interprétation du Dieu
biblique, il n’est pas une hérésie chrétienne, mais une nouvelle religion, non
biblique et non païenne. Et il analyse le problème de la vie avec l’Islam, un
problème qui n’est plus seulement extérieur mais qui est devenu intérieur aux
nations européennes.....
Ce texte est donc un
“ Adversus Islam ”, dans le sens classique des “ adversus ”
traditionnels qui ne signifient pas “ contre ” mais “ en
face ”. C’est la reconnaissance de la différence, qui est la seule voie
qui garantie en même temps vérité et liberté...
II … L’Islam a fait la guerre sainte au Christianisme.
Les terres qui étaient protagonistes du Christianisme dans les six premiers
siècles (l’Asie mineure, l’Afrique) sont devenues terres islamiques. Les terres
d’Athanase et de Basile, de Cyprien et d’Augustin, les terres où la grande
synthèse du Christianisme avec
….
III- Le Christianisme
que connut Mahomet fut le Christianisme nestorien. Et on voit bien ce qui, du
Christianisme nestorien, demeure dans le Coran : la théologie de Jésus
dans le Coran est une christologie nestorienne débarrassée de toute doctrine
trinitaire. Il n’en reste donc que la lecture de Jésus comme prophète et même
comme Messie d’Israël.
Mahomet emprunte donc,
depuis le début, le filon d’une hérésie chrétienne qui va dans le sens d’une
radicale messianisation de Jésus : c’était, pour Mahomet, la voie pour
montrer que le Christianisme ne pouvait pas être universel. Le Christianisme
est universel parce qu’il proclame non seulement l’égalité des hommes dans la
nature humaine mais la vocation de tous les hommes à la vie divine.
Par rapport au Christianisme, Mahomet suit une
stratégie : il nie la divinité du
Christ pour nier l’universalité du Christianisme. Cela faisait de lui le
premier prophète s’adressant à tous les hommes. On voit quelle conscience
avait Mahomet du problème chrétien qui était devant lui : la stratégie originale de Mahomet était
une stratégie anti-chrétienne. Mahomet ne pouvait pas être le prophète
des seuls arabes : il devait démontrer, contre le Christianisme, que Jésus
n’était pas un prophète universel, mais seulement une figure interne à
l’histoire d’Israël. C’était la seule façon de faire de l’Islam l’ultime, la
suprême, la définitive révélation et, pour cela, universelle. L’économie
hébraïque de
….
Mahomet a certainement créé une religion. Mais cette religion n’est pas la religion de
Cela est cohérent avec l’idée chrétienne de
On peut se poser les interrogations qui ont pour objet l’idée de Dieu
sans pour cela manquer à l’adoration due à Dieu. Cela a rendu possible la
raison occidentale, c’est-à-dire l’absence de limites à la raison humaine. La
raison originaire de l’Occident n’est pas l’héritière de la philosophie grecque
mais de la théologie chrétienne. La science occidentale est née de la théologie
chrétienne parce qu’elle a pensé l’esprit sans limites. La science occidentale
est le développement de la philosophie occidentale, parce que sa recherche
infinie pense l’homme comme intellectuellement sans limites :
universellement connaissant d’un cosmos infiniment connaissable. La théologie
occidentale est la métaphysique du Dieu des chrétiens et la philosophie
occidentale comme telle est la critique de la métaphysique chrétienne.
Dans l’Islam, Dieu ne peut pas être
pensé. Il n’existe pas une théologie
musulmane qui soit l’analogue musulman de la théologie chrétienne. Le Kalam musulman n’est pas une théologie,
c’est une apologétique. Et elle ne l’est pas pour la même raison pour laquelle
il n’existe pas une histoire du Coran : parce qu’il n’y a pas de relation
entre le Dieu du Coran et l’homme musulman. Rien n’a de consistance devant
Dieu ; pour cela il n’est pas possible qu’une pensée et qu’une action
humaine constituent une relation de l’homme à Dieu. À part Dieu,
ontologiquement, il n’existe pas de sujet qui suppose une consistance de
créature et une consistance de créature propre de l’homme intelligent, capable
de vouloir et libre. C’est pourquoi il n’existe pas, dans le monde musulman, ce
qui, dans le monde chrétien, est l’idée de Dieu. Il y a seulement des attributs
de l’action divine. Dieu, en soi, n’est
pas pensable ; il n’y a pas ce registre chrétien de l’analogie qui
suppose l’être comme se référant soit à Dieu, soit au cosmos et soit à l’homme.
Mais même les chrétiens n’ont pas affronté le statut ontologique du Dieu du
Coran. Du reste il n’existe pas non plus une apologétique chrétienne “ adversus ” Islam. La plupart des chrétiens pensent que la
différence entre les chrétiens et les musulmans est la doctrine trinitaire et
christologique et que ce qu’autrefois on appelait la théologie naturelle est la
même dans l’Islam et le Christianisme.
On ne se rend pas assez compte, dans la
pensée théologique chrétienne, que la doctrine de
Le Dieu du Coran se manifeste
dans le Coran. Il est éminemment un Dieu du livre. Et cela le distingue
entièrement du panthéisme, du polythéisme, de toutes les formes dans lesquelles
le divin est immanent à la nature. Il en constitue le renversement le plus
radical. Beaucoup plus que ce qui est dit de Dieu dans
Le Dieu biblique s’exprime
dans la création. Il n’y a pas de récit
de la création dans le Coran, c’est-à-dire qu’il n’y a pas ce
“ moment ” où le monde sort de Dieu. Il n’y a pas dans le Coran une
genèse du monde comme dans
La création n’est pas un
thème coranique. Il manque le processus temporel des sept jours. L’origine
n’est pas racontée, on peut dire qu’elle est supposée. La fin de la création
est dite dans le Coran, mais pas son début. La création n’est pas un élément
propre du Coran dans les moments essentiels de l’idée de création : la
genèse de l’univers provenant de l’essence de Dieu, la bonté de l’univers comme
reflet de la bonté divine, la consistance ontologique de l’univers devant Dieu.
La création de
Dans le Coran cette
thématique est absente car la réalité est elle-même le néant, parce
qu’elle n’existe à chaque instant que par l’acte divin. Il ne s’agit pas d’une
création, mais de la position continuelle, de la part de Dieu, d’une réalité
qui demeure définie par son seul non être. Dieu fait exister à chaque
instant une réalité qui n’a jamais d’être par lui-même.
Dans le Coran il n’y a pas
l’idée de l’être propre à Dieu et à l’homme, comme elle est exprimée dans la
doctrine biblique, par le registre de l’analogie, et développée par la théologie
chrétienne. La métaphysique du Dieu du Coran est inexistante parce que l’être
n’est pas une dimension commune à Dieu et à l’homme. Parmi les 99 noms divins du Coran, il n’y a pas le nom
“ être ”. Certains mots arabes sont traduits par le terme
“ existant ”, qui signifie justement autre chose qu’être. L’existence
indique l’efficacité de Dieu, mais les noms coraniques ne mettent pas en Dieu
le mot être parce que cela indiquerait un terme commun à Dieu et à la réalité
du monde, un terme ontologique qui ne regarderait plus l’action de Dieu mais
son essence. Le Dieu du Coran n’est pas
l’être et il n’est pas une essence. Il
est une action.
Le Dieu du Coran n’est pas
l’être et n’est pas une essence. Le Coran ne répond pas à la demande :
qu’est-ce que Dieu ? Il n’affronte pas le problème de la métaphysique de
Dieu parce qu’il n’est pas une Révélation sur Dieu mais seulement une
révélation de son action sur le musulman. Toutefois on pourrait étudier
métaphysiquement le Dieu du Coran, même si cela ne peut être fait à l’intérieur
du Coran et de la tradition islamique.
Puisque la réalité [du monde]
est vue, dans le Coran, comme un néant dans lequel Dieu pose l’existence, il
n’y a pas de terme commun entre Dieu et l’homme. Quand le langage coranique
indique les attributs de Dieu, il ne les applique pas à Dieu même, mais
seulement à la manière avec laquelle le croyant musulman perçoit l’action
divine. Ils ne disent rien sur Dieu en soi, parce que le langage humain est
lui même néant et reçoit sa validité de la seule parole coranique.
Il est vrai que même pour la
théologie chrétienne les attributs de Dieu exprimés en langage humain ne disent
pas, à proprement parler, la réalité divine ; mais le concept de création,
qui confère un être véritable à la réalité, établit une dimension commune entre
Dieu et l’homme. Dieu est la vraie cause du monde et, à cause de cela, le monde
porte l’empreinte de Dieu. Il est possible, en partant des effets de Dieu, de
remonter à ce qui est propre à Dieu, dit en langage humain.
Le Dieu du Coran n’a rien en
commun avec l’homme et avec la réalité qui sont néant. C’est pourquoi rien de
ce qui est réel et exprimé comme réel dans le langage des hommes peut, à juste
titre, être dit de Dieu. Le Dieu du Coran n’est pas une essence et ne peut être
exprimé par des mots qui l’indiquent en lui-même. Et pourtant on peut poser la
question : “ Qu’est-ce que le Dieu du Coran ? ”, même si on
ne peut y répondre dans le langage du Coran.
Le Dieu du Coran ne peut
être exprimé métaphysiquement que par le mot : “ Puissance ”, c’est-à-dire un mot qui indique l’action. Mais le mot puissance ne parle que de la nature
physique, car les dieux païens aussi sont une puissance qui se manifeste dans
les effets naturels.
Le mot plus approprié pourrait être celui de
“ Puissance absolue ”, car les dieux païens ont tous une puissance
limitée. Cependant même cette expression est impropre car la puissance du Dieu
du Coran n’est pas absolue, elle a besoin de l’obéissance du musulman. Le Coran
ordonne au musulman des comportements et c’est en eux que se réalise
…Le mot le plus exact pour exprimer le Dieu du Coran
semble être celui de “ Volonté ”. Mais cette Volonté a pour objet la
réalisation de la puissance absolue du Dieu du Coran à travers les musulmans,
car
XII - le Dieu du Coran
Peut-on appeler le Dieu du
Coran une Personne ? Les musulmans ne l’appellent jamais ainsi.
Personne est un terme ontologique, il suppose la possibilité de définir Dieu
autrement que par la reconnaissance de son action. Cela suppose que l’on puisse
connaître Dieu au-delà de la définition qu’en donne le Coran. Dans le Coran
Dieu semble n’être seulement qu’un commandement, et des commandements précis.
Voilà pourquoi le Dieu du Coran est un principe d’action, vis à vis des hommes,
et non vis à vis de lui-même. La connaissance comporte un processus d’assimilation
du connu au connaissant : c’est pourquoi dans le Christianisme le thème
central est la connaissance de Dieu par de l’homme. Dans le Coran, au
contraire, la volonté ne comporte aucune assimilation entre Dieu qui commande
et le musulman qui se soumet. En réalité, ce
qui est connu de Dieu c’est seulement le Coran. Il n’existe aucun passage
du Coran à Dieu au-delà du Coran et c’est pourquoi il n’y a pas véritablement
une mystique musulmane.
….
Le
Dieu du Coran n’est pas en soi accessible au langage humain, sinon dans son
action. Son action est celle d’une Volonté, mais de là à dire que le Dieu du
Coran est une personne, il s’en faut, et de beaucoup
Le manque de réflexion sur la
métaphysique du Dieu du Coran a pu faire penser qu’on pouvait lui appliquer
toutes les catégories du Dieu des chrétiens. On a, jusqu’à présent, cru que le
Dieu du Coran est une modification théologique du Dieu des chrétiens. Mais il
n’en est pas ainsi. Il est une modification métaphysique du Dieu des chrétiens.
La différence fondamentale
entre les chrétiens et les musulmans est certainement
Il est hors du langage coranique dire que Dieu se
pense, ou que Dieu se veut. Le Dieu du Coran n’est pas sujet d’états
permanents, il n’est pas être, essence, personne, relation. C’est un Dieu
métaphysiquement misérable. Son action est parole, le Dieu du Coran n’a pas
d’existence en dehors du Coran. Et son existence est seulement celle d’une
volonté sans fondement. La volonté divine est le fondement du Coran, mais le
fondement de la volonté divine reste inconnu. Le Dieu du Coran ne révèle pas
lui-même, mais son commandement.
….
Le
Dieu du Coran n’a pas de vie intérieure parce qu’il n’a pas de consistance
ontologique. Ce sont deux aspects différents et liés. Avoir consistance
ontologique signifie l’accès au registre de l’être et donc à celui du Logos. Il
comporte donc la révélation de la demande : “ Qui est
Dieu ? ”. Cette demande ne peut exister dans la théologie coranique
parce que la lettre du Coran est écran totalement opaque à l’identité de Dieu.
Avoir une vie intérieure voudrait dire que Dieu est concevable comme Essence
tournée vers elle-même. Ce qui signifie, encore une fois, que son quis est accessible à l’homme. La volonté de Dieu n’est donc pas celle par
laquelle Dieu se veut, mais celle par laquelle il veut la soumission du
musulman. Les actes réflexifs en Dieu n’existent pas dans le Coran parce qu’il
produit seulement des ordres envers les musulmans.
Le Dieu du Coran est un Dieu
qui est au-delà du monde mais dont la réalité consiste seulement à donner des
ordres au croyant. Elle se réalise dans le temps, et la soumission au Coran est la réalisation de Dieu. Le musulman transforme la volonté de
commandement, qui est Dieu, en volonté voulue, qui est la soumission du
musulman. Le musulman réalise Allah dans le monde.
….
Voilà bien le paradoxe du Dieu du Coran : au-delà
du monde mais entièrement relatif au monde, et au monde dans la forme du
musulman.
Le Dieu du Coran, pure
Volonté, est étranger au monde : le monde représente une de ses volitions
à laquelle il n’est pas lié. Aucun des concepts éthiques, qui dans la théologie
chrétienne peuvent être liés à Dieu, n’ont un écho dans le Dieu du Coran. Le
Dieu du Coran n’est pas le Bien. Il n’a pas une nature qui puisse fonder le
bien, un logos qui puisse l’exprimer. Le fondement des normes coraniques est le
Coran lui-même : elles ne sont pas liées à une loi éternelle qui, dans la
tradition chrétienne, unit la divinité au bien. Cette loi éternelle lie la
divinité à l’idée du bien comme valeur universelle : l’ontologie est
toujours une ontoéthique.
Dans le Dieu du Coran, il n’y
a que la volonté de Dieu, une volonté qui s’adresse à ceux qui sont disposés à
accepter la soumission au Coran. C’est
en eux que
Le Dieu du Coran est une volonté qui se pose comme
discrimination entre le musulman et le non-musulman. Enfin, pour le Dieu du
Coran, l’humanité non-musulmane est le mal, la mauvaise existence.
Il n’y a pas de statut
ontologique et éthique de la création et de la créature. La réalité non
coranique est une réalité qui n’a pas droit à l’existence dans le monde du Dieu
du Coran. C’est l’existence qui doit être annulée par les musulmans. Elle
n’existe que comme matière pour réaliser
Il y a donc deux niveau
d’existence dans le Coran : ce qui est conforme au Coran, et qui a droit à
l’existence ; ce qui n’est pas conforme et qui n’a pas droit à
l’existence. Le Dieu du Coran pose comme mal existentiel les réalités qui
s’opposent au Coran.
La réalité des créatures est
ainsi divisée dans ses existences : la bonne existence coranique et la
mauvaise existence non-musulmane. Il y a ici aussi des éléments de ressemblance
et de différence avec le Dieu des chrétiens.
Dans le Christianisme aussi
il y a deux Règnes. Mais les chrétiens connaissent une économie du salut hors
de l’Église et de la foi. Et puis le choix de Dieu est personnel et mystérieux,
il regarde non pas le choix extérieur mais l’intérieur. Les deux règnes des
chrétiens sont des règnes intérieurs et invisibles. Les deux règnes musulmans
sont extérieurs et visibles.
La religion de l’Islam
introduit une dimension gnostique, le thème de la mauvaise existence. Elle
n’est pas liée à la matérialité de l’existence, comme dans le gnosticisme
antique, c’est le Coran qui définit à la fois la bonne et la mauvaise
existence. Et il introduit, à la place de l’ascétisme gnostique, l’épée de la
guerre sainte contre la mauvaise existence : celle des non-musulmans.
Le rapport entre le croyant
musulman et le Dieu du Coran est analogue à celui entre le Dieu du Coran et le
prophétisme de Mahomet. Le croyant hébraïque et le croyant chrétien établissent
un rapport avec Dieu parce que Dieu a établi un rapport avec eux. Ils existent
devant Dieu.
Le Dieu des chrétiens leur
révèle sa vie divine et les y fait participer. Le croyant chrétien se confie en
Dieu par Dieu se livre à lui. Cela entraîne un rapport dans lequel le chrétien
comme l’hébreux ont des droits face à Dieu.
Le croyant musulman vit sa
foi en acte de soumission. Sa soumission est une attitude extérieure que la
dimension intérieure de l’homme accepte. L’obéissance chrétienne réside dans
une attitude intérieure qui entraîne l’extérieure. La soumission islamique est celle d’une religion extérieure qui
comporte aussi une attitude intérieure. Le chrétien comme homme
intérieur est libre devant Dieu ; le musulman est devant le Dieu du
Coran comme un soumis. L’intériorisation islamique est l’intériorisation de la
soumission. C’est ce qui fonde la force religieuse de l’Islam :
l’adoration.
L’adoration, à cause de sa
limitation, confère une forte identité sociale, en éliminant les problèmes de
conscience. L’homme musulman n’est pas
l’homme intérieur de la conscience chrétienne, c’est l’homme que Dieu
n’interroge pas et qui n’interroge pas Dieu. Face à Allah, le musulman
supprime sa subjectivité, et donc sa pensée. L’objectivité du Dieu du Coran devient le contenu de la conscience du
musulman. La conscience, dans le sens chrétien et occidental du mot, la
conscience personnelle n’existe pas. Le Dieu du Coran est le principe d’une
société universelle en contraposition à toutes les autres. Le précepte, étant
extérieur et se positionnant comme alternative à tous les autres, préfigure une société combattante.
Le principe du combat est
secondaire chez le chrétien, même si les chrétiens ont beaucoup combattu et se
sont beaucoup combattus. Le principe du
combat est essentiel à l’Islam ; le musulman ne peut se concevoir que
comme membre de la religion du Dieu unique [du Coran] qui combat pour son
unicité dans le monde. Le monde musulman a manifesté sa figure combattante de
diverses manières dans l’histoire ; mais il est, par principe, une société combattante. Si cela ne s’est pas
toujours actualisé, cela est dû à des situations historiques qui en limitaient
la possibilité, mais le principe coranique est l’extension de
l’assujettissement du monde entier à l’Islam et l’anéantissement de ce qui
s’oppose au Dieu
du
Coran. Le principe du combat réside dans le totalitarisme sotériologique du
Coran et il est aggravé par le fait que le Dieu du Coran ne reconnaît pas à
l’homme un statut ontologique. Il ne demande pas le libre consentement à la
soumission, il ne s’expose pas à la liberté, mais il demande juste la
soumission comme événement extérieur. L’Islam ne connaît pas l’intériorité humaine :
ce n’est pas l’acte intérieur de la foi qui est demandé, mais bien l’acte
extérieur de la soumission. L’Islam ne connaît point la distinction
chrétienne entre acte intérieur et acte extérieur. La sotériologie coranique ne
laisse aucun place à la liberté, elle exige la soumission. La soumission du musulman est extérieure par rapport au Dieu du Coran,
comme extérieure est la position de Mahomet, simple scribe du Coran.
….
XVIII. L’eschatologie du
Coran.
L’Islam n’a pas de doctrine
politique. Le manque d’ontologie du Dieu du Coran et le manque d’ontologie de
la création, ont comme conséquence le manque d’une doctrine de la société
politique. On peut dire que l’Islam est une société antipolitique, c’est-à-dire
qu’elle se construit contre toute vision
structurée idéale d’un ordre social. L’idée d’une société guidée uniquement
par des règles de droit privé est une utopie politique. C’est pourquoi la
vision d’un Islam politique qui complèterait l’Islam est si fascinant
aujourd’hui.
Il n’y a pas de règles structurantes
d’un pouvoir politique. L’unique idée de
légitimité politique est celle de la succession physique à Mahomet :
c’est-à-dire une solution impossible, qui a pour unique conséquence des guerres
civiles visant à déterminer la succession califale.
L’infidélité, c’est l’infidélité du non-musulman ou du
mauvais musulman au Kitab, le livre
divin dont dérive le Coran. Qui résiste au Coran, résiste au Dieu qui est la
source de l’existence ; c’est pourquoi il n’a pas droit à l’existence.
Tout droit à l’existence se fonde sur le Coran, sur le livre divin. La vie a un
statut coranique. Ainsi,
L’eschatologie est le mot
suprême du Coran. Le monde existe pour sa fin. Le monde existe seulement pour
que les fidèles le consument en consumant les infidèles. Ce qui arrive dans
l’histoire est son processus eschatologique. La création n’est pas l’intention originaire du Dieu du Coran parce
qu’il n’est pas un Dieu métaphysique, c’est un Dieu qui n’est pas l’Être, mais
uniquement le Vouloir. Et le Vouloir voulant du Dieu du Coran n’est pas ce
monde, mais le monde dans lequel il n’existe rien d’autre que le Dieu du Coran,
le Dieu devenu Volonté voulue à travers l’obéissance des musulmans.
…..
XX. L’Islam, hérésie
gnostique, zoroastrienne et manichéenne.
Le Dieu du Coran est un Dieu
eschatologique et l’histoire musulmane est une doctrine de la fin du monde.
L’action extérieure que
l’Islam est une destruction du monde faux, du monde de l’infidélité, le monde
qui, à l’origine, a dit “ non ” au Dieu du Coran, qui a nié
l’obéissance au principe de l’existence. C’est ce monde qui doit être consumé,
le monde de l’infidélité, parce que seul le Dieu du Coran existe, et ce qui
existe, existe seulement parce que le Dieu du Coran le fait exister. Existence
sans essence, les non croyants non pas de droits dans un monde où même
l’obéissance ne confère aucun droit. Le
Dieu du Coran ne se lie pas par un pacte avec les croyants islamiques, car il
est pure volonté et
Le Dieu du Coran est le
principe d’annulation [et donc d’anéantissement] de ce monde qui a choisi de ne
pas reconnaître en Allah le principe de l’existence : et il a construit
dans son infidélité l’essence du mal.
L’histoire de ce monde est la
consumation du mal eschatologique, l’infidélité. On comprend mieux ainsi le
matériel non biblique et non chrétien qui constitue le Coran. On trouve la
trace de l’antique gnosticisme, qui se veut être, lui aussi, une interprétation
du Christianisme.
Le gnosticisme antique est essentiellement, lui aussi, une
eschatologie qui a pour objet la destruction de ce monde, la destruction de la
création, et l’émergence d’un ordre immatériel qui n’est plus une création,
mais l’identité pure du principe avec lui-même.
On retrouve le même thème
dans le manichéisme, dans lequel
l’histoire coïncide avec la lutte du bien contre le mal et donc encore une
eschatologie. Gnosticisme et manichéisme
ont en commun la négation du principe fondamental de
L’Islam est une nouvelle
grande création religieuse. Mahomet est, sans doute, un “ génie ”
religieux parmi les plus grands de l’humanité. Mais du point de vue biblique,
il ne peut être appelé un prophète. Pour le Christianisme, l’Islam ne peut être
qu’une fausse religion. Mahomet est un faussaire génial qui a réalisé une
synthèse religieuse entre l’hébraïsme, le gnosticisme et le Christianisme : il a réuni en une
forme nouvelle les grandes religions universelles qui étaient apparues autour
du bassin méditerranéen. Il a pris d’Israël le monothéisme, du gnosticisme
l’eschatologie et le dualisme zoroastrien, et du Christianisme l’universalisme.
Il a saisi l’hérésie manichéenne, il a pris la réalité la plus forte de chacune
des trois religions. Il a réussi à retrouver la négation de Marcion dans
l’Ancien Testament sans perdre le monothéisme. Il a déformé […] la tension qui
existe, dans le Christianisme, entre la création et l’eschatologie, entre le
“ déjà ” et le “ pas encore ”. Il a su prendre du
gnosticisme, et donc du manichéisme, la distinction entre les
“ pneumatiques ” et les “ psychiques ”, devenue
“ musulmans ” et “ non-musulmans ”. Il a transformé une
ethnie, les arabes, en un porteur d’un message universel, en copiant
partiellement le rapport entre Yahvé et Israël. Il synthétisé le ferment
religieux du monde méditerranéen.
L’Islam a été l’adversaire
décisif du Christianisme, et sa lutte contre le Christianisme a été un grand
succès. C’est finalement l’Islam qui a créé la différence entre l’Orient et
l’Occident. S’il n’y avait pas eu l’Islam, le Christianisme, malgré ses limites
de religion de l’Empire romain, aurait pu sortir de ses limites
méditerranéennes. C’est l’Islam qui a enfermé le Christianisme dans ses limites
spatio-temporelles et en a fait l’Occident.
L’Islam a réussi à rompre
l’hégémonie de la synthèse entre le Christianisme et l’héritage gréco-romain
dans le monde méditerranéen. Et il y a réussi parce que l’héritage hellénique
était déjà défié par le génie gnostique manichéen. Le plus grand philosophe qui
ait vécu et écrit à Rome, Plotin, comprit le défi gnostique : combattre le
Christianisme qui soutint la principale lutte contre le gnosticisme au profit
de l’hellénisme. L’Islam, qui est l’héritier du gnosticisme antique, reprend à
son compte la doctrine de la “ mauvaise essence ” dans la doctrine de
la “ mauvaise existence ”, celle de l’infidèle.
L’Islam a repris et exprimé
tout ce qui se mouvait, autour du bassin méditerranéen, en dehors de
l’hellénisme et de la romanité. Il instaura, entre l’Orient, l’Inde,
La méontologie devenant
politique et terrestre, son arme ne pouvait être que l’épée,
c’est-à-dire la destruction des infidèles. En faisant des croyants une
communauté unie que par son combat pour la réalisation de
L’Islam constituait, pour
la première fois, une religion universelle comme une grande armée. Le monde chrétien fut agressé et en grande partie
soumis. Les grandes Églises qui furent les témoins du Christianisme des
premiers siècles, n’existent pratiquement plus comme cités chrétiennes,
Carthage, Hippone, Alexandrie, Antioche, Jérusalem, Nicée, Césarée, Éphèse,
Constantinople. Et seuls les Germains et les Slaves, peuples barbares,
étrangers à la grande culture méditerranéenne, qui acceptèrent le Christianisme
à travers leur religion païenne, résistèrent à l’Islam. La résistance eut lieu
avec la foi et les armes. L’Islam des premiers siècles chercha même à accaparer
l’héritage grec qu’il repoussa au bout de cinq siècles en abandonnant Avicenne
et Averroès. L’Occident reçut la philosophie grecque des arabes, justement
quand les musulmans l’abandonnèrent. La résistance chrétienne occidentale fut
armée et désarmée, fut un fait personnel et spirituel. Elle ne fut pas
accomplit au nom de l’empire romain, comme à Byzance, mais au nom de la nue foi
chrétienne. Les chrétiens occidentaux comprirent comme action de salut des âmes
les luttes entreprises pour la défense du corps historique de
…..
L’Islam est en conflit
essentiel avec le Christianisme. On ne peut penser à l’Islam sans penser au
Christianisme comme à son adversaire originaire. Les religions païennes ont combattu le Christianisme, mais aucune
d’entre elle n’est apparue en fonction de la lutte au Christianisme. L’Islam le
fait parce qu’il s’approprie la prétention qu’a le Christianisme d’être une
religion universelle. Le paganisme ne l’a jamais fait ; il s’est
toujours défini comme la religion d’une société. Il n’y a pas de place dans le
monde pour deux religions universelles. D’où le conflit.
L’histoire prouve que non
seulement l’Islam se conçoit comme guerre au Christianisme, mais qu’il s’est
révélé l’adversaire historique définitif, l’Adversaire par excellence. Quelque
fois il s’est même présenté comme une hérésie chrétienne, comme un conflit
interne au Christianisme.
J’ai moi-même cru longtemps que l’Islam était, en
quelque manière, interne au Christianisme ; qu’on pouvait lui appliquer
les catégories chrétiennes, comme celle de la prophétie, et d’une certaine
manière celle de la mystique. C’est
la grande influence de Massignon sur la culture catholique française et
italienne et sur la lecture de Al-Hallaj qui a déterminé la conception d’une
toile de fond commune au Christianisme et à l’Islam.
L’étude de la métaphysique du Dieu du Coran m’a montré
que on ne peut, d’aucune façon, confondre le Dieu du Coran et le Dieu de
Tant dans le gnosticisme que dans l’Islam, la doctrine
de la création est supplantée par l’eschatologie et de la fracture totale entre
la création et eschatologie. L’Islam est saprophyte du Christianisme et,
justement, parce qu’il en incorpore, dans son ensemble gnostique et
eschatologique, tant d’éléments, il tend à se s’imposer, tout comme le
gnosticisme, comme totalement substitutif du Christianisme. La puissance de l’Islam, dans son face à face avec
le Christianisme, s’est pleinement révélé dans l’histoire, et non seulement
comme puissance militaire. Car la puissance militaire est une conséquence de son eschatologie sans création dans
laquelle la vie humaine ne compte plus.
L’Islam est donc une nouvelle religion, mais une
religion essentiellement anti-chrétienne, intentionnellement alternative au
Christianisme parce qu’il l’imite tant. Ce [La réalité monstrueuse] qui est
appelé Dieu dans le Coran n’est pas le Dieu de
L’Islam introduit le néant
dans la religion, le néant comme toile de fond de la réalité. Le néant fait
partie du langage chrétien, il exprime la transcendance de Dieu sur la monde,
mais la théologie chrétienne a toujours affirmé que Dieu est l’être ; et
elle se sert du néant comme la flèche de la transcendance de Dieu sur la
création. Le néant chrétien est la relation entre l’Être divin et l’être des
créatures.
L’Islam nie l’être à ce
qui n’est pas Dieu, il en fait le “ rien ”. Le bouddhisme aussi fait du néant une pratique
ascétique (comme le Christianisme), il en fait la base d’une expérience
mystique. La métaphysique du Dieu du Coran voit le néant comme l’être des
choses. Dans le panthéisme, le divin est toute chose. Dans l’Islam il n’y a
rien, non parce que Dieu est, comme dans le Christianisme, mais parce que
aucune chose n’est.
C’est pourquoi la lutte mortelle est la pratique
religieuse fondamentale de l’Islam ; et elle est une pratique collective
comme toutes les pratiques islamiques. Voilà la force essentielle de
l’Islam : la puissance anéantissante. Précisément parce que le néant du
réel est la forme de l’Islam.
L’histoire montre que l’Islam est une religion
alternative au Christianisme et que sa fin ne peut pas être autre chose que
détruire. Mais ce n’est pas une fin stratégique, c’est-à-dire objet d’un
dessein politique, c’est l’essence de l’Islam depuis qu’est
“ descendu ” la parole du Dieu du Coran. Il se fonde sur la métaphysique du Dieu du Coran,
sur son identité idéale et sur la forme historique qui en découle. L’histoire
des rapports entre l’Islam et le Christianisme est là pour le confirmer. Naturellement cela ne veut pas dire que les
individus ou la réalité globale du monde musulman soient réductibles à l’idée
coranique, mais il est certain qu’il n’est pas possible de ne pas en tenir
compte pour tout discours qui, en quelque façon, ait pour objet la réalité
dominante de l’Islam, en quelque partie du temps ou de l’espace qu’elle ait été
située ou qu’elle se situe. »
…..
La composante antichrétienne est devenue à elle seule
un motif de légitimité. C’est le cas
des Talibans en Afghanistan qui ont établi la peine de mort pour qui se
convertit au Christianisme. C’est aussi le cas de la guerre islamique contre
les chrétiens dans les îles Moluques qui a lieu après l’attaque antichrétien à
Timor Est ; comme encore dans les états du nord du Nigeria qui proclament
La dimension
antichrétienne est originaire dans l’Islam. Le Dieu du Coran est une
alternative au Dieu chrétien conçu comme tel. La lutte contre le Christianisme
par la violence et l’oppression est dans l’essence de l’Islam, ce n’en est pas
une dimension accidentelle. L’Islam se justifie dans cette perspective.
Le monothéisme du Coran n’est pas la réplique du
monothéisme chrétien, mais la négation de celui-ci. Quand le musulman dit qu’il
n’y a pas d’autre Dieu qu’Allah, il entend nier directement le Dieu de
Cet élément est donc toujours un élément de
légitimation politique. Ceci arrive
aussi quand les gouvernements sont philo-occidentaux par principe, comme pour
le Pakistan, l’État qui a rendu possible et soutient la prise de pouvoir des
Talibans à Kaboul. La guerre contre les chrétiens qui existe au Pakistan est un
motif de légitimation du caractère islamique du régime. Partout, les régimes arabes se légitiment en permettant la lutte
contre les chrétiens.
Aujourd’hui la pression islamique sur
les Églises chrétiennes du Proche-Orient est telle que les chrétiens
abandonnent ces terres pour partir en Occident. C’est ainsi qu’est née au Proche-Orient la
perspective d’une terre compacte d’Islam, sans chrétiens, qui n’avait jamais
existé avant avec les précédents régimes arabes ou turcs. Depuis les vingt
dernières années, la pression et la guerre contre les chrétiens ont augmenté.
Les pouvoirs politiques des pays musulmans se légitiment au yeux du peuple
musulman en opprimant les minorités chrétiennes. Il y a un approfondissement de
l’essence antichrétienne de l’Islam qui ne trouve devant lui aucune opposition.
Le silence de l’Église et de toutes les
communautés chrétiennes se justifie toujours par la peur des représailles de la
part de l’Islam. Malgré les proclamations officielles catholiques,
l’oppression musulmane sur les Églises d’Orient est passée sous silence.
Mais cet approfondissement trouve aussi
sa racine dans la perte d’identité catholique des peuples de tradition
chrétienne en Europe. Les Églises et
l’Église catholique elle-même ont abandonné d’un coup les mémoires des siècles
passés qui, au contraire, furent la gloire de