ITEM

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 Un regard sur l’actualité politique et religieuse

 Au 28 novembre  2004

 

N°19

Par Monsieur l’abbé Paul Aulagnier

 

 

 

 

Réflexions

sur le cours du temps

 

Réponse à Mr l’abbé de Caqueray

 

 

Dans le site officiel de la FSSPX qui porte le beau nom très romain de « la Porte Latine », Monsieur l’abbé de Caqueray , supérieur du District de France,  me met en cause. Parce que je ne condamne pas Mgr Rifan pour  sa participation à une « concélébration », lui, me condamne d’une façon peu amen. Il affirme que j’ai changé. Je serais devenu « un autre homme », faible, rallié, ayant trahi la « cause ». Il le démontre et même le confirme en publiant un article que j’ai écrit dans Fideliter, en 1993.  Interpellé d’une façon si discourtoise, je me suis permis de lui adresser cette lettre. Je l’ai voulu  aimable. Je l’ai écrit du moins dans cet esprit. Je ne veux pas « polémiquer », même si certains réflexions m’ont faits sourire en les écrivant. La crise que va connaître la FSSPX,  - elle a débuté, elle sera   terrible, mais elle en sortira « plus fraîche et allante que jamais  - cela fait plus de deux ans que j’en avertis les autorités  « A Mgr Tissier de Mallerais j’écrivais : « nous nous préparons à la plus grave crise que la FSSPX n’aura jamais connu dans le cours de son histoire»  et cela  en raison d’actes « malhabiles » de l’autorité actuelle -, ne me le permet pas. Il me dit que j’aurais changé. Je n’en  ai pas l’impression.

 

Sur la messe, puisque c’ est l’objet de la critique de mon « confrère », je reste toujours très convaincu de la bonté, de la nécessité de ce   combat. Le « Bref Examen Critique » reste le document majeur en cette affaire. Je me réjouis de certaines victoires remportées. Je pense même , ayant l’occasion de reprendre, en ces jours, Saint Thomas et son traité sur l’Eucharistie que les nouvelles considérations de mes confrères publiées dans le livre : « le problème de la réforme liturgique » sont vraisemblablement justes et pertinentes. J’ai apprécié les critiques de « Canonicus » dans le dernier numéro du « Courrier de Rome, le numéro d’octobre 2004. J’en ai parlé ouvertement  dans  mon commentaire sur le sacrement de l’Eucharistie  (l’article 5 de la Question 73 de la III pars)  que je fais chaque semaine pour les paroissiens de la Paroisse saint Michel. Il faut poursuivre ce combat. Ce combat a toute une histoire. Je travaille  actuellement sur cette histoire.

 

Je réfléchis sur l’attitude des uns et des autres, sur l’attitude de Mgr Lefebvre, de Mgr de Castro Mayer, de Dom Gérard, de Mgr Rangel, de Mgr Rifan, sur les prêtres qu’on appelle « les ralliés », de Dom Guillou. J’essaye d’analyser les  réactions diverses des uns et  des autres au travers des évènements historiques : les sacres de 88, les accords historiques de 88, d’« Ecclesia Dei Adflicata », la concélébration de Dom Gérard, le 27 avril 1995,  les accords de Campos avec Rome, le 18 janvier 2002, la concélébration de Dom Rifan, ses  explications. Je survole ainsi tout notre combat à partir de 1988. Sur tout cela, je réfléchis et me permets de  transmettre ses réflexions à mon cher confrère. Je pense que cela peut le  faire réfléchir et le servir. C’est mon but. Le seul qui m’intéresse. Je verrai bien.

 

Voici donc cette lettre . Elle est datée du 21 novembre 2004.

 

Alors que je rédigeais ces réflexions, Mgr Rifan m’écrivait pour m’adresser ses propres réflexions sur sa « concélébration ». Je mettrai, à la suite,  ses deux documents d’un de ses proches collaborateurs, le sous-directeur du séminaire.

 

I – Ma lettre à Mr l’abbé de Caqueray

 

 

« Bien cher abbé,

 

 

 

Vous voudrez bien faire insérer dans le site officiel du District de France, "La Porte Latine",   le "droit de réponse" suivant, à la place même où vous me mettez nommément en cause, c'est-à-dire à la "une "du site, en éditorial et le temps nécessaire, d’une mise à jour  à l’autre.  Je vous demande d'adresser à votre  « webmaster »,  ce texte  : "Mr l’abbé de Caqueray, dans son dernier éditorial, me met nommément en cause. Il  affirme que j’ai évolué ! Pour vous faire une opinion fondée sur l'évolution « éventuelle » de ma pensée, allez visiter le  site ITEM (http://item.snoozland.com) et suivez ma "revue" sur le Web:  "Regards sur le Monde"(parution hebdomadaire). Dans le   numéro 17, je  parle précisément de l'attitude de Dom Gérard, dans le combat de la messe. Voyez également  mon  "livre blanc": "l'enjeu". Je  termine  la quatrième partie, la dernière, celle précisément qui porte sur l ‘ « affaire de Campos ».  Bonne visite! Et Bonne lecture!".

 

 

Pour vous, cher Monsieur l'abbé, ces quelques remarques:

 

Dans votre critique, vous semblez identifier l'attitude actuelle de Mgr Rifan à celle de Dom Gérard. C'est le fondement de votre argumentation. Et c’est pourquoi vous me « condamnez » parce que  j’ai « condamné » l’un  -  disons « malmené », ce sera plus proche de la vérité -  et ne  condamne pas l’autre, alors qu’il agit de même.  J’ai donc changé. Deux poids , deux mesures. Deux attitudes identiques. Deux jugements différents. Ergo. 

 

Pour moi, l’ attitude de Dom  Gérard me paraît être bien  différente. de celle actuelle de  Mgr Rifan et des  prêtres de Campos. Je vais vous le prouver.

 

Mais avant,  pour que vous ne vous   mépreniez pas sur ma pensée, permettez-moi, tout d’abord  ces quelques précisions.  Même si j’ai beaucoup critiqué Dom Gérard, même si ses positions et affirmations théologiques m’ont surpris et me surprennent, j’ai toujours eu pour lui, et je garde pour lui, toujours vif respect. J’avoue avoir  du mal à le comprendre. Mais  ce n’est pas un « médiocre ». Il est « grand »  celui qui a su construire le Barroux. Il aime l’art, la poésie et le beau. Quelle belle harmonie dans  les pierres du monastère ! Quelle belle forme !  Il fallut diriger la main de l’architecte  -  Quelle belle  liturgie.  Le chant  grégorien ! Quelle merveille ! Tout à l’honneur de Dieu ! Et quoi qu’on ait pu dire, par le passé, je constate que, dans son monastère, il reste fidèle à la « belle messe romaine ». Nous reviendrons sur cette idée à la fin de ce papier.

 

Voici, pour vous,  cher abbé, quelques idées sur lesquelles vous pourriez réfléchir.

 

A propos des Sacres.

 

Mgr Rifan et ses prêtres  n'ont pas rompu en 1988 avec Mgr Lefebvre et la FSSPX. Bien au contraire. Leur attitude fut franche, loyale et positive. Mgr Rifan, alors simple abbé, accompagnait Mgr de Castro Mayer à Ecône pour les sacres, en juin 1988 et assista personnellement ce "grand "évêque brésilien" à la cérémonie. Je ne parlerai pas de l’attitude de Dom Gérard, « il était là », lui aussi. Il est vrai. Mais relisez  l’article de Brigneau, le plus bel article écrit sur cet événement historique. Il avait tout vu,  - quel «  regard d’aigle »  - ce « païen », cet amoureux de sa Patrie, de son terroir et de son « Eglise », de ses martyrs. Cela  lui vaudra bien, ainsi que les prières de son ami Nourygatte, un jour le baptême,.  Lisez le, vous dis-je. Vous ne perdrez pas votre temps…Sur ce premier point, la différence n’est pas mince. Avouez !

 

Les « accords » de 1988 « Ecclesia Dei Adflicta »

 

Mgr Rifan ne signa pas, non plus,  les "accords" qui ont donné naissance aux "communautés" dépendantes d' "Ecclesia Dei Adflicta". Accords que je condamne toujours,  essentiellement en raison de la référence explicite à la Lettre "Quattuor abhinc annos" qui, en plus de son aspect odieux, à notre égard,  ne dit pas le vrai droit de l'Eglise au sujet de la Messe.  Dès lors, sur le plan de la "stratégie"du "combat", c'était dangereux d’accepter cet « accord ». Il vaut mieux, en cette crise de l’Eglise, que les choses soient bien claires  pour s’engager… Ne voyez-vous pas, là aussi,  une différence ? Et de taille ! Non.

 

Les accords de Mgr Rifan avec Rome : le 18 janvier 2002

 

Mgr Rifan, par contre, en union avec Mgr Rangel et avec l'accord de ses prêtres, a su "régulariser" une  situation canonique. Je l'en ai félicité, et l'en félicite toujours. Des considérations théologiques sur  la nature de l’Eglise l’ont poussé à chercher cette solution. Il y insiste souvent et systématiquement aujourd’hui. Nous faisions les mêmes considérations, - la crainte du « schisme » le temps passant…-, lui et moi, le 13 janvier 2001, alors que Mgr Fellay  réunissait  son « staff » et les prêtres de Campos en  la personne de Mgr Rifan, alors simple abbé, représentant Mgr Rangel. Je ne vais pas aujourd’hui me désolidariser de lui…Je crois qu’il a tellement raison. On ne veut pas le voir…encore…chez nous…Mais cela viendra. Croyez-moi.

 

C’était la raison pour laquelle, encore supérieur de District, dès 1992, j’avais souhaité et organisé des conversations théologiques  avec les « dominicains » de Toulouse et les Pères Abbés de Fontgombault et de Randol.   Manière, entre autres choses, au milieu du combat missionnaire, d’ entretenir, comme cela,  des relations avec l’Eglise et certains de ses membres éminents,  pour en garder l’esprit…Figurez-vous que la jeune génération qui n’a pas connu l’Eglise dans sa majesté, sa beauté, et qui a vécu dans les « hangars » et les « salons », dira,  peut-être un jour, les générations passants : « Mais, au fait, Papa,  c’est quoi l’Eglise ».

 

J’exagère ! Sans doute ? Heureusement !

 

Il eut fallu que ces conversations se poursuivent. Le principe en semble enfin admis par la Maison Générale….Mais avec quelle réticence. De fait, elles n’existent toujours pas. On a peur ! Peur de son ombre !

 

Que ces considérations sur « l’Eglise » aient retenu aussi l’attention de Dom Gérard, en 1988, c’est bien possible. Volontiers, je lui en ferais  crédit. Ce n'est pas moi qui le lui reprocherais.

 

Il ne fallait pas rompre le « front commun »

 

Mais il ne fallait pas pour autant rompre, à l’époque,  l’unité du  « front commun ». Le sens du combat ne le devait pas permettre. Mgr de Castro Meyer, et tout son clergé, Mr l’abbé Rifan aussi, alors qu’il était opposé, lui, au sacre, restèrent tous unis, ainsi que Dom Guillou, qui lui aussi, pourtant,  y  était opposé. Les  « sacres » ! c’était, pour moi, « l’assaut final ». Rome constatant l’unité des « troupes », aurait vite régularisé la situation. Souvenez-vous des considérations du cardinal Ratzinger, à l’épiscopat chilien, juste après les sacres. Ces propos me confirment, post factum, « mon intuition ».  Et nous aurions, tous, alors, avec nos charismes propres, obtenus beaucoup plus encore… J’enrageais de l’attitude de Dom Gérard et de mes confrères… Ceci explique, peut être, le ton  polémique et dur de mon  texte de Fideliter que vous avez fait publié  dans « la Porte Latine ».

 

Bien volontiers, je reconnais aujourd’hui que le ton était excessif. C’est que le temps a changé, Cher Monsieur l’abbé. Je répétais souvent  à Monsieur l’abbé Boivin, quand nous collaborions : « vous raisonnez toujours d’une manière statique ». Vous aussi,  n’oubliez  jamais le facteur « temps » et les circonstances. Non point pour tomber dans le relativisme, mais pour bien juger les choses et vous adapter.

 

Tout cela, pour vous dire, que la  « conclusion » de votre papier est, me semble-t-il, excessive

Vous ne pouvez pas identifier l’attitude de l’un et de l’autre….ni, à ce seul titre, me condamner.

 

Les documents de la « reconnaissance » par Rome de l’Administration Apostolique Saint Jean Marie Vianney

 

Les documents publiés sur cette "régularisation"des pères de Campos » avec Rome - qu'il faut étudier dans leur totalité jusqu'à la dernière lettre du secrétaire de la Congrégation du Clergé,  m'ont paru très justes, et, de toute façon "essentiellement" différents de ceux qui furent acceptés, à l'époque, par Dom Gérard et nos autres amis prêtres des communautés "Ecclesia Dei Adflicta". Ce n’est pas non plus la  moindre différence de l’un à l’autre…

 

J'ai défendu ce point de vue – le bien fondé des accords du 18 janvier 2002,  dans de nombreux articles du « Bulletin Saint Jean Eudes », puis de « Nouvelles de Chrétienté », puis de « Dici », puis  d' « Item ». Vous pouvez les consulter sur mon site ITEM. Dans les documents romains - sur cette affaire de "Campos"- , j'ai pu constater un "grand changement' dans l'attitude romaine au sujet de la messe. Oui ! Que de différences entre 1976 et l’an 2000, année jubilaire.

 

La reconnaissance du « droit » de la messe tridentine.

 

Aujourd’hui, dans l’affaire de Campos »  - ce n’était pas le cas hier, en 1988  -, la messe dite de Saint Pie V  est reconnue, par les autorités compétentes, dans la totalité de son droit. Comme le demandait à l'époque Jean Madiran, « Très Saint Père, redonnez-nous la messe.… », là,  en 2002, le Saint Père entendait et recevait enfin cette supplique et, de fait, redonnait la messe dans la plénitude de son droit «  à un certain nombre de prêtres du Brésil ». J’ai argumenté contre  Monsieur l’abbé de Tanouarn. Il me semble qu’il concluait trop vite. Il y voyait encore et toujours une « concession », comme en 1984, avec la lettre « Quattuor abhinc annos ». Non ! La « facultas » de dire la messe ancienne leur était concédée. C’est une chose d’une autre nature. Nul ne conteste aujourd’hui l’analyse. La messe leur est donnée comme un droit.  C’est une chose entendue…Du moins,  pour les « pères de Campos.

 

Cela ne veut pas dire que ce droit soit reconnu ailleurs, dans d’autres circonscriptions de l’Eglise,  particulièrement en France. Je ne le sais que trop bien.  Voilà tout un épiscopat qui freine des quatre fers et refuse d'aller dans le sens souhaité, aujourd'hui, par Rome. Si cela vous semble étrange - ce qui, de soi, serait normal, vu votre jeune âge et votre mode d’être, tout de fraîcheur et de droiture, - oublieriez-vous la crise que connaît l'Eglise. Elle est loin d'être finie malgré "la victoire  de Campos.  Je n’ai pas changé sur ce point. Vous étiez, peut-être encore à la mamelle, que vos aînés étaient déjà sur le terrain…

 

Une victoire de Campos ?

 

Oui c'est est"une victoire" qui a fait plus avancer l’affaire du retour de la messe dans l’Eglise, dans le sens de la lettre de Jean Madiran « Très Saint Père, redonnez-nous la messe… » que l’acceptation par Dom Gérard du « Motu Proprio » de 88, basé encore sur la fameuse lettre de l’indult, encore que ce texte ait eu aussi son importance, ainsi que le « combat des « communautés Ecclesia Dei ». Il faut toujours bien analyser la réalité qui est faite de mille nuances.

Cette victoire de Campos  le reste, même, si par aventure, les hommes de « là-bas » faiblissaient  (- rien n’est plus muable que les choses humaines  -) Ce que je ne crois pas, cependant et ce qui n'est pas le cas, aujourd’hui encore.  Je vais y arriver. Je pense même que ce sera  Mgr Rifan qui viendra nous sortir de la crise où la FSSPX  s’enfonce…. On verra si je me trompe…

En langage militaire, lorsqu’une zone  tenue jusque là  par l’ « ennemi », a été gagnée,   les militaires appellent cela vraiment une « victoire ». Cette zone  peut être de nouveau perdue. Mais, dans le temps de la récupération, ce fut une « victoire ». Si on reperd la zone , c’est un échec . Votre colonel de père, si besoin était , vous le confirmerait.  Tout les militaires parlent ainsi.

 

Une juste et loyale information entre les chefs.

 

Dans les "négociations" avec Rome, je pense que Mgr Rangel et Dom Rifan furent certainement habiles. Mais qui pourrait le leur reprocher. C'est même un conseil donné par Notre Sauveur et Rédempteur... Toutefois ils informèrent  droitement et  suffisamment, les autorités de la FSSPX. Cela était légitime puisque nous faisions "front commun" et que l'on ne rompt pas un front sans converser entre "chefs". Ce qui ne se fit pas à l'époque, en 1988, avec  Dom Gérard - Nouvelle différence ! Elle est  de taille !  Je le   lui ai vivement reproché  - vous vous chargez  gentiment de me le rappeler en citant un numéro de Fideliter…-  cet article, du reste,  n’est  pas des plus adroits, je le reconnais volontiers, nous étions dans le feu de la bataille  - et le  lui reproche encore. Vous pourrez le vérifier à l'occasion de votre prochaine visite au monastère... Nous nous sommes "ratés" de peu, je crois, durant les vacances dernières ...

 

Après de nombreux échanges et entretiens divers, ouverts et francs  - Mgr Fellay en a parlé ainsi que Mgr Rifan - nos amis de Campos ont pensé,   in fine,  devoir aller jusqu'au bout. Les points de vue divergent sur ce sujet. J'ai pris fait et cause pour eux. j'ai donné mes arguments. Ils sont publics. Ma « direction » me l'a reproché, non point, les arguments, mais l’acte d’indiscipline. J’étais interdit d’écriture. Mais pourquoi interdire, si les arguments étaient, de fait, soutenables. Il suffisait de dire qu’ils ne représentaient  pas la position de la « Maison générale ». Elle  a même jugé pour cela devoir me "rejeter" de notre société.

 

L’affaire de la « concélébration ».

 

 

- Enfin, et ce sera le deuxième point de mes réflexions : vous semblez incriminer Mgr Rifan de son attitude dans cette "affaire de Concélébration" avec l'épiscopat brésilien, lors du renouvellement de la consécration de  ce pays à Notre Dame. Acte de portée nationale.  Les autorités civiles et militaires, pour cette occasion, étaient présentes. Un grand concours de peuple aussi.  Vous suivez ainsi, dans cette réprobation, elle aussi solennelle, la position de la   « Maison Générale », et  plus particulièrement, de  Mr l'abbé Sélégny. Tout comme eux, vous affirmez: « il a concélébré ». « Nous l'avions dit, Nous l'avions affirmé, Nous le savions. Le conseiller doctrinal du pape, le Père Pottier, aujourd'hui, cardinal, l'avait lui aussi affirmé, l'avait, du reste, annoncé. C'est la preuve de son imprudence, de la mauvaiseté de "l'accord". Nous l'avions dit. Nous avions raison. Et nous avons bien fait de ne pas suivre les avis de M l'abbé Aulagnier. Du reste, qu'il reconnaisse les faits, qu’il fasse "amende honorable et qu’il revienne au milieu de nous ». Telle est votre position.

 

 Pour dire "il a concélébré", vous  vous appuyez sur des photos. Elles circulent aujourd'hui de part le monde sur le Web par vos soins ou ceux de vos collaborateurs. De fait, on  voit Mgr Rifan dans chacune d'elles, à côté ou au milieu de quelques confrères. J'ai parfaitement reconnu l'un d'eux, petit de taille, à coté de lui, qui assista à son sacre épiscopal, à Campos,  le 15 août 2002. J'y étais et en suis heureux. On le voit même avec la mitre dans les mains puis sur la tête. Il est en aube avec une étole. On nous le dit participant à la procession des évêques s'approchant de l’autel pour la communion. On encadre même sa tête pour qu'on ne s'y trompe pas. « Une vraie exécution ». Sans grande élégance ! Ici, je dois dire qu'il est bien difficile de savoir quel mouvement liturgique  Mgr Rifan exécute. Je veux bien admettre qu'il est dans la procession  qui va au saint autel. Pour vous être agréable ! Mais vraiment il est difficile objectivement de dire cela. Mais admettons- le!

 

Et fort de tout cela, - et semble-t-il que de cela  -, vous affirmez : « Il a concélébré ». Cela vous suffit pour partir en guerre et le condamner « urbi et orbi ».

 

 

Moi, j'ai préfère aller à la source. Nos « conseils » sont différents.  Le mien, comme le disait sainte Jeanne d'Arc, me parait bien «  meilleur », « plus crédible ». …. Je lui ai téléphoné. Je l'ai eu tout de suite au téléphone. C'était l'heure du repas . Il était en son séminaire. Nous entretenons toujours  de bonnes relations. Je l'ai eu tout de suite.

 

Je lui ai posé la question: « on dit en France que vous avez concélébré ». Des photos circulent sur tous les sites internets. Il était manifestement déjà au courent des critiques.

 

« Je n’ai pas concélébré ». « J’étais là »

 

De sa bonne voix, toujours joviale, toujours  chaleureuse, un peu chuintante, comme l'est son langage portugais, il me dit « mais non ». « Je n'ai pas concélébré. J'étais là. J'étais même assez loin  de l'autel. J'avais déjà dit ma messe. Je n'ai pas levé le bras comme on fait au moment de la consécration. Je n'ai pas prononcé les paroles de la consécration. « J'étais là ». On pourrait peut-être faire la différence, continue-t-il,  entre la "conviviance" et la "connivence". – Ce sont ses mots-  J'ai pensé que la circonstance  particulière  - la consécration de mon pays à Notre Dame - exigeait ma présence. Je suis évêque brésilien, de la conférence épiscopale brésilienne.  Si Mgr Lefebvre disait à ses séminaristes en 1978, qu'il devait apprécier eux-mêmes, les circonstances particulières, pour savoir s’ils pouvaient ou non assister à telle ou telle  Nouvelle Messe, qui n’est pas « intrinsèquement mauvaise »,  à plus forte raison cela peut être permis à un évêque".

 

Je connais, de fait, très bien la conférence de Mgr Lefebvre sur ce sujet délicat à laquelle Mgr Rifan fait allusion. Je l'avais de nouveau écoutée, de fait,  lorsque j'étais au Canada pour égayer  mes longs voyages en voiture. Il dit bien cela. Il condamne même  expressément l’expression « intrinsèquement perverse » pour juger de la Nouvelle Messe. Il a du prononcer cette « condamnation » dans une conférence de 1977. Vous pourrez chercher. Je pense que vous avez la collection « complète » des enregistrements de Mgr Lefebvre ! Une fois n’est pas coutume, je pense.

 

Les photos « compromettantes »

 

Voilà son témoignage, cher abbé. Je le préfère au témoignage de vos photos. Il est plus crédible. Car, voyez-vous, je fais une différence entre "être là" et "concélébrer". Vos photos prouvent bien « qu'il était là ». Mais a-t-il,  de fait,  "concélébré". Vous l'affirmez. Très bien. Mais sur quelle preuve? Les Photos? Elles ne peuvent vous le dire formellement. Mon conseil à moi, son témoignage d'évêque, me le dit "je n'ai pas concélébré". "J'étais là". C'est vrai, Il était là.  Les photos le disent. Et Mgr Rifan ne le nie pas. Mais  elles ne peuvent dire plus. Et que ne peut-on pas faire dire aux photos ? Souvenez-vous des conclusions que certains tiraient  jadis de quelques photos concernant le pape Paul VI. « Ce n’est pas lui. C’est son sosie. Il est encore dans les caves du château saint Ange ». Et même des prêtres très sérieux le croyaient. Oui ! Attention à vos photos, Monsieur l’abbé. Elles restent témoin « muet ». Je vous donne le témoignage d’un témoin « vivant ». Plus qu’un témoin ! L’évêque  même ! Oseriez-vous mettre en doute sa parole 

 

 

La concélébration de Dom Gérard, le 27 avril 1995

 

Par contre, Dom Gérard, lui, a dit publiquement qu'il avait  « concélébré » avec le pape, en 1995. Il n’y était, en plus, nullement tenu. - Je tiens ce témoignage de M l’abbé Bisig. Ils étaient ensemble  -.  Il est revenu publiquement sur ce sujet, le 24 octobre 1998, devant les pèlerins des "communautés "Ecclesia Dei Adflicta"  venus dire au pape  leur action de grâce

-  dix ans après la publication du fameux « Motu Proprio » - mais tout autant leur déception. Je peux vous en parler gentiment, j'y étais. J'y ai entendu les paroles de Dom Gérard. Il a voulu se justifier. C'est normal.  C'est du reste ce qu'a fait Mgr Rifan au téléphone avec moi. Sous ce rapport, il y a une parenté entre les deux. Mais qui  reprochera à quelqu'un de se défendre, de se justifier. C’est parfois même un devoir de se défendre.  La justice peut l'exiger. La charité aussi.

 

Mais, dans ce cas précis,  la  ressemblance entre les deux hommes, respectables l’un et l’autre, s'arrête là.

L’un a concélébré vraiment. L’autre non.

 

De l’assistance à la Nouvelle Messe ou participer à une concélébration

 

Sur le fait de participer à une  concélébration dans le Nouveau Rite, ou assister à la Nouvelle Messe, je serais, il est vrai, moins sévère et  intransigeant que vous. Si la Nouvelle Messe n’est pas « intrinsèquement perverse »  - ce qui est le cas  - (c’est en plus  la pensée explicite de Mgr Lefebvre qui n’a pas craint cependant de laisser titrer une série de ses homélies : « La messe de Luther »  - A ce sujet, votre remarque sur ce titre, dans votre texte que j’ai lu sur « La Porte Latine » me paraît un peu étonnant… Ce  qui a retenu mon attention…-) je ne pense pas que ce soit un péché mortel que d’y assister si les circonstances le requièrent, dès lors que  cette assistance reste  exceptionnelle, occasionnelle, passive, en raison du « danger » qu’elle représente.  On pourrait discuter sur cette « passivité ».  C’est ce que nous a toujours enseigné Mgr Lefebvre. Il pratiqua cette consigne lui-même, lors des obsèques de sa belle-sœur. Et figurez-vous, ici je vous le confirme, il était dans le chœur, et de plus,  je pense pour honorer sa famille, en tenue d’ évêque, je ne sais pas si on dit en « mosette »… Comme un jour, le jeune cardinal Sarto allait visiter sa mère et pour lui faire honneur était en grande tenu de cardinal de la sainte Eglise. Y trouveriez-vous quelque chose à dire là contre… ? Je le crains.  Avoir revêtu les « habits de chœur » est un acte, je le sais, qui fut, à l’époque condamné par certains…Participation « outrancière » ? Restons sérieux, je vous prie. Je ne suis pas sûr de trouver là votre consentement. En habit de cœur : pour honorer sa famille.. Soit. Mais au cours d’une célébration de la Nouvelle Messe …A Non !  Eh bien ! voyez-vous, même Mgr Lefebvre l’a fait. Attachez-vous à bien garder l’esprit de cet évêque, Monsieur l’abbé,   - sans faire du « lefebvrisme pour autant…- Ce n’est pas chose toujours facile. Il faut y veiller. Mais il ne suffit pas de le mettre sur le papier ou de le dire sans cesse,  pour l’être.

 

Les propos de Dom Gérard, le 24 octobre 1998

 

De plus je tiens à vous dire que ce n’est pas tant la « concélébration »  de Dom Gérard  que je regrette, que je déplore. On peut avoir un moment de faiblesse, d’hésitation…Concélébrer avec le pape…Vous imaginez ! Ce n’est pas tous les jours que la chose est possible…La tentation peut être grande…Grande aussi notre faiblesse. La mienne certainement. Et la votre ? « Je disais souvent aux séminaristes pour leur montrer que la « dureté » n’est pas vertu qu’ « un pont trop dur casse »… Oui ce que j’ai du mal à comprendre, et que je ne comprends toujours pas, ce sont  les paroles qu’il utilisa pour se  justifier. Vous me permettrez de vous les citer.  En ces affaires délicates, il faut être précis. Nous nous trouvions dans la grandes salle d’un grand autel romain. Je n’ai plus le nom de l’hotel en tête.  C’était le 24 octobre 1998. Le cardinal Ratzinger venait de terminer sa conférence. Dom Gérard lui succédait immédiatement. J’ai raconté tout cela dans le menu. Dans sa conférence, il prononça ces mots : « le scandale de la division doit cesser, pour être remplacé par la concorde, la concertation et l’unité. C’est dans cet esprit de paix et de communion que le 27 avril 1995 j’ai accepté de concélébrer avec le Saint Père, désirant montrer pas là que nous tous qui militons pour le maintien de l’ancien missel, nous croyons à la validité et à l’orthodoxie du nouveau rite ». Validité de la Nouvelle Messe, certainement ! « Orthodoxie » ? Certainement pas. Nous savons qu’elle s’éloigne dans l’ensemble comme dans le détail de la doctrine catholique sur la Sainte Messe définie pour toujours dans la XXII session du Concile de Trente. Le Magistère de l’Eglise , du reste, commence à s’en  inquiéter.
Le pape Jean-Paul II parle lui-même « d’ombres » importantes dans la célébration de la messe.

 

Ce sont ces paroles que je regrette. Je l’ai écrit. Je ne retire rien de ce que j’ai dit. Il ne me semble pas que j’ai « évolué » comme vous voulez absolument le faire admettre à vos lecteurs. Vos fidèles pourront le constater s’ils viennent, comme je les y invite, sur le site ITEM. Je reprends, sans rien changer bien des « éditos » passés . Sans changer pratiquement un mot.

 

Mgr Rifan et « sa » concélébration

 

Or je constate que Mgr Rifan n’a jamais dit cela, ni écrit cela. Vous devriez je pense, apprécier la différence d’attitude et de position.  Il a même fait publier, nous étions en 2000-2001,  - ils étaient  en pleine discussion avec Rome et le Cardinal Castrillon Hoyos  -  la lettre que Mgr  de Castro-Meyer adressait à Paul VI, en 1969, lui demandant qu’il veuille bien accepter que ses prêtres et lui puissent continuer à célébrer les saints mystères dans le rite ancien de Saint Pie V.  Il ne reçut, - c’est Mgr Rifan qui nous le dit, il était son secrétaire   - jamais aucune réponse. Et de conclure « Qui ne dit mot consent ». Et tout le clergé garda la messe  de toujours…Ils en savaient parfaitement les raisons. Mgr de Castro Meyer leur avait adressé à tous  une étude personnelle.  Il fit même traduire le « Bref Examen Critique » en portugais, pour eux. Ils furent même chassés de leurs paroisses par le nouvelle évêque en raison de la  fidélité à la messe de leur ordination. Tous. Le jeune abbé Rifan aussi. Oseriez-vous dire ensuite que Mgr Rangel et Mgr Rifan cachèrent, dans ces négociations, la vérité. Le Père Guymarez, la cheville ouvrière des accords, était brésilien. Il connaissait facilement tout ce qui se publiait au Brésil… Leur attachement à la messe ancienne était clairement dite

en pleine conversation  romaine.

 

Je ne crois pas que Dom Gérard fut aussi « courageux » et « droit » lorsqu’il contactait Rome…en « cachette ».

 

Croyez vous qu’ils puissent tous, eux,  un jour  oublier cette fidélité ? Allons donc ! Ce sont des hommes « trempés » comme on dit, qui agissent droitement. Il ne faut pas leur en compter.  De telles personnes ne sont pas comme girouette au vent au sommet du clocher. Vous n’avez pas encore beaucoup vécu. A votre place, je me ferais plus discret. Et je ne donnerais pas la leçon à un clergé et à un évêque qui ont affronté les « frimas de l’hiver ». Un peu de modestie tout de même. Attendez d’avoir vécu pour faire la leçon à la chrétienté ! Votre famille vous a appris la discrétion. Vivez-là.  Vous rendrez  service à tout le monde.

 

Et puis, il ne faut pas vous  tromper de « guerre » ni d’ « une » guerre.

 

De  guerre

 

Tout ce clergé d’ « Ecclesia Dei », tous ces « ralliés » que vous semblez réprouver, condamner, rejeter, devraient être pour vous, au contraire, le temps passant,  l’objet de vos sollicitudes, de votre attention, de votre examen, de votre prière. Gardez pour tous un cœur de père. Vous les considérez comme des « enfants prodigues », soyez, d’autant plus  pour eux, le père de l’Evangile.  Ayez alors même générosité. A force de sollicitude, Jésus a triomphé d’ âmes qui le repoussait, le détestait. Ce n’est pas par les menaces, ni par de dures paroles, ni par la peur ni par rien de semblable que vous gagnerez l’estime ni des fidèles ni de votre clergé, ni des autres. Ne prenez pas l’exemple de mon « papier » de Fideliter. Ce n’est pas le meilleur « Aulagnier », s’il en existe un… Avec le recul, je le comprends mieux. Le gouvernement est un art difficile. On ne réussit pas tout de suite, ni toujours…Ne témoignez ni répulsion ni haine pour quiconque quel qu’il soit, surtout pas pour un confrère dans le sacerdoce. Imitez votre Maître, au témoignage de Saint Paul aux Romains : «  Alors que nous étions encore pécheurs, le Christ est mort pour nous », « Afin de la(l’Eglise) sanctifier en la purifiant dans le baptême de l’eau, par la parole ; afin de se donner à lui-même une Eglise pleine de gloire, n’ayant ni ride, ni rien de pareil, une épouse sainte et immaculée ». « Par la Parole !  »

 

Vous ne pouvez les envoyer tous d’un bloc, comme cela d’un revers de main loin de votre cœur,  aux « enfers ». Il faut nuancer vos réactions. Approchez-les  un peu pour les mieux connaître.  Ils sont pour beaucoup vos aînés. Vous en connaissez peu. Le temps a passé. Vous arrivez. Ils ont œuvré avant vous. Le temps a pu leur donner un peu d’expérience. Les épreuves rencontrées, un peu de réflexions, un peu de connaissance de l’Eglise et de son personnel. Ils ont connu eux aussi beaucoup d’épreuves. La crise qui les a bousculés  en 1999,  a pu les faire réfléchir, les affermir, les aguerrir, les fortifier. Moi, j’en ai rencontré plusieurs, ces dernières années. Je me suis, avec beaucoup, jadis, « affrontés », même « frottés ». Je dois vous dire que je suis admiratif de beaucoup. Peu dans la FSP sont favorables au bi-ritualisme. Je peux vous donner des noms. A part les « 13 » qui ont pris le pouvoir, mais qui ne le garderont peut-être pas…j’en connais peu de favorables, vous dis-je au bi-ritualisme.

 

A propos du bi-ritualisme

 

Et puis, je distinguerais, sur ce sujet, entre l’aspect doctrinal et l’aspect pratique. « Le rite Nouveau », dans son existence,  ne dépend pas de vous. Il est pourtant partout célébré. Vous n’y pouvez rien. Vous pouvez objecter doctrinalement. Vous devez continuer d’objecter…Le cardinal Stickler le fait bien, le cardinal Ratzinger aussi…Vous pouvez actualiser votre critique et montrer que la doctrine de Saint Thomas sur l’Eucharistie qui est  retenue comme la doctrine catholique  ne se retrouve pas aujourd’hui dans bien des documents romaines , même dans l’Encyclique « Ecclesia de Eucharistia ». Voyez le n° 14 de l’Encyclique et le « ad secundum » de l’article 5 de la Question 73 de la III pars… Vous verrez la différence. C’est, certes bien grave…Et sous ce rapport, vous pouvez  demander, comme le faisait le Cardinal Ottaviani, son abrogation. Vous pouvez supplier qu’on vous laisse le « libre usage »de la messe de « toujours ».  Ce qu’ont obtenu les Pères de Campos. Qu’on nous  « laisse faire l’expérience de la Tradition »…comme le demandait des années durant Mgr Lefebvre… Attention !  Aujourd’hui, Rome vous le propose…   et la Maison Générale semble encore refuser.  Mais supprimer ce rite nouveau  ne dépend pas de vous. Et sous ce rapport, sous cet aspect  pratique, il faut bien constater que le « bi ritualisme » existe, que vous le vouliez ou non…Soyez réaliste !

 

Parmi le jeune clergé qui monte, de cette FSP, on les sent proche même de Mgr Lefebvre de sa pensée, de son combat. C’était même la crainte exprimée clairement par un Denis Le Pivain dans sa lettre au Nonce  pour attirer son attention sur le danger.   Les aînés ont peut-être, à un moment donné, été ébranlés, secoués. La tempête s’est déchaînée. Ils ont été bousculés…Mais le temps passant   - tenez compte du temps… je les vois tous aussi bien que nous attachés à leur sacerdoce, habiles dans leur apostolat. Il semble avoir crée même plus d’écoles que vous et que votre confrère, Mr l’abbé Laurençon,  dans la même période. Je les vois « fidèles à ce qu’ils ont reçu au séminaire des mêmes professeurs que nous ».  Que prêchent-ils ? Quels sacrements donnent-ils ? Quel catéchisme enseigne-t-il ? Allons ! Regardez leur paroisse. Regardez leur pèlerinage de Chartres ! C’est toujours la même messe. Voyez là aussi la jeunesse. Voyez chez Dom Gérard. Malgré les compromissions – condamnables - qu’il fit  - que je regrette, il le sait  - il reste fidèle à la messe. Et quelle belle liturgie dans son monastère !  Quel beau grégorien ! Beaucoup de jeunes prêtres des diocèses de France,  - lors de mon dernier séjour – ils étaient plus de quatre prêtres des diocèses  -, sont  heureux de pouvoir dans la paix dire la messe de saint Pie V que la crainte  de leurs évêques leur empêche de célébrer dans leur paroisse. C’est la guerre. Pour eux aussi. Les moines de Dom Gérard, aujourd’hui de son successeur, restent fidèles. Le monastère  fonde même. Il a fallu du temps à Dom Gérard pour qu’un évêque lui ouvre les portes de son diocèse. Mais c’est chose faite aujourd’hui. Et voilà toute une  région qui sera « arrosé » de la grâce du Seigneur. Ce n’est pas rien. Tout de même. Vous ne pouvez  pas ne pas en tenir compte. Vous devez vous en réjouir.  Vous ne pouvez pas resté indifférent. L’ignorer.   Regardez Mgr Vladimir. Le voilà installé près de  Carcassonne. Et au prix de combien de difficultés. C’est la guerre ! Aussi pour eux ! Voyez le nouveau père abbé du Barroux. L’évêque du lieu veut,  à cette occasion, venir concélébrer dans le nouveau rite, au monastère. « Le nouvel Abbé sera peut-être plus souple que l’ « ancien ». Rien à faire. Il est gentiment éconduit. C’est la guerre aussi pour eux ! Et là, il gagne une victoire !

 

 

Ils n’ont pas fait le choix des sacres,

 

Ils n’ont pas fait le choix des sacres, me direz-vous.  C’est vrai ! Ils ont reçu, pour cela,  bien des avantages de la part de Rome, à l’époque… Toutefois sans les sacres… que seraient-ils, tous ? …Rome les entoura tous d’une nouvelle sollicitude. Soit ! C’est la guerre. Vous pouvez toutefois accepter qu’en conscience certains aient pu avoir légitimement du mal à faire ce choix. J’en connais moi, chez « nous », chez « vous » qui étaient contre. Ou qui s’en sont remis « aveuglement » à Mgr Lefebvre. Belle obéissance !. Je le veux bien. Mais je comprends que certains n’aient pu faire le pas malgré l’estime qu’ils portaient à Mgr Lefebvre.  Ils n’en devenaient  pas,  pour autant, moins bons. Les qualités qui les animaient hier, les animent aujourd’hui encore.  Ne faites pas des sacres la ligne de partage des eaux. D’un côté, les bons. De l’autre les méchants. Non ! Certes, je reconnais volontiers que parfois, eux-mêmes restent et sont « sectaires » à notre endroit…Qu’ils vous prennent encore pour « schismatiques ». Tout cela ne me paraît pas très juste …  d’autant que ce n’est pas ce que Rome dit aujourd’hui …de « vous »,  de la bouche même du Cardinal Castrillon Hoyos. 

 

Il me semble qu’il faut prendre en compte tout cela.

 

Comme le faisait très justement remarqué Jean Madiran le 27 novembre 2002 :  « La FSSPX n’est pas la seule à défendre la messe, le catéchisme et l’Ecriture. Sociologiquement, elle est la principale ; elle est la plus nombreuse ; la moins dépourvue de moyens matériels. C’est elle qui a le plus d’écoles (notamment pour garçons) véritablement catholiques. Cela n’autorise pas ses zélateurs hyperboliques à croire qu’il n’y a qu’elle, et en dehors d’elle point de salut ; et à mépriser tout ce qui se fait d’autre pour l’Ecriture, le catéchisme et la messe, si c’est en dehors des prêtres de la FSSPX ». C’est très juste. Et retenez , je vous prie, la conclusion : « Cela embrouille les choses avec des zizanies superflues et infondées ».

 

Il ne faut pas se tromper de guerre. Aussi, si c’est possible,  corrigez votre point de vue

 

Il ne faut pas, non plus,  se tromper d’ « une » guerre.

 

Le temps que nous connaissons aujourd’hui, surtout en Europe, doit nous conduire à « l’union », à l’ « union des cœurs », à un vrai « pacte ». Un pacte fait de respect des différences, du respect des caractères, du souvenir de nos conflits, de nos « histoires ». Nous serons alors plus prudents, plus attentifs, plus humbles, plus déférents et respectueux des combats que tous ont mené. Et ainsi  unis dans le Credo de Pierre, unis sous « l’Etendard du Christ Roi », unis dans le respect et  la spécificité de chacun, des laïcs et des clercs, des groupes plus missionnaires, des groupes plus politiques, dans la juste liberté de tous mais unis dans la même soif et la même ardeur à défendre, comme jadis, comme hier, le même patrimoine catholique. Ce n’est que comme cela que nous pourrons nous dresser contre le danger de l’islam et arrêter, comme jadis Charles Martel, sa progression, les pouvoirs politiques, de toutes couleurs, trahissant la France, ne  défendant  plus le sol de la Patrie, ni son identité chrétienne fasse à « l’explosion libertaire ».

 

La conclusion 

 

Je l’emprunterai de nouveau à Jean Madiran. Il terminait sa présentation du livre de Mgr Tissier de Mallerais sur Mgr Lefebvre par ces mots que je fais miens : « Ces diverses considérations visent à préparer l’expression risquées d’un vœu qui paraîtra utopique, mais que je ressens comme nécessaire dans le vilain temps que nous avons à traverser et qui se prolonge désastreusement : mon vœu d’une amitié entre tous ceux qui, en diverses demeures, gardent la même messe, le même catéchisme, la même Ecriture . » (Présent 27 novembre 2002). Travaillez-y. Avec l’accord de vos supérieurs, proposez-la. Vous ferez œuvre utile. Et laisserez un nom. Sinon…

 

 

 

II – Les réflexions de « Campos ».

 


A- Participer à une messe célébrée selon le rite de Paul VI

Quelques personnes se posent des questions sur la participation occasionnelle de Dom Fernando et de quelques-uns de ses prêtres à des messes célébrées selon le Rite de Paul VI.

Dom Fernando est un évêque catholique, membre de l'Episcopat Catholique, en communion avec la Saint Père le Pape. Aussi, comme tout évêque catholique, même ceux de rite différent, il doit manifester pratiquement qu'il est en pleine communion.

Nul ne peut être catholique s'il maintient une attitude de refus de la communion avec le Pape et avec l'Episcopat catholique. De fait, l'Eglise définit comme schismatique celui qui refuse de se soumettre au Pontife Romain et de se maintenir dans la communion avec les autres membres de l'Eglise qui sont ses sujets (canon 751). Dès lors, refuser continuellement et explicitement de participer à toute messe dans le rite célébré par le Pape et par tous les Evêques de l'Eglise, parce que l'on juge ce rite, en soi-même, incompatible avec la Foi ou peccamineux, représente un refus formel de communion avec le Pape et avec l'Episcopat catholique.

On ne peut nier le fait objectif qu'aujourd'hui le rite de Paul VI est le rite officiel de l'Eglise latine, célébré par le Pape et par tous l'Episcopat Catholique.

Si nous considérions, en théorie ou en pratique, la Nouvelle Messe, en soi-même, comme invalide ou hérétique ou sacrilège ou hétérodoxe ou peccamineuse ou illégitime ou non catholique, nous devrions tirer les conséquences théologiques d'une telle position et l'appliquer au Pape et à tout l'Episcopat du monde, c'est-à-dire à toute l'Eglise enseignante: soit il faut accepter que l'Eglise a promulgué officiellement, conservé pour des décennies et offert tous les jours à Dieu un culte illégitime et peccamineux - proposition condamnée par le Magistère - et que donc les portes de l'Enfer on prévalu contre elle, ce qui serait une hérésie. Ou alors il nous faudrait adopter le principe sectaire que c'est nous qui sommes l'Eglise et qu'hors de nous il n'y a point de salut, ce qui serait une autre hérésie. Ces positions ne peuvent être acceptées par un catholique, ni en théorie, ni en pratique.

Notre participation, donc, découle de principes doctrinaux. Et elle ne signifie pas que nous n'avons pas de réserves quant au nouveau rite, comme nous l'avons déjà porté respectueusement à la connaissance du Saint Siège. Notre participation ne signifie pas non plus l'approbation à tout ce qui peut arriver. Etre uni à la hiérarchie de l'Eglise et en parfaite communion avec elle ne signifie pas approuver les nombreuses erreurs qui arrivent aujourd'hui au sein de la Sainte Eglise, provoquées par sa partie humaine. Il est clair que nous regrettons profondément, avec le Saint Père le Pape, que la Réforme Liturgique ait laissé la place à des ambiguïtés, libertés, créativités, adaptations, réductions et instrumentalisations (Ecclesia de Eucharistia, n. 10, 52, 61), et ait pu être l'origine de nombreux abus et avoir conduit en certains milieux à une perte du respect dû au sacré (Cardinal Gagnon, Offerten Situng - Römisches [?], nov.dez.1993,p. 35). Surtout, nous rejetons toute profanation de la Liturgie, comme par exemple aux messes dans lesquelles « la Liturgie dégénère en un "show", dans lequel on tente de rendre la religion intéressante en y ajoutant des [besteiras] à la mode... avec des succès momentanés dans le groupe des fabricants de la liturgie », comme critique le Cardinal Ratzinger (Introduction au livre intitulé « La Réforme Liturgique » de Mgr. Klaus Gamber, p. 6).

C'est pour cela que nous conservons le vénérable rite de Saint Pie V, mais « cum Petro et sub Petro », en pleine communion.

P. Gaspar Samuel Coimbra Pelegrini